Álvaro Ortiz en GRAF Barcelona 2013
-Tu devrais sortir un peu.....
Aller voir tes vieux copains.
- pff...Tu rigoles ils ne parlent que de fuites urinaires.
ça me déprime.
Mais ce que j'avais vraiment apprécié dans tout ça, c'était qu'enfin j'étais en train de vivre quelque chose qui méritait d'être raconté.
Ça commence par trois amis qui ne se sont pas vus depuis près de cinq ans et qui se chamaille dans une voiture. Sept jours de voyage et des tas de kilomètres en perspective pour aller à un point X marqué sur une carte. Voilà en gros de quoi il retourne, mais il est aussi question de mensonge, de mort, de gros durs avec des chapeaux de cow-boy, d'un marin et sa fille, d’incendies, d'un singe.
Que dire de quelqu'un qui vient de mourir? Que dire sans tomber dans "c'était un type formidable"? "Un excellent ami"... et des clichés débiles de ce genre... Que dire de quelque que tu n'as pas appelé depuis cinq ans...et qui veut tout à coup que tu disperses ses cendres?
Naples était alors la capitale du royaume des Deux-Siciles, un des vastes domaines de l'Empire espagnol. C'était alors une ville moderne, cosmopolite, la deuxième plus grande d'Europe avec ses 350.000 habitants.
Un de nos protagonistes est Gerard Van Honthorst, né en 1592 à Utrecht, au sein d'une famille d'artistes. On le connaissait également sous le nom de Gherardo delle Notti, sans que l'on sache si c'était à cause de ses tableaux nocturnes ou de son côté fêtard.
L'autre est Dirck Van Baburen, un rouquin du même âge, originaire de la même ville et amateur de combats de coqs. Ils séjournaient en Italie depuis environ deux ans.
Deux peintres hollandais à Rome, cela peut paraître exotique, mais la ville en accueillit près de cinq cents entre 1600 et 1630.
Le vrai collectionneur est davantage intéressé par la quête que par la possession.
Voir Naples et puis mourir, dit le proverbe italien.
C'est que même des objets aussi anodins que le fauteuil dans lequel il s'asseyait devait receler une histoire rocambolesque.
A l'époque, j'avais des problèmes de sommeil. Cette nuit-là, je me souviens, quand je me suis mis au lit, avec toutes ces images dans la tête du type en train de massacrer ses amis... je suis tombé comme une masse.
Comme il me l’avait demandé, je lui ai tout raconté par le menu. Je vous ai parlé tout à l’heure de mon oncle son infarctus et ses chats, mais pas de l’aspect le plus scabreux de l’histoire.
Quand il est mort, toutes ses fenêtres étaient fermées, les chats n’avaient presque plus rien à manger... j’ai toujours trouvé qu’il n’était pas très sympa avec eux. Si bien que, le moment venu, ils n’ont pas hésité à le MANGER.
Ils ont commencé par les parties saillantes, je ne sais pas comment on dit... les oreilles et le nez, qui sont molles et faciles à mordiller. Quand la police l’a trouvé, il paraît qu’il n’avait plus de visage. Mais ça, c’est pas le pire. L’escalier avait une marche abîmée et, en tombant, mon oncle s’y est fait une légère entaille sur le ventre. Légère, mais suffisante pour qu’après avoir dévoré son visage... les chats se mettent à grattouiller sa plaie. D’après le policier, c’était... C’était abominable, une vraie boucherie...
Ils ont commencé par trifouiller la blessure et ont fini par lui arracher les boyaux et les éparpiller dans tout le salon. On avait presque l’impression que ça les avait amusés. Que, sous prétexte de mourir de faim, ils en avaient profité pour se venger de ce type qui depuis des années leur filait des coups de savate. Le policier a dit que pile au moment où il entrait... un des chats avait littéralement plongé la tête à l’intérieur du cadavre.