Anne-Marie Sicotte

Une vie de travail contenue dans quatre grosses boîtes. C’était difficile, parfois. Le chagrin montait alors qu’elle ne s’y attendait pas, mais Véronique se sentait si proche de sa mère ainsi, plus proche qu'elle ne l’a jamais été.

C’est dur quand les gens qu’on aime souffrent.

C’est toujours dur, quand il y a du monde et que, tout d’un coup, il n’y a plus personne.

Elle a envie d’aimer sa virginité avant de la perdre... Oui, l’aimer comme un hymne à l’innocence, cette somptueuse innocence de l’enfance. Les émotions brutes, l’amour sans réserve, la richesse sensuelle de chaque journée... L’aimer comme une promesse de joie.

Généralement, les déclarations d’amour, c’est pour s’accrocher à quelqu’un. Je t’aime, alors reste toujours avec moi. Et surtout, n’aime personne d’autre. La passion est un besoin dégénéré qui entraîne la destruction dans son sillage. La passion brutalise l’être aimé par ses exigences, par son appétit inextinguible...

Que les mots sont pauvres ! Et comme souvent ils ne servent qu’à blesser, qu’à écraser l’autre. Ils ne veulent pas libérer la parole, ils veulent faire taire. Son père prétendait aimer son épouse mais ne pouvait s’empêcher de la battre avec des phrases humiliantes et opprimantes. Elle pleurait en silence, sans se défendre, écrasée par ce jugement sans appel.

Il est nécessaire de sacrifier l’intimité, proclament les hommes, au profit d’une plus haute et noble mission, celle de l’avancement de la civilisation ! Il faut valoriser l’activité cérébrale et laisser le sexe à sa juste place, celle d’exutoire primaire à la tension !

Les hommes, dit-elle, il y a toujours quelque chose qu’ils n’aiment pas de notre sexe. Le corps féminin est juste le moyen pour eux d’arriver à leur propre plaisir.

La joie la rend ivre, et son corps est habité d’un léger mouvement de bascule, comme s’il voulait savourer de nouveau le goût de la jouissance. Un homme capable d’enchanter ainsi une femme ne peut que l’aimer, vénérer chaque parcelle de son être au complet. Elle ferme les yeux pour prolonger le moment merveilleux qu’elle vient de vivre, les orgasmes qui se sont déversés en elle comme des geysers brûlants, l’inondant tout entière.

L’univers est une voûte constellée d’étoiles utiles et belles pour l’humain, ou parée du soleil qui est la source de vie. Le tout palpable, proche et rassurant. L’univers n’est pas un vide, mais un plein, une entité, un tout rassurant qui justifie l’existence.

J’ai peur des gens et en même temps, j’ai constamment besoin de leur approbation pour fonctionner. Je soupèse les conséquences de mes actes et je m’ajuste aux réactions que j’imagine... Que c’est stupide, quand même. Je voudrais grandir.

Elle voudrait dire que l’amour existe et qu’elle le veut tout entier. Qu’elle est fatiguée de se préoccuper des pensées des autres ! Pour aimer, elle attend une permission qui ne vient jamais !

Le plaisir, ce n’est pas visuel.

Les familles recomposées, c’est parfois une occasion de s’ouvrir aux autres.

Elle croyait encore quelque chose possible... Elle avait voulu illustrer le désir. Elle a souvent voulu mettre le désir, le corps et les sens en images. Mais cette fois-là, c’était différent. Elle tentait de dessiner la sublimation du désir en force intellectuelle. Après tout, si les hommes en étaient capables, pourquoi pas elle? Elle ne voulait plus être seulement douceur et amour, mais aussi violence et action.

La société de production, c’est comme une secte religieuse. En apparence, les gens y sont libres. Mais petit à petit, ils doivent tous emprunter la même route.

Il déteste les «j’aurais donc dû». Les décisions ont été prises. Pas nécessairement les meilleures, mais c’est ainsi. Les erreurs aident, dans la vie. Elles font grandir, évoluer.

On ne démolit pas ainsi une mère sans faire beaucoup de tort à ses enfants.

L’accueil de Clément est très chaleureux et Véronique sent une vague de bonheur fondre sur elle, à laquelle elle s’abandonne comme on mord dans un morceau de gâteau crémeux. Elle redevient la fille de son père.

En amour, il y a toujours inégalité. On est fascinés par ce qui est différent de nous. On cherche ce qu’on n’a pas. Pour moi, c’est une utopie, la passion entre deux êtres pareils. Parfois, on se demande si tous nos efforts en valent la peine, s’il y a vraiment moyen de changer quelque chose à quoi que ce soit. Si on n’est pas condamnés à geler toute notre vie, sans véritable chaleur intérieure.