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Critiques de Fanny Wallendorf (61)
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Jusqu'au prodige

Prodigieusement haletant ! Prodigieusement sylvestre !



« Je n’ai pas le goût du malheur et je refuse qu’il m’enseigne quoi que ce soit. Je n’ai pas besoin d’être martyrisée pour savoir que l’éternité est tangible. Mystérieuse est la lumière, et non l’obscurité ».



Immédiatement, sans crier gare, nous sommes plongés dans une course poursuite à travers une forêt de haute montagne, course éperdue d’une bête traquée fuyant le Chasseur, cet homme brutal, sordide, cruel. La jeune Thérèse, dont nous entendons le poignant monologue, a réussi à échapper à celui qui l’avait maintenue captive durant quatre longues années. Profitant du silence et de la fuite imposés par la grande Guerre en ce lieu isolé en pleine montagne, il l’a séquestrée, l’humiliant, l’affamant, l’appelant « la Souillon »…Elle court Thérèse, elle court à perdre haleine, ses pensées aussi virevoltantes que ses pas saccadés, ne sachant pas si elle a l’once d’une chance face à son tortionnaire dont l’art du pistage est stupéfiant, sachant repérer la salive d’un sanglier sur un tronc, sentir les odeurs stagnantes dans les fougères, ne se trompant jamais sur la nature de l’animal, son chemin, ses habitudes…Effrayante cette perception des proies de la part d’un prédateur dont la passion malsaine, la manie barbare, est précisément de collectionner les proies vivantes en haut de son grenier, ayant eu besoin d’une autre proie, humaine cette fois, pour s’occuper des pauvres animaux sauvages enchainés. Thérèse fut cette proie. Sa crainte maladive que l’animal meure lui a fait élaborer un dispositif dont Thérèse est devenue le centre : les animaux sauvages nécessitent une surveillance permanente. « Il traquait la beauté à sang chaud pour la soumettre ».



« Il disait qu’aucun être ne vit sans laisser de traces. Que c’est dans la lumière que sont dissimulés les secrets, que la montagne avoue tout à qui sait déchiffrer ses rébus, fouiller dans ses plis ».



Elle fuit Thérèse, la tête pleine de pensées, soliloques pour tenir bon et retrouver son frère Jean, tant aimé, avec lequel elle a toujours eu une relation fusionnelle. La guerre les a séparés, elle va le retrouver en vallée de Valchevrière après la Forêt Feuillue, le Bois Contigu, le Plateau de Lossol…parcours sacré qu’elle se répète tel un mantra. Les phrases répétées, les pensées obsédantes qui se basculent incessamment dans sa tête oppressent le lecteur qui tourne les pages avidement pour savoir si elle va réussir à atteindre sa vallée natale, à éviter le Chasseur, à éviter les allemands qui ratissent les vallées. Fanny Wallendorf entremêle avec brio la poésie et le roman noir, la beauté et l’oppression, l’onirisme et la mort.



« Voilà que les arbres s’étoffent avec démesure, je ne parviens pas à déloger le Chasseur de mon esprit, je le vois, petit et chauve, les membres courts, les dents tachés par le vin, avec son caractère éminemment grossier, comme on le dirait d’une forme sans nuances, je revois les lézards, les souris que je devais tuer pour nourrir l’effraie, comment me défaire de lui, il n’y avait aucune raison que je rencontre le mal, aucune, mais je l’ai rencontré ».



Sauvage et ardente, décidée mais aussi terrifiée, elle fuit à travers ses montagnes durant trois jours et trois nuits dans un paysage où les bêtes sont plus rassurantes que les hommes, où les animaux sauvages peuvent se faire prodigieux. Un paysage, un panorama qui lui rappelle qu’elle est enfin libre. Ce livre, lu d’une traite, est aussi une véritable leçon de vie.



« Un frisson me parcourt et de nouveau j’en suis certaine : la joie est pérenne. La joie demeure. C’est notre connaissance d’elle qui s’éteint. Nous nous lénifions, nous abjurons, trompés par l’opacité crasse de la nuit que répand celui qui déteste la lumière. Car la puissance de qui désire notre mort est sans bords elle aussi ».



Une leçon à méditer…oui, la joie est pérenne, merci à cette jeune auteure dont il s’agit du troisième roman, après « L’appel » et « Les grands chevaux », de nous le rappeler avec autant d’émotion et de poésie dans ce petit livre sylvestre. Un livre noir, certes, mais parcouru de lambeaux verts veloutés dont la beauté m’a caressée.



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L'appel

Inspiré par les exploits sportifs de Dick Fosbury, le célèbre athlète qui reste associé au Fosbury flop, le saut en rouleau dorsal, Fanny Wallendorf écrit un roman étonnant.



Richard est un adolescent ordinaire, , qui ne brille ni par ses résultats scolaires , ni même ses résultats sportifs. On se demande même pourquoi il s’accroche à cette discipline qu’est le saut en hauteur, puisque malgré ses 1.93 mètres , il n’ « efface » jamais 1.62 mètres lorsqu’il saute en ciseau et la technique en rouleau ventral n’est guère beaucoup plus efficace. Jusqu’au jour où, sur son terrain d’entrainement en travaux, la présence d’une branche d’arbre et un accès modifié à la barre, le propulse dans cette position peu académique au dessus de la hauteur fatidique.



C’est ensuite le parcours du jeune champion qui sera abordé. Accepté comme boursier à l’université grâce à ses exploits et à sa progression fulgurante, il sera confronté régulièrement aux critiques voire aux moqueries des jurys ou de la presse. Ses piètres résultats scolaires risqueront de clore le débat et la guerre du Vietnam jette aussi une ombre sur sa carrière.



