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Critiques de François de La Rochefoucauld (37)
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Maximes

Je crois que chaque phrase de cette oeuvre pourrait faire une belle citation. C'est pourquoi nous avons fait un recueil virtuel rassemblant les citations nous semblant être les meilleures. À découvrir, si vous avez aimé les maximes ou si vous désirez recevoir un bref aperçu.
Lien : http://www.repere.tv/?p=379
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Maximes

Les Maximes, omnes miskīn,



Durant des siècles, les mortels n’avaient pour seule consolation existentielle que les Saintes Ecritures, et ne pouvaient déchiffrer l’âme humaine qu’à partir des exégèses et des paraboles sacrées, parfois déjà fragmentaires, comme sous la plume de Pascal dont les “Pensées” ne sont brèves que faute d’avoir été proprement rédigées du vivant de l’auteur.



Puis sont arrivés les “moralistes” de Vauvenargues à Chamfort au XVIIIe siècle, puis de Schopenhauer à Nietzsche au XIXe, et même plus proche de nous Cioran, mais le premier et le plus emblématique d’entre eux est sans conteste La Rochefoucauld, qui fait paraitre ses Maximes en 1664.



C’est avec ces pensées, maximes ou aphorismes, que l’aristocrate français du XVIIe siècle nous offre une alternative plus incarnée et sans folklore pour nos introspections laïques.



Il n’est pas très aisé bien sûr de résumer un ouvrage sans thème (ou cent thèmes…), en effet les traits les plus divers de nos personnalités, de nos rapports humains sont abordés, déshabillés, démasqués en seulement quelques caractères (comme dirait La Bruyère…), autant dire que François de La Rochefoucauld aurait fait fureur aujourd’hui avec ses “tweets”, tantôt drôles ou acerbes, et d’une limpidité et d’un péremptoire vertigineux.



Nous sommes loin des conseils des vieux sages comme Marc-Aurèle ou Confucius, il n’est plus question d’aider et de dicter une conduite, mais d’observer l’humain dans tous ses travers, de le décrire, de le dépeindre, de le juger, le critiquer. La Rochefoucauld traque toutes les hypocrisies du Grand Siècle, mais ce n’est pas gratuit car c’est bien notre faculté de jugement critique qui peut nous permettre à partir de ces Maximes, de corriger ou d’accepter notre sort et nos tares et de comprendre nos semblables.

Ce qui impressionne le plus c’est d’avoir pu ainsi croquer l’humain, ce que des années de psychanalyse aujourd’hui font accoucher, en quelques mots, magistralement agencés, dans une suite implacable, irréfragable…



Bon mais en fait pas toujours non plus! Par exemple, “Ceux qui s'appliquent trop aux petites choses deviennent ordinairement incapables des grandes” est-ce qu’on pourrait pas en tirer l’inverse conséquence ? C’est en s’occupant des petites choses avec le plus d’attention qu’on se prépare à s’occuper des grandes ? Et quand bien même François avait raison, ceux qui sont obsédés de la virgule dans un e-mail n’ont pas la “big picture” comme on dit dans la langue managériale, on a envie de dire tant mieux parce que c’est pas ce qu’on leur demande… Y a des grands manitous pour ça !



“Peu de maximes sont vraies à tous égards” écrivait Vauvenargues, jugé plus stoïcien que La Rochefoucauld (les deux hommes publient leurs maximes à moins de trente cinq ans tout de même…). Une maxime est aussi un parti pris, mais ce serait un exercice amusant ça, faire des contre-maximes de La Rochefoucauld, allez qui commence ?



