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Critiques de Catherine Deschepper (10)
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Le complexe du gastéropode

Pour l'interview de l'auteure, suivez le lien ci-dessous :

https://www.youtube.com/watch?v=pjVVa6mi-jI





Province de Liège. Résidence d'écriture du château de Paille. Propriété de Gédéon de Ducart d'Olise, mécène engagé.



Ils sont quatre ! Quatre invités par « La Société des Auteurs en Devenir » pour plusieurs semaines en résidence d'écriture. Tous n'ont à leur actif qu'une seule publication.



Emile, poète, de son nom d'auteur Noirdessin, qui n'avait aucune envie d'être là, arrive avec deux bonnes heures d'avance, et tant pis pour la bonne mal réveillée qui ne l'attendait pas de sitôt. Il tient à visiter toutes les chambres pour choisir la sienne, à l'abri des regards des trois autres invités. Car, il le sait, un seul sera publié ! Mais s'il n'avait aucune envie d'être là, pourquoi est-il venu ? Tout ça, c'est à cause de cette foutue saloperie d'inondation qui avait envahi la chambre de bonne qu'il louait dans un immeuble de rapport à Schaerbeek ! L'inondation en question n'aurait rien été si on ne l'avait pas expulsé. Il en était la cause, d'accord, mais si sa voisine du dessous ne l'avait pas provoqué, il n'aurait pas fait déborder sa baignoire expressément… Eh, oui, il avait aussi quelques loyers en retard, mais bon, faut pas jeter un écrivain dehors avec l'eau du bain pour si peu de choses ! Il lui reste un mois pour se trouver un nouveau logement et pour rédiger ses « Poésies maritimes » …



Nadine est soulagée de voir les grilles du château se refermer derrière elle. Elle peut enfin échapper à Roger, son mari, et à ses disciples, les « Inspirationnistes ». Ceux-ci avaient découvert dans quel château elle se retirait et étaient venus camper dans le champ proche de l'entrée pour lui envoyer des ondes positives. Son premier bouquin avait été un succès fantastique dans le genre bien-être, recherche de soi, chakras, etc.



Nicolas a pondu un roman policier plutôt efficace, mais qui n'a pas ému les foules. Depuis, il n'a aucune inspiration… C'est pourquoi, dans un premier temps, il va surtout examiner ses concurrents…



Jean-Paul Sartondeau ne veut pas pénétrer dans ce château, mais Odile qui l'a conduit jusque là ne veut rien entendre ! Elle est prête à tous les sacrifices pour un écrivain. Alors, soit il pénètre dans ce château et dans un mois elle le récupère, soit il dégage tout de suite et tout est fini ! Bye ! Bye ! Casse-toi !



Critique :



Catherine Deschepper, l'auteure facétieuse, nous balance ici une comédie qui s'apparente à une pièce de théâtre de boulevard. Humour garanti qui sera apprécié par tous ceux dont les zygomatiques ne sont point trop ankylosés suite au port du masque qui contribue à notre sauvegarde en ces temps de pandémie covidienne.



Mais ces auteurs débutants, et leurs deux mécènes, sont-ils si caricaturaux que cela ? le monde de l'édition qu'elle égratigne avec délectation serait-il vraiment aussi éloigné de ce qu'elle laisse entendre ? Et ces critiques littéraires au jugement si sûr qu'il peut faire et défaire des carrières, sur quoi repose leur expertise ?



J'ai adoré les portraits de chacun des « héros » de cette histoire enfermés dans un huis-clos qui ne peut qu'engendrer des confrontations entre eux… Et avec eux-mêmes ! Certains vont se (re)découvrir pour le meilleur, pour le pire… Et pour notre rire. « J'ai encore un peu de causticité, je vous en remets une couche ? » pourrait nous demander Catherine Deschepper tant elle est douée pour créer des situations burlesques. On en vient à prendre en pitié ses "héros" car quelque part, aussi caricaturaux soient-ils, il y a une part de nous en eux.



