Gauthier Chapelle

Le niveau de vie d'un Européen moyen est de 400 "esclaves énergétiques", ce qui signifie que chacun de nous consomme quotidiennement une quantité d'énergie équivalente à la force de travail de 400 personnes en bonne santé.

p.183-4.
Kingsnorth revient sur sa prise de conscience : " Les écologistes n'étaient pas honnêtes avec eux-mêmes. Il était de plus en plus évident que le changement climatique ne pouvait être stoppé, que la vie moderne n'était pas compatible avec les besoins de l'écosystème global, que la croissance économique faisait partie du problème et que l'avenir ne serait pas lumineux, vert, confortable et " durable " pour dix milliards de personnes, mais qu'il était plus susceptible de créer un déclin, un appauvrissement, un chaos et des des difficultés pour nous tous.

p.138.
L'avènement de la physique moderne a poursuivi ce mouvement de " bannissement des qualités sensibles au profit des figures et des nombres ", débouchant sur une " civilisation autistique " ayant perdu ses liens de réciprocité et d'empathie avec les autres qu'humains (vivants et non-vivants), ou pire, sur une civilisation psychopathe qui ne ressent que pour elle-même. " Toute émotion est ramenée [aux humains] de n'importe quelle façon. Les autres ne sont que des objets qui servent à assouvir leurs envies. Ce problème d'absence d'empathie explique pourquoi ils n'ont aucune morale et fonc aucune limite à faire du mal à autrui physiquement et moralement. "

p.74.
A contrario, les expériences de déracinement, de relogement, de déplacement, de camps de réfugiés, de migrations, participent à la fragmentation des liens sociaux et à la fragilisation des individus. Tout ce qui favorise un attachement à un territoire (liens sociaux inclus) est donc le bienvenu !

p.73.
Cela est bien entendu à nuancer. Comme dans une situation de compétition où il y a les mieux armés qui s'en sortent toujours et les moins armés qui ne la supportent pas et qui en souffrent. Il en va de même pour une catastrophe : les plus résilients peuvent aisément en faire une opportunité ou même une force de changement, alors que les plus vulnérables s'en prennent plein la figure, voire ne remontent jamais la pente.

p.65.
Troisièmement, un discours clair et pédagogique (et pratique) est indispensable. Il est conseillé aux médecins de choisir judicieusement leurs mots, d'éviter le jargon médical, et de présenter si besoin des preuves tangibles. Led nouvelles doivent être données de manière douce, mais directement, Claire, et sans détours ni euphémismes.
Par exemple, l'utilisation des expressions " il est mort " ou " elle est décédée " est préférable à " il est parti " ou " elle n'est plus avec nous ".

p.64-5.
Premièrement, les patients considèrent leurs médecins comme l'une de leurs plus importantes sources de soutien psychologique. Il est donc crucial que ces derniers répondent de manière empathique à leurs réactions émotionnelles : garder une posture chaleureuse et humaine, utiliser des expressions de soutien pour soulager la détresse émotionnelle et permettre aux patients d'exprimer leurs sentiments.
Cette empathie réduit l'isolement, exprime une solidarité et " valide " les sentiments ou les pensées des patients comme normaux et prévisibles.

p.62.
Juste après l'annonce de sa maladie à un homme, le médecin affirme à son épouse qu'il " est foutu ". Quinze jours après, le médecin s'étonne de la retrouver avec sept kilos de moins. Elle lui explique qu'elle est ainsi depuis l'annonce où il lui a dit que son mari était " foutu ".

p.24.
Malgré ses incroyables compétences, il refuse cette étiquette de survivaliste, et raconte avec malice : " Si vous mettez dix survivalistes dans une forêt pendant des mois, explique-t-il, ils vont s'entretuer et détruire la forêt. Si vous mettez dans la même forêt dix Amérindiens, non seulement la forêt sera plus belle et productive, mais ils auront constitué une tribu, une vraie communauté d'humains en lien avec les autres êtres vivants. "

Diminuer la population, c'est très difficile et ça met des décennies. Le seul levier rapide, c'est que les riches consomment moins et qu'ils partagent, dans les limites de la biosphère.