Qu’en pensez-vous ?
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Maximes

Lecture divertissante qui réserve de nombreux sourires et quelques éclats de rire...
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Maximes

des maximes à relire à volonté, c'est toujours agréable. Ressorti des cartons ...(même si cette place n'était pas la sienne, mais faute de place sur les étagères ...)
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Maximes

Les maximes n'ont pas la cote à l'heure actuelle. Et pourtant, l'exercice est remarquable. Elaguer les mots pour acérer les idées c'est trancher dans le vif, pointer le coeur, et appuyer sans pitié. Notre amour propre dévore tout, à commencer par nous même. La saurions nous que cela ne changerait rien tant l'empire de sa force nous contraint. La Rochefoucauld en nous propose une élégante démonstration dont la force de vérité est à trouver dans son actualité. Ces maximes sont un vrai plaisir. A déguster, en acceptant le goût amer de la nature humaine.
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Maximes

"Résumé :

Un moraliste ? Nullement. C'est un romancier, le premier en date de nos romanciers. Tout lui vient de l'imagination, de la brusque perception qu'il a d'un sentiment humain par la capture d'un regard ou d'un mot. Chacune de ses maximes est une intrigue découverte. Au lieu de développer l'histoire, il la réduit, lui donne une articulation, l'incline selon son humeur. Cette humeur est sombre. C'est que, dans le monde, là où il vit, on ne pénètre un peu profondément les êtres que par les défaillances et les ruptures. "

Ennuyeux



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Maximes

Il mena une vie pour le moins mouvementée dans les hautes sphères de la noblesse et du pouvoir , grand guerrier et grand amant , il tira de son expérience ,vers la fin de ses jours ,ces Maximes d’un noir pessimisme sur la nature humaine (un Cioran du XVIIIème) rendues encore plus percutantes par la concision et l’efficacité du style.
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Maximes

Œuvre incontournable de la littérature du siècle de Louis XIV, les "Maximes" de La Rochefoucauld ont connu six éditions (de 1665 à 1693, la dernière posthume).



Elle exprime, en effet, à la perfection ce qu'il est convenu d'appeler le style "classique" fait de la recherche du mot juste, de la pensée claire et de la concision. À l'opposé d'un certain romantisme, souvent verbeux et redondant, l'auteur classique vise à l'essentiel, rejetant tout élément qu'il juge superflu, toute digression. Est-il besoin de dire que la chose est d'autant plus vraie dans le genre particulier de la maxime qui, par définition, cherche à exprimer une vérité morale de la façon la plus succincte qui soit? Et dans ce domaine-là, La Rochefoucauld excelle! Les quelque 500 maximes qui composent son recueil montrent à quel point l'auteur maîtrise son sujet: en deux ou trois lignes, généralement, parfois même en une seule, il assène au lecteur sa vision de l'homme. (Qu'on le compare avec d'autres écrivains de maximes, Vauvenargues par exemple au siècle suivant, et l'on verra la différence!) L'épigraphe de son livre en est un parfait exemple: " Nos vertus ne sont, le plus souvent, que des vices déguisés." Sa phrase est tout en nerfs et en muscles - pas une once de graisse.



Sur le plan philosophique, La Rochefoucauld, comme ses contemporains Racine et Pascal, a une conception particulièrement sombre de la nature humaine; ses écrits sont une illustration de la doctrine janséniste qui avait alors une grande influence sur les esprits: l'homme, sans la grâce divine, est un être déchu, enfermé dans son égoïsme et son amour-propre, incapable de vérité et d'empathie pour autrui; il ne pense qu'à lui, même s'il feint le contraire. Certains diront qu'il est terriblement pessimiste, d'autres loueront sa lucidité sans concession... À chacun de voir!



En tout cas, c'est une œuvre qui, je pense, ne peut laisser indifférent.

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Maximes

Un très bon recueil, qui semble toujours d'actualité, avec cependant quelques inégalités. Ces Maximes restent tout de même très agréable à lire et donnent beaucoup à réfléchir.
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Maximes

François René vicomte de Chateaubriand est un écrivain français qui a été militaire jusqu'à la Révolution française. Passionné des choses qui régissent de l'état, des sociétés et la nature humaine, il a occupé plusieurs postes de responsabilité politiques. Celui-là pour qui l'ailleurs est à démystifier par la curiosité, voyage beaucoup à travers les Amériques et l'Europe.



Homme, ayant beaucoup vu et beaucoup connu dans ses diverses carrières et dans ses multiples voyages, Chateaubriand nous livre dans ce livre Pensées, réflexions et maximes, toutes ses observations sur les hommes et sur les société sous forme des aphorismes brefs...



Pensées, réflexions et maximes conservent l’éternelle actualité de la nature humaine.



