AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Arnaud Nebbache (58)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Brancusi contre États-Unis

Ahh, Brancusi.

Un des grands piliers de la sculpture moderne. Un de ceux dont on peut dire il y a eu un avant et un après.

Si je connais ses oeuvres majeures et quelques anecdotes et grandes lignes sur sa vie et sa carrière, je dois avouer que cette histoire judiciaire n'avait pas marqué plus que ça mon esprit.

Mais ce n'est pas vraiment ça qui m'a attirée de prime abord avec cette BD mais l'incroyable technique picturale que l'on peut déjà apprécier sur la couverture mais qui est assez représentative des planches à l'intérieur. Les trais sont quasiment inexistants et c'est les aplats de couleurs eux même qui font resortir les formes, les personnages et les décors. Cette technique picturale est très importante et rappelle aux connaisseurs la technique de la lithographie qui sonne, en plus, un certains velouté, une certaine texture à l'aplat.

Les visages et attitudes des personnages, souvent minimalistes et un peu caricaturaux, n'en sont pas moins expressifs, parfaitement rendus et graphiquement très efficaces.

Vous l'avez compris, j'ai adoré le dessin.

Mais revenons à l'histoire.

Une des oeuvres majeures de l'artiste - fruit de très nombreuses années de travail, de réflexion et d'expérimentations diverses - et l'une de ses oeuvres les plus épurées , appelée "l'oiseau dans l'espace", est bloquée par les douanes. En effet, pour être affranchie de taxes, il doit s'agir d'une oeuvre originale, sans objet pratique, réalisée par un sculpteur professionnel. Personne ne conteste l'inutilité fonctionnelle de cette pièce, le qualificatif d'oeuvre unique pose problème. Dans le cadre d'une pièce aussi stylisée, comment être certain qu'il n'en existe qu'une seule et qu'elle a bien été réalisée par Brancusi lui-même?

Bref, c'est assurément la question de la définition même d'oeuvre d'art et de démarche artistique qui est posée. Une question qui est passionnante et dont la réponse est toujours le lieu de discussions entre amateurs d'art et de néophytes. Tout comme la différence entre artisans et artistes et la frontière, parfois trouble, qui les sépare.

Ce sont des sujets qui me touchent, qui m'intéressent et m'interpellent, et je dois dire que j'ai vraiment adoré cette lecture.

De plus, cette BD représente une incroyable galerie de portraits : Fernand Léger, Alexander Calder, Peggy Guggenheim, Marcel Duchamp, Man Ray...tous ces grands noms se succèdent le temps d'une réflexion, d'une figuration ou occupent un rôle plus important...un régal pour les amateurs.
Commenter  J’apprécie          161
Brancusi contre États-Unis

Qu'est-ce qu'une oeuvre d'art ? Quels en sont les caractères distinctifs par rapport à un objet manufacturé ? Qui peut en juger ? Autant de questions soulevées lors d'un procès ubuesque qui a opposé le sculpteur Brâncuși aux douanes américaines.



En 1926, Constantin Brâncuși est un artiste moderne reconnu qui fréquente le groupe des surréalistes. Son ami Marcel Duchamp l'encourage à présenter une vingtaine de ses oeuvres aux Etats-Unis. L'exposition se tiendra à la Brummer Gallery de New York, mais malheureusement, due à l'ignorance des douaniers américains, une polémique va éclater. Une sculpture, vraisemblablement trop avant-gardiste, est considérée comme un objet utilitaire, un produit industriel susceptible d'être taxé. Il s'agit de L'Oiseau dans l'espace.



Condamnation de l'art abstrait, de la création artistique jugée dérangeante, nouvelle querelle des anciens et des modernes. Ce roman graphique, le premier d'Arnaud Nebbache, fait revivre le procès intenté à Brancusi afin qu'il prouve que son "oiseau" est bien une oeuvre d'art, même s'il ne possède ni tête, ni bec, ni plumes, ni pattes...



Un procès où se succèdent à la barre des artistes renommés, des avocats hargneux, des critiques parfois incompétents, des historiens, des collectionneurs et des marchands d'art. L'ambiance est dramatique, presque tragi-comique. Préjugés et méconnaissance se mêlent aux considérations artistiques. Finalement Brancusi aura gain de cause.



