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Citations de Annie Lavigne (123)


Une odeur d’encens planait dans le studio où un musicien de jazz faisait hurler sa trompette. Le décor était minimaliste : un matelas posé directement sur le sol, des coussins et une chaîne hi-fi, derniers vestiges de l’antre du jeune homme.

Julien alluma des dizaines de chandelles qu’il disposa de manière à éclairer subtilement tous les coins sombres. Alors que les flammes dissipaient l’obscurité, les contours de la pièce se dessinaient. Le studio n’était plus qu’une grande pièce dépouillée et sans âme, prête à recevoir les meubles du prochain locataire. Ce vide lui donnait un tout autre cachet.

Je m’approchai de la fenêtre. Dans le ciel, les étoiles brillaient, ces précieux diamants qui, au matin, tomberaient dans les nuages pour faire s’abattre sur la ville un orage aux gouttes de pluie scintillantes… Et au centre du ciel, dans toute sa splendeur, la lune pleine nous poignardait de ses puissants rayons.

Ce soir, la reine de la nuit était notre complice…

Nous allions passer l’une de nos dernières nuits ensemble et nous avions ce grand espace à notre disposition. Nous pouvions y créer un ballet moderne, y faire une exposition de corps humains ou y peindre des œuvres surréalistes si telle était notre fantaisie. Nous pouvions écouter Vivaldi à tue-tête en jouant les chefs d’orchestre ou hurler à la lune en imitant le loup. La nuit, tout était permis…
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Je ne traînai pas dans la rue bien longtemps. J’étais trop intelligente pour cela. Je me fis des copains plus âgés, qui sortaient dans les boîtes de nuit. Je me teignis les cheveux en rose et je me perçai le nombril.

Je sortis de la pénombre et commençai à danser sous les feux des projecteurs. Adolescente à la découverte de sa sexualité, je partais faire la tournée des discothèques les plus branchées. Avec mes fausses cartes d’identité, je rentrais dans tous les clubs, où la drogue se distribuait comme des bonbons. Des jaunes, des bleus, des rouges, des verts…

Incroyable comment ces petites pilules pouvaient te faire oublier le con qui t’avait plantée là ou la baffe que ton vieux t’avait donnée…

La nuit venue, nous endormions notre conscience, et nos enfers personnels devenaient un feu de joie autour duquel nous dansions. La nuit venue, tous mes amis se croyaient heureux. Moi, au moins, je savais que je ne l’étais pas. J’étais vide en dedans.

Comment peut-on se sentir vide à quinze ans, alors que la vie a encore tant à nous offrir ?

C’est qu’on est vulnérable, on n’a pas encore fabriqué notre bouclier, forgé notre carapace. Les loups rôdent, les vautours guettent, et si l’on n’est pas vigilant, on tombe entre leurs griffes…

J’étais maintenant une dure à cuire, mais franchement, je n’y croyais pas du tout. Derrière cette belle jeune femme se cachait une petite fille rêveuse qui dormait encore avec Monsieur l’Ourson.

Papa, je ne voulais que dans tes bras être serrée, mais tu avais les bras cassés…

Mon père n’avait rien contre le fait que je sorte dans les discothèques, même à mon âge. Il s’en balançait que je ne rentre pas coucher, il n’en dormait que mieux, ce con, sur ses deux oreilles bien bouchées. Pour lui, j’étais une petite pute qui n’avait rien de mieux à faire que de courir après les hommes. Alors, c’est ce que je fis.

Je me mis à découcher... et je commençai à coucher. À quinze ans, j’étais déjà une grande fille...

Avec ce déménagement, j’avais tout perdu : ma mère, mon enfance, ma virginité. Malgré cela, un feu intérieur commença à brûler en moi. Je crus tout d’abord que c’était de la haine, mais il s’agissait plutôt d’une fureur de vivre. Un intarissable goût de la vie qui me donna l’espoir de sortir un jour de ce gouffre où je m’étais enlisée. Le gouffre de l’adolescence...

Ma mère, pendant que je mendiais de l’affection, travaillait dans un pays africain en voie de développement à un projet d’urbanisation. Je l’admirais beaucoup, et je lui pardonnai d’être partie.

C’était mon rêve aussi.

Partir.

Comme un oiseau tropical espérant retourner dans sa forêt, je rêvais de retourner quelque part, comme si je n’étais pas vraiment née ici.

