Le défi de ce livre ne s'arrête pas à cette dimension sportive. Ce n'est en effet pas d'une simple biographie dont il s'agit, mais bien de deux, conjointes et entremêlées. Thomas et Alexander sont frères, ils ne sont pourtant pas jumeaux, loin de là. Ils ne se confondent pas avec leur cordée, ils ont chacun leur personnalité et leur histoire bien distincte. Thomas, l'aîné et le plus grand des deux frères, le plus fougueux et expansif, est adepte d'un alpinisme instinctif et spontané. Enthousiaste, le corps tatoué et zébré d'innombrables cicatrices, il est attiré plus que tout par l'impossible et le défi physique et moral. Alexander, le cadet, plus réservé, est cérébral et méthodique, maître absolu de la performance technique, mentale et physique sur le rocher, adepte du solo intégral, âme généreuse et joyeuse mais secrètement cabossée.
L'immense famille des montagnards de langue allemande, à la superbe vitalité sportive, culturelle, économique et historique, nous reste étrangère. Question de langue, bien sûr, mais d'héritage historique aussi. Les traumatismes des deux guerres mondiales qui ont dressé les peuples allemand et français l'un contre l'autre n'ont pas totalement disparu et dans le champ alpin, tout nous sépare : nos références, nos histoires, nos héros, nos cotations de difficulté, nos sommets favoris...