Partie 3 sur 3. Rencontre avec Danielle Mitterrand autour de son ouvrage Mot à Mot - entretiens avec Yorgos Archimandritis (Le Cherche-midi).
Lorsque des "messieurs très sérieux", censés disposer d'une information exhaustive, me renvoient sans ménagement à mes utopies, je ne peux retenir un brin d'agacement devant leur ignorance et leur soumission à l'ordre établi.
Certains diront que je suis entêtée, mais comment ne pas l'être quand on croit à la cause que l'on défend.
Pour honorer la France et le travail de certains, François Mitterrand, président de la République, sera le premier invité officiel à Pretoria. Moi, je n'ai pu suivre ce voyage officiel qu'à distance, à la télévision, alitée à l'hôpital. Mon cœur tellement usé était de toutes ses pauvres forces avec eux là-bas... Et pourtant, je n'étais pas absente ; dans son discours d'accueil, le nouveau président rendit hommage à France-Libertés et nominativement « à Danielle Mitterrand, la présidente de cette fondation ». Cher Nelson Mandela... Une nouvelle page d'Histoire s'écrit pour les Sud-Africains.
718 - [Pocket n°10086, p. 329]
Le racisme, à l'évidence, concerne moins l'origine des êtres que l'épaisseur de leur portefeuille. Mais il a une fonction bien commode: tandis que les pauvres, étrangers ou non, s'entre-déchirent dans leur misère, ils ne se posent pas de question sur la logique qui les broie. La xénophobie, cette gangrène, nourrie par des démagogues en quête de pouvoir, gagne les esprits jusqu'au sein de l'Etat.
Chemin faisant, je m'interroge sur la capacité des pouvoirs et des hommes de décision à mettre en œuvre une construction pacifique du monde. Ils en parlent tous en toutes occasions mais se résoudre à toucher aux causes de l'injustice, origine des révoltes et des insurrections, ne leur vient pas à l'esprit. (p.94)

Vous, diplomates, vous devez maintenir de bonnes relations avec les pays où vous représentez la France, favoriser des échanges commerciaux et avoir une bonne table - réputation oblige! Vous vous sentez tenus d'absoudre les gouvernements, quelles que soient leurs pratiques. C'est votre affaire, par la mienne!
"Vos collègues font la même chose en Turquie, au désespoir des Kurdes! Et en Chine, malgré le Tibet! Je ne vais pas faire le tour du monde, ce serait trop désespérant! Vous exercez votre fonction d'une manière exemplaire dès qu'il s'agit de marchés et de compétitivité. Mais les cris des torturés, les gémissements des populations exterminées, les fracas des villages écrasés vous atteignent-ils? Doivent-ils être étouffés pour que les échanges commerciaux se réalisent? Quand j'entends les propos qui se propagent dans nos ambassades, j'ai envie de fuir au galop devant ce discours "commercialement correct". Et l'humainement nécessaire, existe-t-il à vos yeux?
(...) la valeur de l'argent, libéré de toute référence concrète, n'est plus que virtuelle. Elle peut faire le bonheur temporaire d'un Shlomo ou d'un Mardoshé, mais ne peut en aucun cas contribuer au bien-être réel de l'ensemble de l'humanité. Elle ne peut satisfaire que ceux qui identifient leur propre valeur humaine à celle de leur portefeuille en Bourse.
Chemin faisant, je m'interroge sur la capacité des pouvoirs et des hommes de décision à mettre en œuvre une construction pacifique du monde. Ils en parlent tous en toutes occasions mais se résoudre à toucher aux causes de l'injustice, origine des révoltes et des insurrections, ne leur vient pas à l'esprit. (p.94)
Plus tard, pendant des heures, le président Ortega va m'expliquer comment il a dû plier devant le diktat américain, renoncer à sa politique sociale et se soumettre à la loi des marchés ... en échange du démantèlement des mercenaires, entraînés et financés par cette même Amérique, qui harcèlent le Nicaragua!
... ne point confondre la résistance avec l'opposition politique. L'opposition ne s'oppose pas au pouvoir, et sa forme la plus aboutie est celle d'un parti d'opposition; tandis que la résistance, par définition, ne peut être un parti: elle n'est pas faite pour gouverner, mais ... pour résister.