Après un an en terre africaine, où elle menait une vie excitante et pleinement satisfaisante, elle décida de s’y établir. Nous entretînmes une correspondance de cinq ou six lettres par année. Elle devint pour moi davantage une amie qu’une mère. Lorsque la vie pesait de tout son poids sur mes frêles épaules, c’était elle qui me donnait de l’espoir. Je me disais que moi aussi un jour je partirais.

Je sentis monter en moi cette irrépressible envie de partir. L’envie de tout lâcher pour poursuivre un rêve d’aventures, du canal de Suez jusqu’à la Terre de Feu, traversant l’Atlantique pour longer les côtes de l’Afrique jusqu’au delta du Nil. Le désir d’une longue fuite sur les immuables chemins du monde…
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La mer de l’Oubli brillait intensément alors qu’Emroth plongeait sous sa surface. Il s’enfonça dans l’eau et son corps frissonna légèrement. Puis il ne ressentit plus le besoin de respirer : il venait de pénétrer dans le monde parallèle…

Ça y est, songea-t-il, exalté. Je vais enfin toucher la Mère des océans… L’élémentaliste de l’eau descendit de plus en plus profondément dans les abysses, guidé par les trois ondines qui étaient venues le chercher. Les rayons de l’astre du jour s’amenuisèrent et firent place à une lumière tamisée. Complètement à l’aise dans l’eau, il se laissa transporter par les créatures de l’Autre Monde, oubliant peu à peu où il était…

Les élémentaux lâchèrent soudain ses mains et poursuivirent leur chemin, s’évanouissant dans l’étendue bleue. Serein, il se laissa descendre dans les profondeurs de la mer de l’Oubli. Et le temps s’arrêta.

Porté par la douceur de l’eau, il ressentit le calme et la sécurité du ventre d’une mère. En ce lieu où régnait un silence réconfortant, il éprouva un sentiment de paix total.

Il leva les yeux. Il était si profond que la lumière du soleil ne l’atteignait plus, mais les eaux étaient aussi claires qu’à la surface : des milliers d’éclats argentés brillaient tout autour de lui.

Comme c’est beau… pensa-t-il, émerveillé.

Emroth perdit peu à peu la mémoire. Faisant lentement un tour sur lui-même, il tenta de se rappeler les événements qui l’avaient mené jusque-là, mais il n’en gardait aucun souvenir. Il se sentit alors complètement en paix. Ni les regrets du passé ni les appréhensions du futur ne pouvaient le hanter. Seul existait l’instant présent.

Qui suis-je ? se demanda-t-il. Même cela, il l’avait oublié. Qui était-il, d’où venait-il, et surtout, où allait-il ? Il n’en savait rien.

