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4.03/5 (sur 50 notes)

Nationalité : Roumanie
Né(e) à : Drăgăşani , le 23/04/1894
Mort(e) à : Bucarest , le 19/10/1935
Biographie :

Marqué jeune par la mort d'un de ses frères puis par sa mobilisation pendant la première guerre mondiale, Gib Mihăescu connut une vocation littéraire un peu tardive, d'autant plus qu'en parallèle il reprit le cabinet d'avocat de son père. Après une pièce de théâtre, il publia plusieurs romans, dont "La Femme russe" et "La Femme chocolat". Une mort prématurée vint mettre fin à ses nombreux projets littéraires.

Source : Wikipedia
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Bibliographie de Gib I. Mihaescu   (9)Voir plus

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Citations et extraits (67) Voir plus Ajouter une citation
La rue ensoleillée se déroulait devant lui, les parfums colportés par les filles coulaient à flots dans le caniveau, les jambons suspendus aux devantures des épiceries et les tonneaux de tarama, de harengs fumés et de fromage dressaient le tableau de l’abondance et du bonheur universels comme le bruit de la rue, le bourdonnement des abeilles, les chevaux décharnés des cochers et même cette merveilleuse statue équestre de Matthias Corvin qui se trouvait juste là, bien installée sur son socle.
Il était adossé au cadre jaune d’une vitrine, en compagnie d’une bande d’amis, lorsqu’il la vit passer dans un groupe de filles. Le groupe des garçons salua avec de grands gestes, de sorte que toute la rue détourna le regard pour elle. Elle portait un tailleur bleu, aux lignes épurées, et un chapeau de velours noir aux larges bords. Elle s’avançait avec sa démarche royale, distribuant sans compter des fleurs de sourires. Elle réserva à Negrişor un sourire si particulier qu’ils se retournèrent tous pour le regarder.
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– La suite, la suite ! gémit avec insistance mademoiselle Eleonora.
Negrişor paraissait résolument embarrassé et mademoiselle Eleonora d’autant plus impatiente et curieuse.
– Eh bien, vous vous êtes arrêté à l’épisode crucial, l’encouragea-t-elle avec une indicible douceur. Je comprends votre hésitation. Je comprends, je comprends tout. Vous pouvez tout me raconter, vous savez, allez-y, courage. Non, je ne le dirai à personne, pauvre malheureux, à personne, je garderai tout pour moi, je serai muette comme une tombe.
(p. 38)
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Dans les vitrines, aussi propres que l'eau fraîche, de la bibliothèque, dont mademoiselle Eleonora affirmait que c''était l'unique souvenir de son père, se reflétaient à présent d'incomparables merveilles : une jambe emprisonnée dans un collant transparent, que l'ourlet de la robe de chambre entremêlée dans la boucle d'une jarretière dénudait jusqu'au dessus du genou, puis un sein brun et insolent qui glissait en catimini son téton dans la fente, profitant ainsi du geste de mademoiselle Eleonora qui rabattit sa tête en arrière et secoua légèrement ses cheveux pour les aligner et faciliter ainsi la confection d'un chignon en torsade ; enfin le contour robuste des lombes, cambrés pendant qu'elle se penchait pour couvrir sa jambe.
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En définitive, le sort n'était pas si rancunier et si stupidement farceur, comme tant d'autres l'en accusaient. Negrişor avait remarqué, au fil de ses années, bien assez nombreuses pour que la somme finale soit jugée rondelette, que, si ce vieillard déluré, ce birbe à qui l'on a confié la charge de la maîtrise du temps et des trajectoires des hommes, lui infligeait un malheur ou deux, il prenait néanmoins ensuite le soin de retourner soudain la veste de la chance. Le barbon doit être plutôt égrillard et grippe-sou : face à celui qui ne se révolte jamais contre ses canulars, il est capable de sortir de ses gonds en redoublant de ténacité ; tandis que celui qui se ramollit, il finit par lui taper sur la tête et l'achever. En revanche, contre celui qui lui oppose résistance et l'accuse ouvertement, il se fâche, pour avoir été trop hostilement morigéné. Lorsqu'on fait des gaudrioles sympathiques, cela l'enchante comme tout grison qui ne met pas votre patience à rude épreuve. Que voulez-vous ? Nous vivons dans un monde qui s'est trop éloigné de ses origines, comme si nous étions les enfants d'hommes trop anciens et usés. Tout est fêlé dans cet univers expulsé de l'ordre préétabli ; possible que ce soit la raison pour laquelle Dieu souhaite sa perte, et sa transfiguration.
Mais là commence une toute autre histoire, et seul le diable sait qui pourra encore la suivre. Celui qui, en revanche, sent la raison d'être des choses se doit, qu'il le veuille ou non, de s'y conformer. Puisque l'univers est timbré, que peut-il de plus, Negrişor, hormis commander encore un espresso, et disposer, de façon symétrique, autour de la tasse, sur la soucoupe, quelques mégots de cigarettes, en attendant la nouvelle facétie du vieillard aux ciseaux.
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 Il prit peur d'elle. Il y avait quelque chose d'assassin dans ses regards qui transperçaient ses yeux et cette folle envie de tout savoir, jusqu'au dernier grain de mystère, ce terrible plaisir qu'éprouve la femme à la vue des lambeaux de viande et du sang masculin versé rien que pour elle, l'horreur qu'il lisait derrière ce front bombé, suscitèrent la révolte de Negrişor contre le chocolatier qui avait osé animer cette douce fantaisie pâtissière de sentiments.
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Monsieur ou madame Untel travaille à la transposition dans telle ou telle langue du valeureux roman, etc. [...] Eh bien, monsieur ou madame Untel travaille depuis un peu trop longtemps. Les diverses actions entreprises en vue de la réalisation de ce but fort louable sont généreusement arrosées avec –comme disait feu le professeur Longinescu– la vaseline des engrenages sociaux. Louanges anticipées et prises de position publiques ou discrètes, immatérielles ou matérielles, de reconnaissance, à volonté. [...] Mais rien ne peut s'entrevoir à l'horizon désert. Aucun résultat, je m'empresse d'ajouter, appréciable. Mais c'est une tout autre chose que j'attends qu'on me montre: une ou deux chroniques robustes, signées par autant de personnalités tout aussi robustes du pays où le livre en question vient de paraître, et puis un compte éditeur tout aussi solide. Ici, naturellement, monsieur ou madame Untel sourira, plein de sous-entendus… "Bah, cela ne me regarde pas. Euh... moi j'ai fait tout ce dont j'étais capable."
Nous ne doutons pas une seconde que la distinguée personne en question ait fait à ce sujet tout ce dont elle était capable. Mais le noble missionnaire ou la noble missionnaire des écrits roumains était trop peu capable.

