Citations de Béatrice Courtot (84)
Les « indigènes » étaient pauvres. L’Algérie devait avoir sa personnalité. Le « vrai » peuple algérien devait reprendre sa destinée pour lui-même contre le colonialisme. Il devait avoir le droit de disposer de lui-même.
Nous, les « indigènes », nous ne voulons pas oublier le passé. Car oublier le passé, pour un peuple, c’est oublier qu’il est un peuple. Les Européens voulaient effacer les Arabes de l’histoire. Mais voilà qu’ils renaissent, en Égypte, en Tunisie, au Maroc et bientôt en Algérie.
Les hommes, jeunes ou moins jeunes, se tenaient debout, reluquant des cavalières potentielles. Ces dernières semblaient agitées, le cœur battant, tels des oiseaux bavards et puérils. Leurs robes étaient amples, leurs chevelures maintenues en rouleaux, torsades, vagues… Leurs décolletés étaient touchants, petits, ronds, en pointe ou en carré, montrant à peine les salières. Sur l’estrade, un orchestre était composé d’une demi-douzaine de musiciens jouant du cornet à piston, clarinettes et saxophones. Daniel pouvait reconnaître les notes du voisin qui s’entraînait régulièrement et charmait le voisinage, toutes fenêtres ouvertes, dès les soirées d’été. La valse était particulièrement prisée. L’orchestre avait voulu offrir un festival artistique. C’est la java bleue, la java la plus belle, celle qui ensorcelle, et que l’on danse les yeux dans les yeux… chantonnaient-ils tous. Les jeunes filles avaient des robes couleur de ciel, de campagne, de soleil, bleues, vertes, jaunes.
Tout le monde était amoureux de Violette et rêvait de sortir avec elle. Mais ce n’était pas une mince affaire. La belle ne semblait pas donner son cœur à n’importe qui. Il fallait la conquérir…
C’était le temps de l’insouciance. Seule la cloche du lycée les rappelait à l’ordre, comme le clairon de la victoire. Chacun allait désormais voler vers la vie adulte, bien loin des encriers en faïence, des buvards tachés, des plumes Sergent-Major, des papiers couverts de pattes de mouches, des ardoises…
Comment ne pas succomber au charme de cette petite sœur espiègle ? Elle était farceuse et avait toujours la joie naïve de transgresser les interdits… Ses genoux étaient égratignés, ses mains griffées.
...les sentiments changent au fil des années. Ils deviennent plus tendres et perdurent avec un peu de chance…
J’admirais leur relation ; ils semblaient regarder ensemble, dans la même direction. D’une certaine façon, ils avaient réussi l’impossible, en faisant des compromis, en faisant face aux aléas de la vie, en accumulant des moments de bonheur. Leur train de vie était modeste, pourtant ils avaient cette capacité de sourire à des choses sans importance et leur loge de conciergerie, bien plus qu’une simple habitation, était leur univers, petit, mais sûr. « Une maison est faite de murs et de voûtes. Un chez-soi est fait d’amour et de rêves », m’avait-elle dit fièrement un jour. L’an dernier, ils avaient même fêté leurs noces de crêpe – trente-neuf ans de mariage – jusqu’à frôler l’indigestion.
Tous les couples modernes étaient-ils condamnés à ne durer qu’un certain temps ? Notre génération était-elle devenue trop exigeante ? L’injonction au bonheur semblait dicter nos vies. Nos débuts avec Aurel avaient pourtant été dignes d’un film romantique. Un coup de foudre, des déclarations palpitantes, des sentiments exaltés, des moments vécus à 200 %, des dizaines de textos échangés par heure, des cœurs battant à l’unisson.
Il aimait se décrire ainsi, « bon cœur et mauvais caractère, comme les trois mousquetaires ! » et Eugénie approuvait cette image. En société, il était bavard et savait faire rire, alors que son fils était plutôt réservé, sensible, attaché à la douceur de l’enfance, et un brin rêveur.
Tous semblaient happés par une vague rêverie comme un doux songe entre l’homme et l’objet, avant que la lancinante psalmodie du muezzin ne les rappelle au devoir.
Son avenir sur les bancs de la faculté d’Alger devenait bien réel. Daniel s’imagina déjà en train de potasser des volumes sur la physiologie végétale et la pharmacologie. Depuis son plus jeune âge, il aimait observer la nature et était passionné par les pouvoirs extraordinaires des plantes médicinales.