Il s’abandonna complètement à la mer de l’Oubli, nageant au fond de l’eau, envahi par ce sentiment de sérénité où il ne ressentait plus ni la peur ni la tristesse. Les éclats de lumière s’amenuisèrent peu à peu et il ne resta autour de lui que la noirceur, immense, infinie…
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Avec ce déménagement , j'avais tout perdu : ma mère, mon enfance, ma virginité. Malgré cela, un feu intérieur commença à bruler en moi. je crus tout d'abord que c'était de la haine, mais il s'agissait plutôt d'une fureur de vivre. Un intarissable goût de la vie qui me donna l'espoir de sortir un jour de ce gouffre où je m'étais enlisée. Le gouffre de l'adolescence...
[Morgane]
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– Marie la douce, es-tu vraiment aussi douce qu’on le dit ? susurra Antoine.
Je sentis mes mains devenir moites et les battements de mon cœur s’accélérer. Mais j’essayai de garder la tête froide, pour ne pas que ce grand gaillard de la ville remarque qu’il pouvait me troubler avec quelques mots.
– Quand on m’a trouvée sur le rivage, l’eau salée de la mer avait rendu ma peau aussi douce que du satin.
– Moi, je vais t’appeler Marie la fière.
– Pourquoi « la fière » ?
– Parce que tout à l’heure, quand tu dansais et que tout le village te regardait, tu avais l’air d’une fille fière.
– Si j’ai l’air de quoi que ce soit, c’est sans le vouloir. Et les gens du village, je ne dansais pas pour eux.
– Non, tu dansais pour moi.
Je plongeai mon regard pétillant dans ses yeux sombres.
– C’est vraiment ce que tu penses, Antoine le faux pêcheur ?
– Je pense que tu dansais juste pour moi, précisa-t-il en pressant sa main contre ma cuisse.
Mon cœur fit un bond dans ma poitrine.
J’avais envie de sentir sa main remonter le long de ma cuisse... mais j’avais aussi envie de le gifler pour son arrogance ! Cela me fâchait qu’il ose prétendre que je dansais pour lui. Ou plutôt, cela me fâchait qu’il ait compris que je dansais pour lui. Je n’étais pas une morue que l’on pouvait pêcher, et je ne serais sûrement pas sa prise ce soir !
Tranquillement, il se pencha vers moi. Ses lèvres étaient tout près des miennes. « Comme ce serait bon de les goûter… » me dis-je, puis je me ressaisis. Au moment où Antoine tenta de me voler un baiser, je détournai la tête et descendis de la charrette.
– Si tu veux que je t’embrasse, il va falloir que tu gagnes plus qu’une simple course, Antoine Boileau ! soutins-je en montant les marches de la galerie.
– Ah oui ! Et qu’est-ce qu’il faut que je gagne ?
– Si tu ne le sais pas, tu ne me mérites pas ! lançai-je en entrant dans la maison.
– Salut, Marie la fière ! On se retrouvera bientôt…
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Amorgen et les autres grands-druides transmirent le message de Dechtiré à Conor Mac Ness, roi d’Ulster, et Maeve, reine du Connaught. Cette quête-ci étant plus importante que les stratégies militaires pour se disputer de nouveaux territoires, les souverains conclurent une trêve et choisirent leurs plus vaillants guerriers afin de ratisser les plaines, de fouiller les montagnes et de pénétrer au cœur des plus denses forêts de l’île Verte. Toutes les femmes au ventre un peu rond furent palpées et l’on surveilla de près tous les accouchements.
Vint le jour du solstice d’hiver. Amorgen désespérait de trouver l’enfant de la prophétie à temps. Aussi accueilla-t-il avec soulagement une vision où Dana lui montrait le repaire de la puissante Ess Enchen. Le Grand Druide connaissait la sorcière. Il savait qu’elle avait déjà comploté avec les Seigneurs Fomorés et était capable de duper les dieux. Ce ne pouvait être qu’elle, il en était persuadé.
Il guida le roi Conor et les chevaliers de la Branche rouge jusqu’au cœur ténébreux de la forêt aux Mille Voix. Ils se rapprochèrent de l’endroit où gisait la sorcière. La lune était pleine et ses rayons s’infiltraient entre les branches des arbres pour donner vie, l’espace d’une nuit, au pays des ombres. Les hautes herbes et les buissons frémissaient. Les brindilles qui jonchaient le sol craquaient parfois sous les pas lourds des chevaliers.
Alors que l’astre froid disparaissait derrière d’épais nuages, le Amorgen fit signe à Conor et à ses hommes. Mains crispées sur leurs épées, ceux-ci se dissimulèrent à l’abri des troncs épais.

Étendue sur sa longue cape pourpre brodée de fils d’argent, Ess Enchenn se tordait de douleur. Tantôt elle dépliait les jambes et arquait le dos, tantôt elle rapprochait ses genoux de sa poitrine palpitante. De grosses gouttes de sueur inondaient son front et ses tempes. Ses doigts labourèrent le sol en creusant de profonds sillons et elle hurla de douleur. Sa tromperie à Lug, elle la payait au prix fort. Ess sentait toute la puissance du petit être qui cherchait à sortir, quitte à lui déchiqueter les entrailles. Son corps de mortelle n’était pas fait pour donner vie à un demi-dieu.
Elle s’étendit sur le dos, les genoux repliés. Son visage se crispa comme si le souffle de la mort lui caressait l’échine. Elle laissa échapper un hurlement terrible, inhumain, qui se fit l’écho de cette incroyable naissance. Pour la première fois depuis la création des mondes, un enfant de la tribu de Dana voyait le jour dans le royaume des hommes.

