Cynthia Bond -
Ruby .
Cynthia Bond vous présente son ouvrage "
Ruby" aux éditions Christian Bourgois. Retrouvez le livre : http://www.mollat.com/livres/bond-cynthia-
ruby-9782267028720.html Notes de Musique : Serenity de Jason Shaw - Vimeo Music Visitez le site : http://www.mollat.com/ Suivez la librairie mollat sur les réseaux sociaux : Facebook : https://www.facebook.com/Librairie.mollat?ref=ts Twitter : https://twitter.com/LibrairieMollat Instagram : https://instagram.com/librairie_mollat/ Dailymotion : http://www.dailymotion.com/user/Librairie_Mollat/1 Vimeo : https://vimeo.com/mollat Pinterest : https://www.pinterest.com/librairiemollat/ Tumblr : http://mollat-bordeaux.tumblr.com/ Soundcloud: https://soundcloud.com/librairie-mollat Blogs : http://blogs.mollat.com/
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"Son père buvait jusqu'au moindre sou que sa mère réussissait à trouver, ce qui le rendait méchant et amorphe, avec des yeux injectés de sang qui n'exprimaient que la haine à l'état pur.....
Jamais il ne se levait pour frapper un enfant, il était trop paresseux pour ça, mais si l'un d'eux avait le malheur de passer trop près de ses mains araignée, il attrapait un bras, une jambe et se mettait à taper avec ce qui lui tombait sous la main- un balai, un bâton, une poêle à frire, un marteau.................."
Donc Liberty ne dépend ni de l'Amérique, ni de Dieu, de rien. Merde, un endroit qui n'a jamais été baptisé par la loi de personne. [...]
Ce qui explique bien que le Diable l'ait inscrit dans son livre, il y a inscrit beaucoup d'hommes de Liberty, leur âme fait partie de la liste.
Ils l’avaient tous observé avec constance, s'enfoncer dans la folie. Leur inquiétude, mêlée d'une secrète satisfaction, s'était résorbée dans les replis de leurs corps, comme de la vaseline. Au bout d'un certain temps, ils levaient à peine le nez de leurs journaux quand Ruby débarquait. Ils niaient sa présence en baillant ou saluaient sa présence en crachant un jet de jus de tabac.
Ruby sentit la solitude avant qu’elle ne fût là. Sut que, en dépit de tout ce qu’elle allait devoir affronter quand elle quitterait cette petite baraque, la solitude serait le pire.
Puisqu'il n'y avait personne à qui demander des conseils, il inventa. Il commença par lui savonner la tête. D'emblée, ça tourna au noir. Il rinça avec une cruche en faisant couler l'eau dans un seau à part pour ne pas gâcher le bain chaud et propre. Il lui lava la tête une deuxième fois puis il recommença encore et encore. Au septième rinçage l'eau était presque claire. Ses cheveux ressemblaient maintenant à de la laine mouillée, lourde et noire.
Ils commencèrent à chouchoter sous ses doigts. Ils lui montrèrent où les séparer et quoi laisser de côté. Ils lui apprirent à écraser du gingembre sauvage et à le mélanger avec l'huile d'arachide, à tiédir la mixture, à la glisser dans les galeries creusées sous cette effervescence tout en massant du bout des doigts la peau du crâne. Il prit soudain conscience que les cheveux s'étaient adressés à lui toute la journée pendant qu'il faisait le ménage, lui expliquant ce qu'il devait acheter, ce dont ils avaient besoin .
La véranda retrouva son calme, chacun s’arrachant au puits des souvenirs. Chemin faisant, ils tombaient sur des pierres repères – souvenirs d’autres lynchages – famille et amis égorgés en plein champ, traînés à l’arrière des voitures, pendus à une branche basse. Dans l’esprit d’Ephram surgit l’image de son père mourant seul dans la forêt de pins.
Mais ce que Chauncy ne pouvait pas savoir, ce que le révérend ne pouvait pas imaginer, c’est qu’ils ne seraient jamais de taille à résister à une mère qui cherche ses petits.
"Mais il réfléchissait ainsi du temps où il respirait encore.
La mort avait beaucoup simplifié les choses. Jésus était un peu de bourre de tabac parti en fumée.Dieu le fruit du whisky distillé.Le nom que sa mère lui avait donné, Omar Jennings, et le nom qu'il avait inventé, le révérend Jennings, les deux n'étaient plus que poussière dans les cassures de ses chaussures."
Ma Tante ouvrit brusquement les yeux. " Me regarde pas comme ça gamin, je mords". Puis " Viens donc ici."
Ses yeux l'attrapèrent, comme un hameçon se plante dans les branchies d'un poisson. Il avança en tremblant.
"Comment tu t'appelles?"
- Ephram Jennings. Son regard s'adoucit
- Ah! le fils d'Otha?
- Oui M'dame
- T'as ses yeux... J'espère que t'auras pas sa chance.
Ephram avait envie de s'enfuir de la pièce mais quelque chose dans ce visage de pleine nuit le retenait. Elle lui toucha l'arrière du crâne en lui grattant doucement la nuque avec avec ses ongles.
T'es rien d'autre qu'un bréchet. L'os du pari comme on dit. Tu vois, là?
Elle lui toucha la base du crâne où elle tapota une petite bosse.
- Ça veut dire que tu vis sur des souhaits.
Elle lui appuya sur la nuque. - Le truc avec l'os du pari? Faut qu'il se casse en deux pour que les souhaits se réalisent. Et, y a toujours un perdant, mais n'empêche..."
Tu as été le trésor de ton père dès que tu es née et jusqu’à sa mort. Il disait souvent qu’il y avait des rubis enfouis au fond de toi. Souviens-toi, ma chérie, ne laisse jamais un homme extraire de toi ce qui fait ta richesse. Ne le laisse pas piocher dans le trésor de ton âme. Souviens-toi, tant que tu ne le donnes pas, il reste inaccessible. On pourra te mentir et chercher à te duper pour te l’arracher, ma chérie, et ils essaieront. On pourra lever la main sur toi, ou pire, on pourra te briser mais la seule façon d’obtenir ce qu’ils cherchent, c’est de te convaincre que tu n’as jamais possédé de trésor. De te convaincre qu’il n’y a là rien d’autre qu’un boulet de charbon.