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EAN : 9791022607490
380 pages
Editions Métailié (01/03/2018)
3.73/5   15 notes
Résumé :
Dans l’air pur des montagnes d’Ayacucho règne une odeur de mort. Pourtant, quand Vicente Blanco, reporter espagnol, débarque dans la ville andine pour enquêter sur le Sentier lumineux, il ne voit rien. Les militaires paradent, l’archevêque Crispin joue au basket, les habitants se taisent, les “subversifs” se cachent. Pas de scènes tragiques, pas de barricades, pas de combats. Tout juste, parfois, quelques bruits de balles. Avec deux journalistes locaux qui deviennen... >Voir plus
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Ayacucho, le Recoin des Morts en quechua, doit son nom à un massacre remontant à l'époque de l'empire Inca. Quelques siècles plus tard, dans les années 80-90, cette ville des Andes péruviennes s'est à nouveau trouvée à l'épicentre du champ de bataille, coincée malgré elle dans une guerre silencieuse entre l'armée et la guérilla du Sentier Lumineux.

Or donc, nous avons à ma gauche les communistes du Sentier, « troupes fantasmagoriques d'un parti maoïste, aussi primaire, aussi caricatural et aussi déliquescent qu'un épiphénomène asiatique implanté en Amérique ». A ma droite, l'Etat péruvien, « dignement » représenté par son armée « endoctrinée et, surtout, armée par les puissances qui commandent réellement dans ce monde, comme d'habitude ». Et ces deux extrêmes sont tellement extrêmes qu'ils se rejoignent, hallucinés et sanguinaires, pour encercler ceux qui ne demandaient que la paix, les villageois, les paysans, désormais pris au piège de leurs oppresseurs des deux bords. Car s'il est risqué de choisir un camp, il est deux fois plus dangereux de ne pas le choisir : « souffrir les assauts des bourreaux pervers qui ne veulent qu'une chose, éviter que tu t'allies avec leur ennemi. Mais que se passe-t-il si les bourreaux ne te veulent pas non plus à leur côté et te tuent ? » Choisir ou ne pas choisir n'est pas la question. Bienvenue dans la paranoïa et la terreur péruviennes. Dans cette guerre sale et sournoise qui ne laisse entendre que quelques coups de feu dans la nuit et ne laisse paraître que de rares cadavres au petit matin, le troisième camp, celui des victimes, préfère « ne rien voir, ne rien entendre, ne rien dire ». A la marge de cette troisième voie, quelques courageux, audacieux, insensés, qui rêvent de rendre compte de ce qui se passe : trois journalistes, deux locaux et un Espagnol, Vicente Blanco (personnage fictif mais manifestement l'alter-ego ibérique de l'auteur). Celui-ci, narrateur, arrivé à Ayacucho avec une certaine candeur pour enquêter sur la guérilla, sera bien vite déniaisé par ses collègues péruviens, Luis et Max, et par ses entretiens avec les représentants de l'intelligentsia locale, l'Armée et l'Eglise. Inexorablement engagés dans le camp des innocents anonymes, Vicente, Max et Luis sont lancés corps et âme dans un jeu de plus en plus serré et dangereux.

Terrorisme aveugle, répression aveugle, victimes lucides mais impuissantes, tout cela est au coeur de ce « grand roman de la violence péruvienne », entretenue par des idéologies bancales et un profond racisme à l'égard des Indiens. Une histoire pesante qui parvient jusqu'à nous, un « J'accuse » andin qui dénonce la folie maoïste, la barbarie militaire et la lâcheté, voire la complicité, de l'Eglise catholique. Le style aurait gagné à être moins répétitif et moins pédagogique, plus concis, plus aéré et allégé en points d'exclamation un brin naïfs, mais on ressent parfaitement le dilemme désespéré du narrateur (et de l'auteur), qui a dû se résoudre, la mort dans l'âme, à fuir le Pérou et à y abandonner ses amis, pour sauver sa peau et le produit de ses investigations, et témoigner. Un travail de mémoire essentiel.
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Ce que j'ai ressenti:

Depuis le commencement de la répression, contre le Sentier Lumineux, l'armée a fait disparaître les gens, mais au début ils n'étaient que quelques-uns et on pouvait les identifier.