Je me suis régalé avec ce récit aux dimensions très humaines, où l'auteure fait rire, tout en gardant une dimension bienveillante pour ses personnages. Catherine Deschepper cherche-t-elle à faire passer un message ? Il faudrait le lui demander, mais pour ma part, la détente zygomatesque qu'elle m'a procurée me suffit amplement. Son style est original : « […] il se trouva nez à nez avec un homme hirsute, tout droit sorti de la forêt. On aurait dit un scout périmé qui aurait vieilli dans son uniforme. »

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Le complexe du gastéropode

Trouver l'inspiration après l'écriture d'un premier ouvrage qui a connu un certain succès n'est pas toujours facile pour un auteur.



C'est pour cela que le Comte et la Comtesse de Ducart d'Olise, couple de mécènes adorant la littérature, ouvrent les portes de leur château à quatre écrivains qui ont eu la chance d'être sélectionnés avec à la clef un contrat d'édition pour celui qui rédigera la meilleure des publications.

Jean-Paul, Nicolas, Nadine et Emile, quatre jeunes auteurs se retrouvent donc en concurrence. Tandis que certains se prêtent à l'exercice avec une certaine décontraction, d'autres commencent à concevoir des plans machiavéliques pour éliminer les autres participants. Alors que chacun s'atèle à la tâche, une série d'événements fortuits et rocambolesques vont se produire pour notre plus grand plaisir...



Catherine Deschepper, avec beaucoup d'humour et sans prendre de pincettes, nous montre dès les premières pages de son roman les difficultés et la pression auxquels sont confrontés les auteurs lors de l'écriture d'un ouvrage après que ces derniers aient déjà connu le succès avec une ancienne publication.

Ce huit-clos burlesque très agréable à lire permet de passer un bon moment et de nous rappeler qu'il est nécessaire de prendre du temps pour soi et de redéfinir nos priorités.



Je tiens à remercier Babelio et Weyrich Edition pour la découverte de cette auteur qui m'a donné le sourire tout le temps de cette lecture.



#item 90
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Le complexe du gastéropode

Et pourtant, cela avait bien commencé ! J’étais en compagnie du 1er personnage invité à une résidence d’écriture au château du comte Gédéon de Ducart d’Olise. Cet auteur se débattait avec la 1ère phrase de son roman, « Saloperie de putain de première phrase », et se disait que Proust, finalement, ne s’était pas foulé avec le narrateur qui longtemps se couchait de bonne heure…



Donc, je souris et je ris même aux éclats durant les premières pages, où les 3 autres auteurs débutants sont présentés de manière très originale, surtout pour ceux qui ont une petite (ou une grande) connaissance de la chose littéraire et du fonctionnement du récit. Hilarant, d’autant plus que les titres à rallonge mettent le lecteur dans le coup.



Mais lorsque les affaires se corsent, qu’il y a jalousie larvée entre les auteurs, ça devient du franchement n’importe quoi, et je n’aime pas ça. Je me suis mise à survoler les lignes, apercevant au passage un homme se trainant nu près d’une piscine, entouré de limaces. Et là, je me suis dit non. Ca ne me fait même pas rire.

Surtout que je déteste les limaces. Et je me fiche complètement de leur complexe.

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Le complexe du gastéropode

Quatre auteurs en résidence ont trois semaines pour écrire, ou fortement avancer, leur deuxième ouvrage. Quand un premier récit, un premier recueil a connu un certain succès, tout le monde attend l’auteur au tournant, lecteurs comme éditeurs et critiques. La pression est plus grande que pour un premier roman. Catherine Deschepper dont c’est le deuxième roman le sait mieux que quiconque.



Son deuxième roman ne ressemble en rien au premier. Elle a délibérément choisi une histoire plus rocambolesque, un ton à l’humour caustique pour nous parler des écrivains en devenir et en recherche de notoriété. D’une plume acérée, elle nous brosse le portrait de quatre candidats au succès. Certains vivent difficilement la sortie de l’anonymat suite à leur premier livre, d’autres ne rêvent que de gloire et sont prêts à tout pour y parvenir, d’autres encore sont déçus du petit monde de la littérature et se sentent incompris ou bafoués. Un tableau plus vrai que nature, finement observé, où la personnalité de chacun est exacerbée par le huis-clos de la résidence. Et la nature humaine est, on le sait, complexe et décevante.