L’auteur insiste beaucoup sur la force spirituelle et les capacités de concentration de son personnage, qui pratique une sorte de méditation et trouve aussi dans la course à pied un refuge propice à la paix intérieure.





C’est intéressant sur le plan documentaire, j’ai tout appris de cette discipline qui ne faisait pas partie de mes préoccupations habituelles.



C’est écrit de façon simple et efficace, et la lecture est facile.





Expérience plutôt positive pour ce roman, sportif, lu avec un peu de culpabilité au fond d’un fauteuil alors que le personnage essaie de repousser les limites de ses possibilités
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L'appel

Richard est un athlète moyen dans une ville moyenne. Mais un jour, il a l’idée de franchir différemment sa barre de saut en hauteur. Pour son premier roman Fanny Wallendorf s’inspire de Dick Fosbury pour nous raconter l’irrésistible ascension du jeune homme.



Ceux qui me suivent régulièrement savent que lorsque l’on parle de sport, et plus particulièrement d’athlétisme, je ne peux m’empêcher d’évoquer mon expérience durant ces années à peine moins éloignées que celles dont il sera question dans ce splendide roman. Je me souviens que dans les trois disciplines principales de l’athlétisme, courir, sauter, lancer il y avait les excentriques. Les lanceurs de marteau, à la fois par leur morphologie et en raison de la cage dans laquelle ils évoluaient, les sauteurs à la perche qui partaient faire le funambule à des hauteurs risquées et les coureurs de steeple – dont je faisais partie – qui affrontaient barrières et rivière durant leur tour de piste. Rapidement les sauteurs en hauteur sont venus rejoindre ces «marginaux», non pas parce qu’ils étaient grands et sveltes, mais parce qu’ils sautaient d’une manière particulière, en Fosbury-flop.

Voilà qui nous ramène à Richard, le personnage imaginé par Fanny Wallendorf et qui s’inspire de l’athlète américain Dick Fosbury, à l’origine de cette révolution dans le monde très codifié de cette discipline olympique. Si la fin de l’histoire est connue, le titre olympique obtenu en 1968 à Mexico, tout le talent de la primo-romancière vient de la manière dont elle mêle les faits biographiques avec l’interprétation du parcours qui a conduit l’adolescent à la gloire.

Rassurons en effet ceux que la littérature sportive ne passionne pas. Nous sommes ici loin du traité technique et bien davantage dans un roman d’initiation. Aux tourments du jeune adolescent mal à l’aise avec un corps qui a poussé trop vite, viennent s’ajouter des études poussives. La première qui va croire en lui et l’encourager s’appelle Beckie. Avec elle, il va découvrir l’amour et trouver la motivation nécessaire pour dépasser les 1,60 m qui semblaient être sa limite naturelle. Car désormais il s’amuse avec le sautoir, essaie des choses, tente d’apprivoiser cette barre et découvre que s’il engage d’abord son dos, il peut monter plus haut.

Le jour où il présente ce saut peu orthodoxe, c’est le tollé général. Les entraîneurs entendent que l’on respecte le style traditionnel et les adversaires demandent que l’on disqualifie cet original. Même si rien dans les règlements ne stipule qu’il ne peut franchir la barre comme il le fait, le combat va être terrible pour faire accepter cette variante. Non seulement, on voudra le ramener dans le droit chemin, mais on lui suggèrera de changer de discipline, de se mettre aux haies ou au saut en longueur.

Fanny Wallendorf montre alors combien Richard est habité, comment il a la conviction que sa nouvelle technique peut le faire progresser. Après tout, il ne demande guère plus que d’essayer. Même les premiers succès et son arrivée dans l’équipe d’athlétisme de l’université ne parviendront pas à vaincre les réticences de son nouvel entraineur. D’autant que la presse s’empare aussi du sujet et décrit avec des métaphores peu glorieuses cette course d’élan bizarre suivie d’un saut encore incompréhensible.

Il faudra encore beaucoup de volonté et d’énergie pour faire taire les sceptiques, la famille, les autorités sportives, le grand public. Et entrer dans la légende du sport en imposant une technique qui a depuis fait l’unanimité dans le monde entier.
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L'appel

L'image de couverture surprend... C'est la vue qu'a Richard la tête tournée vers le ciel... comme Dick Fosbury lorsqu'il sautait en hauteur et tournait le dos à la tradition du saut en ciseau ou en rouleau ventral.



Le roman est assez proche de la biographie originale, si l'on en croit Wikipédia, avec cet entraîneur qui l'invite à contre sens à reprendre le saut en ciseau avant de lui proposer le triple saut et le saut de haies!

Richard est un solitaire qui n'est pas décrit comme un compétiteur forcené mais comme un mystique du saut dont la technique a été rendue possible par le remplacement du bac à sable par le matelas.

On progressera avec des barres toujours plus hautes jusqu'aux J.O. de Mexico le20 octobre 1968 avec un record du monde en rouleau dorsal alors révolutionnaire mais qui, depuis, est devenu la norme et la seule technique en cours.



Les parties sur les sauts, la préparation, la recherche dans la technique innovante, la détermination dont il a fait preuve face aux jugements sont intéressantes mais cette histoire est beaucoup trop "enrobée" à mon goût, ce qui lui donne un rythme nonchalant.

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L'appel

***,*



Qui aurait cru que Richard décrocherait un jour une médaille aux JO ?? Certainement pas ses entraîneurs, qui lui ont même conseillé de changer de discipline... Alors qu’il ne dépassait pas les 1,62 au saut en hauteur, ce garçon hors du commun va faire de son rêve une réalité...



C’est une fois encore grâce aux 68 premières fois que j’ai fait la rencontre d’une auteur, d’une écriture et d’un personnage tellement attachant...



