"Lâchons les chiens", premier livre de Brady Udall ; ce recueil de 11 nouvelles, dont les titres sont assez éloquents : Lâchons les chiens - Raid nocturne - Buckeye le Mormon - La ballade du boulet et de la chaîne - Basket à la casse - Le contraire de la solitude - La perruque - Vernon - Le serpent - La beauté - Il se soûle profondément et fameusement - se grapille au hasard de l'envie du jour...
Des histoires courtes et réalistes, pleine d'humanité, de tendresse rude, et de l'odeur du désert et des grands espaces de l'Amérique profonde, avec ce petit arrière-goût de rêve désillusionné....
Brady Udall est un grand auteur américain, il est l'observateur de cette Amérique que le cinéma ne montre pas, parce que ce n'est pas assez spectaculaire... Une Amérique vraie, vivante, cruelle, drôle, pathétique, humaine, quoi.
Ses romans suivants, l'excellentissime "Le destin miraculeux d'Edgar Mint", et l'étrange et déstabilisant "Le Polygame solitaire", sont superbes. Une écriture simple, concise, précise et étrangement poétique, et des sujets qui n'appartiennent qu'à lui. Brady Udall est un grand.
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Certains disent que pour bien connaître un auteur, il faut lire sa correspondance.
J'ai personnellement toujours pensé qu'il fallait aussi lire ses nouvelles (s'il y en a !).
Brady Udall est surtout connu pour ses deux romans, mais ses nouvelles sont fabuleuses, tendres et décalées, cruelles et réalistes.
Ses personnages restent gravés dans notre esprit parce qu'Udall nous les présente toujours dans un moment critique de leur vie, un moment charnière qui les révèle au lecteur.
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Loin des personnages lisses de la plupart des séries tv états-uniennes, les personnages rencontrés au fil de ces récits sont humains. Tout simplement? Non, car la condition humaine est plutôt complexe.
Pas de lourdeur ou de désespoir, néanmoins. Ces portraits sont incroyablement réalistes et suscitent la compassion, l'étonnement, l'identification, le rire, ...
Nous sommes tous des humains, du rire aux larme, de l'égoïsme à la solidarité, de la méfiance à la confiance, de la force à la faiblesse, et j'en passe. Une très belle leçon d'humanité.
Les situations peuvent sembler improbables, et pourtant on suit ces morceaux de vie en y croyant, en y étant.
J'ai rarement eu une telle impression d'y être, de ressentir la chaleur, les sentiments, les bruits, les odeurs, les enjeux, etc. Udall a un talent immense pour décrire, écrire et vous plonger dans ses univers.
Je découvre cet auteur avec ce recueil de nouvelles. Je souhaite lire d'autres oeuvres d'Udall.
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Porté par sa peu commune lettre U, Udall devient petit à petit un rendez-vous annuel pour ma liste du challenge ABC. Lâchons les chiens est son premier recueil de nouvelles, et le livre qui l'a fait connaître auprès du grand public.
On sent dans chaque nouvelle la volonté de l'auteur de rester proche de la réalité. Pas d'hommes d'affaires importants vaquant dans les grandes métropoles, Udall ne met en scène que des hommes venant d'un village perdu au fin fond de l'Amérique et vivant de petits boulots. Souvent un peu paumés, récemment divorcés ou veufs, ils doivent prendre une décision importante pour leur avenir.
Il m'a manqué un petit quelque chose pour accrocher vraiment à ces histoires. Il est assez difficile de s'impliquer dans des tranches de vie ordinaires de gens ordinaires. Même si Udall propose des personnages un peu en marge de la société, ils ne le sont pas suffisamment pour me marquer. À la rigueur, un fil conducteur fort entre tous les récits aurait aussi pu faire l'affaire, mais là encore, je suis resté sur ma faim.
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Je pense que c'est sa première oeuvre qui a été publiée et heureusement ses deux romans suivants sont de beaucoup supérieurs à ces nouvelles. J'en ai aimé quelques unes mais en gros, ça ne vaut pas la peine de lire ces nouvelles pour apprécier la très grande valeur cet auteur américain.
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« Nous longeons des hauts fourneaux, des stations-services et des caravanes alignées sur le bord de la route. »
Avec un goût de poussière dans la bouche, le dos fourbu par cette route interminable et cahotante. Je crache par terre le peu de salive qui me reste en bouche. Ma main, par habitude, plonge dans la glacière mais ressort à nue. J'ai déjà bu la dernière bière il y a bien soixante miles. C'est donc avec un sourire salutaire que je tourne le volant, et m'engouffre dans ce qui ressemble le plus à de la vie, un soupçon de vie dans une poussière balayée par le vent. Ferme la vitre ! on n'arrive plus à respirer.