Pour ma part, j'apprécie depuis longtemps les oeuvres de Brancusi, si pures, si aériennes et j'aime de temps en temps revisiter son atelier tout proche du Centre Pompidou à Paris. Par contre, j'ignorais tout du procès qui lui avait été intenté aux Etats-Unis. Cette BD est en ce sens très instructive. Elle est bien conçue et l'auteur alterne astucieusement les couleurs pour mieux différencier les époques et les lieux, celui du procès à New York et ceux du quotidien de Brancusi. Un petit bémol toutefois, autant la retranscription de ce procès m'a intéressée et séduite, autant les graphismes ne m'ont pas enthousiasmée. Je n'ai pas réussi à adhérer à ces aplats de couleurs, aux contrastes assez ternes et aux visages très stylisés. Ce n'est que mon ressenti personnel.



#Challenge Riquiqui 2024

Commenter  J’apprécie          240
Brancusi contre États-Unis

Un épisode méconnu de la vie du sculpteur Brancusi.

Le procès qu'il a intenté à l'État américain pour faire reconnaître ses sculptures en tant qu'oeuvres d'art et non comme éléments industriels.

Une réflexion sur l'art, toujours intéressante, de même que les conclusions du juge.
Commenter  J’apprécie          40
Une journée d'apicultrice

Enorme coup de cœur pour ce docu-fiction qui raconte la trépidante journée d'une apicultrice. Chaque page de gauche fonctionne comme un imagier, centré sur l'apicultrice, la ruche, les abeilles, les arbres mellifères, les prédateurs de la ruche, etc. Celle de droite raconte cette folle journée où l'apicultrice découvre que les abeilles sont parties de ses ruches. Mais où est donc l'essaim ? Lorsqu'elle le retrouve (avec l'aide des enfants), c'est pour découvrir qu'il s'est placé juste à côté d'un champ, dans lequel un tracteur s'apprête à déverser des pesticides. Le rythme s'accélère alors et comme un bon thriller, nous voilà soudain aux côtés de l'apicultrice qui œuvre pour sauver l'essaim. Super récit, ouvrage original !

Commenter  J’apprécie          00
Brancusi contre États-Unis

C'est ma bibliothécaire qui m'a conseillé ce roman graphique et je la remercie.



Le sujet est très intéressant mais je n'ai adhéré ni aux dessins, ni aux couleurs. Ce n'est que mon avis, d'autant plus que je suis novice en lecture de roman graphique.



J'ai appris beaucoup de choses sur Brancusi et j'ai eu plaisir à croiser Rodin, avec qui il a travaillé quelques semaines, Erik Satie, Man Ray ou encore Monet et ses cathédrales.



C'est sa sculpture "L'oiseau dans l'espace" qui est au centre de ce procès entre Brancusi et les États Unis. Il ne comprend pas ce qu'on lui reproche et pour cause : "Ils cherchent à prouver que je suis un artisan et non un artiste. Pourquoi l'art doit-il rivaliser avec l'industrie?"



Au final, ses amis et son avocat résument bien le coeur du problème : "Une poignée de frileux effrayés par la modernité. Ils ont peur de l'audace et veulent la punir".



Si vous aimez l'histoire de l'art, vous prendrez plaisir à lire ce roman graphique.
Commenter  J’apprécie          170
Brancusi contre États-Unis

Je suis extrêmement surprise par cette BD. J’adore cette histoire, donc le livre m’intriguait beaucoup mais je n’étais pas transportée par le dessin. Je l’ai pris et repose plusieurs fois… et je ne suis lancée.

On suit Brancusi dont l’œuvre est taxée comme une œuvre industrielle et qui a décidé de ne pas se laisser faire.

Une vraie réflexion sur ce qu’est une œuvre et ce qu’est de l’art
Commenter  J’apprécie          10
Brancusi contre États-Unis

Avec élégance, impertinence et humour, Arnaud Nebbache tire de ce procès surréaliste une belle réflexion sur l'art et la démarche artistique.
Lien : https://cnlj.bnf.fr/fr/conte..
Commenter  J’apprécie          00
Brancusi contre États-Unis

Je ne connaissais pas vraiment Bracusi, mais grâce à cette BD, je me sens un peu plus "experte" dans le domaine de l'art, mais j'ai encore beaucoup à apprendre.