Ce roman n’est pas la biographie romancée de Dick Fosbury... Il est tellement plus...

C’est à la fois l’histoire d’un adolescent un peu rêveur, qui vit depuis toujours avec le sport comme quotidien. C’est aussi le chemin d’un jeune homme qui cherche à comprendre le mouvement qui le portera au-delà de ce que peuvent dire les gens qui l’entourent. C’est enfin la foi et le dépassement de soi d’un homme simple et persévérant...



Bien plus qu’un roman sur le saut en hauteur ou sur la vie de Richard Fosbury, le livre de Fanny Wallendorf est la puissance de nos croyance mise en mots...
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Jusqu'au prodige

La petite fille entre en résistance



Dans son troisième roman, Fanny Wallendorf raconte la fuite d'une jeune enfant dans le massif du Vercors en 1944, à la recherche de son frère. Une quête initiatique dans une nature imposante.



Commençons par le commencement, en l'occurrence par le titre un peu énigmatique de ce court roman. La narratrice nous l'explique dès les premières pages, en soulignant que pour les chasseurs, le pistage "est une tradition dans le massif depuis des siècles, née avec la légende du Prodige, un grand renard noir qui habiterait dans la montagne et que seuls quelques individus apercevraient à chaque génération. (...) Il m’a simplement expliqué que le Prodige désignait initialement l’apparition de l’animal, qui avait fini par être baptisé ainsi."

Le chasseur dont il est question ici est un homme brut de décoffrage qui a recueilli Thérèse, la narratrice, dans sa ferme au début de l'Occupation et qui la considère comme sa prisonnière. Mais comme la jeune fille l'assiste dans sa traque de toutes sortes d'animaux, il va lui délivrer ses secrets et son savoir-faire. Un "trésor" dont elle entend faire bon usage. Car elle a une promesse à honorer, retrouver son frère Jean qui a pris le maquis.

Après quatre années, elle se sent prête et s'enfuit dans la montagne. «La guerre se termine et je sais que tu seras au rendez-vous; rien ne peut troubler cette certitude. Valchevrière, que je ne connais pas, a été ma véritable maison depuis 1940. Mon corps était à la ferme Ségur mais ma tête et mon cœur logeaient là-bas. J'ai dessiné chaque jour mentalement la carte de la montagne. Et j'y suis maintenant, j'y suis. Je suis dans le rêve de ma fuite. Et je la sens cette terre de ma libération, je la sens, je la prends dans mon poing elle est humide, je hume son odeur, je suis vivante.»

Sera-t-elle rattrapée par le chasseur, par les Allemands ou réussira-t-elle à retrouver son frère? C'est tout l'enjeu de la dernière partie du livre.

Fanny Wallendorf joue avec les codes du conte pour suivre ce parcours initiatique, à commencer par la rencontre entre l'homme et l'animal alors pourvu de pouvoirs surnaturels et qui devient alors une sorte de guide en ces temps troublés.

Si Thérèse doit avant tout maîtriser sa peur, ce n'est pas à l'encontre de la nature, mais bien des hommes. Alors, à l'image des milliers d'hommes cachés dans ces massifs, elle entre à son tour en résistance.

On retrouve dans ce troisième roman le «nature writing» des Grands Chevaux (2021), mais aussi cette volonté farouche qui animait le sportif de L’Appel, qui nous avait permis de découvrir Fanny Wallendorf en 2019. On y retrouve aussi cette écriture claire et directe qui n'hésite pas à aller vers le merveilleux et la poésie.


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L'appel

Richard est un jeune homme atypique et lunaire, qui pratique l'athlétisme sans succès, dans la ville moyenne de Portland, dans les années 60.

Sa discipline, c'est le saut en hauteur. Il aime sauter, il aime s'entraîner et surtout courir, mais il plafonne à 1,60 m malgré sa grande taille. Impossible de décoller, la méthode du saut en ciseaux n'est pas faite pour lui.

Alors qu'il s'entraîne sur un terrain municipal accidenté, il a l'idée de sauter sur le dos, sa course étant déviée par un arbre. Et là, il ressent une aisance... ça change tout !

A force de méditation et de concentration, il va visualiser mentalement son saut et réussir à le perfectionner. Il suscite la curiosité, voire la colère de ses entraîneurs et du monde sportif mais ça marche et il continue de sauter ainsi.

Difficile de faire homologuer ses records personnels, sa méthode n'étant pas conventionnelle, et son entraîneur doit se battre pour le faire accepter. c'est un véritable combat et il leur arrive de se décourager.

J'ai beaucoup aimé ce roman. Sans jamais être nommé, on sait que Richard est Dick Fosbury. On connaît donc son ascension sportive et sa réputation sachant que sa manière de sauter porte désormais son nom. Mais le livre se lit avec beaucoup de plaisir.

Richard est un jeune homme à attachant avec ses petites superstitions, ses petits grigris. Persévérant, extrêmement mature et déterminé, il se transcende en sautant, et c'est beau !

Ce roman est une véritable hymne au sport, au geste, à la discipline et à l'adversité. Fanny Wallendorf est très inspirée et nous décrit tout ça avec beaucoup de finesse.

Bien sûr, on suit aussi le quotidien heureux de Richard : sa vie avec ses amis au lycée, puis sur le campus, ses premières amours avec Becky, la fille de son coach, sa relation complice avec ses parents, son entraînement forcené...

Mais la guerre du Vietnam et ses enrôlements massifs planent comme une menace sur la destinée du sportif et de ses amis.

Richard va toujours plus loin, s'élève de plus en plus, le tout avec beaucoup d'humilité et de bienveillance, sans jamais écraser les autres. Une belle leçon de sport et de fair-play !

Seul tout petit point négatif, le roman est peut-être un petit peu trop long et parfois répétitif, mais je n'ai pas lâché ma lecture une seule fois.