Amorgen avait attendu cet instant pour donner l’ordre aux chevaliers de l’entourer. Il connaissait les secrets du sang. Il savait que la force des femmes résidait dans ce précieux liquide qui s’écoulait à chaque lune de leur matrice et leur conférait la faculté de donner la vie. Depuis leur arrivée, il guettait le moment où la sorcière serait trop affaiblie pour leur résister.
Sortant les épées de leurs fourreaux, les hommes créèrent un cercle de lames argentées autour d’Ess Enchenn. À la demande d’Amorgen, Conor Mac Ness récupéra le nouveau-né dans ses bras et s’éloigna. La sorcière gisait à terre, à demi consciente. Le Druide fit signe aux guerriers de ranger leurs armes et de se boucher les oreilles. Il leva les bras vers le ciel et récita une série d’incantations. Amorgen était l’un des rares mortels à posséder le pouvoir de transformer la matière. À force d’étudier l’anatomie et les lois de la création, il avait réussi à percer leurs secrets. Après des décennies de recherches et de pratique, il avait découvert que le son avait le pouvoir de transformer le corps, de modifier chaque cellule sans altérer l’esprit qui était l’essence même de l’être.
Il répéta les mêmes paroles encore et encore, des mots empreints d’une puissance magique. Il vit Ess Enchenn se métamorphoser lentement. Sa peau se désagrégea, ses organes se liquéfièrent, ses os se décomposèrent. Tout son corps se transforma en fines gouttelettes de sang qui s’élevèrent en un tourbillon écarlate et se déposèrent sur les milliers d’aiguilles d’un immense pin, le seul arbre qui saurait les garder, même durant les grands froids de l’hiver. Ainsi Amorgen emprisonna-t-il la maléfique Ess au cœur de la forêt aux Mille Voix.
Après que ses incantations eurent fait leur œuvre magique, le Grand Druide rejoignit Conor qui l’attendait à l’écart avec l’enfant-Lumière. Il enveloppa le bébé dans sa cape et rentra à Emain Macha, escorté par le roi et les chevaliers.

Les Seigneurs Fomorés, qui s’étaient bien gardés de révéler leur présence, maudirent ceux qui s’étaient emparés de leur enfant. Ils ne se fatiguèrent même pas à délivrer la sorcière. Elle ne leur était plus d’aucune utilité. En revanche, ils se jurèrent de récupérer sa fille quand celle-ci sortirait de l’enfance, prête à accomplir son destin…
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Tandis qu’il traversait la salle pleine à craquer, Amorgen entendit un brouhaha émaner de la foule : « À mort ! », « Tuons cette enfant maudite ! », « C’est une malédiction pour notre peuple ! » D’un geste de la main, le roi les fit taire.
Le Grand Druide leva Avana à bout de bras, afin que tous puissent voir son aura lumineuse. L’éclat qui brillait au fond de ses yeux bleus et sa peau d’où émanait la plus belle lueur qu’ils aient jamais vue semblèrent captiver les Ulates.
– Ce bébé est la fille de Lug, la fille du Soleil ! affirma Amorgen d’une voix solennelle. Elle appartient à la tribu de Dana ! Nous ne pouvons sacrifier un des leurs.
– Tu veux élever parmi nous une sorcière encore plus puissante qu’Ess Enchenn ! s’écria l’un des chevaliers.
– Une sorcière ? Vous croyez qu’elle deviendra une sorcière ? demanda le Druide en haussant le ton. Êtes-vous devins pour oser parler ainsi ? Qui parmi vous peut prétendre connaître l’avenir de cette enfant ? Qui sait ce qu’elle deviendra ?
– Toi, tu devrais le savoir ! N’es-tu pas devin, Amorgen ? Ne vois-tu pas son destin ? l’interpella une femme du fond de la salle.
– La nuit dernière, je me suis rendu dans la plaine avec elle. Je l’ai étendue dans l’herbe et j’ai scruté les nuages. J’ai observé la position des étoiles et j’ai écouté souffler le vent. J’ai interrogé la nature et les astres toute la nuit pour connaître l’avenir de cette enfant. Je n’ai rien vu, rien senti, rien entendu. Même la nature ne connaît pas son destin. Je vous l’ai dit : ce n’est pas une mortelle comme nous.
En racontant cela, Amorgen mentait aux siens. En fait, il avait eu la même vision que de nombreuses années auparavant : cette enfant, une fois grande, pourrait aider les Seigneurs Fomorés à prendre le contrôle de la terre d’Erin. Il ne voulait pas révéler cette prophétie à son peuple qui risquait de la mettre à mort sans tenir compte de ses conseils. Ce qui serait une terrible erreur puisqu’elle devait aussi être une bénédiction pour les peuples de l’île Verte, celle qui les sauverait du joug des Ténèbres. Il ne comprenait pas comment l’enfant-Lumière pouvait être à la fois une malédiction et une grâce, mais il avait foi en ses visions.
– Tu l’as dit, Amorgen, elle n’est pas comme nous ! s’exclama une femme hargneuse. Qui sait si sa seule présence n’attirera pas sur nous les forces des Ténèbres ?
– Cessez donc d’avoir peur de tout. Ce n’est qu’un bébé… intervint Conor Mac Ness en se levant.
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Lydia écoutait Viviane avec attention. Ce que ses ravisseurs lui expliquaient était véridique : les réactions mentales et émotionnelles ainsi que les comportements pouvaient être provoqués, modifiés ou inhibés chez l’homme par la stimulation de structures cérébrales spécifiques. Avec la micropuce, les Serkys avaient réussi à imposer une dictature mondiale et à faire disparaître la liberté de pensée. Et ils avaient créé un nouvel homme : l’homme-machine.
– Les mégacités sont des entrepôts d’esclaves humains privés de tout libre arbitre, déclara Liam sur un ton grave.
Lydia ne partageait pas encore la ferveur de ses ravisseurs et leur besoin d’opposer une résistance au Gouvernement planétaire, mais elle était fort intriguée par les propos que tenaient ces rebelles. Elle avait souvent pressenti que la cité était une sorte de prison, mais elle n’avait jamais osé aller jusqu’au bout de cette intuition, par peur des conclusions qu’elle aurait pu en tirer.
"Et si on était réellement emprisonnés ?..."
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Sur le chemin du retour, je marchais sans m'apercevoir que je pressais le pas. Rosalie venait de me révéler que Lisette était une croqueuse d'hommes pathologique et que même à Gaspé, il existait des tripots, des maisons de jeux où les hommes pouvaient perdre tout ce qu'ils possédaient. Et moi qui étais revenue dans mon village natal pour trouver la tranquillité d'esprit !

