Et elles lui avaient enseigné des filouteries de bonne femme pour qu’elle feigne de perdre son pucelage et qu’elle puisse déployer au soleil dans le patio de sa maison, le matin de son premier jour de jeune mariée, le drap de fil avec la tache rouge de l’honneur.
Elle s’était mariée dans cette illusion. Bayardo San Roman, lui, avait dû se marier dans l’illusion d’acheter le bonheur grâce à sa fortune et à son pouvoir exceptionnels.
C'était comme s'ils avaient contourné le difficile calvaire de la vie conjugale pour aller tout droit au cœur même de l'amour. Ils vivaient en silence comme deux vieux échaudés par la vie, au delà des pièges de la passion, au delà des mensonges barbares du rêve et des mirages de la déception: au delà de l'amour.
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Tous deux avaient perdu conscience de leur âge dès leur première rencontres et se comportaient avec la confiance de deux époux qui s'étaient caché tant de choses dans la vie qu'ils n'avaient presque plus rien à se dire.
(...) il raconta l'histoire d'un village que des affiches anonymes, en une semaine,
avait rayé de la carte.
Ses habitants avaient fini par s'entre-tuer.
Les survivants avaient déterré les os de leurs morts et les avaient emportés
pour être sûrs de ne jamais revenir.