Si seulement vous pouviez voir mon exemplaire de Ayacucho, rien qu'à l'oeil nu, vous pourriez voir que ce livre ne m'a pas laissée indifférente…C'est très souvent le cas avec les lectures de la collection Metailié, et quand je le feuillette une énième fois pour écrire cette chronique, je le vois maintes fois corné ( c'est quand un passage me bouleverse…), des phrases sont surlignés en fluo (c'est quand la poésie s'y glisse), et puis, il y a toutes les recherches en post-it que j'ai faites pour mieux m'imprégner de l'ambiance du livre…Oui si seulement, vous pourriez voir tout cela, il a vécu ce livre: en couleurs et plissage, en émerveillement et émotions…Ce n'est pas une lecture qui laisse indemne: il m'a fait prendre conscience, que dans le monde, il y a des lieux maudits et Ayacucho porte bien son nom: le Recoin des Morts…

« Mais quand je voyage, je retrouve la liberté et mon vice de toujours, le papier, les crayons, l'encre. »

Le talent d'un auteur se déniche dans les détails. Alfredo Pita en étant journaliste, écrivain et poète nous dévoile dans une prose magnifique et bouleversante, tout un contexte historique, politique et social au Pérou: il a l'art et la manière d'utiliser les mots qui parle au coeur, de suggérer plutôt que de heurter, de dépeindre avec une beauté sensitive, les malheurs d'une population. Une plume à l'image de la violence péruvienne: dissimulée à un oeil non averti, il en reste pourtant l'odeur, encore plus intrusive… le cadre de vie de Ayacucho est irrespirable, les horreurs bien dissimulées aux regards d'autrui, et ce qui est encore pire, car c'est dans l'ombre que les monstres se révèlent, les plus cruels…En créant son personnage de Vicente Blanco et ses deux acolytes un peu téméraires Luis et Max, Alfredo Pita lance son intrigue dans une enquête journalistique pour comprendre les massacres qui s'y déroulent, pour rendre justice aux victimes de ses pairs tués à Uchuraccay, mais surtout pour faire enfin la lumière, sur ces milliers d'anonymes, disparus dans le néant…Une enquête qu'on ressent comme une urgence, au péril de leurs vies, avec toutes les menaces sourdes ou énoncées…La tension dans ses lignes est oppressante, et pourtant, l'auteur arrive à nous atteindre avec de la douceur et de la poésie…

« Tout au long de l'histoire du Pérou la vie d'un indien n'a jamais rien valu. Elle n'est bonne qu'à arroser la terre des autres de sueur et de sang. Et je ne parle pas de ses larmes parce qu'il y a longtemps qu'il n'en a plus! »

Je ne croyais plus jamais revoir écrit, et surtout dans l'actualité des années 80, les mots tels que « Camps d'extermination ». Mes yeux se sont brouillés… Comme j'ai été naïve de croire que l'Histoire aiderai les Hommes à ne pas reproduire les horreurs du passé… Ayacucho, théâtre macabre et lieux de perdition pour tous ses habitants, victimes d'une guerre silencieuse entre la folie terroriste du Sentier Lumineux, l'Etat Péruvien et quelques arrangements flous avec l'Eglise: un cocktail détonnant qui a vu mourir des milliers d'innocents dans les hauteurs andines…Voilà pourquoi cette lecture, restera longtemps dans mon esprit, parce que tout le contexte est réel dans cette fiction, et qu'on ne peut décidément pas rester de marbre devant de telles souffrances…C'est d'abord un coup au coeur, avant d'affirmer que c'est un coup de coeur. Une histoire qui mérite de sortir des sombres sentiers, où la cruauté a cru agir impunément. Un livre magnifique pour ne pas oublier cette tragédie ignoble…

« Alors la logique s'impose: ce qui est invisible n'existe pas,et s'il arrive quelque chose à ce qui n'existe pas, aussi dramatique que cela soit, quelle importance. »

Ma note Plaisir de Lecture 10/10

Chronique complète sur le blog ;)
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Caliméro le résumait bien : C'est trop injuste ! Voilà un roman qu'une copinaute m'avait donné envie de découvrir, je mets la main dessus (enfin !), je commence à le lire et là, bardaf, c'est l'embardée.

Pas moyen d'entrer dans l'histoire, ou du moins, pas assez longtemps que pour arriver à me concentrer plus de 15 pages.

