AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Elisabeth Quin (105)


Être aveugle de naissance ou le devenir, qu’est-ce qui est pire ? Perdre la vue, ou n’avoir jamais vu ? Est-ce indécent de poser la question ? Comment ne pas se la poser ? Le mot « pire » suinte-t-il le mépris ? Est-il violent envers les non-voyants ? Est-il la marque de mon ignorance, de ma candeur, ou de ma bêtise ? Ou de ma nouvelle liberté ?
Commenter  J’apprécie          00
Persuadé que la voix humaine est le vecteur infaillible de « la musique morale » d’un être, Lusseyran se chargea seul du recrutement des futurs membres du réseau. À l’oreille, à l’instinct. Il fut dénoncé deux ans plus tard à la Gestapo française par un infiltré à la solde des Allemands dont le jeune aveugle avait jugé la voix « trop basse ». Déporté à Buchenwald en janvier 1944, « der Blinde » fut libéré en avril 1945.
Commenter  J’apprécie          00
L’aveugle voit avec le corps tout entier, il capte, ressent, hume, entend, touche, devine. Incapables de comprendre l’univers parallèle dans lequel évolue un non-voyant, nous sous-estimons le potentiel de ce capteur prodigieux, le corps augmenté de l’aveugle.
Commenter  J’apprécie          00
Je sais aujourd’hui qu’il faut pardonner à sa pieuvre, pardonner à son corps, à tout ce qui s’autodétruit à l’intérieur de soi, pardonner à ce qui vous veut du mal. Il faut pardonner en bloc. Pour s’alléger.
Et se battre avec amour, un authentique amour de soi et de la vie. C’est le seul combat qui vaille.
Commenter  J’apprécie          00
Tous les malades connaissent le refrain seriné par les bien-portants : la maladie vous grandit et vous fortifie, rend vertueux, permet d’accéder à des niveaux supérieurs de conscience. Qu’importe si on en meurt, on meurt éclairé. La maladie, ce cadeau ! Cette chance, osons le mot, de découvrir l’essence de la condition humaine, etc. De plus, Ogien contestait la dimension politique et économique du dolorisme qui condamne les plus démunis à la résignation.
Commenter  J’apprécie          10
Demander pitié à notre corps, c’est discourir devant une pieuvre, pour qui nos paroles ne peuvent avoir plus de sens que le bruit de l’eau, et avec laquelle nous serions épouvantés d’être condamnés à vivre.
Commenter  J’apprécie          00
C’est dans la maladie que nous nous rendons compte que nous ne vivons pas seuls, mais enchaînés à un être différent, dont des abîmes nous séparent, qui ne nous connaît pas et duquel il est impossible de nous faire comprendre : notre corps.
Commenter  J’apprécie          10
On cherche un sens, une justification supérieure à la maladie, lorsqu’elle annonce un changement radical de condition ; on aimerait qu’elle ait une cause moins banale que la dégénérescence des cellules ou l’hérédité.
Commenter  J’apprécie          00
Le chef n’est pas là, les souris dansent : sans la vue, l’odorat et l’ouïe se libèrent. Tenir une heure quinze. Imaginer le visage de la chanteuse, vivre en creux la mise en scène, s’interroger sur le travail d’un critique d’opéra si celui-ci s’abandonnait à la même expérience que moi. Ravaler un ricanement.
Commenter  J’apprécie          00
La maladie génétique, transmission de patrimoine non notariée. Le glaucome me rattache à mon père et à ses ascendants écossais, portugais et nivernais aussi sûrement qu’une terre ou un patronyme. Le glaucome me diminue mais certifie mon appartenance.
Commenter  J’apprécie          00
L’expression « y tenir comme à la prunelle de ses yeux » a pris tout son sens en 2017, lorsque mon glaucome s’est brutalement aggravé, et que j’ai décidé de tout mettre en œuvre pour retarder la perte de la vision.
Commenter  J’apprécie          00