L’anniversaire de la mort de mes parents était toujours un jour douloureux. Un vendredi 13 pour les superstitieux. C’était comme si une chape de plomb tombait à chaque fois sur mes épaules. Hier, j’avais ressenti des émotions très négatives. Une inquiétude s’était emparée de moi, frôlant même la crise d’angoisse. Moi qui n’étais pas d’un tempérament particulièrement anxieux, j’étais étonnée d’avoir éprouvé une telle détresse. On aurait dit un signe de mauvais présage. Je chassai immédiatement cette idée de ma tête et montrai à mes élèves les pas du dernier exercice avant les étirements finaux.
La page blanche est devenue parole. Elle a réussi à transformer le néant en divin.
Il était nécessaire de me confronter à ce sentiment contradictoire qui veut que l’on adore et l’on déteste à la fois ce qui vous a tout donné et tout repris. Ici, le pire doit être noyé avec le temps. Il ne faut se souvenir que du meilleur. Il me plaît de te faire partager la senteur de l’air, la douceur du ciel, la lumière du pays que je n’ai plus revu.
À chacun sa madeleine de Proust… La nôtre a la saveur des jours lointains, des genoux écorchés qui piquaient quand Mamé nous les désinfectait à l’eau-de-vie, des lancers de noyaux d’abricot depuis la fenêtre, et des courses effrénées en patins à roulettes avec, en guise de protection, un simple coussin accroché à nos fesses avec de la ficelle.
— Mamé avait le don de trouver des solutions à nos petits problèmes d’enfants, dis-je en plantant avec gourmandise ma cuillère dans la tourte.
— Et l’art de cuisiner merveilleusement bien, renchérit ma mère, le regard nostalgique. Pas comme nous ! ajouta-t-elle dans un éclat de rire.
Ma mère non plus n’a pas hérité du gène « transmission du savoir-faire culinaire ». Pour ma part, la dernière fois que j’ai utilisé le four, le détecteur de fumée s’est déclenché. L’alarme était stridente. Impossible de l’arrêter. La seule solution que j’ai trouvée a été de taper avec un balai pour essayer de le décrocher. Résultat des courses : une alarme définitivement muette et un plafond ruiné. Nous rions encore en évoquant ma mésaventure.
« Je n’ai qu’une ride et je m’assois dessus », comme pour se rassurer sur le temps qui file inexorablement. C’est facile avec sa dernière crème antirides à la bave d’escargot (qu’est-ce qu’on n’invente pas maintenant !) qui lui a valu le surnom de « Mamie Sorcière » par Diana. D’ailleurs, ce même jour, ma fille lui a demandé si, à son époque, elle voyait en noir et blanc, comme sur les vieilles photos de famille accrochées au mur de sa chambre. J’en rigole encore.
On ne peut rien apprendre aux gens.On peut seulement les aider à découvrir qu’ils possèdent déjà en eux tout ce qui est à apprendre.
Galilée
À défaut d’être coach sportif, je vais t’initier au job positive. Il s’agit de trouver tes vraies valeurs, peu importe les obstacles rencontrés sur ta route. Ton CV, c’est ton identité, tes victoires et tes échecs, ton parcours, pas toujours linéaire… un peu comme ton corps, tes courbes que tu juges trop lisses, trop plates ou trop rondes, avec tes cicatrices, qui finalement font de toi une beauté imparfaite, au charme irrésistible.
Femme libérée (des hommes mais pas de ses complexes), créative, impatiente, désordonnée mais perspicace. Lumineuse. Humaine et parfois surhumaine (Je me demande vraiment comment tu fais pour jongler entre ton boulot et Diana. Moi qui n’ai pas encore d’enfant, sache que je suis vraiment admirative…). Ancienne fêtarde reconvertie en mère modèle. Tiraillée entre sa passion pour écrire et ses devoirs de famille. Meilleure amie du monde.
Je me rends alors compte que ces papillons sont l’incarnation même de mon angoisse. La peur du risque. La peur de me brûler les ailes en sortant de ma zone de confort. Mais si des dizaines de papillons sont morts, peut-être qu’il y en a un qui a réussi à se diriger vers la lune… grâce à la panne d’électricité qu’ont engendrée ses collègues électrisés !