Ce procès Etats-Unis/Bracusi qui ne veut pas payer les droits de douane de sa sculpture appelée "Oiseau" est vraiment très intéressant et nous montre les prémices de l'art contemporain. Il a fallut beaucoup de d'entêtement des peintres, sculpteurs... qui ne voulaient pas se laisser enfermer dans le moule imposé par les textes régissant le monde de l'art.

C'est vraiment très intéressant.

Seul bémol me concernant, je n'ai pas vraiment aimé les dessins que j'ai trouvé assez agressifs.
Commenter  J’apprécie          20
Brancusi contre États-Unis

Brancusi est un sculpteur célèbre, un des premiers “abstraits” de l’Art Moderne. Cet album raconte une anecdote particulière de sa vie : Il se rend aux États-Unis pour exposer dans une galerie new-yorkaise, une des ses sculptures est arrêtée à la douane pour faire payer la taxe sur les objets industriels manufacturés, Brancusi portera plainte, le procès devra alors faire valoir ou pas la valeur d’œuvre d’art à l’objet en question.



Ce que j’ai aimé, c’est que les auteurs n’ont jamais orienté leur histoire vers le sensationnel et la provocation, ni vers le fait divers, mais au contraire, ils ne parlent que d’Art moderne, de perception, d’interprétation, d’évolution, de création. Pas de débats houleux au tribunal, au contraire, ces débats sont un peu ridiculisés, mais sont racontés avec une apparente neutralité. On suit alors le sculpteur dans son atelier, avec sa compagne, ou dans ses rencontres diverses, le procès semble loin pour lui, de l’autre côté de l’Atlantique, il n’y assiste d’ailleurs pas, c’est Marcel Duchamp qui le suivra pour témoigner de son déroulé. Brancusi ne le vit à distance que comme un sujet d'angoisses et de doutes.



Le dessin est travaillé en surface de couleurs, en aplats dilués, il n’est fait que de taches de couleurs naturelles posées délicatement sur le blanc très présent, comme une vieille sérigraphie, sur un papier qui semble absorber l’encre en profondeur. Les formes sont jetées sur le papier, et elle prennent vie avec une belle élégance, dévoilant le mouvement l’élancement des formes ou leur étalement plus pesant, le dessin lui-même pose les enjeux de l’Art Moderne : confrontation des formes, réflexion de la lumière, la naissance de l’abstraction, la prédominance de l’impression, de l’émotion sur le réalisme naturaliste.

Il y a peu d’action dans cette histoire, quelques faits se croisent avec quelques réflexions et interrogations, comme se déroule en réalité la vie de ces artistes à cette époque, pas de lyrisme tapageur qui dénaturerait l’art de Brancusi qui en est dépourvu (le mouvement minimaliste est d’ailleurs son héritier).

Le fait divers n’est alors qu’un prétexte pour poser des questions essentielles à l’interprétation d’une œuvre d’Art : Quels sont les critères pour juger de la notion d'œuvre d'art ? Cette bande dessinée nous apporte un point de vue historique avec cette évolution radicale que l’Art Moderne a apportée à cette époque, et d’un point de vue plus global sur notre interprétation de toutes œuvres d’Art, celle de tout public en 2023.



Voilà donc un album très intelligent, une biographie comme j’aime en trouver, qui raconte les doutes, les interrogations et qui nous met, nous lecteur, devant l’œuvre de l’artiste en question, et devant l’Art en général.
Commenter  J’apprécie          280
Brancusi contre États-Unis

Voici mon retour de lecture sur la bande dessinée Brancusi contre États-Unis.

1927, un procès ubuesque se tient à New York.

Avocats, témoins, experts et artistes débattent pour savoir si le travail de Constantin Brancusi doit être considéré comme de l'art.


En écho, à Paris, le sculpteur et ses contemporains doutent. Le travail de Brancusi est-il à la hauteur face au génie de l'artisanat et de l'industrie ?

Le nouveau continent a-t-il les épaules pour jouer le rôle central dans l'art moderne que l'histoire lui impose désormais ?