Je ne vous en dirai pas beaucoup plus car ce roman mérite d’être découvert sans être trop défloré. Il est original, ressemble à un vaudeville et l’humour caustique y est présent jusque dans les exergues des chapitres. Mais le fond est criant de vérité et l’écriture de l’auteure est alerte, vive et maîtrisée. Ce fut pour moi un réel plaisir de lecture. Et je ne peux que vous exhorter à le découvrir rapidement.

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Les pas perdus du Paradis

Catherine Deschepper a déjà écrit deux recueils de nouvelles publiés chez Quadrature, Un kiwi dans le cendrier et Bruxelles à contrejour et voilà qu’elle a trouvé un petit éditeur français pour publier son premier roman destiné aux grands ados. Je pense que celui-ci peut même carrément plaire aux adultes par les thématiques qu’il aborde.



Le narrateur est donc Nathan, seize ans, confronté à la détresse d’une famille venue d’Erythrée et qui a traversé l’enfer pour arriver en France (petit détail, je ne sais pourquoi, je me sentais plus en Belgique qu’en France en lisant ce roman). Il est tombé amoureux de Saïma, la fille aînée. Un jour, la mère et la petite soeur de Saïma sont arrêtées par la police et retenues en centre fermé. La jeune fille, qui a échappé par miracle à l’arrestation, veut réaliser le rêve de sa mère : atteindre le Royaume-Uni, le « Youké ». Et pour la cacher, en attendant le grand départ, Nathan (et ses potes, très importants dans l’histoire) trouvent la solution qu’ils pensent géniale : faire habiter Saïma chez Mamynou, la grand-mère de Nathan, dont l’esprit commence à divaguer joyeusement (ou dangereusement, selon le point de vue) depuis quelque temps et que les parents du garçon envisagent très sérieusement de placer.



Deux thèmes assez lourds donc, l’exil et la maladie d’Alzheimer auxquels se greffent les amours adolescentes et l’amitié. Sur quatre saisons, Nathan et ses amis, Saïma vont grandir, la vraie vie va les presser d’avancer, d’évoluer, d’inventer des lendemains qu’on espère meilleurs. « C’est ça la vie ! » comme aiment à le répéter Saïma et Mamynou. Les adultes vont eux aussi apprendre de cette expérience inédite. Certes Mamynou m’a paru vraiment très à l’ouest dans ses délires et ces jeunes gens portent vraiment beaucoup sur leurs épaules, la fin m’a paru un peu abrupte mais la finesse psychologique que j’avais tant appréciée dans Un kiwi dans le cendrier, le traitement moderne des thèmes sont intéressants. Le roman est plein d’humour et d’espoir finalement, sous la plume élégante de Catherine Deschepper.
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Le complexe du gastéropode

Surprise dans ma boîte aux lettres il y a quelques semaines, ce roman de Catherine Deschepper, le deuxième qu’elle écrit (le premier étant un roman étiqueté pour ados), le premier officiellement pour adultes. Dans sa dédicace, l’auteure me dit avec humour qu’elle ne restera pas longtemps dans le petit monde littéraire belge. De fait, ça commence fort avec cette première phrase « Saloperie de putain de première phrase » qui évoque la difficulté de commencer un livre, surtout le second, celui pour lequel quatre écrivains fort divers sont invités à une résidence d’écriture dans un château ardennais. Dès cet incipit, la célèbre première phrase de Proust « Longtemps je me suis couché de bonne heure » est passée à la moulinette et c’était assez réjouissant (même si j’ai le plus grand respect pour Marcel, évidemment). Le roman se déroule alors, un peu lentement d’abord avec la présentation des protagonistes, avec plus de rythme dès que l’un des quatre se met en tête d’écrire la réalité ou de réaliser la fiction, on ne sait trop, et surtout d’éliminer ses concurrents pour attirer sur lui seul les projecteurs de la gloire littéraire.



