Quelle différence existait-il entre le besoin et la cupidité ? Combien de poissons un homme pouvait-il tuer avant que cela ne devienne des meurtres gratuits ?

Il construisait quelque chose. On n'arrivait pas à savoir quoi, mais il était clair qu'il avait commencé au début de la matinée. Il y avait à coté de lui une petite tronçonneuse, un marteau et des clous, un niveau à bulle, une perceuse, des boulons et des clés. A l'aide de bouts de bois et de morceaux de ferraille ainsi que de tubes en carton, il fabriquait un labyrinthe composé de rampes, de tunnels, de ponts et d'échangeurs qui ressemblait à une version condensée du réseau d'autoroutes de Los Angeles. [...] Elle lui a demandé ce qu'il faisait, et il a répondu que c'était quelque chose pour les écureuils et pour moi à l'occasion de mon anniversaire. Et comment il appelait ça ? lui a-t-elle demandé.
"Un rabyrinthe.
- Merveilleux ! me suis-je exclamé.
- Sois pas sarcaustique, répliqua Bill Bob.
- Un rabyrinthe ! c'est pile ce qu'on voulait , les écureuils et moi.
- T'inquiète pas. Y auras pas de rats dedans.
- Ah, ouf.
- Comment ça marche ? demanda Eddy.
- Tu mets des cacahuètes dedans et tu t'éloignes pour regarder les écureuils venir et courir tout autour. Ca leur donnera une idée de ce qui les attend quand ils deviendront des gens. "
J'ai ricané.
Livre Cinquième - Au Bout de la Ligne -
Dernier Chapitre - p 461 -
-[...] j'aimerais aussi savoir pourquoi tu hurles "excellent" et "très bien" chaque fois que je dis que j'aimerais le savoir ? Tu t'attendais pas à ce que je réponde "c'est Dieu" ou"c'est mon âme" ?
Titus a eu l'air atterré.
- Gus! je suis un philosophe, pas un évangéliste ! C'est le "j'aimerais le savoir" qui est primordial. Se contenter de dire "c'est Dieu" et en rester là, c'est abandonner la quête avant même de l'avoir commencée. Chercher la vérité, la chercher désespérément, c'est rejeter toute forme de théorie, de dogme ou d'opinion préconçue jusqu'au moment où tu vois, où tu touches l'Être, la Chose elle-même, où tu fusionnes avec elle ! Personne n'a jamais découvert la vérité en répondant aux questions par des leçons ânonnées au catéchisme...
Livre Troisième : Personnages au Naturel
Chap-7- Où l'on philosophe - p.296 -
J'ai continué mon chemin, incapable de saisir les choses, mais empli d'espoir. Et lorsque les premiers rayons ont effleuré la cime des grands érables qui se dressaient sur la plus haute crête, que les doigts roses se sont fondus dans le bleu du ciel au-delà de la montagne et que les feuilles rouges se sont embrasées pour dessiner une large cicatrice écarlate au-dessus de l'or mat des aulnes qui ondoyaient comme une vague, un frisson m'a parcouru des pieds à la tête - à cet instant, ce fut comme si un vieil ami depuis longtemps perdu de vue cheminait, invisible, à mes côtés...
Livre Quatrième: La ligne de Lumière
Chap 4 - La Randonnée - p - 382 -
Quand le trapéziste est au milieu de son saut, que la tête du dompteur est à moitié dans la gueule du lion, que la scie du magicien traverse le corps de son assistante, même le gosse le moins futé du public comprend que ce n'est pas le moment de poser des questions.
Si j'ai réussi à garder mon flegme, je n'ai pas réussi à contrôler mes glandes. Trop de pluie dans une rivière entraîne une crue. Trop de sécrétions chez un adolescent entraînent des actes de vandalisme.
Livre Premier : Le parfait pêcheur à la ligne
Chap. 7 "Recevoir une éducation" & "J'vais te montrer" - p. 74 -
Papa est assis dans son fauteuil, en train de lire la page des sports du journal du dimanche. Je suis couché sur ses genoux. Plus tard, quand il se lèvera, il deviendra plein de choses - chemise de flanelle, ceinture en cuir, pantalon ample marron clair...-, mais pour le moment il forme un tout : un sol, une région, une planète. Ma tête repose sur l'un des grands accoudoirs rembourrés, mes pieds sur l'autre, et le reste de moi est là, sur les genoux de Papa.
Le journal me cache son visage, mais les grandes pages vibrent au rythme de sa respiration. Le joueur de base-ball sur l'une des photos a l'air sérieux. Je ne pose pas de questions, je ne demande rien. Je ne bouge pas. J'entends son souffle lent et régulier. Je sens son odeur de tabac.
(Incipit)
Parce qu'elle a abrité deux fils dans les eaux de son ventre, ma mère pense tout savoir sur le fœtus humain. Ce dernier, affirme-t-elle, n'est pas un nageur. Il ne ressemble ni à un poisson, ni à un phoque, ni à une anguille, ni même à une tortue : c'est un pauvre être maladroit, inadapté au milieu aquatique, une créature terrestre tâtonnante, désorientée par son immersion et impatiente d'y mettre fin. Mon frère, explique-t-elle, était un fœtus de ce genre. Pas moi.
(incipit)

PROGRAMME IDÉAL D'UNE JOURNÉE
1. Dormir : 6 heures
2. Se nourrir : 30 min (de préférence entre deux lancers ou en pêchant au coup)
3. École : 0 heure !
4. Bain, trône, etc : 15 min (inévitable).
5. Tâches ménagères et diverses : 30 min (jardiner, inutile ; épousseter, malsain ; propreté minimale, facile à obtenir).
6. Conversations autre que sur la pêche : 0h.
7. Transports : 45 min (vers une rivière poissonneuse).
8. Entretien du matériel/montage de mouches/fabrication de cannes/tenue du journal, etc. : 1h30 min.
9. Pêche : 14h30min par jour !
MANIÈRES DE CONCRÉTISER LE PROGRAMME IDÉAL
1. Finir l'école et pas d'université !
2. Aller seul dans des rivières où on peut pêcher toute l'année (côtières de préférence).
3. Éviter les amitiés, pêcheurs compris (pertes de temps en bavardages).
4. Essayer la caféine et la nicotine pour éliminer l'excès de sommeil.
5. Faire la route, les courses, les recherches et préparer le matériel une fois la nuit tombée pour réserver le jour exclusivement à la pêche.
Résultat (en comptant les impondérables) :
Au moins 4 000 heures de pêche par an !!!
Bill Bob [...]. Ensuite, il a ajouté que, quand il était bébé, il ne savait pas qu'il avait des yeux ou une tête, et qu'il croyait être ce qu'il voyait. Il se souvenait m'avoir regardé en s'imaginant qu'il était moi sans comprendre comment je pouvais quitter la pièce alors que lui ne le voulait pas, puisqu'il était moi.
Livre Deuxième
La Chute d'un Pêcheur scientifique
Chap. 1- p. 130 -