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Critiques de Anna de Sandre (28)
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Villebasse

Une ville sombre aux habitants sans avenir, contée par une plume poétique aussi lumineuse que cette Lune bleue, fantastique, mystérieuse, accrochée dans le ciel de Villebasse.



Anna de Sandre, nous entraîne avec son premier roman, dans une lecture déroutante, mais captivante. En à peine plus de deux cents pages et trente-sept chapitres, elle nous dépeint une ville et une vingtaine de ses habitants. Cette ville, personnage principal du roman, engoncée dans une vallée dont seule dépasse cette fameuse Lune bleue, ressemble à tant de villes que nous connaissons, dévastée par la fermeture d’usines, oubliée des projets d’envergure au profit d’autres. Ces villes où seuls errent des habitants qui ne font que survivre, parfois rejoints par des personnes qui arrivent là par hasard. Ces communes souvent rurales que l’on connaît tous, du Nord au Sud, de la Bretagne au Grand-Est.



Cette ville, Villebasse, c’est Le Chien qui nous la fera découvrir. Arrivé lui aussi par hasard, il est dénué de maîtres et va de maison en maison, traversant quartiers et rues. Le seul point central où se retrouve régulièrement de nombreux personnages est Le ventre de l’ogresse, un bar. Les personnages multiples sont tous différents, mais ont en commun une absence de joie dans leur vie, tantôt en proie à des névroses familiales, tantôt victime de la crise économique. Anna de Sandre, à travers ce voyage onirique et poétique dépeint celle qui est souvent qualifiée de France périphérique. Cette France oubliée des politiques entre chaque élection et qui ne fait parlait d’elle en général qu’avec des drames intéressants les médias.



Cette lecture est relativement perturbante tant les premiers chapitres nous perdent dans ces rues froides, enneigées où il nous est impossible de trouver un fil conducteur. C’est d’ailleurs à cette occasion que la magie de la prose de l’autrice opère le plus et nous incite à aller plus loin, pour rapidement nous emballer totalement. N’ouvrez pas ce livre si vous n’avez pas un vrai temps de lecture devant vous.



Je remercie La Manufacture de Livre, Marie-Anne Lacoma et Pierre Fourniaud pour m’avoir permis de découvrir ce roman que je relirai certainement, chose rare, tant il possède de mystères à explorer.
Lien : https://imaginoire.fr/2022/0..
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Villebasse

Commencer l'année par ce roman n'est pas chose idéale, l'entrée dans Villebasse, une ville retirée du Sud-Ouest de la France auréolée d'une lune bleue depuis plusieurs années, en plein hiver - et quel hiver - étant d'une profonde et sauvage noirceur. Rien n'est, dès les premiers chapitres, épargné au lecteur, qui fait face à la monstruosité humaine qui se donne comme rendez-vous dans cette ville étrange et qui, comme par enchantement, semble retenir parmi elle tous ceux qui s'aventurent dans ses ruelles juste une fois. Monstruosité humaine qui fait, dans le même temps, souvent face à la banalité d'un quotidien commun.



La construction narrative, la plume, et le ton, de fait, n'épargnent pas non plus, faisant osciller entre de nombreux habitants sans logique apparente de prime abord au fil des chapitres ; entre une langue recherchée et poétique, tout aussi noire que la ville qu'elle décrit, et une langue crue, d'une vulgarité brutale, au sein d'une même phrase ; entre gravité et violence de certaines scènes, et pointes sarcastiques, ou au contraire plus légères, pour d'autres.



Après être restée dubitative pendant plusieurs chapitres, j'ai fini par me laisser prendre, et par l'histoire, dans laquelle l'on comprend très vite que l'on n'aura pas de réponses à toutes nos questions, et finalement, tant pis, et par la plume, qui paraît au début foutraque, et qui finalement montre une excellente maîtrise de l'hybridité stylistique qu'elle choisit de mettre en scène pour raconter Villebasse.



