Catherine Millet présentait son roman "Commencements" le 7 octobre 2022 à La Galerne.
Je suis toujours profondément admiratrice du temps suspendu dans lequel vivent les baiseurs et qui retient ma sympathie. Il peut s'être passé dix ans, que dis-je vingt ans et plus encore, depuis qu'ils ont joui avec une femme, ils vous en parlent, ou s'adressent à elle, comme si c'était hier. Leur plaisir est une fleur vivace qui ne connaît pas les saisons. Elle s'épanouit dans une serre qui isole des contingences extérieures et qui fait qu'ils voient toujours de la même façon le corps qu'ils ont tenu contre eux, celui-ci serait-il flétri ou rigidifié dans une robe de bure.
Je n'ai pas été très étonnée lorsque des critiques hostiles à mon livre ont été exprimées par des gens dont on peut croire, pourtant, qu'ils ont eux-mêmes une sexualité relativement affranchie. Ceux-ci doivent trouver leur plaisir dans la transgression, donc avoir besoin de maintenir des tabous, notamment dans la parole, pour continuer de jouir en cachette. N'ayant jamais attribué au sexe une valeur sacrée, je n'ai jamais éprouvé le besoin de l'enfermement dans un tabernacle comme le font finalement ceux qui me reprochent de faire tomber tout mystère.

Comme je me suis décidée à lire les livres dont tout le monde parle ou a parlé, ceux qui font ou ont fait le buzz, me voilà empruntant celui-ci à la bibliothèque...
Je n'ai survécu qu'à.... 5 pages!
Aucun style, l'auteur a posé ses mots tels qu'ils sont sortis de sa tête. L'écriture est lourde, désordonnée, saccadée. Le style me fait penser à des discussions de comptoir ou de blablatages entre copines "ah oui, je t'ai pas dit..." "ah mais ca me fait penser que j'ai aussi vu machin qui faisait chose" "c'est vrai? mais c'est comme la dinde que j'ai fait cuire à Noel!" "Oui, et le facteur il met la marmotte dans le papier d'alu".
Il faudrait être dans la tête de l'auteur, suivre son cheminement de pensée. Bien sûr, ce n'est qu'une ecrivaine d'essai qu'on ne peut juger comme on le ferait d'un grand auteur.
Je ne saurais parler donc du contenu du livre en lui-même puisque je n'ai pas survécu au style de Mme Millet dès les premières pages....

[Incipit.]
Si l'on ne croit pas à la prédestination, alors, il faut admettre que les circonstances d'une rencontre, que par facilité nous attribuons au hasard, sont en fait le résultat d'une incalculable suite de décisions, prises à chaque carrefour dans notre vie, et qui nous ont secrètement orientés vers elle. Ce n'est pas que nous ayons recherché ni même souhaité, serait-ce du fond de notre inconscient, toutes nos rencontres, même les plus importantes. Plutôt, chacun d'entre nous agit à la façon d'un artiste ou d'un écrivain qui construit son oeuvre dans une succession de choix ; un geste ou un mot ne détermine pas inéluctablement le geste ou le mot qui suit, mais place au contraire son auteur devant un nouveau choix. Un peintre qui a posé une touche de rouge peut choisir de l'éteindre en lui juxtaposant une touche de violet ; il peut choisir de la faire vibrer par une touche de vert. Au bout du compte, il aura beau s'être mis au travail avec quelque idée de son tableau achevé en tête, la somme de toutes les décisions qu'il aura prises, sans les avoir toutes prévues, fera apparaître un autre résultat. Ainsi nous conduisons notre vie par un enchaînement d'actes bien plus délibérés que nous ne sommes prêts à l'admettre - parce qu'en assumer clairement toute la responsabilité serait un fardeau trop lourd -, et qui pourtant nous mettent sur le chemin de personnes vers qui nous ne pensons pas nous être dirigés depuis si longtemps.
Les plaisirs sont ressentis comme les plus intenses, les douleurs comme les plus profondes lorsqu'ils mobilisent le plus de canaux émotifs, qu'ils drainent une quantité incalculable de souvenirs heureux ou malheureux, d’espérances réalisées ou brisées.
Le désir exaspéré est un dictateur naïf qui ne croit pas qu'on puisse ni s'opposer à lui ni même le contrarier.
Ceux qui obéissent à des principes moraux sont sans doute mieux armés pour affronter les manifestations de la jalousie que ceux que leur philosophie libertine laisse désemparés face à des explosions passionnelles.
les
femmes d’aujourd’hui ont une plus grande marge de
manoeuvre sexuelle pour partir à la recherche de leur
épanouissement intime, mais la question reste la
même : un bon amant, ça ne se trouve pas comme ça…
Bref, je suis entrée dans la vie sexuelle adulte comme, petite fille, je m'engouffrais dans le tunnel du train fantôme, à l'aveugle, pour le plaisir d'être ballottée et saisie au hasard. Ou encore : absorbée comme une grenouille par un serpent.
Alors que les rêves de l’adulte projettent celui-ci dans le futur, ceux de l’enfant sont immédiatement palpables. De plus, au fur et à mesure que l’adulte réalise ses rêves, son monde imaginaire se rétrécit parce qu’il doit accepter que la réalité n’est jamais aussi magique que les rêves si bien que, sans même s’en rendre compte, il adapte ceux-ci aux limites du raisonnable, renonce à l’Amérique pour la villa Sans-Souci, alors que, tout le temps que dure l’enfance, les rêves s’amplifient tant que l’espace de vie s’élargit.