Citations de Djamel Cherigui (34)
« L’argent qu’on possède est l’instrument de la liberté ; celui qu’on pourchasse est celui de la servitude. » Jean-Jacques Rousseau
Il était 5 heures du matin. La lune s’en allait, l’aube se levait. Et avec elle resurgissaient les désillusions et les cruelles réalités qu’on avait, le temps d’un soupir, dissimulées au plus profond de la nuit.
L'esprit, c'est comme la nature, il a horreur du vide.
Sa chance, à ce connard, c'est qu'j'suis plutôt lent au démarrage, que j'ai jamais eu la patate facile...Ah ! le Tminik ! Le zeub de chiotte ! Il méritait bien une bonne branlée, que j'me lève et que j'lui redessine le portrait ! Au minimum que je lui plante une cuillère à café dans l’œil ! Mais bon, j'lai bien regardé..Toute cette masse autour de son squelette... y avait beaucoup de graisse, c'est vrai, mais y avait aussi pas mal de muscles. Et y avait moi à côté, épais comme un linge sec, et qui avait déjà pas mal éclusé depuis le matin. Je l'ai bouclé et j'ai souri jaune.
p.49/50
J'observais ma vie défiler dans un vacarme assourdissant.
Mon passé se révélait n'être qu'une pitoyable mascarade, mon futur un abîme vertigineux, où seul le pire était envisageable. Je n'entrevoyais aucune issue, aucune échappatoire, aucune solution. Je basculais dans la démence la plus absolue.
La nuit c’est un délire à part. C’est le moment où les cafards sortent de leurs trous. Y a plus de gens normaux dans les rues, y a que des marginaux, des alcooliques des flemmards, des chômeurs. Des mecs qui tournent en rond, qui savent pas quoi faire de leur temps, qui n’ont nulle part où aller. Des rats échappés de leurs cages. La nuit, elle te prend aux tripes, elle te pousse à faire des trucs de cinglés, c’est le royaume de la démesure, le crépuscule de la raison.
Il avait tous les services fiscaux sur le paletot : Urssaf, CAF, Tracfin, RSI, etc. Rien que des acronymes fumeux qui semblaient avoir été tout spécialement créés pour mieux ruiner la vie des administrés. ( p 169/ 170 )
Le colosse se dégage facilement. Il fait un pas en arrière, prend son élan... et paf !!! ... Il me colle une grosse beigne en plein pif. Un filet de sang jaillit de ma truffe, j'aperçois des petites étoiles qui dansent autour de moi. Ca aurait pu lui suffire, au mec (enfin, moi j'trouvais) mais non ! Le v'là qui m'bloque dans un coin du couloir. Il s'acharne sur ma tronche : Jabs ! Crochets ! Uppercuts ! Y s'fait plaisir le mec ! Il prend tout son temps, il me lamine, me martèle. C'est un pilonnage intensif, c'est la Marne et la Vendée sur ma gueule. Ses mains sont des battoirs, ses avant-bras, des marteaux-piqueurs. Il m'estropie la trogne, me vandalise la poire. C'est de la démolition ! Du gros œuvre ! Y m'travaille un peu avec les coudes...
La vie bohème, c'est pas comme dans les comédies musicales. Y'a rien de romantique là-dedans. Tout le temps que j'ai zoné dans la rue, j'ai vu ni peintre ni poète. Pas d'ateliers d'artiste avec des lilas jusque sous les fenêtres. Que des caves humides et des bouches de métro. Des squats délabrés. Clochards, toxicos, et punks à chiens. Gueules tordues et regards glacés. Des mecs qui t'écorcheraient vif pour un bifton de cinq balles. Rien de ce que j'avais imaginé. Putain de désillusion.
Mais pour Alain, ne pas dire non, ça voulait forcément dire oui. Il s'infiltrait dans les hésitations comme l'eau dans les fissures d'une toiture.
D'une main, il chopait le mec au collet, et de l'autre, il distribuait des baffes. Simple et efficace. Après cette brutale négociation, le locataire n'avait pas d'autre choix que de s'acquitter prestement de sa dette.
Y a pas à dire, les poisses, c'est comme les loups, ça se trimballe toujours en meute.
Un jour, on fait la connaissance d'une personne, et alors, sans même s'en apercevoir, on s'met à tourner autour d'elle, comme la terre autour du soleil. En orbite. Les événements de la vie sont comme les raz-de-marée, ils nous déferlent dessus et tout ce qu'on peut faire, c'est tenter de garder la tête hors de l'eau.
Les couloirs étaient dégueulasses. Quand on marchait, nos pieds soulevaient tellement de poussière que ça brûlait les yeux. On avait l'impression d'avancer sur du sable. Manquait plus que les palmiers et les transats et on se serait cru en bord de plage.
À force d'évoquer les tropiques, on a eu terriblement soif. Les histoires de contrées exotiques, C'est comme les angines, ça finit inexorablement par vous assécher la gorge.
La vie bohème, c'est pas comme dans les comédies musicales. Ya rien de romantique là-dedans. Tout le temps que j'ai zoné dans la rue, je n'ai vu ni peintre ni poète. Pas d'atelier d'artiste avec des lilas jusque sous les fenêtres. Que des caves humides et des bouches de métro. Des squats délabrés. Clochards, toxicos, et punks à chiens. Gueules tordues et regards glacés. ( p 12 )
Accuser Alain Basile d'avoir chamboulé mon existence reviendrait à reprocher au Vésuve d'avoir carbonisé Pompéi. Y a pas d'explication à ça. C'est dans l'ordre des choses. Putain de fatalité. Au départ, j'étais juste un locataire de plus, un pauvre clampin qui squattait dans un studio au-dessus de son épicerie, en attendant de trouver mieux. A bien y réfléchir, on squatte tous quelque part en attendant de trouver mieux. Mais pour trouver, faut chercher, et chercher ça demande du courage. Et le courage, ça a jamais été mon point fort.
A bien y réfléchir, on squatte tous quelque part en attendant de trouver mieux. Mais pour trouver faut chercher, et chercher ça demande du courage. Et le courage, ça a jamais été mon point fort.
C'était ainsi, tout mourait autour de moi. Tout se disloquait, se dissolvait, s'évaporait. Il n'y avait rien à faire pour retenir le passé. Le temps suivait une inaliénable course, il s'en allait, vaille que vaille, vers d'autres horizons. C'était la fin d'une époque, la fin d'un cycle, la fin d'une histoire... Et rien ni personne ne pouvait y remédier. Le temps filait à travers les vies, comme le sable à travers les doigts. Y avait plus moyen de revenir en arrière, plus moyen de négocier. Les copies étaient rendues, la sentence prononcée. Pour tous ceux qui avaient foiré le virage, c'était trop tard. Pour tous les foireux de la vie, y avait plus d'issue, c'était foutu !
En sortant de la station, j'me suis retrouvé sur une grande place et là, j'ai eu direct la confirmation qu'on était bien l'début du mois : une fil longue de plusieurs kilomètres piétinait devant la petite poste mitoyenne du bar-tabac, la populace agglutinée, compressée, entassé, derrière le minuscule guichet des retraits. On entendait vociférer jusque dans la ville voisine. L'air était irrespirable, on avait préféré venir chercher les allocations avant de se doucher. Y avait des priorités.