Une découverte finalement intéressante à rebours.
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Villebasse

« Depuis que le Chien était entré dans Villebasse, aux premiers jours de cet hiver particulièrement froid, on avait le sentiment incongru que la mort survenait davantage qu’à l’habitude ici, et plus qu’aux alentours. »



Un hiver

Une ville éclairée par une étrange lune bleue

Et un chien, « Le Chien », venu d’on ne sait où

Il rôde, il semble être partout à la fois

Si vous le suivez, vous rencontrerez les habitants de Villebasse



Totalement subjuguée par l’écriture de ce roman. Je pense que peu de plumes françaises actuelles proposent un style aussi travaillé et une langue aussi belle. L’onirisme et la poésie saisissent le lecteur au détour du réel. Anna de Sandre nous emporte dans un univers sombre qui fait terriblement écho à nos vies modernes. Villebasse semble hors de l’espace et du temps, étouffée par la neige. Et pourtant, les maux et les tourments des habitants sont bien ceux de notre époque. C’est glauque et envoutant. C’est noir et brillant. Je ne vous en dit pas plus (#laflemme) mais je crois que La Manufacture a déniché une très grande autrice.
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Iris et l'escalier

Elle a des yeux immenses, des cheveux roux en bataille, les pieds nus, un sourire lumineux. Iris est une petite fille enjouée et curieuse, à l'imagination débordante. Mais elle est petite, et le monde est si vaste autour d'elle. À commencer par Escalier, tellement haut qu'il lui fait peur.

Armée de tout son courage, Iris entreprend pourtant son ascension. Chaque pas est mesuré, chaque marche est comptée. La fillette est bien décidée à aller jusqu'en haut, quitte à disputer Escalier qui lui cause bien du souci.

Arrivée à la dernière marche, Iris est très fière d'elle. Elle a réussi l'épreuve. Il est tard, c'est l'heure de se coucher, de rejoindre sa chambre... mais pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? Elle aimerait bien avancer encore. Grimper sur un grand arbre. Atteindre la plus haute branche. Toucher le ciel.

Elle empoigne alors son sac à dos, y glisse quelques friandises au passage, et part explorer le Pays des Très Grands Arbres, un endroit extraordinaire où les animaux sont gigantesques. Iris se sent minuscule mais elle n'a pas peur, elle comprend le langage des arbres géants.

Un très joli album qui évoque avec bienveillance et poésie les premiers apprentissages de l'enfant. Grandir et vaincre ses angoisses ne sont pas des choses faciles. Il y a bien des étapes et des obstacles à franchir avant d'atteindre le sommet. Les illustrations crayonnées empreintes de légèreté, d'onirisme et de douceur sont magnifiques. Rêver de grandir, grandir en rêvant...


Lien : http://lesmotsdelafin.wordpr..
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Villebasse

Quel plaisir de tenir ce bouquin en main!

Une couverture toute douce, un format ergonomique et léger, des pages souples… Bref, une lecture qui commence dans des conditions optimales!



Fin prête à plonger dans ce roman aussi noir que sa couverture…



À la lecture des premiers chapitres, on découvre tour à tour de brefs événements liés à la vie des habitants de Villebasse. On se sent entrer dans un labyrinthe sans pour autant s’y perdre car très vite, il appert que ces mini-épisodes ont tous un lien. Parfois, il s’agit d’une même scène racontée à travers des points de vue ou des personnages différents. In fine, toutes ces petites histoires s’entrecroisent et se rejoignent dans un tableau contemporain dont l’intrigue est racontée de façon mélodique. Le rythme et la forme de la narration sont de toute beauté. Le roman ne se lit pas d’une traite, il se savoure. On revient parfois en arrière pour relire certains passages et c’est ce qui rend cette lecture encore plus accrocheuse.



Étrangement, il s’agit d’un premier roman. Nul doute qu’il ne sera pas le dernier! J’ai trouvé l’écriture d’Anna De Sandre d’une grande particularité. Je ne parviens d’ailleurs pas à l’identifier à d’autres styles déjà lus. Un mélange de faits modernes écrits dans une langue un tantinet désuète (ce qui fait tout son charme et son originalité). Les mots sont étudiés et se combinent parfaitement de manière à ce que le lecteur ressente la réflexion qu’il y a eu derrière chaque phrase.



Ce livre est un condensé de poésie et d’humour noir qui dévoile des scènes effroyables au clair de deux lunes. On se retrouve coincés dans cet univers étrange dont personne ne semble se soucier et qui donne dès lors libre cours à notre imagination.



C’est pour moi une magnifique découverte de la rentrée littéraire!
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Villebasse

Lire « Villebasse » d’Anna de Sandre signifie presque emménager, le temps de votre lecture, dans « cette ville à zone blanche et à lune bleue » qu’est Villebasse. En effet, depuis quelques années, une mystérieuse lune bleue a fait son apparition dans le ciel, et avec elle des hivers enneigés, terriblement froids, et des phénomènes étranges. « Le Chien » aussi a élu domicile au sein de cette bourgade qui longe la forêt.

