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Critiques de Isabel Ascencio (27)
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Délit de gosse

Jeanne veut un enfant de Marie. Un enfant désiré et déjà aimé. Mais comment faire ?

Peu s’en faut pour la scénariste de métier que notre héroïne est. Le mariage de son frère tombe à pic. L’occasion est trop belle. Celle de revoir ses amies masculines du passé. Elle convie Marie à la noce pour réaliser un véritable « braquage de gamètes ».

C’est sur ce ton tant primesautier que caustique que commence cette histoire rocambolesque, mais loin d’être frivole.

On se laisserait presque emporter...



Malheureusement, la lourdeur du style pèse de plus en plus sur l’originalité et la fraîcheur du récit. Plus proche d’un modèle de rédaction scolaire, l’exercice romanesque efface de lui même les personnages et son sujet.

La succession d’adjectifs inutiles, ou d’application dans la tournure de phrases si correcte nuisent à la vitalité d’une histoire qui n’en manquait pourtant pas.

Copie à revoir, si j’ose dire.

Dommage, mais l’idée était bonne. Peut-être une prochaine fois...



Lu en mai 2019.
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Un poisson sans bicyclette

Nous sommes dans les années soixante-dix ( Lors de la canicule de 1976 en particulier) et nous allons vivre et observer des événements presqu’ anodins à travers deux principaux points de vue :

Ceux de Jane et de Lise, l’une d’origine Britannique (Rencontrée sur l’île de Wight, lors d’un certain festival par une sorte de Gourou Hippie…) membre d’une communauté, au vrai sens du terme, qui s’installe dans une ferme près d’un village du sud de la France, l’autre petite fille de treize ans, originaire de ce même village, avec ses chasseurs un peu réac, ses gendarmes débonnaires et pas toujours très futés, rêvant de sortir de ce trou et de prendre son destin en main, avec l’aide de quelqu’un qui voudrait bien l’enlever.



C’est l’occasion, à travers les espoirs et le ras-le-bol de Lise, puis la folie et les névroses de Jane, d’exposer les difficultés qu’il y a à installer une communauté égalitaire, dans laquelle les hommes et les femmes ne retomberaient pas dans les schémas traditionnels de la société. On est en plein mouvement féministe, avec les risques de radicalisation qui s’emparent de la plupart des mouvements en phase de développement. (D’où le titre, sur la base d’un slogan Anglais…)

On ne change pas de modèle de société sans changer auparavant de culture. On va donc retrouver tout au long du récit les contradictions internes des communautés, des grandes utopies :

Exemple : « La communauté c’est génial » (Mais je m’ennuie et je ne sais plus où on va ni après quoi on court. )

Autre exemple : « L’amour libre, c’est vraiment super ! » ( Mais je suis jaloux(se) comme un pou et j’en crève dans mon coin)



On est mis dans l’ambiance de l’époque que certains d’ente-nous ont connu (Et ce ne sont pas les plus jeunes….) par de nombreuses références culturelles, voir cultes : Qui a oublié « My lady d’Arbanville », ou « La France a peur » au journal de vingt heure, à propos de l’affaire Patrick Henry ? Et de Colette Magny dont les chants engagés reviennent en leitmotiv tout au long du roman.



Tout cela est écrit dans un style un peu télégraphique, qui colle bien au récit et rend la lecture assez rythmée . Et derrière la brutalité des mots, les phrases regorgent de poésie et de rêve… et aussi d’une bonne dose de folie.

En tout cas, ce livre nous montre que quitter l’enfance, quitter l’adolescence et quitter les modèles établis de la société, rien n’est facile.



Ce livre est une belle découverte que je dois à Babelio et à la collection « Verticales » de Gallimard. Sa modernité ne le rend pas toujours aussi facile à lire qu’il n’y parait, mais il faut le découvrir.

Cela vaut vraiment le coup.

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Délit de gosse

Jeanne croise le regard Marie sur le tournage d’un film dans le vieux port de Barcelone. Une semaine plus tard, elles forment un couple. «Ces sept nuits, c’était moins une addition qu’une graine, avec tout le potentiel d’une vie dedans, et je me disais que nos corps encore poisseux d’amour au réveil faisaient un sacré bon terreau pour que ça lève. Il ne manquait plus que l’arrosage des jours… »

Avec le temps, leur union s’affermit, les projets prennent forme. Parmi ceux-ci l’idée de créer une famille, d’accueillir un enfant. À Barcelone justement, elles ne devraient pas rencontrer de problème particulier pour faire réaliser une insémination artificielle. Sauf que Jeanne-Élise Vaujours du Val a des principes et n’imagine pas une autre méthode que la traditionnelle pour parvenir à ses fins.