Sélection prix du roman Cezam Inter-CE 2020



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L'appel

A priori ce roman n'avait pas grand chose pour me séduire car j'imaginais qu'il s'agissait de la biographie romancée d'un fameux athlète : Dick Fosbury, médaille d'or de saut en hauteur aux Jeux Olympiques de Mexico en 1968 et inventeur de la technique de saut à laquelle il a donné son nom.

Et figurez-vous qu'il s'agit de l'histoire d'un homme nommé Richard Fosbury, sauteur en hauteur et qui met au point un saut qui va secouer le monde sportif en général et de l'athlétisme en particulier : le fosbury, mais que ce premier roman m'a énormément plu ! Comme quoi...

Il faut dire que si la biographie du "vrai" Fosbury est respectée dans ses grandes lignes, surtout dans la succession de compétitions et d'obstacles qu'il doit affronter, là n'est point le sujet central du roman, d'une portée bien plus large que la seule passion du sport. L'approche de l'auteur se concentre sur la démarche créatrice qui conduit Fosbury à maîtriser son corps et ses gestes jusqu'à accomplir le mouvement parfait. Pour lui, le saut en hauteur, la compétition, ne sont que des moyens et non des fins. Ce sont des outils qui doivent lui permettre non de vaincre mais de s'accomplir en trouvant l'accord idéal entre tout ce qu'il est (taille, poids, muscles, chair mais aussi histoire et personnalité) et les éléments extérieurs à lui. Son entraînement se fonde autant sur la résistance physique, la musculation et l'endurance que sur son aptitude à la concentration. Et le récit nous entraîne dans ses courses à travers le quartier de son enfance qu'il parvient à recréer de manière à l'impliquer dans sa progression.

Ce pouvoir de fusion entre corps et esprit, cette capacité d'absorption du cadre a quelque chose de chamanique qui m'a fascinée. L'auteur en fait une description précise et concrète qui semble se répéter à mesure que l'athlète progresse mais qui, en fait, évolue d'une manière infime, comme un développement spiralaire. La création du saut (fosbury) comme réalisation de soi-même après tous les exercices de concentration, et surtout de prise de conscience d'une appartenance au monde, est véritablement inspirante, et, pour le coup, transposable à nombre d'expériences. L'écriture se plie sans peine à ce que vit le personnage : factuelle et concise pour raconter la vie familiale et universitaire, poétique et analytique pour décrire l'entraînement singulier que s'impose le personnage.

Alors oui : peut-être que le roman aurait mérité quelques coupures ça et là. Mais, en même temps, ce temps de lecture est en parfaite corrélation avec la lente évolution de Fosbury, de l'enfant de 12 ans, jusqu'au champion de Mexico. Cette durée est nécessaire, me semble-t-il , pour ressentir réellement le temps indispensable à la construction, à la création. Cela permet en outre une plongée au coeur des années 60, avec d'autres combats, révolutions, évolutions en toile de fond.

Le roman est déjà inscrit dans la polysémie du titre : l'appel vers un autre soi-même, l'appel vers la gloire, l'appel comme conviction inexorable d'être là pour inventer quelque chose, mais aussi l'appel comme impulsion fondamentale du saut en hauteur. Accessoirement, on pourrait dire aussi que c'est un appel au lecteur que lance ce roman atypique, fascinant et palpitant.

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L'appel

En 1957, Richard a 10 ans quand il commence le saut en hauteur. Il n'est pas très doué, mais il continue parce que cela lui permet de côtoyer ses amis. « Sa course d'appel n'est pas terrible, et son impulsion ne lui permet de monter assez haut. » (p. 18) Que ce soit en ciseaux ou en enroulé ventral, Richard échoue à dépasser 1m62 pendant des années. Et un jour, par hasard, il s'élance en un saut dorsal qui l'élève bien au-dessus de la barre et du tapis. Dès lors, Richard est déterminé à perfectionner la technique qu'il a inventée. « Champion mec, où t'as appris cette technique ? [...] / Nulle part. je voulais juste passer la barre. » (p. 78) Du lycée à l'université, de la menace de la mobilisation pour le Vietnam aux sélections des Jeux olympiques de Mexico en 1968, Richard est un hurluberlu qui assume sa différence et s'attache à ne jamais faire comme les autres. Parce que c'est la meilleure technique qu'il a trouvée pour réussir. « Je crois qu'on apprend par les détours les plus saugrenus. » (p. 262)



Fanny Wallendorf s'est librement inspirée de la vie de Richard Fosbury, inventeur du saut auquel il a donné son nom, mais en respectant scrupuleusement ses exploits sportifs. Le personnage qu'elle présente est un athlète têtu qui a révolutionné sa discipline sportive jusqu'à la consécration aux Jeux olympiques. Au collège et au lycée, le saut en hauteur était ma hantise, pire encore que l'endurance et les tours ineptes et répétitifs autour du stade. Cependant, j'ai énormément apprécié la façon dont l'autrice déploie le mental de Richard. Le jeune homme multiplie les rituels secrets pour atteindre le plus haut niveau de concentration et découvrir les limites de son corps afin de mieux les dépasser. « Il se concentre. Il sollicite la mémoire de son corps. Visualise sa course du début à la fin. La réalise sans bouger d'un pouce. Se sent atteindre un palier, puis deux, puis trois. Éprouver l'impulsion. Sens venir le mouvement. » (p. 68) D'entraînements forcenés en répétitions obstinées des mêmes gestes, le sportif efface de nouvelles hauteurs. Mais c'est plus qu'un athlète que Fanny Wallendorf nous offre sur le papier, c'est une vie qui se déroule entre amours, amitiés, bonheurs, peines, progrès et espoirs. L'appel est un des plus beaux livres que j'ai lus en 2019.
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L'appel

Comme indiqué en préambule, ce premier roman de Fanny Wellendorf est inspiré de la carrière sportive de Richard Douglas Fosbury, dit Dick Fosbury (né en 1947).