Ce livre puissant m’aura autant dérangée qu’interrogée.

Les 37 chapitres relativement courts qui se succèdent font état de plus de vingt personnages, tous plus ou moins principaux, tous cabossés, abimés par la vie, soit victimes, soit bourreaux au passé douloureux. Certains reviennent plus souvent que d’autres dans l’histoire. Tout au long du livre, je me suis questionnée quant au fil conducteur de tous ces êtres en souffrance, le liant de l’histoire : était-ce « le Chien », cet animal rôdant tour à tour chez les uns et chez les autres sans jamais élire domicile vraiment chez l’un(e) d’entre eux ? Etait-ce le quartier sud de Villebasse, ce microcosme connu depuis des siècles déjà comme un lieu dans lequel on s’installait souvent définitivement ? Etait-ce la précarité sous toutes ses formes qui, en soumettant les habitants à ses règles injustes, allait me mettre, moi lectrice en attente, sur le chemin d’une intrigue dont je ne comprendrais éventuellement la résolution qu’aux dernières lignes ?

L’autrice nous amène sans tabou dans des univers aussi violents que tristes et désespérants, où se succèdent le viol, le meurtre, une agression sexuelle sur mineure, l’abandon parental, la violence, … et la cruauté psychologique, souvent utilisée de façon inconsciente. Les personnages endurent le deuil, la tristesse, tentant de faire face à cette vie malgré leurs fragilités. « C’est le lot des fragiles de tomber sans protester », écrit l’autrice.

Arrivée à un tiers du livre, j’éprouve du rejet pour beaucoup d’entre eux, violents, vulgaires, primaires. Je m’en veux alors un peu de les juger tous dans un pseudo procès sans attendre d’avoir plus d’information sur eux et me penche sur l’écriture, révélatrice de biens des secrets. Anna de Sandre pratique deux langages opposés dans son livre : le premier, très étudié (même un brin trop à mon goût), poétique, et le second, cru, parfois vulgaire. Une question me taraude : sous le manteau de laideur de certaines phrases, n’aurais-je pas su voir une certaine beauté dissimulée ? Je pose donc le livre pour réfléchir au fait qu’un être humain n’est pas tout bon ou tout mauvais, il peut alterner bonté et méchanceté voire cruauté. Il n’empêche que j’éprouve de l’aversion pour un certain nombre d’entre eux aux profils accablants et aux actes abjects. J’aimerais les savoir punis à la fin, mais…le seront-ils ?

Le Chien m’intrigue particulièrement. Personne ne l’a nommé. Dans un passage anthropomorphique, il éprouve reconnaissance et loyauté envers son sauveur et cauchemarde en dormant, du mal qu’on lui a fait subir. Son absence de jugement humain en fait selon moi, l’être le plus humain (le moins inhumain) de tous !

Dans la suite de mes interrogations, je me demande si je suis en plein roman noir ? Ou en plein roman social qui dénonce la misère sociale et ses effets sur la vie affective, pécuniaire, psychologique, morale ? On apprend que les habitants souffrent encore de la « honte du manque et de la pauvreté qui étaient venus pourrir Villebasse », suite à la fermeture de la filature en 2008. L’autrice aurait-elle prévu de faire revenir le mal comme un boomerang sur les expéditeurs ? Ou les raconte-t-elle plutôt avec empathie et sans jugement, au travers de leurs failles, de leurs incapacités à s’en sortir. « Tim enchaînait les emplois précaires. Rose était sans diplôme et sans malice ».

Je ne recommanderais pas cette lecture un soir de déprime. Quoi que ! L’autrice note dans son résumé « un monde ravagé par nos maux ordinaires ». Chez une partie d’entre eux, en effet, il en va ainsi. Et nous pourrions découvrir que nous ne sommes pas les seuls blessés, imparfaits, en échec, perdus, malheureux, à la dérive… et qu’en creusant en nous, nous pourrions bien trouver une belle source d’humanité, pourquoi pas même une source divine. « Il était distrayant de prendre soin d’un autre quand on n’avait pas le courage de s’en sortir. Jusqu’au jour où il apparaissait que, si l’on maîtrisait ces actes et cette attention pour autrui, alors il était naturel de les tourner vers soi ».