J’imagine que Catherine Deschepper a vécu ce genre d’événement, une résidence d’écriture, et qu’elle connaît bien le microcosme de l’édition belge. Ce qui est sûr, c’est qu’elle maîtrise avec jubilation les codes littéraires et s’en joue à merveille : il suffit de lire les titres de parties et de chapitres pour comprendre qu’elle s’est vraiment amusée à écrire cette pochade et à tracer les portraits des quatre écrivains, tous plus farfelus les uns que les autres. Le rapport à l’écriture, au succès, aux lecteurs, l’angoisse de la page blanche, la recherche du sujet en or, la concurrence entre auteurs (mais noooon, ça n’existe pas, si ?), tout y passe, dans ce pauvre château malmené par cette résidence. Mais je l’avoue, je n’ai pas été emportée par cette lecture et pourtant, je devrais avoir honte me réjouir sans arrière-pensée du fait qu’une auteure ose un livre humoristique en cette rentrée littéraire pleine de sujets sérieux, voire dramatiques. J’ai eu un peu de mal à m’accrocher jusqu’au bout et j’en suis désolée, mais je ne suis pas une bonne cliente pour le total déjanté. Ceci dit, je suis sûre que, par son sujet et son traitement, ce roman trouvera son public et amusera bien d’autres lecteurs !



Un grand merci aux éditions Weyrich pour l’envoi de ce livre !
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Les pas perdus du Paradis

Catherine Deschepper nous propose ici son premier roman paru aux éditions de Beauvilliers. C’est un jeune nom de la littérature belge mais peut-être l’avez-vous lue chez Quadrature où elle a publié deux recueils de nouvelles dont « Bruxelles à contrejour » illustrées par de jolies photos de Martine Henry.



« Les Pas perdus du Paradis » est un roman jeunesse qui vaut vraiment la peine d’être découvert. La couverture n’est pas très attirante pour un lecteur adolescent. Mais je suis sûre que son contenu le sera : un premier amour contrarié, des amis sur qui on peut compter ainsi qu'un plaidoyer pour une meilleure prise en charge des migrants et une mise en lumière des affres de la maladie d’Alzheimer. Le récit raconte un an de la vie de Nathan, Saïma, Mamynou et leur entourage. Un an qui va bouleverser chacun : faire grandir les ados et aider à vivre les adultes.



Dans la littérature jeunesse, ce sont des thèmes déjà abordés mais l’angle de l’auteure est ici très différent. Elle ne nous parle pas seulement des migrants ou de la maladie d’Alzheimer mais met les deux en lien avec d’autres et décrit les interactions, les influences des situations des uns sur la vie des autres. Et le titre prend alors un autre sens.



J’ai aimé les portraits croisés des protagonistes de l’histoire et les émotions multiples qui se nouent entre eux. Le ton est juste d’un bout à l’autre, les réactions vraies et le rythme dynamique. Trois qualités essentielles pour un roman jeunesse, selon moi. Faire rire et sourire avec des thèmes aussi durs n’est pas évident mais Catherine Deschepper y parvient avec subtilité. La structure du récit épouse les saisons tout en créant des liens entre elles et les sentiments de chacun, les unes influençant les autres. La plume de l’auteure est vive et alerte, teintée d’humour et la description des ambiances et des personnages est le fruit d’une observation très fine.



Bref, je ne peux que vous conseiller ce roman intelligent, tendre et vrai.
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Un kiwi dans le cendrier

Pour preuve de son goût du décalé, du pas de côté pour aborder son sujet principal (les femmes), Catherine Deschepper prend la peine de nous rapporter les définitions des mots : kiwi, cendrier et incongru. Effectivement le titre peut paraître incongru mais vous devrez patienter un certain temps pour comprendre ce choix. (Petite preuve supplémentaire s’il en est, l’auteure m’a dédicacé ce livre en écrivant à l’envers…)



La première nouvelle, Etat civil, plante le décor ou plutôt les portraits de ces trois femmes que nous accompagnerons tout au long du recueil (ou elles nous accompagneront, car chaque lecteur/lectrice pourra sans doute reconnaître l’une ou l’autre situation entre les lignes) : Emma, mariée, la trentaine volontairement rayonnante et couronnée de quatre enfants ; Inès, quarante ans, deux enfants, fraîchement et douloureusement divorcée ; Zoé, la célibataire conquérante de cinquante ans, peur de rien et la liberté chevillée au corps.