Dick Fosbury fut médaillé d'or aux JO de 1968 en sautant au-dessus d'une barre placée à 2,24 mètres du sol, alors nouveau record olympique (soit 4 cm sous le record mondial de l'époque détenu depuis 1963 par le soviétique Valery Brumel). Fosbury donna son nom à la technique de saut du « rouleau dorsal », aussi appelée « Fosbury-flop », qu'il fut le premier à utiliser dans une compétition internationale.

Les champions de l'époque sautaient en « rouleau ventral », technique qui avait succédé à celle du « rouleau costal », laquelle avait remplacé celle du « ciseau ». Le dernier record mondial inscrit en saut ventral date de 1978 à 2,34 m, tandis que depuis 1993 le record du monde est détenu par le Cubain Javier Sotomayor (1984-2001 taille de 1,95 m) avec un saut à 2,45 m en « fosbury-flop ».

Le « fosbury-flop » se caractérise par une course d'élan en courbe, une prise d'appel sur le pied extérieur, une rotation pour tourner le dos à la barre afin de la faire franchir d'abord par le haut du corps puis par les jambes. La réception avec cette technique s'effectuant sur les épaules, elle fut rendue possible par l'usage de matelas à cet effet, en remplacement des bacs à sable.



Fanny Wellendorf nous raconte l'adolescence du jeune Richard : ses éveils amoureux, et ses débuts dans une discipline sportive qu'il a choisie en raison de sa taille (1,93 m) - débuts laborieux pendant plusieurs années avec les techniques du ciseau ou du rouleau ventral. L'auteure fait même un parallèle audacieux et réussi entre les découvertes sportives et amoureuses (cf. citations).

L'importance des facteurs psychologiques dans la performance sportive est soulignée, pour la persévérance à l'entraînement et pour l'accomplissement des gestes les plus fluides lors des sauts.

Le plaisir ressenti par Richard lorsqu'il s'entraîne ou met son corps à l'épreuve est souligné, de même que son optimisme et sa modestie. Ce personnage est attachant, sympathique, et fidèle en amitié, comme le montre son attitude avec Andrew, lequel manifeste pourtant de plus en plus ouvertement sa jalousie...



J'ai beaucoup apprécié cette lecture mais déplore que l'auteure ait omis de montrer les inévitables moments que vit régulièrement un sportif qui s'entraîne intensément, moments durant lesquels il n'a pas envie de bouger, se sent vidé physiquement et psychologiquement, mais qu'il surmonte... Il les surmonte parce qu'il s'y oblige, sachant qu'il ne refera pas cet entraînement-là s'il le rate ce jour-là, qu'il en éprouverait une culpabilité désastreuse pour l'image qu'il se donne de lui-même. Or la capacité des sportifs à surmonter ces moments difficiles participe à leurs grandeurs. Ici, seules des contrariétés extérieures viennent perturber le jeune Richard (questions sur la légalité de son saut, nécessité de conjuguer sport et études …), toujours désireux de courir ou sauter.



• sélection Cézam 2020 •

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L'appel

Depuis ses dix ans, Richard fait du saut en hauteur. Comme il ne progresse plus alors qu'il « efface » 1,62m, il envisage de changer de sport. Mais rien ne lui convient.Il découvre alors une pratique proche de la méditation pour arriver à une sorte d'état modifié de conscience, les yeux fixés sur le miroir, les muscles bandés, puis s'échappant de plus en plus de son environnement. La concentration extrême et l’entraînement secret sur un vieux stade désaffecté vont le pousser au dépassement de soi : il va inventer un nouveau type de saut, le saut dorsal qui lui ouvrira les voies du succès.



Ainsi résumée - et romancée - est racontée l'histoire véridique de Dick Fosbury, champion olympique de saut en hauteur avec 2,24m en 1968 à Mexico . L'auteure étoffe son roman en y dépeignant un contexte universitaire exigeant et très vivant, des réactions jalouses et idiotes devant une nouvelle pratique du saut, la découverte de l'amour et de la sexualité, une famille aimante et exigeante, une vie d'ado hors norme dans son Oregon natal entre Portland et l'université de Corvallis au bord de la rivière Williamette, douce comme « un serpent endormi ». Et la hantise d'être appelé sous les drapeaux pour partir au Vietnam...



Je n'aurais pas pensé m'intéresser autant à un domaine qui m'échappe passablement, celui du sport dans et par les universités américaines. Mais il y a dans ce livre une approche du sport par le dépassement de soi, l'exigence, la souffrance, totalement applicable à tous les domaines de la recherche d'excellence. Il y a aussi la superbe expérience du bonheur du corps dans l'effort, la joie immense, profonde, quasi sensuelle à faire jouer ses muscles et son cerveau. Le personnage de Richard est parfaitement crédible, attachant, impressionnant. Le contexte (fac, parents, coaching, milieu sportif) est également tout à fait intéressant.



Une belle découverte, un premier roman prometteur.
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Jusqu'au prodige

Je me souviens encore très bien de ma lecture du premier roman de Fanny Wallendorf, L'Appel dans lequel elle se glissait dans l'esprit et le corps d'un personnage ressemblant étrangement à Dick Fosbury. S'il est aussi question de course ici, les conditions et le contexte sont bien différents. Pas de piste d'athlétisme ni de clameurs, mais la densité sombre et sauvage d'une forêt. Pas de concentration absolue ni d'envol, mais la fuite éperdue et la peur. Néanmoins, la force des images est la même, tout comme la précision de la plume qui creuse au plus près des sensations. J'étais le Richard des records, j'ai été la Thérèse flamboyante, sauvage et courageuse portée par un formidable espoir.