Chez les autres, ceux qui ont tué, violé, je trouve l’expression « maux ordinaires » quelque peu légère. Leur univers ultra-violent est certes leur quotidien, mais je souhaite qu’il ne devienne pas celui de tous, de toute une ville, une société.

Un premier roman qui vous plaira ou non mais qui gardera votre mental et votre esprit en alerte, en réflexion, en gestation. La fatalité sociale est-elle réelle ? Que (qui) seriez-vous devenu(e) à Villebasse ?

Une victime ? Un bourreau ?

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Villebasse

« Depuis que le Chien était entré dans Villebasse, aux premiers jours de cet hiver particulièrement froid, on avait le sentiment incongru que la mort survenait davantage qu'à l'habitude ici, et plus qu'aux alentours. »

L'incipit donne le ton, fil rouge d'une histoire magnétique, hivernale.Tout semble étrange, comme dans un Entre-Monde. En fusion avec un ésotérisme empreint de mystères troublants et angoissants, éloigné d'une lumière apaisante. Et pourtant, l'écriture est le toit du monde, l'olympien d'une trame sereine et poétique, magistrale jusqu'au point final. Le charme d'un récit dont on ne lâche pas un point, une virgule et les traces d'un Chien (C majuscule) dans la neige qui dévoile mot à mot l'énigme parabolique.

« Une lune imparfaitement ronde et bleue, bleue comme si elle abritait au moins un océan, mais un océan de tous les chagrins du monde évaporés, dans l'atmosphère qui se seraient condensés pour se précipiter en elle sous la forme d'un liquide aux propriétés inconnues. »

Le Chien, métaphysique, sombre, déambule dans chaque recoin. Son aura bouscule tous les codes d'un village qui va observer à la loupe ses déplacements et les bouleversements que cela va engendrer. Les habitants le connaissent tous. D'aucuns savent d'où vient ce chien noir. Un mythe s'instaure. L'attitude emblématique de le Chien qui va soit régler ses comptes soit remettre d'équerre l'habitus du village en intégralité. Parfois tendre, affectueux, ou agressif, le manichéen en déplacement dans un village qui va vivre dans un souffle des plus inquiets. Un village labyrinthe dont on ne peut s'échapper. La lune étrange élève ses secrets, éblouissante en connivence avec le Chien. Ici, c'est l'ambiance qui assigne les transmutations en devenir. « Villebasse » est une oeuvre spéculative. Un roman noir qui forge les destinées dans les profondeurs les plus fabuleuses et secrètes.

« C'était indéfinissable, comme un pas de côté qui vous faisait quitter la marche du monde : une gémellité bancale qui les rapprochait comme un étai. »

« Villebasse vient de la nuit, celle qui élève et isole pour mieux affronter ses démons intérieurs et renaître à la vie. « Villebasse » est un symbole des plus oniriques. Bien au-delà de l'envergure de ce roman-fable, Anna de Sandre détient la clef de l'enchantement littéraire. Publié par les majeures Éditions La Manufacture de livres

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Villebasse

Anna de Sandre possède une plume remarquable s'harmonisant parfaitement à ce récit où la noirceur s'illumine sous la lune bleue de cette étrange ville, peu attirante voir même repoussante, qu'il semble pourtant difficile à fuir.



Tout comme cette ville, l'écriture de l'auteure semble nous posséder, nous entraînant au fil des pages au coeur de Villebasse, une ville où rôde le Chien et où circulent une incroyable violence et une profonde tristesse.



Dans cet univers onirique, j'ai savouré cette plume singulière, pleine de charme et cette histoire étonnante habitée par la noirceur des âmes humaines capables du pire et rarement du meilleur ou alors du meilleur du pire.



Une nouvelle voix qui ravira comme moi les amoureux des plumes noires et des histoires qui sortent des sentiers battus.



Une des belles surprises de la rentrée.



Chronique complète sur mon blog lien ci-dessous ⬇️
Lien : https://madosedencre.over-bl..
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Un régal d'herbes mouillées

« Un régal d’herbes mouillées » est un recueil de poèmes édité par les éditions Les Carnets du Dessert de Lune, un éditeur belge.



Anna de Sandre écrit de la poésie, des nouvelles et des albums pour enfants. Elle tient un blog que je vous conseille vivement de fréquenter.



Sans poses ni fioritures excessives – la dame n’est pas du genre à se regarder écrire – Anna de Sandre va droit au but. Elle croque ses contemporains avec une justesse et une acuité terribles qui n’exclut en rien tendresse et humour.