Une véritable richesse de la sagesse humaine sur toutes les questions de l'existence. Un regard sur une civilisation profondément mitigée.

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Maximes

Regards sur une société de faux semblants et de secrets d'alcôves.



Finesse et aigreurs d'esprit se font cocktails aussi savoureux qu’assassines de ses mœurs en déliquescence.



A découvrir et relire sans modération, dans toute son actualité et modernité de notre temps.



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Maximes

Probablement le meilleur recueil de maximes, le style de la Rochefoucauld étant exceptionnel, et ses réflexions sur la cour et le coeur humain étant encore d'une pertinence parfaite aujourd'hui. J'adore l'exercice consistant à ciseler sa pensée de la sorte et je déplore qu'il soit tombé en désuétude.
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Maximes

Les « Maximes » se lisent vite et leur sens de la formule, vif et percutant fait souvent mouche.



On est saisi par la vision si pessimiste de l’âme humaine que révèle le duc, mais également gêné par l’acuité de sa vue qui perce à jour tous les voiles dont nous entourons notre conduite afin d’en travestir les sombres moteurs.



Bien que noble, La Rochefoucauld n’eut pas une vie simple, il fut emprisonné par Richelieu, exilé et finit sa vie presque aveugle suite à une blessure de guerre.



Ruiné et disgracié, ayant connu les horreurs des champs de batailles et les bassesses des intrigues de la cour, l’homme en conçut probablement un profond dégoût pour la nature humaine.



Dépeignant des hommes faibles peu capables d’adopter les principes de vertus tant prônés par les philosophes, les « Maximes » nous enjoignent à plus d’humilité et nous renvoient comme un miroir la face la plus sombre de notre humanité.



Salvateur !
Lien : https://lediscoursdharnois.b..
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Maximes

La Rochefoucald. Maximes. Folio Classique. 5 étoiles.

Extrait du résumé éditeur : «… finesse d'analyse du comportement humain, dans le mensonge et la fausse vertu, l'amour et l'amitié, dans le jeu de dupes de la société ou dans la description des passions ».

Un vade-mecum pour qui occupe un poste à haute responsabilité dans l’administration. Complémentaire à l’Art de la Guerre de Sun Tzu 😊.

Chaque maxime de ce petit livret du 17 ème siècle est ciselée avec finesse.

Je les ai lues et relues il y a plus de 20 ans jusqu’à ce que la reliure tombe en morceau.

Chacune fait résonner en soi un vécu et exprime souvent en quelque mots percutant les raisons de nos mauvaises expériences…qui apparaissent alors avec beaucoup de clarté et parfois de l’humour. Noir. Désenchanté.

Un ouvrage philosophique indispensable et très accessible que je recommande chaudement comme introduction à la vie adulte.

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Mémoires précédées de l'Apologie de M. le prince ..

FASCINANT !



François VI de la Rochefoucauld (1613-1680) vit une vie de guerre, de coterie, de complot, de salon sous Richelieu et Mazarin puis publie ses Mémoires....Il a soutenu Condé, Conti et Longueville contre le Roi, il a haï le Cardinal de Retz* qui le lui rendait vraiment bien**, a aîmé, fût aîmé et quitta ce Monde honoré d'une réputation non usurpée de Moraliste Glacial où l'Amour de Soi le dispute à là virulence du jugement.



Ses Mémoires sont un bijou littéraire : épique (vous y trouverez un duel entre un Coligny et un Guise, l'affaire des Ferrets dont notre Alexandre national fît son miel, un combat avec Retz qu'il manque d'expédier en le coinçant entre deux portes-Retz le raconte aussi dans ses propres Mémoires- ), historique (la Fronde des Princes en direct) et stylistique.



Ce Français "foucaldien" du XVII-XVIIIème roule sous la plume comme autant de grains de caviars dans une bouche de gourmet.



Mme de Sévigné, Saint-Simon, Retz, La Rochefoucauld, Tallemant des Réaux, vous troussent leurs textes avec une élégance, une envolée, une maîtrise totalement ahurissantes.C'est simple, c'est beau....



Bref à cheval....!



