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Citations de Cornelia Read (50)


Elle nous avait briefées sur les meilleurs chinois qui livraient (Empire Se-Chouan Greenwich, et surtout pas Empire Se-Chouan Village, même si les deux restos n’étaient qu’à cinquante mètres l’un de l’autre), sur les meilleurs bagels (H&H), et sur la teinturerie la plus proche qui proposait le nettoyage à sec en moins de vingt-quatre heures sans payer de supplément, à condition de se pointer à sept heures du matin et d’être gentille avec la dame de la caisse.
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L’appartement était un trois-pièces d’avant-guerre dans Chelsea, dans la 16e Rue ouest, entre la Sixième et la Septième Avenue, sans portier. A présent, Sue se cassait le cul à hurler au téléphone pour une société de production qui réalisait des publicités télévisées, dans le nord de Manhattan, ce qui lui avait appris à exploiter au maximum les ressources de la ville à partir de nos revenus de misère mis en commun.
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A l’origine, c’est Sue qui avait trouvé notre appartement, à l’époque où elle était encore étudiante en cinéma à l’université de New York. Je l’avais rencontrée au pensionnat, un matin de septembre : elle s’était avancée et s’était présentée à moi parce que nous étions toutes les deux déléguées de classe, elle en première et moi en troisième année. L’année suivante, je lui avais demandé de veiller sur ma petite sœur Pagan quand elle était venue me rejoindre sur la côte est, dans la classe de Sue.
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Consciente des regards qui pesaient sur elle, la jouvencelle psychotique me lâcha et resta plantée là, les poings serrés, vibrant comme un diapason en colère.

— Enfin, merde, c’est quand même pas la fin du monde de m’avoir tenu la porte ? demandai-je.

Sa main droite revint au niveau de ma poitrine, le doigt en avant.

— Il ! Pic. Va ! Pic. Falloir ! Pic. Pic. Changer de ton ! Pic. Pic. PIC.

Elle me fit reculer jusqu’à la vitre du comptoir, derrière laquelle s’étendait un pittoresque paysage de chantilly illuminé par des projecteurs.
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La fille de la porte, encore plus furibarde, m’obligea à me retourner pour me hurler au visage “Salope !”, si près que je me retrouvai constellée de postillons.

— Euh… dis-je en essayant de reculer un peu, je vous demande pardon ?

Elle me serra l’épaule plus fort et se mit à me perforer la poitrine de son doigt osseux.

— Eh ! Toi ! Tu…

Pic. Pic. Pic.

— … te prends pour qui ?

Le dernier coup faillit casser la french manucure de son ongle, en plein milieu du logo “Lefty’s Tattoo and Piercing, Chula Vista” sur mon (presque) plus beau tee-shirt noir.

— Je me prends pour Madeline Ludlam Fabyan Dare, dis-je en levant le menton pour la regarder de haut, par-dessus mon nez. Pourquoi ?

— Salope ! cracha ma squelettique ennemie, de façon un peu redondante.

Tous les clients attablés nous observaient maintenant, leurs fourchettes chargées de gâteaux suspendues en l’air.
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L’intérieur de la pâtisserie paraissait sombre, après ce soleil éclatant de fin d’été qui illuminait le trottoir. Il me faudrait quelques secondes pour que mes yeux s’adaptent, alors je me contentai de humer les senteurs de beurre et de vanille qui parfumaient la petite boutique.

Maman demanda notre gâteau de fête à la caisse, tandis qu’une bande d’aficionados des sucreries goûtait des sachertorte et des éclairs, assis à une dizaine de minuscules tables serrées à travers l’étendue de carrelage noir et blanc.

Alors que la tenancière posait un carton rose sur le comptoir devant ma mère, je sentis une griffe de ptérodactyle décharné s’agripper à mon épaule.

La fille de la porte, encore plus furibarde, m’obligea à me retourner pour me hurler au visage “Salope !”, si près que je me retrouvai constellée de postillons.
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Après avoir tapoté ses cheveux bruns, coupés court, maman passa devant la fille d’un air désinvolte.

Stupéfaite de cette effronterie, la fille glapit :

— Et moi, je suis quoi, le portier ?

Putain, ma poule, arrête de te prendre pour le centre du monde.

Comme elle restait là sans bouger, je murmurai :

— Pourquoi, vous avez un problème avec les portiers ?