Elle a le sens de la formule et sait créer des rapprochements incongrus de mots, d’images, d’où émerge ce qu’on appelle communément (je crois) poésie.

Sa poésie est au plus près des êtres humains, des corps, de la matière. D'une simplicité qui n'empêche pas la profondeur, la poésie d'Anna de Sandre est très accessible, même à ceux qui, comme moi, ne sont pas de grands lecteurs de poésie.



Mon goût pour les histoires et les personnages me fait pencher du côté des textes qui s’éloignent de la poésie "pure" (si tant est que cette expression est un sens) et ressemblent à des micro-nouvelles comme « Le garçon d’à côté » « La marque » ou encore « C’est loin la Laponie ».

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Villebasse

Un roman tout à fait dans la veine de cette maison d'édition : un portrait sans concession de la noirceur du quotidien, écrit dans une langue riche et puissante.

Mais cette fois-ci, ça n'a pas fonctionné chez moi.

Par que le noir manque ici cruellement de nuance : tous les personnages, sans exceptions, sont sales, moches, torturés, sans passé ni avenir, et surtout sans la moindre lueur d'espoir dans leur vie. Il n'y aurait eu qu'une petite poignée de personnages, j'aurais peut-être réussi à mieux les comprendre, peut-être à les prendre en pitié. Mais non : là, chaque chapitre ouvre une scène sur un nouveau personnage, sans lien réel avec les précédents. Trop peu pour comprendre qui est qui, se représenter chacun et construire un lien avec eux. On ne peut que les survoler, sans avoir la place d'imaginer le moindre développement à leur égard.

Parce que la langue est partout trop riche. J'aime les belles phrases et les images poétiques, pourtant. Mais quand c'est distillé à bonne mesure (le "bonne" étant subjectif, je sais). Pas quand chaque phrase est tarabiscotée pour porter une nouvelle métaphore jamais filée avec le reste, une nouvelle figure de style plus masturbatoire qu'autre chose. Je trouve que cela ôte toute la lisibilité du récit, que l'image, quand elle est compréhensible en première lecture, efface l'histoire.

Bon, cela dit, ici, d'histoire, il n'y a pas. Pas d'intrigue, pas de développement de personnages, d'évolution de leurs regards ou de leurs relations, pas d'attache pour le lecteur (ni aux personnages, ni à l'histoire, donc). Juste une succession de portraits noirs (qui "s'explique" vaguement dans les derniers chapitres, mais cette justification poussive ne rattrape en rien tout l'intérêt qu'on a perdu au fil des 200 pages précédentes).

Bref : il y avait de la matière (noire) et du talent (poétique), mais leur utilisation (démesurée) n'a pas fonctionné pour moi dans ce livre (j'ose à peine écrire "roman"). Le tout manquait de liant, laissant l'impression d'un bon cookie avec trop de beurre (l'abus de formules alambiquées pour dire des choses simples) et pas assez d'oeuf (absence d'intrigue pour lier les tranches de vie entre elles et susciter l'empathie envers au moins un personnage) : c'est bon, mais vite écoeurant, et ça se désagrège entre les doigts.
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Villebasse

Inquiétant roman-mosaïque condensé d’une ville fictive, parcours tendre, cruel et poétique parmi des gens ordinaires qui ne le sont bien entendu pas tant que ça, une réussite rare et impressionnante.



Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2021/12/20/note-de-lecture-villebasse-anna-de-sandre/



On connaissait jusqu’ici Anna de Sandre pour son blog d’expérimentation langagière et conceptuelle, pour sa poésie et ses nouvelles, dont un superbe échantillon nous était offert en 2014 dans « Le parapluie rouge » et, pour certains d’entre nous, pour ses albums jeunesse sous le pseudonyme d’Anne Pym. Et puis vint « Villebasse », en cet automne 2021, à La Manufacture de Livres. Un premier roman détonant, situé simultanément hors du temps qui passe et au beau milieu des forces centrifuges du contemporain.



Dans cette petite ville occitane fictive (mais peut-être pas inventée de toutes pièces), comme figée ou assoupie mais bouillonnant pourtant de forces telluriques de prime abord invisibles, on croisera au fil d’une intrigue en forme de redoutable mosaïque des personnages simultanément ordinaires et mystérieux, comme des voisins et connaissances distantes dont on ne connaît jamais que quelques facettes apparentes et éventuellement changeantes. Brutalisant soudainement la torpeur ambiante et l’inexorabilité qui caractérisent le lieu, un viol, un décès et l’arrivée subreptice d’un chien ô combien étrange – à moins qu’il ne soit que la projection astrale des envies et des doutes de certains citadins – vont mettre le feu aux poudres, ou plutôt, peut-être, allumer une série de mèches lentes dont on ne découvrira que trop tard à quels barils explosifs elles étaient reliées.