* A propos de Retz : "La retraite qu’il vient de faire est la plus éclatante et la plus fausse action de sa vie ; c’est un sacrifice qu’il fait à son orgueil, sous prétexte de dévotion : il quitte la cour, où il ne peut s’attacher, et il s’éloigne du monde, qui s’éloigne de lui".



** A propos de La Rochefoucauld : "Il n’a jamais été guerrier, quoiqu’il fût très-soldat. Il n’a jamais été, par lui-même, bon courtisan, quoiqu’il ait eu toujours bonne intention de l’être. Il n’a jamais été bon homme de parti, quoique toute sa vie il y ait été engagé. Cet air de honte et de timidité que vous lui voyez dans la vie civile s’était tourné, dans les affaires, en air d’apologie. Il croyait toujours en avoir besoin, ce qui, joint à ses maximes , qui ne marquent pas assez de foi en la vertu, et à sa pratique, qui a toujours été de chercher à sortir des affaires avec autant d’impatience qu’il y était entré, me fait conclure qu’il eût beaucoup mieux fait de se connoître et de se réduire à passer, comme il l’eût pu, pour le courtisan le plus poli qui eût paru dans son siècle".
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Oeuvres complètes

En attendant Nietzsche…



Il est véritablement difficile d'étiqueter François de la Rochefoucauld (1613-1680) au regard de ce que fut sa vie.



Né prince de Marcillac, il devint à la mort de son père duc De La Rochefoucauld, c'est-à-dire membre de la fine fleur de la noblesse française.

A ce titre, il combattit d'abord sous le règne de Louis XIII contre différentes armées étrangères puis fut très impliqué dans les affrontements lors des événements de la Fronde, cette guerre ouverte au sein de la noblesse pour s'opposer à Louis XIV, au début de son règne. La Rochefoucauld fut par conséquent en premier lieu un homme de guerre rompu aux chevauchées, sièges et intrigues pour négocier, faire, défaire les alliances.

Dans cette période fort troublée et violente il convient de rappeler que les stratégies, intérêts n'étaient pas celles attachées aux États que nous connaissons aujourd'hui. Les principes de loyauté nationaliste n'existaient pas, en tout cas pas dans l'expression contemporaine.

Ainsi selon les péripéties, La Rochefoucauld, pu se retrouver combattre ou être de facto allié de troupes espagnoles présentes sur ce qui était alors le territoire du royaume de France.



Mais il était aussi à l'aise pour manier l'épée que la plume. Avec ce profil il fut une sorte de double d'un fameux contemporain, Savignien de Cyrano (1619-1655) immortalisé par Edmond Rostand comme Cyrano de Bergerac dans sa pièce de théâtre, chef d'oeuvre absolu.



Cet ouvrage « Oeuvres complètes » regroupe l'ensemble des écrits, majoritairement en prose et accessoirement en poésie, avec comme pièce(s) principale(s), les fameuses « Maximes », dans toutes ses versions.

Les autres pièces ont un intérêt historique, pas dans l'exposé de faits majeurs de l'Histoire mais par une immersion dans les coulisses de la noblesse lors de ces événements de la Fronde.

Le lecteur découvre ainsi par exemple les enjeux, qui semblaient très importants, de l'attribution, ou non, d'un tabouret auprès de la Reine au profit de l'épouse De La Rochefoucauld.

Mais il doit être constaté, qu'à moins d'être un expert doctorant sur la période, qu'il est souvent difficile d'apprécier les véritables enjeux qui s'attachent aux péripéties, tour à tour minutieusement retranscrites ou évoquées de façon lapidaires ; il en est de même quant à l'importance de chacun(e) très nombreux acteurs mentionnés.

De surcroît, le style encore partiellement écrit dans la forme du « vieux français » privilégie de longues phrases qui nécessitent de la part du lecteur contemporain une concentration importante, laquelle concentration n'empêche pas régulièrement de perdre le fil. En tout cas, ce fut le cas en ce qui me concerne.

Par contraste, les « Maximes » se suffisent à elles-mêmes, il s'agit d'aphorismes d'une parfaite clarté.



