Cédric Sire

Quand on se plongeait dans l’étude des comportements et des relations humaines, une des premières choses qu’on constatait, c’est que rien n’arrivait par hasard. Il n’y avait pas de coïncidences. Uniquement des choix.

Mais elle avait ses addictions bien à elle.

Comme Barbara.

Au final, c’était elle, l’unique raison de son angoisse.

Ah, si elle avait su ! Si elle s’était doutée qu’on puisse devenir accro à ce point. C’était tombé sur elle, comme ça, sans qu’elle le voie venir. Mais voit-on jamais venir ce genre de choses ?

Pour arrêter un monstre, il faut parfois être un monstre.

— Tu ne sais donc pas d’où viennent ces produits ? Réfléchis un peu. Ils sont fabriqués avec des matières animales. À partir d’animaux morts. Il y a toujours une vie inférieure à prendre pour pouvoir améliorer la sienne. Pour essayer d’effacer des rides inévitables, pour raffermir la peau vieillissante, régénérer nos organes malades. C’est exactement ce que je fais.

Les monstres sont dans notre tête, qu'on soit enfant ou vieillard.

Un DJ invisible avait pris le relais, enchaînant tube après tube, des morceaux lourds et répétitifs, et à présent les spectres dansaient, les yeux fermés, le centre de gravité très bas, de droite à gauche, comme des zombies étranges et sensuels, absorbés dans leur monde intérieur, dans leur propre inertie au sein du désordre.

Elle ôta son masque et Falconnier put découvrir la totalité de ses traits ronds et purs, à la beauté presque naïve. Des taches de rousseur déposaient comme une poudre d'étoiles sur ses pommettes et le dessus de son nez droit.

Résoudre les énigmes. Ne pas dormir, ne s'arrêter à aucun obstacle tant que l'animal sauvage n'est pas à terre, dévoilé et vaincu.

Il songea à leur toute première rencontre, aux beaux-arts, quand il s'était inscrit à son cours presque par hasard, et qu'il l'avait vue entrer dans la salle de dessin. Il se souvenait très précisément de cet instant. Cela avait été comme une révélation, il n'avait pu détacher ses yeux d'elle. Et il avait pensé, c'est elle. Ça ne peut être qu'elle. Au premier regard il avait été fou d'elle, et il avait accepté cela, accepté que sa vie tout entière ne dépendrait plus que d'elle, de son sourire, de cette rivière d'enthousiasme sans fin qu'était Kristel. Dès cette seconde, il lui avait été impossible d'imaginer sa vie sans elle.

Aurore était une de ces femmes rayonnantes, capable de dégager une affolante sensualité même sans avoir dormi, ni s'être maquillée.

De plus, elle était fascinée par cette capacité d’escalade qu’avait la haine, tout le temps, chez tout le monde.
De la moindre étincelle surgissait un incendie redoutable.

Il n'y avait qu'une solution pour vaincre cette peur.
Il lui fallait l'affronter.
Il lui fallait prendre des décisions.
Qui allaient encore une fois changer sa vie.

Après l'orage, après les cris et après les morts, il n'y aura jamais que du vide et les pleurs de ceux qui restent.

Lu il y a déjà un gros bout de temps et relu récemment pour une critique aux élèves ... Le roman me laisse encore une impression mitigée ... D'une part le thème me plaît beaucoup, apporte un côté meurtre légendaire qui éclaire une nuit trouble, chevauche des mythologies curieuses et fonce droit devant sur des chemins bien écrasés et couverts de boue ... C'est distrayant, rapide et très imagé ... D'autre part et malgré mon énorme attrait pour Nathaniel, le dit enfant des cimetières, tombes, morgues et autres joyeusetés je me suis pris à éprouver un rejet viscéral pour l'inspecteur de la bande, le Vauvert balèze aux gros bras, à la sale gueule et aux manières criardes ... Impossible pour moi de lui trouver un point positif ... Au point qu'ayant la collection entière, j'éprouve des difficultés à continuer les autres romans de l'auteur ... Et donc une lecture en dents de scie, entre intérêt et ennui par moments, un côté un peu trop americanisé parfois - les légendes urbaines par chez nous, mwouais - des personnages intéressants même si parfois stéréotypés (mais c'est son premier grand roman tout de même), des crimes crapuleux amusants et graphiques, une petite pointe de pudeur sous des litres de sang, une écriture assez souple et incisive ... Il faut essayer et se faire sa propre idée !

Après l'orage, après les cris et après les morts, tous ces morts pour rien. Il restera encore les mensonges. Ceux-là, rien ne les lavera. Ils perdureront.

Le plus insupportable, c'était que ces monstres menaient des existences ordinaires le reste du temps. Insoupçonnés de leurs amis et collègues de travail, ils revêtaient l'apparence trompeuse des agneaux.

Son unique expérience en matière de salon littéraire se limitait à un poste de chauffeur, trois ans auparavant. Elle avait été assignée à un auteur de romans policiers du nom d'Olivier Norek, qui venait de se voir décerner un prix littéraire, et qui semblait connaître un succès fou auprès du public féminin. Il ne lui avait demandé qu'une chose : l'emmener faire la tournée des boîtes de nuit, en compagnie de plusieurs de ses collègues. Elle se souvenait de la consommation excessive d'alcool de cette joyeuse bande et de la bonne humeur permanente.

Il aperçu Cassandre Klem, un peu plus loin dans le couloir, qui lui faisait coucou de la main.
- Mais vous le savez très bien, ajouta-t-elle avec un clin d'œil qui n'avait rien d'amical. On peut retrouver les fichiers effaces si on est malin. Votre problème, c'est que vous croyez être le meilleur.
- Je le suis, grogna Falconnier, mais sa voix était voilée.
Il regardait tour à tour la procureure, le grand policier et cette gamine attardée dans son sweat-shirt à capuche. L'humiliation était intolérable.
- Vous êtes juste très bon, dit encore Klem. Mais entre nous, loin d'être un super héros...
Blême, il s'abstint de commentaires.

Elle marcha dans les rues au hasard tandis que les voix se muaient en une spirale folle dans sa tête. Elle s'égara dans des ruelles sombres, trébucha à moitié, et finit par s'arrêter devant un alignement de containers de poubelles. L'odeur qui se dégageait des bennes était écœurante. A l'image du monde dans lequel elle évoluait. La décomposition, cachée sous la surface polie. Les pulsions inavouables.

Dardeau dégageait une énergie bouillonnante qui faisait aussitôt penser à un Valmont ou un Don Juan. Il était évident que l'homme le savait et en jouait. Estel comprenait sans mal l'impact d'une telle aura sur le lectorat de ménagères en mal de frissons.