Nous suivrons donc les trois » héroïnes » à travers des thèmes variés, le corps, l’amour, le sexe, les vacances, les loisirs, le sweet home, l’enfance, le temps. Chacune aborde ces pans du quotidien avec le caractère et la philosophie de vie qui est la sienne. Emma a décidé que sa vie serait digne d’un conte de fées (j’ai souri à chaque fois que son mari est évoqué, jamais autrement que par « le prince ») et elle fait tout pour en préserver les apparences et la réalité, le tout en élevant quatre enfants en bas âge… Inès, récemment divorcée, éprouve toutes les douleurs de la séparation mais veut se relever, se reconstruire et ne plus retomber sur un aussi mauvais numéro que le mari en allé. Quant à Zoé, femme libre, elle attire les hommes, les copines en mal de confidences, les enfants qui reconnaissent en elle l’enfant toujours prête à partager leurs jeux, bref c’est l’amie et la maîtresse idéale.



Vous vous doutez bien que, pour atteindre et réussir ces idéaux, il y a un prix à payer : des compromis interminables, une certaine solitude, l’impression de n’être parfois pas à sa place ou plus prosaïquement, ne plus jamais pouvoir prendre un bain seule, passer beaucoup de temps à pousser sa valise entre deux maisons sur des pavés inégaux ou encore se résoudre à fréquenter les sites de rencontres.



La plume de Catherine Deschepper est trempée dans l’humour et l’ironie. Si elle parle de ses trois drôles de dames à la troisième personne, avec un apparent détachement, et dans un style un peu haché (qui suit en fait la réflexion, les hésitations qu’on peut avoir face au quotidien) (et il est loin d’être inélégant, ce style), on sent bien que ses nouvelles sont nourries d’une observation très fine de multiples femmes, d’introspection aussi, d’interrogations qui hantent la vie des femmes modernes (je n’allais quand même pas écrire des femmes d’aujourd’hui car la psychologie de madame Deschepper est autrement fine que dans un magazine féminin) et aussi d’autodérision. Cela demande de l’attention, pour ne pas perdre une goutte de plaisir. En un mot, c’est passionnant. C’est brillant. C’est jubilatoire. Coup de coeur !
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Le complexe du gastéropode

Comme il se doit, je remercie Babelio et les éditions Weyrich, qui m’ont permis de découvrir ce livre, remporté dans le cadre de la masse critique « Littérature » de septembre dernier.

Comme l’annonce le 4e de couverture, je m’attendais à l’histoire de quatre auteurs débutants en résidence avec une espèce de « prix » pour un seul d’entre eux à la clé, et en effet il s’agit bien de ça… mais surtout de tout autre chose, je crois que rien ne peut vraiment préparer à ce petit livre complètement déjanté et extrêmement réjouissant !



Pour être un peu plus claire : la SAD, Société des Auteurs en Devenir, obscure société active dans le monde des lettres francophones de Belgique, a remarqué – avec raison - qu’un certain nombre d’auteurs belges prometteurs disparaissent, généralement en France (où le Belge est à la mode), dès lors qu’un premier livre a remporté un certain succès. Pour enrayer cette fuite des cerveaux créateurs, cette Société a mis en place une résidence d’écriture, chaque année, dans le château d’un noblion oublié qui en profite pour asseoir son nom comme mécène des Lettres. C’est là que quelques auteurs triés sur le volet sont conviés, dans un cadre et une ambiance propices à la création de ce qui serait leur deuxième œuvre, qu’ils seraient alors, en sus, enclins à publier auprès d’une maison d’édition belge ! Je ne dirai rien de plus de ces quatre personnages principaux, que l’on découvre au fil des pages et de la narration de l’autrice… À vrai dire, elle digresse tellement (pour notre plus grand plaisir, cela dit, j’y reviens) que j’ai eu un peu de mal, au début, à reconnaître qui était qui parmi ces personnages, mais peu à peu on s’y fait et on les reconnaît plus que bien !