« Il engage sa vieille voiture dans le parking d'un vaste bâtiment en bois surmonté d'un panneau qui annonce 'The Ranch' en grandes lettres malingres. Le soleil commence tout juste à se coucher, mais l'endroit est aussi illuminé que Las Vegas. Toute une armée de pick-up sales encombre le parking. »
Se frayer un chemin entre les rétroviseurs et les pare-chocs chromés et suivre le brou-haha d'une meute gueularde et assoiffée. Un lieu qui n'a pas de nom, comme un ranch sans nom. Un air abîmé, par le temps, la poussière et le fracs de la vie, j'imagine déjà les âmes qui y règnent. De la peine et de la bière qui coulent à flot sur le comptoir et qui déversent son lot de solitude et de tristesse. Être un cow-boy solitaire a son revers, celui de se retrouver seul à boire sa bière, dans la fraîcheur d'une pénombre en coin, ou dans un coin d'une moiteur extrême.
« Nous entrons dans la partie principale qui est plus vaste qu'une salle de bal. Il y a deux bars circulaires au milieu et quelques estrades sur lesquelles dansent des femmes à demi dévêtues. Des tables et des chaises sont disposés dans les coins. La musique est si forte que je la sens rebondir sur ma poitrine. »
Un vieux juke-box distille sa musique, comme des airs de country new-age. Lambchop. Cela change de Johnny Cash, paix à son âme et black respect. Il reviendra lorsque les jeunes auront déserté les lieux pour aller fourrer leur queue dans le cul des serveuses à l'arrière de leur pick-up ou entre les seins des danseuses usées. Il vaut peut-être mieux ça que de voir ces cow-boys souls se fracasser la tête avec des pieds de chaises en bois. Le bruit m'envahit, comme cette nappe de fumée qui s'envole des tables voisines. Je me ferme sur moi-même, une bulle de silence me caresse, le temps de prendre ma bière, en solitaire et l'âme soul mais pas encore saoul.
« On déniche une table inoccupée le long du mur, juste à côté de l'une des danseuses. Elle porte un slip en dentelle noire et un T-shirt coupé qui suffit à peine à dissimuler ses avantages. »
Terres d'Amérique, je roule en pensée à travers l'Utah et l'Arizona, des nouvelles de Brady Udall qui mettent en lumières, néons clignotants de quelques bars miteux et de phares alignés, des pauvres types à mon image qui se demandent ce qu'ils font de leur vie, ce qu'ils font dans cette vie. Ils se sentent seuls et boivent leur bière, parfois même sans saveur, mais continuent leur chemin, sans envie ni rêve. Oui cette Amérique, pas si profonde que ça, est la mienne, et je reste assis à regarder ma bière, sans même m'apercevoir que la danseuse à enlever son tee-shirt, en écoutant Kurt Wagner avec ce goût de poussière en moi.
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11 nouvelles, qui en toute franchise, sont de bonne qualité...
Nous avons à faire, ici, à des paumés sympas qui font tout leur possible pour améliorer leur vie et en sauver ce qui peux encore l'être...
La 1ere nouvelle qui donne le titre au livre, est pour moi la meilleure de toutes...
A savoir, aussi, petit détail amusant, que dans chaque nouvelle, on y croise un chien, parfois son existence est juste évoquée.... et parfois ce sont les paumés qui se croisent au fil des histoires...
Remarquez que parfois ils sont cabots eux-mêmes...
C'est un livre plaisant....
Mais pas du niveau d'un Jim Harrison... Là, la barre est haute, et "Chien Brun" est hors norme.
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Une révélation... En un mot, voilà qui résume mon coup de coeur, en forme de coup de poing dans l'âme, pour Brady Udall et ses "gueules" de l'Amérique profonde.
Cela faisait longtemps que je n'avais plus lu de recueil de nouvelles. Et encore plus longtemps que j'avais pris du plaisir à en lire. Un peu lassé. C'est donc avec une certaine appréhension que j'avais sélectionné un recueil de nouvelles dans le cadre du Challenge ABC (il y a assez peu d'auteurs en "U").
L'Amérique d'Udall, c'est celle des subprimes, des délocalisations, des vieux pick-ups rouillés, des latinos sans papiers qui bossent dans des ranchs, des divorces, des coups de sang... ce n'est pas l'Amérique qui gagne de Donald Trump... Et l'auteur nous présente des portraits. Des tronches, des caractères trempés à la Bud, chemises à carreaux et bottes usées.