Nous sommes des drogués du pétrole. Continuer est très dangereux. Un sevrage brutal aussi.

- (...) En fait, ce qu'il y a derrière cette obsession nucléariste, c'est l'incapacité à remettre en question notre manière de vivre.
- Mais la décroissance, quand même... Personne ne veut revenir à la bougie !
- Bravo les clichés ! Déjà, juste revenir aux années 1960, ce serait bien. Pendant le confinement de la covid 19, avec le ralentissement brutal de l'économie, on est presque arrivés dans les clous au niveau des objectifs climatiques. Pour bien faire, il faudrait tenir tout le siècle avec ce rythme de confinement, voire l'accentuer un peu, mais en y ajoutant de la justice sociale.

- Mais alors, c'est quoi le plus important ? Le climat ou les animaux ?
- Les deux ! Il faut préserver un maximum d'écosystèmes, et même régénérer ce qu'on peut. Ce qui est important à comprendre, c'est que les problèmes sont liés. Les actions aussi : la plupart de celles qui aident pour l'un sont bonnes pour l'autre, et inversement.

- Si on tue les autres espèces, c'est mauvais pour le climat. Inversement, si on bousille le climat, c'est mauvais pour les animaux et les plantes, et finalement, tout ça va nous retomber dessus : incendies, sécheresses, inondations, chute des rendements agricoles, etc. Les paysans vont galérer. Et qui dit moins de nourriture dit...
- Famine ?
- Et révolutions.

Les végétaux ne bougent pas, mais ils peuvent envoyer leurs descendants aller vivre plus loin, par les graines et le pollen. C'est souvent plus lent que les migrations d'animaux. Beaucoup n'auront pas le temps de s'adapter ou de migrer, ça va être l'hécatombe. Mais qui dit effondrement du vivant (les adultes disent "biodiversité", pour faire sérieux), dit aussi difficultés pour les humains. Car ce sont les autres espèces qui nous font vivre.

- Oui, mais c'est lent, on aura le temps de voir venir. Dis-moi que j'ai raison.
- La fonte va durer des siècles, tu as raison. Lentement au début, puis ça peut s'accélérer. Mais les scientifiques estiment qu'il y a aujourd'hui assez de chaleur dans l'atmosphère pour faire fondre toute la glace du Groenland, c'est-à-dire pour faire monter le niveau de plusieurs mètres.

Un degré de plus, en un peu plus d'un siècle, ça ne paraît pas énorme, effectivement, mais ça change beaucoup de choses pour les animaux, les plantes, et surtout pour nos sociétés. Un degré, c'est une moyenne sur toute la Terre. Ça veut dire que ça se réchauffe moins à certains endroits et plus à d'autres. Par exemple, les océans accumulent beaucoup de chaleur, mais comme ils sont immenses, leur température n'augmente que très lentement. Par contre, aux pôles ou sur les continents, la température peut augmenter de 5°C, 10°C, voire plus. Ça change tout !

Quand on découvre le sujet de l'effondrement, le mental cherche dans tous les sens une issue, une direction, n'importe quelle explication, ou alors des coupables.

- Anticiper les dangers, et se préparer à l'entraide. C'est ça la posture. Mais beaucoup de gens n'aiment pas ça.
- Ils veulent de bonnes nouvelles.
- Ils ont peur de la peur. C'est dommage. Il suffirait de ne plus avoir peur de la peur pour se mettre en mouvement. Car une fois en mouvement, la peur s'estompe et l'espérance revient. La joie aussi.

Il va falloir s'adapter, s'habituer, vivre avec... (...) Il va falloir transformer tout cela en un grand récit qui ne fasse pas peur et qui redonne de l'espérance et de la joie.