"Nous aurions tout aussi bien pu rester à Québec, pensai-je. Antoine aurait continué à fréquenter les bordels et à jouer l'argent de notre ménage, mais moi, j'aurais eu tout le confort de la ville. Je ne marcherais pas en bottine trouée sur ce chemin de poussière, mais j'aurais de vraies chaussures et rentrerais chez moi sur un trottoir pavé!

Décidément, le sort s'acharne sur mon couple....."
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e qui devait n'être que provisoire devint notre quotidien. Les trois années qui suivirent furent rythmées par notre travail : les allées et venues d'Antoine marquaient les grandes mesures de notre vie, ponctuées par mes lessives et livraisons. Bien qu'il fût travaillant et courageux, je devinais sans peine qu'Antoine avait eu beaucoup de difficulté à s'adapter aux conditions de travail en forêt. Il n'en parlait jamais de lui-même et lorsque les enfants lui posaient des questions, il exagérait, mettant en scène la vie au camp afin de les faire rire. Ses histoires étaient peuplées de loups, d'originaux, d'arbres immenses, de trappeurs et de coups de fusil. Je ne posais pas de questions quand il rentrait, mais lui offrais une maison accueillante où se remettre de la rudesse de son quotidien. En été, sa peau était si piquée par les insectes que je devais le badigeonner de teinture d'iode pour éviter les infections. Son visage et ses mains se marquèrent quand même de plusieurs cicatrices.
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L'hiver 1914 fit son apparition très tôt. La neige arriva dès novembre, ce qui ne m'étonna pas : j'avais remarqué que la peau des oignons était plus épaisse qu'à l'habitude.

Habituellement, quand l'automne arrivait, Antoine avait suffisamment avancé son travail pour s'absenter moins souvent, mais, cette année-là, il resta au camp des bûcherons. Il ne rentra quasiment pas et lorsque cela arrivait, je sentis plusieurs fois émaner de lui des vapeurs d'alcool. Je connaissais tellement bien cette odeur que je remarquais aussitôt l'air de fatigue et de gêne qui l'accompagnait.

Je finis un jour par aborder le sujet.

- Tu travailles toujours beaucoup, mais les semaines passées, nous avons eu moins d'argent.....Comment cela se fait-il, Antoine ?