Il faut beaucoup de talent pour donner ainsi vie authentique à une ville fictive et pour parvenir à lui donner une telle stature de personnage à part entière, surtout sans abattre d’emblée toutes ses cartes. L’aura du « Jérusalem » d’Alan Moore et de sa monstrueuse investigation poétique, fort justement revendiquée par l’autrice, irrigue ces (seulement) 200 pages, en sus des résonances avec de somptueuses mises en roman d’un habitat capable de véritable emprise, telles la « Bruges-la-Morte » de Georges Rodenbach, la Riemech de Jérôme Lafargue (« L’ami Butler »), voire le lotissement Grand Siècle ou les hauts de Ligurie de Fanny Taillandier.



Pour tangenter l’inquiétude baroque et sinistre des « Saisons » de Maurice Pons ou un sentiment de fantasy urbaine digne des meilleurs (et des plus discrets) scénarios du « Shadowrun » de FASA ou de la série télévisée « Grimm » de David Greenwalt et Jim Kouf, pour apprivoiser et transposer, sans jamais la désigner sans ambiguïtés, la possibilité de la sorcellerie dans le bocage chère à Jeanne Favret-Saada comme à Maurice Fourré (« La marraine du sel », 1955), pour révéler systématiquement aussi les minables garous qui peuvent somnoler en chacune et chacun, ou pour conduire au long cours une formidable accumulation de potentiel en attendant que lâchent les digues, il faut un méticuleux travail sur l’écriture elle-même, une infusion poétique délibérée où la précision technique du vocabulaire baigné d’humour intérieur, comme chez Céline Minard, et la juxtaposition soigneuse de l’ultramoderne et du légèrement, volontairement, suranné, comme chez Nicolas Rozier, ouvrent l’espace nécessaire à une véritable création. Et c’est ainsi que l’on obtient un roman rare et mystérieux, dense et ramifié, tendrement poétique et joliment cruel.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Villebasse

Anna de Sandre nous raconte Villebasse et une galerie d' habitants cabossés avec des vies bancales. Il y a la mort bien présente, le sang, la pauvreté, des misères et Le Chien qui erre, navigue.

Qui est Le Chien ?



De la narration faite de Villebasse et de ceux qui y habitent, je ne voyais ni la lumière, ni le jour. Seulement la nuit. Et cette lune bleue. La froideur aussi.

J'aimais cette ambiance mais bien que conquise par le style de l'écriture, je me fis la remarque qu'il me manquait un liant entre tous ces chapitres courts. Le passage de l'un à l'autre était trop sec et brutal. J'étais gênée et perdue parfois de passer de l'histoire d'un personnage à un autre..

J'ai cru garder cette réserve jusqu'à la fin.



Puis le chapitre XXXV et les mots de Rose sont arrivés et j'ai basculé dans l'émotion. Quelques pages pour me ressaisir.

Le dernier chapitre arrive.

Le XXXVII.

Et là ! Dans la cuisine. Cette scène avec le briquet... Émotionnellement très forte. La vie et la lumière ont paru renaître. Grâce à ce passage couplé aux dernières pages qui ont suivi, ce chapitre ultime a déversé un flot de chaleur et d'humanité qui m'a bouleversée et que je n'attendais plus.

Très, très émue (euphémisme).

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Villebasse

Anna de Sandre est libraire, elle est déjà l’auteure de fiction jeunesse sous le nom de plume Anne Pym. La couverture est presque unicolore et correspond parfaitement au contenu de ce roman assez déconcertant, qui va fouiller les recoins les plus sombres du comportement humain. C’est l’un des romans les plus insolites qui m’ait été donné de lire, non pas par sa qualité littéraire, mais parce que je l’ai fini en étant loin d’être sure d’avoir compris ou l’auteure avait voulu en venir.



