Sous les fleurs d’un monde flottant
avec mon riz brun
et mon saké blanc
Matsuo Bashô
Panique —
le mur de pierre s’effondre
sous les amours des chats
//Shiki
Enamouré
le chat oublie le riz
qui colle à ses moustaches
//Tan Taigi
Près de la chandelle
une pivoine
en silence
//Morikawa Kyoriku
Nuit d’été —
le bruit de mes socques
fait vibrer le silence
//Bashô
Rien qui m’appartienne —
sinon la paix du coeur
et la fraîcheur de l’air
- Kobayashi Issa
Squelettes
enveloppés de soie
nous contemplons les fleurs
- Ueshima Onitsura
Un monde
qui souffre
sous un manteau de fleurs
- Kobayashi Issa
Papillon qui bats des ailes
je suis comme toi —
poussière d’être !
- Kobayashi Issa
Retombé au sol
le cerf-volant
a égaré son âme
- Kubota Kuhonta
Jour de brume —
les nymphes du ciel
auraient-elles le vague à l’âme ?
- Kobayashi Issa
On vieillit —
même la longueur du jour
est source de larmes
- Kobayashi Issa
"Couchant d'automne -
la solitude aussi
est une joie"
Yosa Buson
Devant les chrysanthèmes
ma vie
fait silence
Mizuhara Shūōshi
Papillon qui bat des ailes
je suis comme toi
poussière d'être
Kobayashi Issa
Aux admirateurs de lune
les nuages parfois
offrent une pause
Matsuo Bashō
Je crois au Bouddha -
à la réalité verdoyante
des épis de blé !
Ogiwara Seisensui
Au bout de sa langue
il cache des paysages -
l'étranger
Horomito Gin
D'une lente amplitude
mon pouls à l'unisson des vagues -
les mouettes flottent
Sumitaku Kenshin
![](https://images-eu.ssl-images-amazon.com/images/I/51aN2YOE8uL._SX95_.jpg)
Le sol est constellé de feuilles, recouvrant une couche de mousse vert vif comme du matcha. Je contemple ce tapis fauve à mes pieds comme si je regardais la vie même flamboyer de ses derniers feux. L'hiver n'est pas encore là (du reste l'hiver est encore une saison de la vie), pourtant tout s'accélère : la fin viendra, comment l'ignorer désormais ?
« L'éphémère » n'est plus un concept, mais un sentiment d'une intensité poignante. Tout paraît plus précieux, les émotions sont plus profondes, plus riches, les sensations plus vives...
Aucune mélancolie, pourtant, n'émane de cet érable à la stature majestueuse, symbole même de l'automne. Les feuilles qu'il sème sous ses branches dispensent le message non d'une fin à venir mais d'un cycle qui se perpétuera...
L'automne est plein de mains coupées
Non non ce sont des feuilles mortes
Aux vers d'Apollinaire semble répondre le haiku de Samboku, inconnu dont subsiste seulement cet unique poème, récompensé en 1672 par Bashô lors d'un concours :
Telle la main droite
d'une sage-femme —
la feuille d'érable en automne
... Ce qui demeure en moi de cette journée parfaite : le brouillard de lumière vert pâle entre les troncs d'un bois de bambous traversé à la hâte et, dans le jardin de Fujiwara, le voile éclatant du feuillage du grand érable, comme la lumière du soleil derrière les paupières closes.
'Choses amusantes', p. 236-237