Il fut d'abord surpris que je m'adresse à lui aussi directement et regarda par la fenêtre en m'écoutant. Cela dut être bien pratique, car il resta ainsi pendant un long moment. Si bien que je renonçai à toute explication et le laissai à sa contemplation pour retourner à mes occupations.

Son silence valait mille mots : il ne nous avait pas rapporté sa paye au complet. Et je n'eus pas à réfléchir beaucoup pour comprendre qu'il en avait bu une bonne partie.
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Antoine lança son grand sac au fond de la charrette, puis il me tendit la main pour m’aider à descendre. Lorsque nos doigts se touchèrent, j’en fus troublée. Et je le regardai droit dans les yeux.
Je vis le remous.
Le remous des vagues qui déferlent contre la falaise.
Les vagues qui fouettent ma peau.
J’imaginai ses mains se posant sur mes épaules, descendant dans mon dos, effleurant mes fesses… puis remontant sur ma nuque et détachant le ruban de mes cheveux...
Je mis le pied sur le sol et lâchai sa main. Je sentis alors mon visage qui avait rougi sous une bouffée de chaleur.
– Marie, je te présente mon cousin Antoine, le fils de Nicéphore Boileau, dit Charles, qui n’avait rien remarqué. C'est chez lui que j'ai habité durant mes études à Québec. Comme j'ai profité de leur hospitalité durant des années, il s'est dit qu'il pouvait bien profiter de la nôtre, en venant passer ses vacances au Cap.
– Belle prise, mon Charles ! osa Antoine en me fixant dans les yeux.
Je le fusillai du regard.
– Voyons, Antoine ! s’étonna Charles. Tu sais bien que je suis fiancé à Joséphine, qui est toujours à Québec. La belle prise que tu tiens, c’est la Marie du Carol de la dernière terre.
Charles et Antoine s’amusaient bien en parlant de moi comme si j’étais la dernière morue qu’ils venaient de pêcher. Je les laissai faire sans répliquer ; les garçons aimaient bien s’imaginer que les filles étaient des poissons qui n’attendaient que leur appétissant hameçon pour mordre… Ça leur donnait le goût d’aller à la pêche…
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Bien à l’abri au cœur de la forêt, les Seigneurs Fomorés enveloppèrent Ess Enchenn dans un linceul et la placèrent au centre d’un cercle de menhirs. Jour et nuit, ils scandèrent d’obscures incantations, canalisant vers elle les forces des Ténèbres. La puissante sorcière faisait pénétrer ces énergies dans toutes les fibres de son corps, modifiant ainsi lentement son apparence.
Au matin du troisième jour, tandis que les premières lueurs du soleil coloraient le ciel, les Seigneurs Fomorés sortirent de leur longue transe. Ils observèrent attentivement le corps d’Ess Enchenn. Les minutes passèrent… Nul ne bougea ni ne parla pour ne pas disperser les forces en présence. Ils attendirent que les Ténèbres accomplissent leur travail.
Soudain, une main blanche et fine se fraya un chemin entre les plis du tissu souillé de sang. Suivirent une autre main, une tête, des épaules et une poitrine magnifique. La sorcière sortit de son linceul et se releva avec la grâce d’une jeune fille. Elle examina son corps d’un air satisfait. Elle avait l’apparence de Macha, la déesse de la fertilité.
– Je suis prête, déclara-t-elle, en leur adressant un sourire malicieux.
Ils la vêtirent d’une longue tunique violette et couvrirent ses épaules d’un manteau vert serti d’émeraudes.
– Je reviendrai avec, dans mes entrailles, l’enfant qui nous permettra de soumettre la terre d’Erin à notre domination ! promit-elle en quittant lentement la clairière.
Le soleil, au zénith, faisait briller les émeraudes de son manteau. Elle disparut dans les bois en sentant sur elle les regards des créatures de l’En-deçà. Quand les derniers éclats de ses pierres précieuses s’évanouirent, les Seigneurs Fomorés retournèrent dans les profondeurs des Ténèbres pour attendre la naissance de l’enfant.
En ce jour de l’équinoxe du printemps, Ess Enchenn, qui connaissait les lieux sacrés menant au royaume des Tuatha de Danann, le peuple des dieux, entreprit la traversée du lac Neagh… Elle avait déjà choisi sa proie : Lug, le dieu-Lumière.
Le grand Lug, dieu du soleil, de la lumière et du feu, était aussi le petit-fils de Balor, ancien Seigneur Fomoré. Alors que sa barque la portait sur les eaux limpides, la sorcière révisait son plan machiavélique. Le dieu-Lumière portait en lui l’empreinte des Ténèbres. Il engendrerait un enfant qui sera tiraillé entre l’Ombre et la Lumière…
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Sur le tertre d’Arberth, un monticule sacré de la forêt aux Mille Voix, se trouvait un cromlech formé de douze menhirs dressés en cercle sous lequel passait un puissant courant tellurique. Pas même les druides les plus érudits ne savaient qui avait érigé ces pierres qui, selon la légende, dataient d’au moins trois mille ans.
À l’aurore du septième matin suivant la naissance de l’enfant, une procession avec, en tête, le Grand Druide se rendit au cromlech qui servait aux cérémonies des Ulates, ainsi qu’aux réunions druidiques secrètes.
C’était le début de la saison froide et une fine couche de givre recouvrait le sol. Tandis que les Ulates formaient un demi-cercle devant Amorgen, les rayons du soleil levant firent briller les hautes herbes de la clairière, conférant à ce lieu un aspect magique.
Le silence se fit dans l’assemblée et l’on n’entendit plus que le chant des oiseaux qui célébraient de leurs trilles. Au moment où le Druide leva la petite Avana vers le ciel pour la présenter aux dieux qui observaient ce baptême, les mortels en présence ressentirent un frisson inexplicable. Ils participaient à un événement dont l’importance dépassait leur entendement.
Sans les voir, ils étaient entourés de représentants des autres mondes. La tribu de Dana offrit sa protection à l’enfant par le biais de Dechtiré qui lui caressa le front du bout de son aile blanche. Les Seigneurs Fomorés, quant à eux, dirigèrent vers elle les puissances des Ténèbres pour la préparer à sa mission future. Les druides, qui avaient développé leur vision du monde parallèle, aperçurent aussi des gnomes et des elfes, intrigués par l’enfant à l’aura lumineuse. Même dans la solitude, au sommet des plus hautes montagnes ou dans les entrailles du monde, Avana ne serait jamais seule. Et ce serait avec beaucoup d’intérêt que tous la regarderaient grandir.