Brancusi contre États-Unis est une bande dessinée qui m'a réellement fait découvrir cet artiste. Je le connaissais de nom mais j'ignorais par exemple qu'un tel procès avait existé. J'ai pris plaisir à lire cette bande dessinée d'une traite. C'est fascinant de suivre le travail de cet artiste, le fait que son travail soit si contreversé.

Brancusi était un sculpteur roumain, naturalitsé français. Ses œuvres fûrent très contreversés aux Etats-Unirs car elles étaient surréalistes. Ses oiseaux ne ressemblaient pas forcément à des oiseaux. Notamment son « oiseau dans l'espace » qui a été confisqué par les douanes, pensant que c'était du matériel industriel qui lui est fortement taxé. Ce qui a donné lieu à ce procès.

L'auteur nous présente la vie de Brancusi, ce qui le préoccupe et le procès. On sent qu'il s'est énormément documenté, et que cette bande dessinée lui tient à cœur.

Je n'ai pas totalement adhéré avec le graphisme, mais chacun ses goûts et sur ce point là mon ressenti est vraiment personnel.

Brancusi contre États-Unis est une bande dessinée intéressante, que j'ai apprécié et note quatre étoiles.
Commenter  J’apprécie          290
Brancusi contre États-Unis

J'ai beaucoup appris dans cette BD racontant le procès en 1927 opposant le sculpteur Brancusi contre les Etats-Unis au sujet d'une sculpture taxée par les douanes à son arrivée sur le sol américain au titre d'objet métallique manufacturé et non d’œuvre d'art. Cette BD raconte ce procès complétement ubuesque (les débats sont parfois ahurissants) mais aussi la vie de Brancusi, ses amis, son processus de création. Le choix de l'auteur pour les dessins et la technique utilisée m'a un peu surpris au début de ma lecture mais je trouve que finalement cela s'accorde bien avec le récit et le thème. J'ai un moins apprécié le dessin des visages.
Commenter  J’apprécie          50
Brancusi contre États-Unis

Ignare que je suis, je ne connaissais pas Brancusi. Il a fallu que je le découvre avec cette BD. Pour rappel, il s'agit d'un sculpteur roumain naturalisé français qui a été l'un des plus influent au début du XXème siècle. Il a notamment poussé l'abstraction sculpturale jusqu'à un stade jamais atteint dans la tradition moderniste. Bref, un Picasso dans la sculpture.



Il a notamment travaillé durant sa jeunesse dans l'atelier d'Auguste Rodin (que je connais un peu mieux). Il le quitte assez rapidement jugeant qu'il ne pousse tien à côté des grands arbres. C'est bien dit car parfois, il faut s'envoler de ses propres ailes et non rester dans l'ombre d'un maître.



Un épisode marquant de sa vie a été une affaire judiciaire l'opposant aux Etats-Unis. En effet, les américains ne comprenant rien à l'art ont saisi une œuvre en métal à la douane en pensant que c'était du matériel industriel soumis à de fortes taxations.



L’œuvre en question est intitulée « oiseau dans l'espace » mais cela ressemble à une hélice de bateau. Oui, c'est du surréalisme et de l'abstraction ! Il faut imaginer que c'est un oiseau en train de s'envoler.



Ce procès est intéressant car il pose les questions suivantes : qu'est-ce qu'une œuvre d'art ? Quels sont les critères pour juger ? Et surtout qui est juge en la matière ? Alors, objet manufacturé dont on ignore l'utilité ou œuvre d'art à exposer dans les plus grands musées du monde ?



On aura droit à une succession de visions antagonistes d'expert en art moderne, collectionneurs et marchands qui rendent la situation assez cocasse et d'une stupidité absolue à mon humble avis. De nos jours, cela ne pourrait plus se reproduire. Il faut préciser que cela se situe en 1927 à une époque où l'ouverture d'esprit sur les choses d'art n'était sans doute pas aussi élaborée.