Impossible de m'attacher aux personnages, même au principal, Vicente Blanco, le reporter espagnol qui nous livre brut de décoffrage ce qui se passe devant ses yeux, ou les témoignages qu'on lui confie car devant ses yeux, il ne se passe pas grand-chose, tout est larvé, caché sous les tapis.

Qui se font la guerre ? D'un côté du ring, l'armée de l'état Péruvien et de l'autre côté, les combattants du Sentier Lumineux. Oui, dis ainsi, leur nom fait plus penser à une espèce de secte pour le bien-être qu'a des guérilleros !

Problème c'est que pour les combattre, on torture des gens, on les tue, puis on dit que de toute façon, c'était des vilains terroristes communistes du Sentier Lumineux.

Qui veut la paix prépare la guerre et les deux factions sont aussi dingues l'une que l'autre, aussi azimutées, aussi extrémistes, bref, il ne fait pas bon se trouver entre le marteau et l'enclume (à défaut de la faucille) et ceux qui se font taper dessus, ce sont les pauvres paysans qui n'ont rien demandé, ou presque.

Parfois, on souhaite une chose et ce qui arrive n'est pas toujours ce que l'on a désiré.

Ici, faut faire un choix : soit tu as avec l'armée, soit tu es avec les communistes maoïstes (et toutes les définitions en "istes"), ne pas choisir est mauvais pour la santé et pour sa vie. Mais faire le mauvais choix l'est aussi et parfois on se demande ce qu'il faut faire puisque les bourreaux ne te veulent pas de leur côté.

Même jouer au trois singes, celui qui ne voit pas, n'entend pas, ne parle pas, n'est pas la garantie de la vie sauve.

Anybref, il ne fait pas bon se balader au Pérou. On est loin de ♪ Esteban, Zia, Tao, les cités d'or ♫ mais on a mis les pieds dans du racisme primaire, dans des disparitions à la pelle, des tueries, des assassinats politiques ou autre, dans la répression aveugle, qu'elle soit commise par le pouvoir politique en place ou par les zozos du Sentier Lumineux, quant à l'Église, on n'en parlera pas, elle regarde ailleurs, bien entendu.

Après tout ceci, vous vous demandez toujours où le truc a foiré, où la couille est apparue dans le potage.

Tout simplement à cause du style d'écriture que j'ai trouvé répétitif, mal fichu, un peu comme si nous relisions les notes écrites à la volée par la journaliste.

Journaliste qui n'a pas oublié d'être professoral aussi, ajoutant de l'ennui à ma lecture. le récit est lourd, lent et n'avance pas.

Manque de dynamisme, manque de rythme, le côté mon "reportage en direct" ou "notes pas corrigées" m'ont fait soupirer et ralenti ma lecteur, sans compter que tout cela manquait de séparations bien nettes des dialogues,… Aah, ces petits guillemets qui étaient parfois aux abonnés absents.

Tous ces petits détails qui ont alourdis le récit, l'empesant inutilement et le rendant aussi lourd à digérer qu'un porridge froid.

Dommage, j'en attendais beaucoup et ça me fait râler d'être passé à 20.000 lieues de ce roman. Je ne le coterai même pas, tiens.

