« Je suis Naomi Klein.
J'écris sur la crise climatique depuis 15 ans et je viens de publier mon premier livre dédié aux jeunes lecteurs.
Je l'ai fait pour une raison simple.
Les jeunes sont l'âme et le coeur du mouvement climatique. » N. K.
VAINCRE L'INJUSTICE CLIMATIQUE ET SOCIALE de Naomi Klein avec Rebecca Stefoff, en librairie le 21 avril 2021 :
https://www.actes-sud.fr/catalogue/vaincre-linjustice-climatique-et-sociale
L'économie est en guerre contre de nombreuses formes de vie sur terre, y compris la vie humaine. Pour éviter l'effondrement, le climat commande une diminution de l'utilisation des ressources par l'humanité ; pour éviter l'effondrement, le système économique commande une croissance sans entrave. Il n'est possible de changer qu'un seul de ces ensembles de règles, et ce n'est pas celui des lois naturelles.
Notre système économique est en guerre avec la vie sur Terre. Car lorsque l'économie s'arrête, nos systèmes naturels commencent à récupérer. Nous avons besoin d'un réalignement entre les deux.
Le Monde

Sans doute la plus tristement célèbre de ces expériences eut-elle lieu en 1998, lorsque Coca-Cola lança un concours demandant à plusieurs écoles de fournir une stratégie de distribution de coupons-rabais Coke à des étudiants. L'école qui aurait conçu la meilleure stratégie promotionnelle remporterait 500 dollars. Greenbriar High School, à Evans, en Géorgie, a pris le concours très au sérieux, organisant à la fin mars une Journée officielle Coke lors de laquelle tous les élèves arrivaient à l'école vêtus de t-shirts Coca-Cola, posaient pour une photographie de groupe formant les lettres C, o, k, e, assistaient à des conférences données par des cadres de Coca-Cola et apprenaient tout, en classe, sur la boisson noire et pétillante. Ce fut un petit coin de paradis de marketing jusqu'à ce que vienne aux oreilles de la directrice que, dans un horrible geste de défi, un certain Mike Cameron, 19 ans, était arrivé à l'école vêtu d'un t-shirt Pepsi à la journée Coke. Il fut rapidement suspendu pour cette infraction. « Je sais que ça semble affreux – un enfant suspendu pour avoir porté un t-shirt Pepsi à la journée Coke, a dit la directrice, Gloria Hamilton. Ç'aurait été vraiment acceptable... si ça s'était limité à l'intérieur de l'école, mais nous recevions le président régional [de Coca-Cola], et des gens étaient venus en avion d'Atlanta pour nous faire l'honneur de prononcer des allocutions. Ces étudiants savaient que nous avions des invités. »
L'une des ironies de notre époque, c'est que, en même temps que la rue est devenue la denrée la plus demandée de la culture publicitaire, la culture de la rue se voit elle-même prise d'assaut. De New York à Vancouver et à Londres, les sévères mesures policières contre les graffiti, l'affichage, la mendicité, l'art dans la rue, les jeunes avec leurs raclettes à pare-brise, le jardinage communautaire et les vendeurs à la sauvette sont rapidement en train de criminaliser tout ce qui fait vraiment la vie de la rue dans une ville.
Nous étions trop occupés à analyser les images projetées sur le mur pour remarquer que le mur même avait été vendu.
David Lubars, cadre supérieur dans le groupe publicitaire Omnicom, explique avec plus de franchise que d'autres le principe directeur de l'industrie. "Les consommateurs, dit-il, sont comme des cafards - on les asperge, on les asperge , et au bout d'un moment ils sont immunisés"

Extrait d'un entretien avec François Armanet pour l'OBS :
L'une des armes du néolibéralisme consiste à déclarer la guerre à l'imagination en faisant croire qu'il n'y a pas d'alternative , qu'on est parvenu à la fin de l'histoire . .........
Il faut changer de paradigme : substituer à une économie fondée sur la spéculation financière et la consommation de masse qui considère que les gens et la planète comme des ressources inépuisables et jetables , une culture qui protégera et respectera chaque personne et chaque lieu . Pour cela il faut passer à 100 % d'énergie renouvelable d'ici à 30 ans , mais dans l'intervalle il faut construire un système économique plus juste , une gestion démocratique et équitable de l'énergie au lieu de la laisser aux mains des grandes entreprises ............
Le People's Summit de juin 2017 à Chicago était organisé par le plus grand syndicat américain d'infirmières ( dont 150 000 membres sont des femmes de couleur ) . Ces infirmières s'expriment en tant qu'aidantes et défendent aussi les droits de leurs patients souvent privés de couverture médicale . Elles luttent à la fois contre la suppression de l'Obamacare , contre la prolifération des pipelines et des mines de charbon et contre l'expulsion des infirmières portoricaines .
-- Vous êtes donc optimiste ?
-- Pas vraiment ! mais je me refuse de me complaire dans le pessimisme ...... Toute personne disposant d'une tribune et des possibilités matérielles , sociales ou culturelle a le devoir de s'exprimer pour redessiner la carte politique .
Comme nous l'avons vu, ce n'est que depuis trois ou quatre ans que les entreprises ont cessé de camoufler les mises à pied et les restructurations derrière la rhétorique de la nécessité, pour se mettre à parler ouvertement, et sans excuses, de leur aversion pour l'embauche de personnel et, dans les cas extrêmes, de leur retrait total du domaine de l'emploi. Les multinationales qui, auparavant, se vantaient de leur rôle de « moteurs de la croissance de l'emploi » – et l'utilisaient pour réclamer maintes subventions gouvernementales – se présentent désormais comme des moteurs de « croissance économique ». La différence est subtile, sauf si vous cherchez un emploi.
Voici quelques chiffres qui donnent une idée de l'ampleur de la transformation : en 2003, le gouvernement des Etats-Unis passa 3.512 marchés avec des sociétés chargées d'exécuter des fonctions liées à la sécurité ; au cours de la période de 22 mois ayant pris fin en août 2006, la sécurité intérieure au sens large - d'une importance économique négligeable avant 2001 - vaut aujourd' hui 200 milliards de dollars. En 2006, les dépenses du gouvernement des Etats-Unis dans le domaine de la sécurité se chiffraient à environ 545 $ par foyer.
Et il n'est ici question que de la guerre au terrorisme en sol américain. Les gros bénéfices viennent des guerres menées à l'étranger. Sans tenir compte des fournisseurs d'armement, dont les profits ont monté en flèche grâce à la guerre en Irak, la prestation de services à l'armée des Etats-Unis est aujourd' hui l'une des économies tertiaires qui connaît la croissance la plus rapide du monde.
Peu importe leur choix de tactique juridique, les fabriquants de ces produits symboliques envoient tous le même message incroyablement contradictoire : nous voulons que nos marques soient l'air que vous respirez - mais ne songez même pas à l'expirer.