Tout se passe à Villebasse, une mystérieuse ville du sud-ouest de la France, qui exerce un pouvoir presque magnétique sur ceux qui l’habitent, car personne ne quitte Villebasse, personne n’y pense, personne n’ose. Je me suis attachée à essayer de comprendre ce qu’était cette ville, entachée d’une lune bleue à la nuit tombée et d’un chien qui tient lieu d’oracle qui vagabonde d’habitant en habitant. Tour à tour, on prend connaissance avec les individus qui composent Villebasse, qui n’ont rien d’autre de remarquable que d’être des individus tristement banals, dans leur médiocrité comme dans leur quotidien. Il y a même deux troquets, qui, comme ailleurs, réunissent tout-à-chacun.



Bien que le récit soit une narration pure, il contient certains éléments dramatiques qui évoquent Villebasse comme le théâtre d’une ville mythologique revu à l’ère du XXIe siècle : le chien annonciateur de malheurs, les chapitres dont les titres renvoient à des fonctions précises, la ville qui semble porter en elle une fatalité, certains prénom très poétiques – Rose, Coline – certain shakespearien – Iago. Si certains possèdent des noms, beaucoup ne sont désignés que par leur fonction – clerc, avocat, podologue – instaurant en Villebasse une cité ou chacun et chacune a son utilité propre. Ce sont des choses qu’avec une seconde et rapide lecture m’ont amené à considérer sous un autre jour.



Il y a autre chose que la simple volonté des hommes en action dans ce roman, qui est bien difficilement saisissable, une sorte d’action de dieu incarnée par ce Chien, dont la présence inexpliquée signe là l’aura de mystère dans laquelle baigne Villebasse, baignée par la lumière de cette lune mystérieuse. Oracle ? Main vengeresse ? Protecteur de la ville ? Peut-être un peu tout à la fois. Anna de Sandre possède une langue richement et soigneusement travaillée, qui ne laisse rien passée et qui lui permet de s’adonner à des petits jeux, comme cette assonance dans Samuel-Os-de-Seiche, des images plein le texte, qui quelquefois s’adonnent au vulgaire.



Ce qu’il y a de déroutant dans ce roman, j’en parlais au début, c’est qu’il n’y a pas vraiment de liens entre les chapitres, il n’y a pas de narration classiquement menée, rien qui ne relie les personnages entre eux si ce n’est le fait d’être des citoyens de Villebasse. Les codes du roman classique sont clairement mis à mal, c’est une question d’habitude, on s’y fait après quelques chapitres. C’est davantage une succession d’épisodes, et après du recul et de la réflexion, j’y verrais une nouvelle forme d’Epopée moderne, Villebasse m’apparaissant comme une autre forme d’Ithaque – avec son mentalist Patrick Jane et ses jeux modernisées Games of Thrones. Ce qui m’a mis la puce à l’oreille, dès ma première lecture par ailleurs, ce sont ces titres si caractéristiques de l’Epopée qui résument ainsi chaque épisode tels que « Jourdan sauve une bête peu ordinaire » ou bien encore ce titre versifié « Fauchée comme les blés/Colline fait les courses ».





J’ignore si ma vision de ce bien énigmatique roman, qui possède sans aucun doute plusieurs niveaux de lecture, est juste ou erronée, mais l’image de ce chien vengeur sous la lumière irréelle de la lune me paraît plausible. C’est en tout cas une Épopée d’un nouveau genre, totalement démythifiée, désacralisée, une épopée profane, ou le vulgaire – dont l’argent – a tué le sacré et dans le sens ou il y a bien une église, mais totalement dépourvue de ses attraits de piété et de respect, la prière y est blasphémée, la foi est consumée, l’animal est la seule espèce encore digne de sens. Je suis incapable de dire que j’ai aimé ou que j’ai détesté ce roman, il m’a poussé dans une forme de réflexion plus que du ressenti, ce en quoi il se démarque parmi les autres titres publiés chaque année. Le choix de la couverture parle pour lui, c’est un récit somme toutes assez sombre, et qui même conserve indéniablement une certaine forme de poésie, même dans la vulgarité, c’est dire, ne laisse pas porte ouverte à des lendemains plus enchanteurs à Villebasse, ainsi qu’ailleurs. Puisque finalement Villebasse, ça peut être toutes les villes de France.










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Villebasse

Étrange ce roman. De courts chapitres, de nombreux personnages, un énorme chien aux yeux bleus comme la lune apparue quelques années auparavant au-dessus de Villebasse, lieu d'où on ne s'en va pas.

Le récit est une succession de tranches de vie difficiles à relier entre elles. Des passages m'ont plu, d'autres m'ont plutôt ennuyé, et je reconnais ne pas être vraiment rentré dans cette histoire présentée comme poétique et onirique.