[Domnul sau doamna cutare lucrează la transpunerea în limba cutare a valorosului roman etc.[...] Ei bine, domnul ori doamna cutare lucrează cam de mult. Întreprinderile diverse spre realizarea acestui scop laudabil sunt din belşug stropite cu -vorba defunctului profesor Longinescu- "untdelemnul care unge osia daravanelor sociale". Laude anticipate şi exprimări publice ori discrete, sufleteşti ori materiale, de recunoştintă cîte pofteşti. Dar nimic nu se întrevede pe întinderea pustie. Nici un rezultat, mă grăbesc să adaog, apreciabil. [...] dar altceva aş aştepta eu să mi se arate: vreo două cronice zdravene, semnate de vreo cîteva nume tot aşa de zdravene din ţara unde cartea cu pricina a apucat să apară-şi pe urmă un cont zdravăn de librarie. Aci, fireşte, domnul sau doamna cutare va zîmbi cu anume sens "Mde.. asta nu mă priveşte pe mine. Asta, he, de ...eu am făcut tot ce am putut".
Nu ne îndoim că distinsa persoană în chestie a facut tot ce-a putut. Dar nobilul misionar sau nobila misionară a scrisului românesc a putut prea puţin [....].
(Traducerile, în Calendarul, I, Nr. 67, 15 iunie 1932 ) ]
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Elle s’était maintenant relevée et le regardait, souriante comme un chien qu’on gâte parce qu’il est prêt à affronter la mort au moindre signal. Negrişor contempla dans le petit cercle de lumière de ses yeux son propre reflet, minuscule comme un insecte, accoutré de la fourrure du bêta du dessous.
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Oh, cette couleur indéfinie, cette pâleur insaisissable, ces eaux brunes qui fuient et se pourchassent sur le satin de la peau comme la danse ludique de sources obscurcies par la paix mystérieuse de la nuit.
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– Tu dis que tu parles roumain, mais tu n'es pas moldave. Tu es juif ?
– Comment ?
– Tu es youpin ? Je suis obligé de me corriger, en Bessarabie le mot « juif » semble inconnu aux fils d'Israël de basse condition.
– « Niet ».
Je demande sur un ton sévère et agacé :
– Tu parles ou tu ne parles pas roumain ?
– Mais je parle…
– Comment t'appelles-tu ?
– Ilya.
– C'est tout ?
– C'est tout. Pour une âme de Dieu, un seul nom suffit. Car même ceux qui en ont plusieurs n'ont qu'un seul destin. Qu'ils aient vingt noms ou qu'ils en changent pour se cacher, la faim et la mort les rattraperont quand même.
– Tu es philosophe, je vois. Tu es peut-être russe ?
– Une âme de Dieu.
– Laisse Dieu tranquille, et réponds : tu es russe ?
– C'est possible.
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Les minutes s’écoulaient lentement. Cette rue formait un véritable désert : pas un pas ne résonnait sur le trottoir bitumé. Les minutes accrochées au mur, quant à elles, battaient la cadence, produisant une douce musique aux sonorités faïencées. Pendant un moment, il les observa qui surgissaient de l’éternité, sautaient, puis s’agrippaient à la grande aiguille qui les soulevait avec un bruit sourd. Lorsqu’elles achevaient leur existence, Negrisor entendait distinctement un léger cliquetis et il lui semblait qu’un souffle s’éteignait sur un bras de la chaîne du balancier qui descendait.

(…)

Les minutes ici présentes, avec leurs vies équivalentes, égalisées en longueur comme un fagot de brindilles, l’attristaient vraiment. On entendit plusieurs fois le son de la pendule, Negrisor vit qu’il était vingt-deux heures, et, ce qui l’intéressait beaucoup maintenant, c’était de voir par où de nouvelles minutes pourraient encore grimper, alors que la grande aiguille entamait sa descente. Par le bras de la chaîne qui montait, bien sûr. Ensuite, elles se laissent entraîner par les petites roues du mouvement, glissent sur la tige et attendent derrière le cadran blanc, comme les âmes recroquevillées devant le gouffre qui les sépare de l’infini. Ensuite, l’horloge annonce leur destinée, elles se glissent l’une après l’autre vers la flèche de l’aiguille, comme un enfant chevaucherait une poutre qui penche vers d’abyssales noirceurs. A chaque nouveau tic-tac, une nouvelle cabriole.

(…)

Mais Sari ne revenait toujours pas. Elle ne se rendait pas compte que son retard coûtait nombre de nouvelles têtes de minutes culbutées sous l’intransigeant couperet du temps.
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