Avec un peu de chance,les petits-déjeuners de l'enfance peuvent durer toute la vie.
Comment prendre une photo de ces enfants, de ces visages apparemment vides de toute expression, sauf de cette détermination obscure ? Dans leurs yeux affleurait à peine cette volonté avide qu l'on devinait aussi sur leur peau, dans leurs petits os experts en sécheresses, en gelées et en averses, dans leur chair entraînée à la faim, dans leur bouche qui, en dehors du maïs grillé et des patates bouillies, ne connaissait que l'eau du ruisseau et l'air sec de la cordillère, et même cela ils l'avaient perdu.
C’est pour ça que j’étais allé au Pérou ? Pour toucher les limites de notre petitesse et les bordures sinistres de nos délires de pouvoir ?
L’Opus Dei, les militaires, les massacres, la guerre civile.Tout cela avait été aux origines de ma propre vie et tout était là de nouveau, autour de moi., à Ayacucho.Les mêmes agents travaillant avec les mêmes matériaux,le sang et la souffrance,pour produire la même chose, le deuil et l’injustice.
Combien de fois dans la vie d'un homme,les matinées commencent-elles avec le sentiment que les choses vont fonctionner,que le soleil va brûler avec plus d'éclat et que le vent va tomber pour rendre la fin de l'hiver vivable? Très souvent quand on est,ou qu'on est devenu un homme du Nord.
Que la vie soit ce que l'on voudrait,c'est relatif:on est aussi ce que la vie veut qu'on soit.