Voir comme on respire est un souvenir. Voir relève du sursis. Voir est devenu une hygiène de vie, une anxiété permanente, un combat, un sujet de réflexion, et peut-être la borne au-delà de laquelle il me sera difficile de continuer à vivre.
Commenter  J’apprécie          00
Une aveugle ne vérifie pas son apparence toute seule, il lui faut une traduction, le regard d’un autre. L’image de soi dépend de l’autre, devenant une sorte d’élaboration fictionnelle sur laquelle l’aveugle n’a aucun contrôle. Cette déperdition de sa propre image est-elle supportable ? Miroirs humains, oracles sortis d’une féerie à la Cocteau, miroirs tout-puissants dont la bonté est impossible à garantir, réfléchissez bien à votre responsabilité.
Commenter  J’apprécie          00
Être aveugle, est-ce avoir un rapport nécessairement distancié à son corps au point d’être indifférente à son apparence physique, et au jugement des autres ? Comment une aveugle s’envisage-t-elle jour après jour, sans reflet ? La question vaut pour un homme, aussi, mais la femme de cinquante-cinq ans que je suis, cheveux blancs-corps juvénile, se projette. Ride véloce, poil intempestif, miette de nourriture collée à la commissure des lèvres, épi dans les cheveux, tache, trou, salissure, couleurs qui jurent entre elles : le petit coup d’œil mécanique au miroir en passant, l’œillade approbatrice en direction du reflet, les longues minutes de stase dégoûtée devant la glace, autant de modalités du dialogue avec soi totalement étrangères aux aveugles.
Commenter  J’apprécie          30
Le plus bénin et le plus comique parmi ces effets indésirables, c’est l’hyperpilosité. La notice n’en fait pas mention, mais les fabricants de produits de parapharmacie stimulant la pousse des cils le savent bien, qui utilisent les mêmes principes actifs dans leurs mascaras. Latanoprost, Lumigan, Monoprost font pousser les poils sur tout le corps, avec mention particulière pour le visage. Sans aller jusqu’à l’hirsutisme, l’invasion est réelle, et le poil vigoureux, sain et surtout, véloce. Un demi-millimètre par jour, à vue de nez. C’est énorme pour une femme normalement soucieuse de son apparence mais sous-équipée du côté de la confiance en soi, une femme qui évolue dans un milieu professionnel compétitif et cruel, le monde de la télévision, qui scrute à la loupe l’apparence de ses protagonistes à l’écran.
Commenter  J’apprécie          30
Nous ne sommes plus seuls, ce que je fixe et moi. Un intrus s’est glissé, et ce parasite qui altère, pollue tout ce que je regarde, c’est l’ombre portée de mon glaucome.
Commenter  J’apprécie          00
La vue va de soi, jusqu’au jour où quelque chose se détraque dans ce petit cosmos conjonctif et moléculaire de sept grammes, objet parfait et miraculeux, nécessitant si peu d’entretien qu’on le néglige.
Commenter  J’apprécie          00
Elisabeth Quin
Etonnement devant la faculté d'adaptation qui caracétise notre espèce : j'ai oublié ma vue d'avant, je sais plus à quoi ressemblait le bonheur béat d'y voir parfaitement clair."
Commenter  J’apprécie          330
L'oeil est une formidable machine à gaffes. J'en redemande: elle allège les choses, donne du courage permet de regarder la maladie en fa(r)ce.
Commenter  J’apprécie          140
La vue va de soi, jusqu’au jour où quelque chose se détraque dans ce petit cosmos conjonctif et moléculaire de sept grammes, objet parfait et miraculeux, nécessitant si peu d’entretien qu’on ne pense jamais à lui.
Commenter  J’apprécie          140



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Elisabeth Quin (322)Voir plus

Quiz Voir plus

La pluie comme on l'aime

Quel auteur attend "La pluie avant qu'elle tombe"?

Olivier Norek
Jonathan Coe

10 questions
204 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}