Ce procès s'est quand même terminé favorablement pour l'artiste. On assiste à la reconnaissance d'une nouvelle conception de l'art et son intégration dans le domaine juridique. Le droit se heurte à la définition de l'art et à son évolution. En l'occurrence, on voit bien que les frontières de l'art sont élargies pour intégrer une nouvelle conception de l'art qui cherche à représenter des idées abstraites plutôt qu'imiter la nature. Il est question de liberté dans la création. Il ne faut pas punir l'audace !



J'ai apprécié cette lecture non pas par ma connaissance de l'art mais en ma qualité de juriste. Cela apporte toujours quelque chose.

Commenter  J’apprécie          572
La Lapindicite

Dans cet album avec un titre pareil on pourrait s’attendre à une explication de l’opération médicale, si il est certes question de maux de ventre: les douleurs proviennent d’un racket subit par le jeune Ignace. Chaque jour à l’école maternelle un grand lui réclame son goûter. Le sujet est grave, le harcèlement scolaire est abordé pour les plus jeunes part un vocabulaire adapté et par des moments de tendresse bondés de mots rigolos tels glouglouter, bidou pour délester cette dure épreuve. Album à mettre en toutes les mains et qui renforcera le dialogue entre l’enfant et tout son environnement proche (parents, maîtresse, Atsem, médecin).
Commenter  J’apprécie          10
Brancusi contre États-Unis

En refermant cette BD je me suis souvenue de ce reproche, à peine voilé, de Constantin Brancusi, à ses contemporains :



« Vous ne pouvez, hélas, pas encore vous rendre compte [de la valeur] de ce que je vous laisse » (Nici nu vă puteți încă da seama de ceea ce vă las eu).



Dans ce plaidoyer pour la liberté d'expression artistique, Arnaud Nebbache se montre très habile à condenser la vie de Brancusi, les préoccupations de son époque et le procès historique. Il s'est très bien documenté et a opté pour un graphisme à mon sens très original, en tout cas très personnel.



Comme il le déclare au journal L'Express, il utilise « une technique numérique pouvant s'apparenter au pochoir et à la sérigraphie par les quatre aplats de couleurs choisis pour guider chaque séquence du récit ».



Le dessinateur précise encore : « Pour rendre le procès moins froid, j'ai pris la liberté de le faire vivre à travers les yeux et la main de Marcel Duchamp ; on sait qu'il joua un rôle essentiel de médiateur mais rien n'indique qu'il a assisté à l'intégralité des débats ou en a réalisé des croquis ».



J'ai beaucoup apprécié le début de la BD, l'entrée en matière, avec ses renvois au passé de Brancusi : page 11, une belle référence, dans la bouche d'Edward Steinchen (« Dis surtout qu'il te fait de l'ombre ! ») à la célèbre phrase prononcée par Brancusi au sujet de son ancien maître Auguste Rodin : « Il ne pousse rien sous les grands arbres » et pages 23-25, la présence d'une autre artiste d'origine roumaine, Lizica Codréano.



Un véritable coup de coeur pour cette BD, que j'ai un peu boudée au début, à cause de son graphisme, incompréhensible lorsqu'on juge sur un simple échantillon de quelques cases.



Comme la plupart d'entre vous le savent, je suis aussi d'origine roumaine et j'aime établir des liens culturels. Cette fois-ci je vais simplement citer Serge Fauchereau, qui écrit dans son livre Sur les pas de Brancusi (p. 57) :



« Toute sa vie Brancusi a sculpté des oiseaux et tous dérivent plastiquement de ce premier oiseau Măistra (1911) par l'intermédiaire des « Oiseaux en vol » jusqu'au « Grand Coq » auquel il travaillait encore à la veille de sa mort. […] La Măiastra à laquelle renvoie Brancusi est un oiseau particulier des contes et légendes de Roumanie […]. « La Măiastra ou l'oiseau-fée » version autrefois recueillie par Petre Ispirescu est peut-être la plus connue : un empereur a fait édifier un magnifique monastère mais malheureusement aucun architecte ne peut empêcher la tour de l'église de s'écouler. Un rêve lui révèle que seul un oiseau-fée y parviendrait. Ses trois fils partent tour à tour en quête de l'oiseau magique. Les deux aînés finissent par amener l'oiseau ainsi qu'une jeune fille attachée à son service : « Chacun admirait la beauté de cet oiseau : son plumage qui avait des milliers et de milliers de couleurs brillait comme un miroir en plein soleil ». La tour ne s'effondre plus mais le bel oiseau ne chante pas, ce qui plonge tout le monde dans la tristesse. Un jour il se met à chanter merveilleusement devant un jeune berger. Dès que ce berger s'éloigne, son chant cesse. Au terme d'un récit riche en rebondissements et en métamorphoses il s'avère que le pâtre est le plus jeune fils de l'empereur massacré par ses frères. Grâce à une pomme magique la jeune fille qui sert l'oiseau éclaircit toute l'histoire. Justice est faite tout finit par un mariage : elle épouse le jeune prince ».