Thérèse est prisonnière d'un homme qui se fait appeler le Chasseur ; par un concours de circonstances elle a été séparée de son frère lors de la débâcle de 1940 et est retenue dans un hameau isolé, obligée de s'occuper des animaux que l'homme capture. Un jour, l'opportunité de fuir se présente, elle s'élance avec en tête le nom de l'endroit où son frère et elle devaient se rejoindre. Mais quatre ans ont passé, des années de guerre et de destruction. La voici seule dans une nature parfois hostile et à la merci de rencontres dangereuses, animée d'une foi et d'un espoir qui décuplent ses forces. Elle court, se fond dans le décor, déjoue les pièges et tente de garder à l'esprit la beauté du lien qui l'unit à Jean, ce frère adoré dont elle se remémore les mots, les gestes, le regard et les promesses. Elle court et laisse la poésie l'accompagner, adoucir les heures, nourrir son souffle. Jean sera-t-il au rendez-vous ?



Impossible de ne pas être happée par la course de cette jeune fille tandis qu'autour on devine l'hostilité, la violence, les pertes et les destructions. La prose de Fanny Wallendorf est d'une puissance nimbée de poésie et d'une pointe d'onirisme, pour guider son récit dans les liens qui se tissent entre Thérèse et son environnement. Attaché aux pensées de la jeune fille, le lecteur se fond dans le décor sylvestre d'où surgissent des alliés parmi la faune. Et succombe à l'envoûtement de ce beau texte aux allures de conte, terrassé par une foule de sensations et constamment en équilibre entre deux mondes. Merveilleux.
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L'appel

Avant tout, je remercie chaleureusement BABELIO et les éditions FINITUDE de m'avoir offert ce merveilleux ouvrage dans le cadre de l'opération "Masse Critique". Un livre tombé du ciel, ça fait toujours plaisir, surtout lorsqu'il traite du saut en hauteur !

Sportive ratée, j'adore les romans inspirés de la vie des athlètes : "Courir" de Jean Echenoz, "La petite communiste qui ne souriait jamais" de Lola Lafon ; j'y ajouterai désormais "L'appel" de Fanny Wallendorf, inspiré de la vie de Dick Fosbury, qui inventa malgré lui le saut en hauteur dorsal dans les années 60.

Je me suis sentie apesanteur pendant toute ma lecture, tant l'écriture est aérienne et épurée. Il y est donc question de sport et d'entrainement, mais surtout de méditation et de grâce. Souvent pris pour un hurluberlu, Richard, le personnage principal, n'est animé d'aucun esprit de compétition. Tout ce qu'il veut, c'est "descendre dans le silence" qui lui permet de mieux s'élancer pour effacer la barre et aller aussi haut qu'il le sent. Et son seul moyen technique d'y parvenir, c'est sur le dos, et non en s'enroulant ventralement comme c'est la règle à l'époque. D'où le scandale et l'admiration qu'il suscite -mais il est déjà au-delà de tout cela ; seuls importent, pour lui, le saut et la méditation de pleine conscience (qu'il pratique à son insu).

Grâce à Fanny Wallendorf, on l'accompagne donc sur une dizaine d'années, dans sa famille, ses études, ses amours, ses connexions avec la Nature et avec lui-même, ses courses et ses sauts, et ce n'est jamais ennuyeux, tant le personnage est attachant par son altérité, sa sincérité, et sa gentillesse, et tant le roman est bien écrit, et retranscrit subtilement cette Amérique qui sort peu à peu de son rêve en s'enfonçant dans le bourbier du Vietnam. Il y a un parfum de nostalgie qui en émane, et beaucoup de douceur.

C'est un roman lumineux, qui galvanise ; une pure réussite !
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Jusqu'au prodige

1940. sur les routes de l’exode, Thérèse, la narratrice, est brutalement séparée de son frère Jean et rejoint seule une ferme totalement isolée dans le massif du Vercors où l’attend la mère Ségur. Sauf qu’elle est décédée au début de la guerre et c’est son fils, le chasseur qui l’accueille et la retiendra prisonnière pendant quatre longues années. Une interminable et insupportable captivité qui prend fin au lendemain du débarquement allié quand Thérèse, constatant l’absence de son bourreau, s’évade. Elle connait le chemin à travers bois et massifs pour retrouver son frère qui l’attend, c’est sûr, dans le petit village de Valchevrière. Elle sait que cette fuite éperdue de trois jours et trois nuits en pleine nature comporte de sérieux risques car les allemands sont encore dans le secteur et rendent coups pour coups. Son calvaire n’est pas terminé…

Dans ce long et poignant monologue, Thérèse évoque son histoire avec son geôlier et tente de retrouver un peu de sérénité dans sa relation avec une nature protectrice.

La très belle écriture de Fanny Wallendorf sublime le récit de ces soixante-douze heures de souffrances en s’accrochant à cet espoir insensé de retrouvé son frère.

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L'appel

J'ai toujours trouvé passionnant de se pencher sur la source des inventions, quel que soit le domaine (celui qui a eu l'idée pour la première fois de battre des blancs en neige... j'aimerais qu'on m'en raconte l'histoire) et quand ce questionnement rejoint ma passion pour le sport, mon attention est tout acquise.

Fanny Wallendorf propose avec ce roman une exploration fictive de la vie de Dick Fosbury, à l'origine du saut qui porte son nom et que tous ceux qui ont fait de l'athlétisme au collège ces quarante dernières années ont forcément tenté une fois dans leur vie. D'où est né ce saut ? Quel instinct a donc poussé ce gamin qui stagnait à 1,62 avec le saut en ciseaux, la norme en vigueur partout à l'époque, à se tourner pour attaquer la barre avec l'épaule et le dos et à terminer en roulade ?