Ainsi donc, ces quatre jeunes auteurs, retenus pour une énième résidence, vont vivre une espèce de huis-clos créatif chez le compte Gédéon de Ducart d’Oise et son épouse Marie-Maxine. Mais ne vous attendez pas à une histoire vaguement policière où il ne resterait qu’un écrivain à la fin (même si c’est bien le cas), ni à un roman de littérature contemporaine où la psychologie et autres états d’âme des personnages seraient décortiqués à la loupe (pourtant c’est aussi le cas), ni même à un pseudo-pamphlet qui attaquerait le monde de l’édition (encore une fois, cependant, il y a de ça aussi).

Non, l’autrice part de ces quelques points pour développer l’histoire de ces quatre personnages et leurs pensées plus ou moins saugrenues, ainsi que quelques personnages secondaires truculents, avec un petit côté policier malgré tout, et ce qui ressemble à une critique du monde de l’édition – même si j’ai ressenti davantage un regret envers ces (nombreux) auteurs belges qui se font éditer en France dès que possible, qu’une attaque quelconque envers le monde de l’édition en tant que tel ; ce sont davantage les journalistes et autres critiques pseudo-littéraires qui sont, eux, bel et bien égratignés !



Mais surtout, elle laisse aller sa plume dans une espèce de logorrhée où le lecteur (et sachez que j’utilise là ce bon vieil adage grammatical de la langue française : « le lecteur » englobe bien entendu la lectrice que je suis, puisque « le masculin l’emporte » … et pour le coup, je ne m’en porte pas plus mal !) est interpelé encore et encore, dans ce qui s’apparente parfois à un « délire », mais on se laisse embarquer avec bonheur, car une chose évidente transparaît dans tout cela : l’autrice s’amuse sans aucun complexe (tiens, tiens !) et, dès lors, est directement convaincante et entraînante.

Le lecteur est ainsi convié en observateur, à regarder aux côtés de l’autrice l’envers du décor, les coulisses, ce qui se passe au jour le jour dans le secret de chacun, bien au-delà du processus de création, ou peut-être en plein dans ce processus… mais qui se révèle bien différent de tout ce qu’on pouvait imaginer. On n’est jamais en présence d’un auteur occupé consciencieusement à remplir des pages dans un cahier ou sur son portable, ou au pire à faire des recherches pour son histoire, mais on rencontre des personnages (un peu) excessifs, d’une façon ou d’une autre, durant ces quelques jours au château, dans des situations improbables et de plus en plus burlesques.



C’est sans doute là le mot qui définit le mieux le livre : burlesque, auquel on pourrait associer drôle, déjanté, surréaliste même parfois, à la façon d’un vaudeville – comme le dit l’autrice elle-même en entête du chapitre 27 : « (…) on ne peut s’empêcher de penser que ce roman mal fagoté ferait tout de même une bien belle pièce de théâtre ! »

Ce simple bout de phrase montre aussi un autre aspect essentiel de ce livre : dans cette espèce de dialogue constant, quoique complètement loufoque, que l’autrice a initié avec son lecteur, l’autodérision est omniprésente. Et, à mon sens (mais je ne suis évidemment pas neutre), c’est cette autodérision « typiquement belge », comme on peut la retrouver dans les dessins ou écrits de certains de nos humoristes de papier : je pense par exemple au Chat, celui des débuts en tout cas, d’un Philippe Geluck par exemple (pour ne citer que l’un des plus connus… qui a lui aussi viré à la France !), ou aux dessins-chroniques quotidiens d’un Pierre Kroll, resté bien fidèle, quant à lui, à notre national journal Le Soir entre autres – inutile de préciser, je crois, que j’apprécie les deux.



D’ailleurs, bien au-delà de cette autodérision, j’ai beaucoup aimé le fait que, tout au long du livre, l’autrice assume cette belgitude… même si c’est parfois une arme à double tranchant.