J'avoue avoir été dérouté par l'écriture d'Anna de Sandre dont le lyrisme m’a semblé parfois manquer de naturel.

Une impression plutôt mitigée sur un roman pour le moins original, qui a le mérite de ne ressembler à rien de connu.
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Villebasse

Premier roman extrêmement prenant. Le rythme est presque hypnotique, je me suis littéralement laissé emporter par les phrases dans l'univers tour à tour déprimé, glacial, et pourtant vivant que nous présente l'auteur. A sa lecture, j'y ai retrouvé des sensations similaires à celles lors de la lecture d'un livre de Nick Cave. A lire.
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Villebasse

Plonger dans la lecture de ce roman, c’est aller à la rencontre d’une constellation d’âmes bancales - miroirs de nos propres rêves et défaillances - dans un univers onirique frissonnant.



Ici, tout y est humide, sombre et glacial et - pourtant - persiste la lumière dans les espoirs secrets de chacun.

Des espoirs qui tiennent en vie leur hôte et qui sont autant d’éclats de lumière dans ce roman presque noir.



Un premier roman réussit, qui voit l’éclosion d’une nouvelle auteure à la voix singulière où la plume lancinante et la qualité romanesque nous rappellent celle d’un Franck Bouysse ou d’un Philippe Claudel.

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Iris et l'escalier

http://autraversdumiroir.blogspot.fr/2013/10/iris-et-lescalier-danna-de-sandre-et.html
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Un régal d'herbes mouillées

La couverture et le titre apaisent avant même que l’on se glisse entre les pages : on imagine des plaisirs minuscules, des micro-échappées belles, des envols purs.



Puis on ouvre et lit, sur un rythme de pluie à la chute lente, le “puzzle” poétique d’Anna de Sandre : une mosaïque de vies dédaignées (“j’veux entrer / dans le métier / des mosaïstes“), des instants cristallisés, des misères dévoilées, des beautés fragiles qu’un rien suffit à briser… Le recueil se construit comme une galerie de miniaturiste qui, loin de choisir pour inspiration la gracilité de l’existence, préfère en croquer les quotidiens boudés, les personnages effacés, les poisons silencieux et l’enchantement, mais en mode mineur.



Qu’elle esquisse “un miracle au bord du vide”, “la saleté des jours”,des “râles asynchrones”, “la cadence d’une vie en ruine” ou “un carrefour de cris plaintifs”, Anna de Sandre croque, précise, avide, des éclats de vie modestes comme on presse une nouvelle hors d’un fait divers...



La suite par ici : http://www.delitteris.com/au-fil-des-pages/un-regal-d-herbes-mouillees/
Lien : http://www.delitteris.com/au..
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Iris et l'escalier

Une jolie histoire qui a surtout plu à ma fille de 2 ans et demi.

C'est plein de poésie, c'est vraiment joliment écrit, c'est tout en douceur, et Iris semble si mignonne

Mais au bout de la 3e lecture, compter de 1 à 10 plusieurs fois c'est pas très drôle. Et j'aurais bien aimé qu'Iris ne dise pas à l'escalier qu'il est méchant ( parce qu'à la maison on ne dit pas de quelqu'un qu'il est méchant même si parfois il commet des actes que l'on qualifie de méchant, mais là je chipote )et que le singe ne lui parle pas de fessée.( moi j'adoooore les singes les enfants ont hérité de mes peluches de singes et là de l'imaginer menacer d'une fessée, c'est juste pas possible)

Et j'aurais voulu que l'histoire dure plus longtemps :D j'ai eu envie d'en savoir beaucoup plus sur ce monde des très grands arbres et sur la vie de la petite Iris.

Bien sûr y a les dessins magnifiques qui nous en disent aussi un peu plus et continuent de nous raconter l'histoire, mes enfants n'ont pas arrêté à chaque page de commenter tous les détails :D



C'est un très joli livre, qui nous a sorti un peu de nos lectures habituelles par sa poésie et sa douceur. Je pense qu'on le lira encore souvent.

C'est un beau livre à offrir je trouve
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Iris et l'escalier

Cette délicatesse et cette poésie, m'ont touché au coeur !



Autant les mots doux et l'univers tendre de Anna de Sandre (auteur que je ne connaissais pas), que les illustrations oniriques, lumineuses et pétillantes de Chiaki Miyamoto.
Lien : http://yanasaule.canalblog.c..
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