Marielle Tabart, dans son Brancusi, l'inventeur de la sculpture moderne, dénombre pas moins de 27 variations sur le thème de l'oiseau.



Pages 107 et suivantes de la BD, j'ai cru qu'allusion était faite à cette légende sur les pouvoirs de l'artiste.



Je crois avec ferveur en la parenté de cette légende populaire avec le projet artistique de Brancusi.



C'est encore Serge Fauchereau qui traduit ce poème de Lucian Blaga (cf. p. 61) :



« L'oiseau sacré



(incarné en or par le sculpteur Brancusi)



Dans un vent que nul n'a levée

Orion hiératique te bénit

en pleurant sur toi

sa haute géométrie sacrée.



Autrefois tu as vécu au fond des mers

et tu as frôlé le feu du soleil.

Dans les forêts flottantes tu poussais

de longs cris sur les eaux originelles.



Es-tu oiseau ou cloche à travers le monde,

créature qu'on dirait calice

ou chanson d'or survolant

notre terreur des énigmes mortes ?



Tu perdures dans l'ombre comme les contes ;

à la flûte invisible du vent

tu joues pour ceux qui boivent leur sommeil

aux pavots noirs souterrains.



La lumière de tes yeux verts est pour nous

comme le phosphore qui s'écaille aux ossements anciens

à écouter les révélations sans paroles

sous l'herbe du ciel, tu prends ton vol.



Depuis le ciel voûté de ton zénith

tu déchiffres tous les mystères des profondeurs.

Prends ton essor sans fin

mais ne dis jamais ce que tu as vu ».



Grâce sois rendue aux mains de Brancusi, mais aussi à celles d'Arnaud Nebbache, qui lui rend ici, un juste hommage.



Commenter  J’apprécie          813
Brancusi contre États-Unis

L'auteur, l'album (126 pages, 2023) :

C'est le bouquin de Sophie Brocas (Le baiser) qui nous avait mis sur la piste de cette histoire incroyable : le procès du sculpteur Constantin Brancusi contre les États-Unis au sujet de droits de douane sur une de ses sculptures ...

Et c'est Arnaud Nebbache (illustrateur et professeur d'art) qui s'y colle pour retracer en images ce procès historique ...



On aime :

❤️ On se passionne pour le débat ouvert par ce procès : qu'est-ce qui fait une oeuvre d'art ? Son caractère unique (oui, mais il y a les moulages successifs), la main de l'artiste (oui, mais il y a un atelier de fonderie), le jugement des pairs (oui, mais il y a des réfractaires à un nouveau style), la beauté contemplée, le plaisir ressenti (oui, mais tout cela prête à interprétation) ...

Et puis c'est aussi une époque où art, artisanat et industrie se télescopent : outre Brancusi, c'est l'époque de Fernand Léger et d'Alexandre Calder par exemple.

❤️ On apprécie les croquis supposés de Marcel Duchamp que l'artiste dessine pendant le procès pour tenir informé son ami Brancusi resté à Paris : voilà un moyen astucieux pour retracer de façon vivante les débats de la justice.

le contexte :

Dans les années 1920, Marcel Duchamp organise à NY une exposition des sculptures de Brancusi.

À leur arrivée par bateau, les "objets" sont taxés par les douanes US comme "produits manufacturés".

L'une des sculptures, L'oiseau un moulage de bronze poli quasi abstrait, est prise comme pièce à conviction et s'ouvre alors en 1927 ce fameux procès pour lui faire reconnaître le statut d'oeuvre d'art ...