Durant les années qui suivirent, Amorgen ne se déplaça jamais sans Avana. Il l’entourait d’un long morceau de tissu et la portait en écharpe. Ainsi continua-t-il à exercer ses fonctions de Grand Druide, de prêtre, de guérisseur et de juge, traversant la contrée en sentant contre sa poitrine la chaleur du bambin. Il s’occupa d’elle avec autant de soin qu’une nourrice, lui donnant à manger la meilleure nourriture possible, lui confectionnant des vêtements chauds pour la saison morte, se souciant de répondre à tous ses besoins.
Au fil des ans, son amour envers elle se développa et il en vint à la considérer comme sa propre fille. La peau d’Avana perdit l’éclat particulier qu’elle avait à sa naissance et, excepté pour cette petite flamme qui brillait au fond de ses prunelles, elle ressemblait en tout point à une mortelle.
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Je ne traînai pas dans la rue bien longtemps. J’étais trop intelligente pour cela. Je me fis des copains plus âgés, qui sortaient dans les boîtes de nuit. Je me teignis les cheveux en rose et je me perçai le nombril.
Je sortis de la pénombre et commençai à danser sous les feux des projecteurs. Adolescente à la découverte de sa sexualité, je partais faire la tournée des discothèques les plus branchées. Avec mes fausses cartes d’identité, je rentrais dans tous les clubs, où la drogue se distribuait comme des bonbons. Des jaunes, des bleus, des rouges, des verts…
Incroyable comment ces petites pilules pouvaient te faire oublier le con qui t’avait plantée là ou la baffe que ton vieux t’avait donnée…
La nuit venue, nous endormions notre conscience, et nos enfers personnels devenaient un feu de joie autour duquel nous dansions. La nuit venue, tous mes amis se croyaient heureux. Moi, au moins, je savais que je ne l’étais pas. J’étais vide en dedans.
Comment peut-on se sentir vide à quinze ans, alors que la vie a encore tant à nous offrir ?
C’est qu’on est vulnérable, on n’a pas encore fabriqué notre bouclier, forgé notre carapace. Les loups rôdent, les vautours guettent, et si l’on n’est pas vigilant, on tombe entre leurs griffes…
J’étais maintenant une dure à cuire, mais franchement, je n’y croyais pas du tout. Derrière cette belle jeune femme se cachait une petite fille rêveuse qui dormait encore avec Monsieur l’Ourson.