L'auteure se glisse ainsi dans la peau de Richard, adolescent typique d'une famille de la classe moyenne américaine et s'attache à nous faire partager ses sensations, la façon dont il appréhende le sport, les états de transe dans lesquels le plongent parfois ses séances d'entrainement. Les sensations sont motrices, ce sont elles qui guident son parcours, qui le font avancer malgré les moqueries et ricanements devant ce saut non homologué, la rigidité du système fédéral qui tente de lui imposer la norme à tout prix.

On se passionne sans peine pour cet adolescent ordinaire qui ne sait pas alors et ne s'en préoccupe pas d'ailleurs, qu'il marquera son sport de son empreinte. Pas seulement en battant le record du monde, pas seulement en gagnant des médailles olympiques mais en donnant son nom au saut qu'il invente.

Un vrai champion est forcément hors norme. Il sort du cadre, simplement parce qu'il ne peut faire autrement, c'est quelque chose de vital. C'est ce que nous donne à ressentir l'auteure, de façon très fine, sur une base très documentée qui plante le décor du système universitaire américain par lequel passe la politique sportive du pays.

Un personnage attachant, fait d'humilité et de passion, centré sur la quête du geste parfait. Et dans le regard de l'auteure, beaucoup d'admiration et d'envie de tutoyer le secret de la grâce.

Un premier roman très intéressant, fouillé et agréable à lire grâce à la place laissée à l'imagination et au rêve.

En le refermant, on pense à cette citation de René Char : “Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. A te regarder, ils s'habitueront.”
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Les grands chevaux

Une harde de chevaux blancs lancés à plein galop parcourt les rêves de deux hommes qui ne se connaissent pas. Kerr est un pompiste solitaire. Niels est un cracheur de feu exalté. Tous deux traînent des enfances traumatisées et ne savent pas vivre avec les autres hommes. « Tu n'as pas l'air en forme. Être prisonnier d'une idée fixe, c'est bon pour personne. » (p. 141) Pour Kerr, c'est une jeune femme qui lui rouvre les portes du bonheur. Pour Niels, c'est un long chemin de souffrance qui commence quand il ne peut plus exercer son art. Alors qu'un projet de pont tente de relier à nouveau deux villes ennemies, les angoisses tapies n'attendent qu'une étincelle pour embraser les destins.



J'ai beaucoup aimé le premier roman de l'autrice, L'appel. Avec son deuxième texte, je retrouve une plume maîtrisée et sensible, notamment quand elle met de très beaux mots sur l'amour naissant. « Il se sent comme un très jeune homme, déstabilisé par le retour de timidité qu'implique le désir. » (p. 89) J'ai ressenti plus d'empathie pour Kerr que Niels : il réapprend la tendresse et la joie avec la grâce maladroite des premières fois. La fin du roman, fulgurante et surprenante, m'a saisie brusquement. Elle est dévastatrice, mais porte en ses cendres toutes les promesses d'un monde à rebâtir.
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Jusqu'au prodige

Thérèse, après avoir fui son village assailli par les Allemands, est retenue captive par le Chasseur, un homme brutal et dominateur, collectionneur d’animaux rares. Elle doit s’occuper de ces créatures séquestrées aux noms fabuleux et n’a aucun moyen de s’enfuir, tant le chasseur est un pisteur hors-pair.



Pourtant, un matin, elle décide de s’évader pour rejoindre la vallée de Valchevrière, où l’attend son frère adoré. Elle a mémorisé le chemin par cœur et en récite chaque étape comme un mantra. 



Et là, on quitte l’atmosphère poisseuse de la ferme pour la nature, tour à tour accueillante et hostile. Thérèse court, court, court, traversant forêts et sentiers escarpés, croisant mammifères et oiseaux. On vit avec elle cette course folle, on dort à la belle étoile, on entend la rumeur de la nuit et les crissements de la vie nocturne, sans oublier de jeter un coup d’œil par-dessus l’épaule.



Mais le froid et la faim ne sont rien face à la folie des hommes en guerre. Elle croise des soldats allemands, elle est témoin de leur cruauté, mais rien ne l’arrête et cette jeune fille ardente et éprise de liberté, court toujours jusqu’à son frère.



Un texte poétique, à l’écriture précieuse, qui aurait pu commencer par «il était une fois», où la forêt a la part belle comme souvent dans les contes. Le contexte historique est précisé mais ce texte a une portée universelle et nous confronte aux notions de bien et de mal, sans tomber dans le manichéisme.



J’ai été encore une fois transportée par le style de Fanny Wallendorf, que j’avais découvert avec son premier roman «l’appel». Mais la forme du conte, trop narrative à mon goût, ne me convient pas toujours.



Lumineux par l’écriture, il n’en reste pas moins sombre et tragique. Je recommande ce texte original et surprenant !
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L'appel

Voici encore une belle découverte grâce à la sélection du prix cezam.

C'est presque toujours pour moi l'occasion de me lancer dans des lectures auxquelles je n'aurais pas pensé... d'ailleurs souvent je n'aurais même pas eu connaissance de l'existence du livre.

Et j'ai été happée, aspirée par celui ci. Il m'était très difficile de le poser en fin de journée, pour enfin dormir... parce que "malheureusement" j'ai besoin de dormir !

J'ai adoré découvrir, les ressorts, les motivations qui ont menées un jeune homme à défier le conformisme du monde de l'athlétisme.

C'est très facile à lire, et en même temps assez détaillé pour comprendre le cheminement de la pensée de cet athlète lorsqu'il fait face à la barre à franchir.