L'intrigue :

Le dessin de Nebbache pourra dérouter au premier abord mais on reconnaîtra qu'il s'accorde plutôt bien avec son sujet : l'espace des oeuvres d'art et le mouvement du sculpteur, ...

En bon professeur d'art, l'auteur prend d'ailleurs tout son temps pour imaginer et dessiner tout le long processus de création qui aura conduit l'artiste (le plus abstrait des sculpteurs figuratifs) à cette forme aboutie, qui ne ressemblait plus vraiment à un oiseau mais qui voulait saisir l'esprit du mouvement, l'envol de l'oiseau.

C'est un choix de scénario judicieux qui permet de mettre le lecteur dans les meilleures conditions pour apprécier tout le sens du procès qui va se dérouler.

Laissons finalement le dernier mot au juge Waite avec une sentence qui fera date dans l'histoire de l'art :

[...] Une école d'art dite moderne s'est développée dont les tenants tentent de représenter des idées abstraites plutôt que d'imiter des objets naturels. Que nous soyons ou non en sympathie avec ces idées d'avant-garde et les écoles qui les incarnent, nous estimons que leur existence comme leur influence sur le monde de l'art sont des faits que les tribunaux reconnaissent et doivent prendre en compte.



Le lendemain du 26 novembre 1928, la presse US ironise : It's a bird !

Pour celles et ceux qui aiment l'histoire de l'art.
Lien : https://bmr-mam.blogspot.com..
Commenter  J’apprécie          60
Brancusi contre États-Unis

Club N°51 : BD sélectionnée

------------------------------------



C'est un album absolument passionnant sur la vie de Brancusi et plus précisément le procès en 1927 aux États-Unis autour d'une de ses oeuvres, dont le statut artistique fut remis en cause par la douane Américaine.



On suit la vie de Brancusi, tiraillé par le traitement de son art au milieu d'un Paris rempli de Man Ray, Fernand Leger, Calder et autres contemporains alors que Duchamp suit le procès et relate son déroulement à son ami.



Le procès de l'art moderne et la valeur de la représentation dans l'art.



Passionnant, avec un style visuel en aplats colorés, c'est prenant, captivant !



Un vrai coup de coeur !



Greg

------------------------------------


Lien : https://mediatheque.lannion...
Commenter  J’apprécie          340
La tournée de Gaspard

Certains jeunes lecteurs se demanderont peut-être à quoi ressemble la vie ou le métier d'un éboueur à force d'en croiser.

L' album "La tournée de Gaspard" éclairera de façon précise sur cette question et également mettra en lumière quelles sont les actions qui compliqueront, faciliteront, embelliront la journée d'un éboueur comme Gaspard.



Et oui, nos destins sont étroitement liés.

Nous achetons, nous consommons, nous jetons et les éboueurs ramasserons nos déchets.



Le métier d'éboueur, ça sera bien plus que cela, que de passer derrière les incivilités de "petits cochons" car derrière la lourde tâche du ramassage se présentera tout un corps indispensable de métiers: ceux du nettoyage.

Que ferions-nous sans les éboueurs si nous avions à nettoyer nos rues nous-mêmes?

Quid de la planète, sans une action consciencieuse qui n'aura pas toujours les honneurs qu'elle mérite?

Ils seront les pôles de manutention nécéssaires pour que s'éxécute la grande opération solidaire du tri, du recyclage de déchets sur l'ensemble du pays.



Gaspard sera le personnage référent que nous allons suivre pour s'informer de la destination des déchets qu'ils ramassent.

Nous saurons où ils les mènent, quel véhicule leur permettra de les emporter compactés.

Et plushumainement, nous nous intéresserons à ces agents de la propreté et verrons de quoi sont faits leurs journées.

En effet, de quoi est faite notre humeur lorsque l'on nettoie et pousse des charges lourdes tous les jours?

Certaines mauvaises langues jugeront le métier d'éboueur impropre, celui qui plonge ses mains dans les déchets. Et c'est là purement question d'angle, de point de vue, de malveillance peut-être car en nettoyant la ville le métier de l'éboueur n'est-il pas finalement le plus propre du monde (sont-ils bien récompensés pour cette tâche indispensables mais ingrate?).