Sur le fond, au-delà des singularités, on peut appréhender globalement, même s'il n'est jamais cité, une opposition frontale implicite à Descartes (1596-1650). Pour La Rochefoucauld il existe une absence de possibilité de se connaître soi. Par ailleurs, il rejoint sans le savoir, sur un point fondamental son contemporain Spinoza (1632-1677), l'oeuvre de ce dernier n'ayant pas éditée de son vivant. Pour les deux penseurs, le libre arbitre est une illusion ; c'est notamment le cas en matière de relations affectives.



« Comme on n'est jamais libre d'aimer ou de n'aimer pas, on ne peut se plaindre avec justice de la cruauté d'une maîtresse, ni de légèreté de son amant. » (p. 316) 



Il est ainsi proposé une destruction des certitudes dans le comportement de l'homme en société.

Et le principe actif serait en réalité l'amour propre.

Cette révélation ouvrait à l'origine les « Maximes » dans un long développement déplacé au milieu des différentes éditions publiées.



« L'amour propre est l'amour de soi-même, et de toutes choses pour soi ; il est le plus habile homme du monde ; il rende les hommes idolâtres d'eux-mêmes, et les rendrait les tyrans des autres, si la fortune leur en donnait les moyens.

Il ne se repose jamais hors de soi, et ne s'arrête dans les sujets étrangers, que comme les abeilles sur les fleurs, pour en tirer ce qui lui est propre.

Rien n'est si impétueux que ses désirs, rien de si caché que ses desseins, rien de si habile que ses conduites ; ses souplesses ne se peuvent représenter, ses transformations passent celles des métamorphoses, et ses raffinements ceux de la chimie. (…) (p. 318 « Édition hollandaise » p. 356 « Manuscrit Liancourt » et maxime supprimée p. 487).



Le corollaire est que la vertu n'est qu'apparence et ne correspond pas à une motivation sincère. Elle n'est présente que lorsqu'elle est susceptible de servir les intérêts de l'individu.



« L'humilité est une feinte soumission, que nous employons pour soumettre effectivement tout le monde. C'est un mouvement de l'orgueil, par lequel il s'abaisse devant les hommes, pour s'élever sur eux. » (p. 305)



La vertu est en fait intimement liée au vice, que l'on ne peut maîtriser.



«Les vices entrent dans la composition des vertus, comme les poisons entrent dans la composition des remèdes de médecine : la prudence les assemble, et les tempère, et elle s'en sert utilement, contre les maux de la vie. » (p. 301)



La démolition des apparences de la raison emporte aussi ceux qui sont réputés pénétrés de la sagesse, les philosophes. La sagesse est un masque du ressentiment.



« Le mépris des richesses, dans les philosophes, était un désir caché de venger leur mérite de l'injustice de la fortune, par le mépris des mêmes biens, dont elle les privait. C'était un secret qu'ils avaient trouvé, pour se dédommager de l'avilissement de la pauvreté. C'était enfin un chemin détourné, pour aller à la considération, qu'ils ne pouvaient avoir par les richesses. » (p. 330).



Impossible de ne pas établir un rapprochement avec Nietzsche :

«La révolte des esclaves dans la morale commence lorsque le ressentiment lui-même devient créateur et enfante des valeurs. (...)



'L'homme du ressentiment n'est ni franc, ni naïf, ni loyal envers lui-même. (…)

(...) On reconnaît un philosophe à ce qu'il évite trois choses brillantes et bruyantes : la gloire, les princes et les femmes, ce qui ne veut pas dire qu'elles ne viennent pas à lui. Il fuit la lumière du jour (…) »

(« La généalogie de la morale »-Première dissertation p. 45 et 48-Troisième dissertation p. 164 et 173)



« C'est ce qu'on fait et qu'on a toujours fait à propos de toute religion, de toute morale régnantes : les mobiles et les intentions qui se cachent derrière l'habitude sont toujours inventés coup par mensonge dès que commence à combattre l'habitude, à en scruter les intentions et les raisons.

C'est là la grande mauvaise foi des conservateurs de tous les temps : ce sont des ajouteurs de mensonges. » (« Le gai savoir » p. 75)



En amont de ces « Maximes », il convient de souligner le legs de Montaigne (1533-1592) auprès duquel l'auteur a beaucoup emprunté, en premier lieu, quant à la sincérité de vertus spirituelles affichées communément.