On peut faire la fine bouche, et dire "toutes les nouvelles ne sont pas de la même qualité"... Je me marre. Même chez Maupassant, Mérimée, Carver, Oates, Ishiguro... toutes les nouvelles ne sont jamais de la même qualité. Ce qui compte c'est qu'elles fassent mouche. C'est qu'elles atteignent le coeur de la cible... et ça, c'est fait.
Onze nouvelles pleines d'espoir, surtout. C'est ce que je retiendrai. Au-delà des douleurs, des drames, des ruptures, il n'y a pas d'apitoiement, pas d'abandon. On est le plus souvent face à des gens qui ont perdu tout ou presque et qui luttent...
1. « Lâchons les chiens ». Une rencontre improbable entre deux laissés pour compte de la société américaine. Chacun essaie de s'en sortir, vaille que vaille... Mais ils semblent trouver dans leur rencontre une motivation pour aller de l'avant... mais jusqu'où? La chute est lourde de sens. Une vraie merveille.
2. « Raid nocturne ». Un père qui rend visite à son fils... mais façon Udall, donc la nuit avec une chèvre vivante dans les mains...
3. « Buckeye le Mormon ». Un portrait au vitriol de la société WASP. Une boule au ventre, une tranche de vie.
4. « La ballade du boulet et de la chaîne ». Une claque dans la figure... La lente descente aux enfers d'un type qui s'enchaîne (?!) à sa culpabilité... au point de voir partir sa femme, et de la comprendre. Pourtant elle n'attendait qu'un signe...
5. « Basket à la casse ». Udal revisite le mythe américain du basket.
6. « Le contraire de la solitude ». La version de Udall d'une histoire d'amour... entre esprits fêlés, moteur cassé et coeur en berne... Une de mes favorites.
7. « La perruque. Deux pages, tout est dit. Là, si votre coeur n'explose pas, je n'y comprends plus rien. Et pourtant, l'écriture montre la force du père.
8. « Vernon ». Une balade dans un état auquel Udall fait une pub incroyable...
9. « Le serpent ». Tout le génie d'Udall, utiliser un serpent , le mettre au centre de l'histoire pour mieux mettre en valeur les personnages qui gravitent autour.
10. « La beauté ». Un road trip à la Udall, une amitié qui se noue. Les liens forts doivent se rompre, car c'est ton destin (diraient les Inconnus).
11. « Il se saoûle profondément et fameusement ». Aaaah... comme j'ai angoissé en dévorant la nouvelle... "pourvu que..." me disais-je à chaque page. Udall nous dépeint un désir de vengeance et l'instant où tout peut basculer... très fort. Puissant. Poignant.
Ce qui est incroyable avec Brady Udall, c'est que le type que l'on croise à la station-service dans une nouvelle, cela peut être celui qui va pêcher dans la nouvelle suivante, ou qui se tire de chez lui deux nouvelles plus loin. Bien sûr, Udall ne le dit pas. Les personnages, les lieux, les moments s'entrecroisent au fil de ses récits.
Udall nous fait rêver. Il donne à voir, il donne à penser, il lance des arabesques dans le ciel et la magie opère. Un grand auteur.
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LÂCHONS LES CHIENS de BRADY UDALL
C’est en lisant les nouvelles de Banks et Carver que j’ai découvert cet auteur passionnant. 11 nouvelles dont l’action se déroule dans l’Utah et l’Arizona en bordure des réserves indiennes. Udall décrit des personnages improbables dans un environnement sauvage et souvent hostile. En 20/30 pages par histoire il m’a happé dans son monde, déprimant mais attachant où l’ennui le dispute au comique ! je vous le conseille vivement.
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Ce que je dois dire avant tout sur ce livre, c'est que je l'ai découvert grâce à une recommandation sur le blog d'Eric Dejaeger : http://courttoujours.hautetfort.com/ et que j'ai passé ensuite plusieurs années à en lire (ou relire pour certaines) toutes les nouvelles. Globalement, un plaisir. J'avais été cueilli, en particulier, par le premier texte, celui qui donne son titre au recueil. Puis, à mesure qu'on avance, même si on tombe dans une certaine uniformité de récit en récit, on reste touché par chacun des personnages. L'avant-dernière nouvelle fait fortement rêver à un road-trip d'Alaska en Arizona, et ça aussi, c'est appréciable.