"La tournée de Gaspard" est un album documentaire bien fait et accessible pour le jeune âge, un aperçu des actions nécéssaires pour partager des lieux publics avec beaucoup de circulation et les laisser dans l'état où on les a trouvé.

C'est aussi un clin d'oeil à la vie de quartier du milieu urbain, avec son voisinage et ses rencontres quotidienne (le facteur, le commerçant, l'éboueur, d'un côté et le jogueur, la famille qui va aux courses à heures régulières et même ici, le petit garçon en trotinette qui va croiser l'éboueur tous les jours en allant à l'école.

Nous verrons avec Gaspard les professionnels qui demanderont comme la sienne de se lever et travailler à l'aube. Quel exigence!

Et les petits lecteurs qui rechigneront à se lever pour aller en classe!

Intéressant, plaisant et clair.
Commenter  J’apprécie          20
Brancusi contre États-Unis

Pour retranscrire cette affaire, la proposition graphique d’Arnaud Nebbache est à la fois osée et pertinente. Tablant sur une représentation lâchée à la palette de couleurs ramassée, ses planches fascinent. L’auteur parvient à dynamiser et rendre sa bande dessinée captivante de bout en bout, sans nous laisser jamais tomber dans l’ennui juridique ou technique.
Lien : http://www.bodoi.info/brancu..
Commenter  J’apprécie          00
Brancusi contre États-Unis

A travers un dessin très soigné l'auteur nous amène à plusieurs réflexions:

- existe t-il plusieurs conceptions de l'art?

- quelle est la différence entre un artiste et un artisan

- quelle est la liberté dans la représentation?

- seule une reproduction du réel est il de l'art?

- l'art est il la représentation du réel ?



Ce livre est un bel hommage à Brancusi précurseur de l'art abstrait.
Commenter  J’apprécie          20
Brancusi contre États-Unis

Un superbe livre graphique et l'on tourne les pages avec beaucoup de plaisir.

L'auteur nous parle d'un fameux procès, qui a fait jurisprudence : le procès de Constantin Brancusi contre les Etats Unis, en 1926.

Marcel Duchamp, alors installé à New York, propose à son ami sculpteur, d'organiser une exposition de ses œuvres. Brancusi travaille alors avec acharnement à une œuvre qui lui tient à cœur, l'oiseau. Elève de Rodin, il souhaite rendre dans son œuvre l'envol de l'oiseau. L'"Oiseau dans l'espace", une sculpture de plus d'un mètre de haut, mince, fuselée et polie comme un miroir. En apparence un objet manufacturé, mais présentée par son créateur comme une œuvre d'art. Il envoie donc son œuvre mais surprise, arrivée à la douane, elle est lourdement taxée à l'importation en tant qu'objet utilitaire. Les œuvres d'art étant, elles, exonérées. S'engage alors un procès, qui va être raconté en dessin par Duchamp à son ami Bracussi, resté en France.

Nous assistons donc aux dépositions et aux interrogatoires d'Edward Steichen (photographe et peintre) interrogé par maître Higginbotham, de Jacob Epstein (1880–1959, sculpteur américain), de Forbes Watson (rédacteur en chef de la revue The Arts), de Brâncuși accompagné de Fernand Léger (1881-1955) à l'ambassade des Etats Unis à Paris, de Robert Ingersoll Aitken (1878-1949, sculpteur américain), de Thomas Hudson Jones (1892-1969, sculpteur), puis des secondes auditions de Steichen, d'Epstein, de Jones, et enfin du verdict du juge J. Waite.

J'ai adoré suivre le procès mais aussi les questionnements de Brancusi, ses doutes, ses certitudes, les échanges autour d'un café, ses soirées où il croise Man Ray et d'autres artistes de l'époque. Les comptes rendus dessinés de Duchamp du procés.

Un livre magnifique sur l'histoire de l'art, mais aussi sur le droit face aux œuvres d'art et un bel hommage à Constantin Brancusi et envie de continuer à découvrir sa vie et ses œuvres. Avais aimé m'arrêter devant sa tombe lors de vacances parisiennes.

#BrancusicontreEtatsUnis #NetGalleyFrance
Commenter  J’apprécie          20




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Arnaud Nebbache (164)Voir plus


{* *}