Et ce fut mon tour d’entrer.
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La fausse blonde ouvrit la porte, puis se pétrifia comme si elle avait tout à coup compris avec horreur qu’elle pourrait peut-être un jour réellement ingérer autre chose que des diurétiques et une demi-branche de céleri.
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A côté de l’entrée de la pâtisserie se tenait une de ces fausses blondes qui n’ont que la peau sur les os et qu’un coup de vent suffirait à renverser. Elle était maquillée mi-hôtesse de l’air, mi-acteur de kabuki, et elle vacillait au sommet d’escarpins d’un chic douloureux, comme en portent les garces qui se chaussent chez Bergdorf.

Je me demandai une fois de plus pourquoi il y a des femmes désespérées qui s’emmerdent à porter ce genre d’instruments de torture. Alors que, moi, c’est plutôt les autres que j’emmerde avec mes chaussures, et depuis longtemps.
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— Ça doit être là, dit-elle en désignant une pâtisserie vaguement miteuse, sur le trottoir d’en face, juste au-dessus de Waverly Place.

Nous traversâmes la Sixième Avenue au pas de course, au feu rouge. Maman ouvrait la voie. Elle n’habitait plus Manhattan depuis 1965, mais il y a des habitudes qui ne se perdent pas.
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Je venais de passer quatre ans dans ce qu’on désigne, par euphémisme, comme “le cœur du pays”, et j’étais donc plus que ravie d’être de retour dans ma ville natale.

C’était au début de l’automne, il faisait un temps absolument superbe. Je descendais la Sixième Avenue avec ma mère. Nous étions censées aller chercher le dessert pour la fête de ce soir-là, et j’étais d’excellente humeur.

A voir sa tête, maman aurait préféré être en train d’arracher les mauvaises herbes, de déplacer des tas de cailloux ou d’accomplir l’une de ces tâches épuisantes auxquelles on s’attelle à la campagne.
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A Manhattan, en plus, les restos chinois sont excellents, et ils livrent à domicile, ce que je considère – provisoirement – comme la réussite suprême du génie humain. Surtout quand ils vous offrent en plus des nouilles au sésame froides.

Je suis désolée, mais si en décrochant votre téléphone, tout ce qu’on peut vous apporter comme pitance, c’est une pizza tiède fournie par une grande chaîne merdique, je n’appelle pas ça la civilisation.
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C’est ça que j’aime, à New York : quand quelqu’un se conduit comme un sale con et que vous lui dites qu’il se conduit comme un sale con, les gens autour de vous trouvent ça bien.

Partout ailleurs, si je fais ça, les gens me trouvent odieuse.
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Avec une petite fortune américaine, on obtient au bout de trois générations de grands blonds qui doivent faire de gros efforts pour obtenir des notes médiocres à l'école, mais qui sont aussi calmes qu'une meute de vieux labradors flatulents.
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Elle n'était pas simplement belle, elle était littéralement renversante, et j'avais vu des inconnus blêmir et tituber dans la rue en la croisant. Le drame de ma copine, c'est qu'en plus elle est intelligente. Si elle avait été moche ou conne, elle aurait peut-être pu être heureuse.
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L’humilité l’emportait sur l’argent, l’intelligence ne signifiait rien sans la courtoisie, et notre loyauté les unes envers les autres était à la fois absolue et féroce, sur tous les sujets.
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Trop souvent, dans ma propre vie, j’avais éprouvé ce sentiment d’impuissance, d’incapacité à aider d’autres enfants quand cela aurait été si nécessaire. La seule chose qui avait changé, c’est que j’avais un corps d’adulte, désormais. Mais, à l’intérieur, je me sentais encore toute gamine, le petit garçon manqué qui avait envie de défendre toutes les victimes, dans la cour de récré ou à la maison, à coups de pied et à coups de poing.
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Les gamins des villes savent que les terrains vagues envahis par les broussailles abritent toutes sortes de bêtes dangereuses : des chiens féroces, des rats gros comme des blaireaux, avec de longues dents jaunes et tordues.
Et un grand terrain comme celui-ci devait également héberger toutes sortes de gens dangereux.
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C’était la statue de La Petite Sirène assise sur un rocher, dans le port de Copenhague, ses jambes se transformant en queue s’incurvant sur la pierre, le corps tordu à la hauteur de la taille de sorte qu’elle détourne timidement les yeux. On ignore si elle regrette la terre, la mer, ou les deux.
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Je caressais depuis longtemps l’espoir de faire revenir mon père en m’accrochant à tout ce qu’il avait laissé derrière lui, en fermant les yeux bien fort et en ne pensant qu’à des jolies choses. On allait nous donner une seconde chance, à tous les deux. Il suffisait d’appuyer sur le bouton “marche arrière” jusqu’à ce qu’on revienne au moment où il avait foutu le camp alors que j’avais quatre ans. Et on effacerait toutes les conneries qui s’étaient produites ensuite.
Ça ne risquait pas d’arriver.
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