Et puis, plus près de nous, j'ai fini un autre recueil de nouvelles d'un autre écrivain américain, Raymond Carver, et j'ai forcément repensé à ce recueil de Brady Udall. Si j'étais brutal ou caricatural, je dirais : "à quoi bon lire Brady Udall puisqu'il y a Raymond Carver ?". Mais bien sûr, et heureusement, c'est plus compliqué que ça. Mais tout de même, Udall parle des mêmes personnes et des mêmes situations que Carver, de la "lower-middle-class" nord-américaine et vers ce qu'il est convenu d'appeler le "bas de l'échelle sociale", des largués en prise non seulement avec leurs démons et défauts, mais aussi avec un monde et une société pas très bien faits pour les gens qui voudraient juste vivre sans histoires. C'est la même veine réaliste et aussi tendre et humaniste chez les deux. Bien sûr que chez Brady Udall, il y a un peu plus d'humour et de loufoquerie que chez Carver, ou en tout cas de façon plus visible, mais ce qui saute aux yeux quand on lit les deux, comme ça, à peu de distance, c'est que l'un est la cause, et l'autre, la conséquence, sans confusion possible.
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Des nouvelles assez courtes qui se lisent très bien.
Le style est direct, prenant. Mais je suis resté sur ma faim pour chacune d'entre elles, à l'exception de la dernière.
Des tranches de vie dépeignant l'Amérique, c'est bien ce que je cherchais pourtant. Mais l'auteur interrompt son récit après n'avoir parfois que simplement dépeint le tableau. J'en reste déçu.
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Les nouvelles sont à mon avis de qualité inégales. Si j’ai aimé la nouvelle qui donne son titre au recueil et la seconde Raid nocturne, je n’ai pas trouvé beaucoup d’intérêt à Buckeye le mormon et à La ballade du boulet et de la chaîne. Quant à Basket à la casse, je n’y n’y ai rien compris.
D’une manière générale, je trouve les gens excessifs et pas très sympas (p 128).
Les personnages de Le contraire de la solitude, sont assez attachants. Et Venon m’a assez plu.
C‘est peut-être qu'après plusieurs mois avec des douleurs très intenses et un moral au plus bas, j’ai du mal à m'intéresser aux livres sauf s'ils sont passionnants comme ceux de Maria Duenas. J’en ai abandonné plusieurs.
p. 160 ”Et, comme deux personnes trop proches l’une de l’autre, trop dépendantes l’une de l’autre, ils ne cessent de se chamailler puis de se raccommoder”. C’est exactement ce que je vis avec mon fils.
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A la fin de la première nouvelle, les chiens sont lâchés.
La situation est burlesques, les personnages complétement frappés et le texte fort bien écrit, bon style.
Après cela j'ai complétement décroché agacé par l'impression que l'auteur cherchait à sombrer avec des personnages à bout de souffle.
Le nom de l'auteur permet tout de même de valider la lettre U au challenge ABC ==> j'y reviendrai donc au moins pour le style.
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Un des meilleurs recueils de nouvelles que j'aie jamais lu. Chez Brady Udall, chacun des héros est animé d'une vitalité profonde, viscérale, touchante qui est aussi bien le moteur de la narration que celui de la lecture. J'ai fait découvrir ce livre à des tas de gens autour de moi au fil des années et tous l'ont aimé.
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Brady Udall a un talent incroyable pour installer en trois phrases des personnages vivants et immédiatement attachants, comme ce père, séparé de son fils, qui lui dépose comme un voleur dans la nuit la chèvre qui lui manque...
Toutes les nouvelles de ce recueil ne se valent pas, mais ceux qui ont été séduit par Edgar Mint auront je pense comme moi plaisir à plonger dans l'univers profondément humaniste de cet auteur qui explore avec un sourire à la fois radieux et cynique la face sombre de l'Amérique du Grand Ouest de l'Utah et de l'Arizona, à la périphérie du drame quotidien des réserves indiennes.
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des nouvelles parfois sans chute véritable, mais qui rendent bien l'ambiance des petites gens en Amérique, leur solitude parfois, leurs douleurs(perte d'une femme), la solidarité qui les unit... et la difficulté d'échapper à son destin; ma préférée: la première "lâchons les chiens", rencontre de deux paumés et "il se saoule profondément et fameusement" , l'histoire d'une vengeance qui avorte
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Drôle, humain et touchant.
Certaines nouvelles, plus loufoques, donnent envie de croiser la route d'un de ces personnages.
Brady Udall choisit une écriture ordinaire, pour des personnages ordinaires, mais qui créent une ambiance totalement extraordinaire.
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