J’ai trouvé surprenant, par exemple, que le verbe « se racrapoter », indéniable belgicisme, soit expliqué en note de bas de page, alors que tant d’autres expressions régionales émaillent ce livre, mais ne sont quant à elles jamais relevées. Je ne suis certes pas spécialiste des belgicismes, après tout c’est « ma langue » et j’utilise tout un tas de ces mots / expressions au quotidien, et pour un certain nombre je ne suis même pas consciente que ça puisse paraître quelque peu obscur ou, au mieux, rigolo pour des non-Belges ! Par ailleurs, on trouve çà et là quelques traits qui confinent à la blague d’initié (ces jolies « private jokes » qui ne font rire que ceux qui savent) : en effet, à part les quelques personnes qui sont au courant, qui se soucie vraiment de savoir que la bataille de Waterloo n’a pas eu lieu… à Waterloo, mais bien dans l’actuelle commune à part ça inconnue de Braine-l’Alleud ? Même parmi mes compatriotes, peu s’intéressent vraiment à ce détail géographique de quelques kilomètres !

Tout ça pour dire : oui à la belgitude assumée, c’est un aspect qui me plaît toujours beaucoup… mais ici, elle est peut-être un peu trop poussée (quoique... où est la limite ?), si bien que je ne peux m’empêcher de me demander comment les francophones de France, de Suisse, du Québec ou d’Afrique pourraient recevoir un tel livre ?... Représentatif de notre littérature francophone nationale ? Peut-être bien que oui, même s’il y a tant d’autres choses… mais après tout, nous avons d’autres auteur.e.s et d’autres styles qu’Amélie Nothomb ! (ou un Éric-Emmanuel Schmitt par exemple, qui, lui, a fait le chemin inverse, mais reste édité par des maisons françaises)

Je tiens quand même à relever, aussi, que, malgré ou peut-être grâce à cette belgitude assumée jusque dans les choix des mots et autres expressions, on a là un livre d’une toute bonne qualité littéraire ! Déjanté, oui, mais avec le style !



Je ne peux terminer ce livre sans un détour par le titre ou la couverture… Il faut avoir lu le premier pour comprendre le second ou, plus exactement, pour être capable de l’interpréter, donc en réalité je ne peux pas en dire tellement plus ! Mais je pense que ce titre volontairement mystérieux permet à chacun de donner sa propre explication. En revanche, la couverture me dérange bien un peu… car si l’escargot est bien un gastéropode, le gastéropode-vedette du livre n’est pas l’escargot, mais la limace ! Certes, une limace en train de faire la course, comme le suggère cette photo de couverture, ça aurait été beaucoup moins attirant (et donc moins vendeur) que le brave escargot dont l’image suscite toujours une certaine sympathie. Mais c’est dommage…



Bref, j’ai beaucoup apprécié ce livre déjanté, loufoque, burlesque à la belgitude assumée, parfois jusqu’à un certain extrême. Il est évidemment très drôle – même si, pour moi, je ne peux pas dire que j’aie ri aux éclats, en revanche c’est un livre qui se lit avec un sourire constant, car cet humour plein d’autodérision, qui entraîne le lecteur sans faiblir, est une indéniable invitation à la bonne humeur, sans complexe.

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Le complexe du gastéropode

Le complexe du gastéropode est un court roman proposé par Catherine Descheppe. Il est paru chez Weyrich en août 2021.

Ce roman prend la forme d'un huis-clos.

Quatre écrivains participent à un séjour dans un château pour se concentrer sur leur travail d'écriture. La cohabitation tant entre les écrivains qu'avec les hôtes devient rapidement truculente.

Pourtant fan de huis-clos, j'ai eu énormément de mal à m'immerger dans l'atmosphère mise en place par l'auteure. Je suis passée également complètement à côté de la psychologie des personnages que j'ai trouvée trop complexe et exposée de façon trop disparate tout au long du récit.

Concernant le style d'écriture, je l'ai trouvé un peu trop alambiqué même si

certains chapitres virant au burlesque m'ont bien fait rire.

Malgré cela, je pense être complètement passée à côté de ce roman et du message que souhaitait faire passer l'auteure.



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