Chronique du livre "Speed Queen" de Stewart O'Nan pour France 3.
Un animal de compagnie était, par définition, affectueux et malpropre, comme Rufus, mais surtout un être à aimer et qui vous aimait en dépit de vos défauts.
(Rufus est un chien)
Depuis les profondeurs de la nuit, comme un fantôme qui appelle à l'aide, Stahr * le réveilla. Il enfila son peignoir, tailla ses crayons et mit une bouilloire à chauffer. Il ouvrit son cahier et nota : «Stahr sait qu'il va mourir. La tragédie, ce n'est pas ça ; c'est Hollywood.»
[* Stahr est le personnage principal de l'ultime roman, posthume et inachevé, de Francis Scott Fitzgerald "Le dernier Nabab". Il est inspiré du producteur Irving Thalberg que l'auteur avait personnellement connu. Il meurt d'une pneumonie à l'âge de 37 ans.]
Elle eut une vision d'eux prisonniers d'un frêle esquif au milieu des eaux. Ce serait une sorte d'épreuve, comme la survie sur une île déserte – mais c'était ça, le mariage, non ? Ils devraient s'entraider ou mourir.
Depuis leur rencontre [NB : F-S Fitzgerald + Ernest Hemingway], il avait toujours servi de conscience politique, sinon artistique, à Scott. Qu'il fût déçu, compatissant, ou les deux, son opinion comptait beaucoup pour lui.Chaque jour, durant plusieurs semaines, il s'attendait à recevoir une lettre, un coup de téléphone ou un télégramme, prêt, comme un pauvre pécheur, à accepter son verdict, mais Hemingway ne se manifesta jamais.
L'idée c'est de me faire passer pour plus étrange que je suis et du coup les gens peuvent se dire qu'ils sont normaux.
Le danger des vacances, songea-t-elle, était d'avoir trop de temps pour réfléchir.
Elle envisagea de prendre une autre tasse de café mais elle savait que cela la précipiterait dans un tourbillon, la briserait en fragments, ses pensées filant en tous sens, la plupart périlleuses.
Il n'ya pas de deuxième acte dans les vies américaines (F.S. Fitzgerald - Epigraphe du livre)
Quand elle sortit de la voiture, le vent s'empara des cheveux de la fille et en recouvrit son visage, si bien que sa première vision des McPheron fut obscurcie par ses propres cheveux noirs et épais. Les deux vieux s'étaient habillés pour l'occasion. Ils portaient des chemises neuves avec des boutons-pressions en nacre et des pantalons du dimanche tout propres. Leurs visages rouges étaient rasés de près et leurs cheveux gris fer étaient coiffés bien à plat sur leurs crânes avec un excès considérable de gomina qui les laissait si épais et si raides que même les bourrasques ne parvenaient pas à les faire bouger.
Il avait du mal à se fixer longtemps sur une même pensée, alors pour occuper son esprit il se calait devant la télé. L'ennui, c'était que la moindre scène de film un peu poignante l'émouvait aux larmes. Un soir, il regardait Les Évadés, un de ses films préférés. Quand Morgan Freeman dit : « L'espoir est une bonne chose », il dut se détourner et inspirer profondément, plissant les yeux, craignant que quelqu'un le voie.
Avant même que l'avion ait amorcé sa descente, je me surprends à redouter les questions que mon enfance a laissées sans réponse. Annie. Mes parents. Mon propre temps perdu. Dès l'atterrissage, je sais que je ne serai plus capable de réfléchir clairement, que chaque Pizza Hut et chaque garage dont j'ai le souvenir, chaque portion de route que je connais par cœur me laissera abasourdi, comme l'amour.