« Je ne trouve aucune qualité si aysée à contrefaire, que la dévotion, si on n'y confirme les moeurs et la vie ; son essence est abstruse et occulte, les apparences faciles et pompeuses. » (Les Essais-« Du repentir » livre III p. 854 et 1595 éd La Pléiade)  



Dans ces « Essais » cette alchimie vice/vertu, précédemment évoquée, avait déjà fixé l'attention du sage périgourdin.



« La faiblesse de nostre condition, fait que les choses en leur simplicité et pureté naturelle ne puyissent pas tomber en nostre usage.

Les elemens qu nous jouyssons, sont alterez : et les metaux de mesme, et l'or, il le faut empirer par quelque autre matiere, pour l'accomoder à nostre service. Ny la vertu ainsi simple, qu'Ariston et Pyrrho, et encore les Stoïciens faisaient fin de la vie, n'y a peu servir sans composition ; ny la volupté Cyréanique et Aristipique.

Des plaisirs, et biens que nous avons, il n'en est aucun exempt de quelque meslange de mal et d'incommodité. » (Les Essais « Nous ne gardons rien de pur» livre II p. 711 ed 1595 éd La Pléiade)  



A propos d'emprunts, il est établi que Mme de Sablé a parallèlement rédigé ses « Maximes ». La correspondance intégrée dans ces « Oeuvres complètes » permet de constater que les deux acteurs ont échangé, au moins une partie de leur production, réfléchi sur l'élaboration de leurs créations respectives. Dans ce contexte, on peut légitimement s'interroger sur le « recyclage » des « Maximes » de Mme de Sablé que La Rochefoucauld aurait pu mettre en oeuvre. Il est vrai que le principe de « propriété intellectuelle » n'avait pas la même signification qu'aujourd'hui, et n'existait d'ailleurs sans doute pas vraiment ; cela n'excuserait pas naturellement un pillage des écrits. Seul un expert, que je suis loin d'être, pourrait se pencher sur cette question des relations intellectuelles Mme de Sablé-La Rochefoucauld.



Naturellement, on n'est pas obligé d'agréer ces « Maximes ». le problème ne vient pas de leur grande concision ; dans une forme très proche, les pensées de Marc Aurèle ou de Confucius sont profondément éclairantes et pénétrantes.

Alors que celles-ci ont infusé, ces « Maximes », en dépit d'un style soigné, donnent parfois l'impression d'avoir été découpées à la hache, à la va vite sur un bout de table rustique (ou plutôt sur un billot ?) sous une tente lors d'un bivouac de campagne militaire.



Certes, Nietzsche ne fait pas toujours dans la dentelle, c'est un euphémisme. Mais le lecteur dispose d'un corpus d'oeuvres relativement conséquent qui permet d'affiner, de préciser la pensée du philosophe moustachu.



Il convient de ne pas perdre de vue le contexte historique dans lequel ces « Maximes » ont été rédigées. Les fortunes, les rangs dans la haute noblesse se faisaient, se défaisaient selon des codes du paraître et non pas de l’être. La disgrâce, avec des exils, des emprisonnements le cas échéant, pouvait frapper les plus grands sans préavis, sans état de droit pour espoir que le bon vouloir du roi. Il n’est pas surprenant qu’un témoin et acteur aussi investi comme La Rochefoucauld dans un théâtre de jeux de rôles ait en quelque sorte modélisé et universalisé son vécu.



Trait d'union entre Montaigne et Nietzsche, La Rochefoucauld, n'a cependant pas tout l'immense relief philosophique de ceux-ci. Mais son oeuvre et sa vie méritent beaucoup mieux que l'oubli dans lequel elles semblent avoir été précipitées.
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Réflexions, ou Sentences et maximes morales (..

Comme François de la Rochefoucault, j'aime lire des oeuvres "qui façonnent l'esprit et fortifient l'âme" ... Cet ouvrage en fait indéniablement partie... Que de maximes intemporelles, percutantes et réfléchies à découvrir... Un livre à mettre entre toutes les mains !
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