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Une très sale guerre. Elle a ensanglanté le Pérou durant des années, dans les campagnes notamment, avec pour principales victimes des paysans qui n'avaient que le tort de se trouver entre le Sentier lumineux et les forces militaires lesquelles, avec l'aide des autorités et de l'Eglise, rivalisaient avec leurs opposants dans les exécutions expéditives, faisant régner un climat d'horreur. C'est ce que le héros de Ayacucho (une ville dont le nom signifie le recoin des morts, en langue quechua), un journaliste espagnol un peu candide, va découvrir au fil de son séjour au coeur du cyclone de violence. en 1991. le paradoxe est qu'il ne voit pratiquement rien au début, avant de comprendre, avec la fréquentation et l'amitié de journalistes locaux, l'étendue des atrocités de cette "guerre invisible". C'est tout l'intérêt du roman d'Alfredo Pita que de coller aux basques de ce reporter naïf et inconscient dans une enquête minutieuse et patiente où l'on apprécie notamment les entrevues avec l'évêque d'Ayacucho, une canaille absolue dont la personnalité n'est pas sans rappeler le rôle des ecclésiastiques dans la guerre d'Espagne, le parallèle entre les deux conflits étant souvent établi par l'auteur. le livre n'est pas exempt de répétitions ni d'atermoiements mais sa richesse documentaire est indéniable de même que son intensité dramatique. Journaliste, poète et auteur de nouvelles et de contes, Alfredo Pita n'a écrit qu'un autre roman. Nul doute que Ayacucho est pour lui le livre le plus important de son existence, ce qui explique sa force malgré un style que l'on pourrait assez souvent qualifier de journalistique.
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L'auteur, péruvien, décale son regard sur son pays en confiant la parole à un narrateur, journaliste espagnol. Celui-ci mène une enquête au Pérou sur les disparitions et assassinats de journalistes et de paysans dans la région d'Ayacucho, du fait à la fois des militants maoïstes du Sentier lumineux et de l'armée péruvienne.
Les maoïstes, voulant être dans le peuple "comme un poisson  dans l'eau" s'acharnent à éliminer toute opposition de la part des paysans, et de son côté l'armée sème la terreur en voulant annihiler toute tentative de complicité des paysans avec le mouvement maoïste.
Pris entre deux feux, c'est tout un pan du peuple péruvien qui trinque, les morts et disparitions se comptant par milliers.
Le livre prend la forme d'un roman noir et sensible, où s'affrontent de beaux personnages et de beaux salauds.
A lire absolument si l'histoire de l'Amérique latine vous intéresse.
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Tu dois être au courant que la société péruvienne est très raciste. Dans ce cadre, si la violence, le conflit affecte des villageois, des paysans, des pauvres Indiens, comme on disait avant et comme on dit toujours à Lima, quelle importance? Tout au long de l'histoire du Pérou la vie d'un Indien n'a jamais rien valu. Elle n'est bonne qu'à arroser la terre des autres de sueur et de sang. Et je ne parle pas de ses larmes, parce qu'il y a longtemps qu'il n'en a plus!
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Dans ce recoin des Andes, le combat était supposé opposer deux camps. D'un côté les troupes fantasmagoriques d'un parti maoïste, aussi primaire, aussi caricatural et aussi déliquescent qu'un épiphénomène asiatique implanté en Amérique ; de l'autre, une armée endoctrinée et, surtout, armée par les puissances qui commandent réellement dans ce monde, comme d'habitude. Mais entre les deux camps il y avait la grande masse des victimes que le conflit laissait sur son passage, l'immense cohorte des malheureux qui avaient eu la malchance de naître et de se retrouver dans ces parages, où les chiens de guerre s'acharnaient sur eux pour empêcher qu'ils rejoignent le camp ennemi. Un guerre civile est un jeu d'enfants en comparaison de ça, me disais-je.
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Tu sais, en Amérique latine, nous avons de formidables écrivains. Tu n'as peut-être pas conscience que l'Espagne n'est qu'une province de la langue, et non son unique propriétaire.
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Alors la logique s'impose: ce qui est invisible n'existe pas,et s'il arrive quelque chose à ce qui n'existe pas, aussi dramatique que cela soit, quelle importance.
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Monseigneur Crispín était une personnalité mystérieuse et opaque, pour lui et pour tout le monde, mais c'était en même temps quelqu'un que Max déchiffrait facilement, surtout dans le cadre de la guerre, de la violence que vivaient quotidiennement les pauvres. Ces gens qui au cours des dernières décennies avaient pris pour habitude de se réfugier dans l'église pour demander de l'aide ou de la consolation et qui se trouvaient à présent face à un mur de silence, indifférent et cruel. Max ne savait pas qui était cet homme (…) mais il savait très bien que face à la douleur et à la souffrance des gens il se comportait « pire qu'un cacique ou qu'un préfet d'un autre temps, de ceux qui pensaient que les Indiens ne valaient pas plus cher que des vers de terre ». Je ne sais pas si nous te l'avons dit, mais ce misérable refuse de recevoir à l'archevêché les gens venus dénoncer les morts ou les disparitions qui surviennent dans les communautés éloignées. Il a ordonné d'accrocher dans son secrétariat un panneau qui dit : « Ici on ne reçoit pas plaintes ni de dénonciations concernant les droits de l'homme. »
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