Papa, je ne voulais que dans tes bras être serrée, mais tu avais les bras cassés…

Mon père n’avait rien contre le fait que je sorte dans les discothèques, même à mon âge. Il s’en balançait que je ne rentre pas coucher, il n’en dormait que mieux, ce con, sur ses deux oreilles bien bouchées. Pour lui, j’étais une petite pute qui n’avait rien de mieux à faire que de courir après les hommes. Alors, c’est ce que je fis.
Je me mis à découcher... et je commençai à coucher. À quinze ans, j’étais déjà une grande fille...

Avec ce déménagement, j’avais tout perdu : ma mère, mon enfance, ma virginité. Malgré cela, un feu intérieur commença à brûler en moi. Je crus tout d’abord que c’était de la haine, mais il s’agissait plutôt d’une fureur de vivre. Un intarissable goût de la vie qui me donna l’espoir de sortir un jour de ce gouffre où je m’étais enlisée. Le gouffre de l’adolescence...

Ma mère, pendant que je mendiais de l’affection, travaillait dans un pays africain en voie de développement à un projet d’urbanisation. Je l’admirais beaucoup, et je lui pardonnai d’être partie.
C’était mon rêve aussi.
Partir.
Comme un oiseau tropical espérant retourner dans sa forêt, je rêvais de retourner quelque part, comme si je n’étais pas vraiment née ici.
Après un an en terre africaine, où elle menait une vie excitante et pleinement satisfaisante, elle décida de s’y établir. Nous entretînmes une correspondance de cinq ou six lettres par année. Elle devint pour moi davantage une amie qu’une mère. Lorsque la vie pesait de tout son poids sur mes frêles épaules, c’était elle qui me donnait de l’espoir. Je me disais que moi aussi un jour je partirais.
Je sentis monter en moi cette irrépressible envie de partir. L’envie de tout lâcher pour poursuivre un rêve d’aventures, du canal de Suez jusqu’à la Terre de Feu, traversant l’Atlantique pour longer les côtes de l’Afrique jusqu’au delta du Nil. Le désir d’une longue fuite sur les immuables chemins du monde…
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L’espace d’un instant, j’imaginai que nous partions vivre ailleurs, loin des commérages et des regards accusateurs, quittant le Cap pour toujours. Que nous partions fouler de notre jeunesse pleine d’espoir le Vieux Continent, la terre de France, la patrie de Victor Hugo, de Balzac, de Baudelaire… Cette patrie que j’avais connue à travers les livres, à travers les vers, et qui m’attirait tant
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L’amour du Seigneur était ce qui me faisait préférer la lumière à l’obscurité et accepter dans mon cœur même ceux qui me voulaient du mal. C’était ce qui me gardait de la haine, de la colère, de la jalousie et de la rancune ; ce qui me faisait apprécier la beauté des fleurs, des arbres et de la mer. C’était ce qui me poussait à vouloir devenir meilleure, à ouvrir mes ailes pour monter toujours plus haut vers le ciel.
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Un pays inhabité, ça a beaucoup de charme. C’est pur, telle l’eau coulant d’une source. C’est tout lisse et doux, puisque les hommes ne se le sont pas encore approprié. Ils n’ont pas déraciné ses arbres ni soulevé ses pierres. Ils ne l’ont pas labouré et ensemencé. Ils n’ont pas enfoncé leurs grosses mains dans sa terre vierge. Ils ne l’ont pas encore recouvert de leurs maisons et de leurs chemins. Un pays inhabité est nu, tout prêt à être caressé. Un pays colonisé, c’est une terre que l’on fait sienne en la rendant fertile.
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Annie Lavigne
Tu es paralysé par la peur de ne pas réussir, alors que tu n’as même pas encore essayé. C’est cette crainte de l’échec qui empêche bien des êtres d’accomplir leur destinée, car l’homme préfère demeurer dans le confort de l’inaction que de tenter l’impossible et d’échouer. Ce qu’il ignore, c’est que rien n’est impossible… à celui qui sait que tout est possible. 
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