Un petit bonheur....

Et quand j'ai eu fini ma lecture, à une heure de matin, je me suis précipitée sur internet pour chercher des images des JO de 68... et là, les images que j'ai trouvées correspondait exactement à ce que j'avais lu !
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L'appel

À en croire les entraîneurs de Richard, ce dernier ne posséderait aucun talent pour le sport. Inscrit dans un club d'athlétisme simplement parce qu'il souhaite se faire des amis, le jeune garçon est loin d'imaginer qu'une dizaine d'années plus tard, il remportera une médaille d'or aux Jeux Olympiques de Mexico grâce à une nouvelle technique dont il sera l'instigateur, le saut dorsal.



Issu d'une famille de classe moyenne, Richard est un adolescent plutôt rêveur et solitaire qui grandit dans l'Oregon. Il partage son temps entre l'école et ses entraînements dans un club de saut en hauteur. Mais, gêné par sa grande taille, il ne parvient plus à progresser et à faire évoluer son saut en ciseaux.



Guidé par son instinct et sa volonté de perfectionnement, multipliant les heures d'entrainement seul dans un stade à l'abandon, il réussit à mettre au point une nouvelle technique pour franchir la barre.



Cette fiction s'inspire de la vie de l'athlète Dick Fosbury, inventeur du célèbre rouleau dorsal qui porte son nom. Avec ce roman, Fanny Wallendorf relève brillamment le défi de faire du lecteur le témoin de la naissance de ce saut novateur qui a bouleversé la discipline du saut en hauteur et l'univers du sport à la fin des années 60.



Elle nous dépeint, grâce à une plume simple et alerte, le parcours stupéfiant de ce garçon qui a choisi d'écouter son corps en dépit des moqueries et de l'hostilité que suscite ce saut inédit.



Richard visualise la trajectoire, maîtrise sa respiration. Il dompte ses émotions et fait abstraction du monde extérieur qui l'entoure. Le jeune homme se concentre uniquement sur le sautoir. Il démarre sa course et courbe son élan, se propulse dans les airs et franchit la barre sur le dos avec une sensation de plénitude extrême.



Avec pour toile de fond la guerre du Vietnam et les premiers émois amoureux de l'adolescent, l'auteure s'immisce dans la tête de Richard avec talent. N'ayant pas du tout l'esprit compétiteur, le jeune homme, humble et passionné, se révèle attachant et fascinant par la persévérance ainsi que l'audace dont il fait preuve.



Un premier roman captivant sur le dépassement de soi avec le récit de vie particulièrement inspirant de cet homme qui a ébranlé la pratique du saut en hauteur.
Lien : https://mesechappeeslivresqu..
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L'appel

S’il n’avait pas été sélectionné par l’association "Les 68 Premières fois", il m’aurait de toute façon attirée sur l’étagère d’une librairie. Il avait tout pour me plaire : son titre, pour le moins mystérieux "L’appel", un appel vers qui ? vers quoi ? Sa couverture, un paysage à l’envers étonnante et énigmatique. Et je l’ai adoré, ce premier roman de Fanny Wallendorf. Pourtant, le début fut difficile.



Pour moi qui aime entrer dans un roman vierge de toute information, qui ne lis pas la quatrième de couverture avant de l’avoir terminé, le préambule de l’auteure expliquant l’origine du récit fut particulièrement gênant. J’eus préféré découvrir moi-même l’histoire de Richard, jeune Américain, passionné d’athlétisme et plus particulièrement de saut en hauteur. Je n’en dirai pas davantage, préférant vous laisser découvrir par vous-même son parcours époustouflant. J’ai donc abordé "L’appel", sans surprise et dans l’attente du phénomène annoncé…



Le début me fut difficile, toujours à guetter un changement dans le parcours du héros. J’ai trouvé long les premières descriptions de ses entraînements et même parfois redondantes. Et puis, j’ai tout oublié et me suis retrouvée aux côtés de ce jeune athlète, moyen en terme de performance, au physique banal et même plutôt "gringalet", mais que la passion amène à se surpasser. Je me suis laissée totalement emportée. Ce n’est pas seulement le journal d’un sportif que nous livre l’auteure, c’est sa réflexion, la parfaite harmonie qu’il met en place, qu’il travaille sans relâche, entre le corps et l’esprit. Richard "visualise" ses courses et son saut final. Fanny Wallendorf nous décrit parfaitement ce jeune qui, loin des sportifs habituels, n’est dans la compétition qu’avec lui-même. Sa quête de perfection se fait en toute humilité. L’écriture, très belle, simple et fluide est surtout efficace. Nous suivons les progrès et finalement les prouesses du jeune athlète grâce aux mots et au rythme que l’auteur donne à ses phrases jusqu’à l’apothéose des dernières pages.



Si au départ la comparaison – que pourtant je n’aime pas faire habituellement – avec le roman de Jean Hatzfeld "Deux mètres dix" qui racontait aussi le parcours de deux sauteuses, fut à l’avantage de ce dernier, j’ai vite reconnu les qualités de "L’appel". Ses potentiels défauts se sont effacés au fur et à mesure de la lecture vite addictive, palpitante, passionnante. Oubliées les pages en trop – j’ai pensé un instant que certaines pouvaient être inutiles, il n’en est rien –, oubliées les redites, oubliées les amourettes du héros, moins intéressantes que ses performances, mais qui finalement le rendent attendrissant. Je le reconnais, tout a son importance, y compris les descriptions de paysages américains magnifiques et surtout, en filigrane et admirablement traitée, tout en discrétion cette guerre du Vietnam qui bouleversa l’Amérique.



Un superbe roman pour les amateurs d’athlétisme et les autres.


Lien : https://memo-emoi.fr
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