Tout le problème consiste alors à trouver un «donneur» docile qui ne posera pas de questions, qui ne saura rien du «vol de gamètes».

Un carton d’invitation va servir de déclic. Le petit frère de Jeanne se marie prochainement dans le Périgord où la famille est propriétaire d’un grand manoir. L’endroit et les circonstances idéales pour entraîner un noceur dans une alcôve.

En faisant de l’une de ses protagonistes une cinéaste, Isabel Ascencio a trouvé une manière très astucieuse de construire son scénario. Pour que le plan fonctionne, elle va devoir construire son story-board scène par scène, préparer les lieux, cadrer au plus près des acteurs. Ce qui nous vaut des descriptions très détaillées avec, comme sur un tournage, la confrontation du film imaginé avec la réalité du plateau.

Il faut gérer la météo, les impondérables du mariage – à commencer par le taux d0alcoolémie des différents invités – les humeurs et l’ego de la «victime», le polytechnicien François-Henri.

«La deuxième fois que Jeanne l’a entendu dire Polytechnique, elle a été traversée d’une pensée cocasse. L’X, elle s’est dit, c’est comme ça qu’on l’appellerait, le poseur de graine. Ni nom, ni visage, on ne pouvait pas concevoir circonstance plus faste.»

Bien entendu, je ne vais pas dévoiler ici l’issue de cette nuit de noces très particulière, mais j’aimerais souligner combien, pour reprendre la métaphore cinématographique, la plume d’Isabel Ascencio se déplace comme une caméra, qui joue avec les différents plans, du gros-plan au panoramique, réussissant même de jolis flash-backs pour nous faire comprendre d’où viennent les motivations, quel a été le parcours des protagonistes et comment, de John Ford à Almodovar, leur imaginaire s’est construit.

Une manière aussi subtile qu’incisive d’aborder les thèmes très actuels de la maternité, de la PMA, des enfants de couples homosexuels, de filiation, de la «famille idéale», mais aussi une belle histoire d’amour.


Lien : https://collectiondelivres.w..
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Les événements, suite

Attention, coup de coeur !

Il y a des livres dont on entend peu parler et pourtant, ils réunissent tout ce que l’on attend de la littérature : une écriture, une réflexion sur les hommes, les lieux qu’ils habitent et qui les habiteront pour toujours, l’Histoire qu’ils traversent et qui s’inscrira à jamais en eux... Tout cela est là, dans le dernier livre d’Isabel Ascencio : un livre fort, très fort, de ces romans qu’on n’oublie pas et dont les personnages nous accompagnent pour longtemps.

Joëlle Leblanc, la narratrice, a quitté le Jura où elle vit pour se rendre à l’enterrement de son père Serge Leblanc, dans le Nord. C’est l’histoire de ce père qu’elle va raconter, un pied-noir, un exilé, qui a quitté l’Algérie en 1962 pour se retrouver un peu perdu dans les rues de Marseille… S’en suivront une rencontre avec une femme, un mariage, deux enfants, une installation dans une commune du Var, avec, en prime, l’achat d’un petit terrain non constructible sur les hauteurs du village, « dix ares de vieilles souches en pentes raides » et un cabanon de douze mètres carrés avec une vue sur la baie de Bandol quand le ciel est dégagé…

Un lieu à soi, pour aller pique-niquer en famille.

Un bout de terre qui rappelle tant les pieds de vigne du trisaïeul, là-bas, en Algérie...

Serge Leblanc aurait pu mener une vie paisible assis sur son coin de terre aride, les yeux perdus dans la contemplation du ciel bleu méditerranéen lavé par le mistral.

Mais un homme n’est pas une ligne droite. Non, un homme est fait de nostalgie, de souvenirs, de paysages, d’images, de sensations, d’attachement à une terre, à une enfance. Et tout cela est là, en chacun, et chacun est la somme de cet ailleurs, de ces territoires, de ces espaces en dehors desquels être chez soi ne va pas de soi...

Ainsi, Serge Leblanc a beau mettre un pied devant l’autre chaque jour, son coeur est resté attaché à l’Algérie et ce qu’il porte en lui du passé va lui jouer des tours car l’on est sensible aux êtres qui ont les mêmes images dans les yeux...

Et pourtant, peut-être aurait-il pu (dû ?) détester immédiatement Michel Garrigou, le Marseillais, une grande gueule qui aime raconter ses « vingt-huit mois d’Algérie et dix de rab dans la foulée », les yeux brûlés par le soleil, les pieds en sang dans les rangers, la trouille qui tord le ventre de celui dont la mission était « le maintien de l’ordre » … Bel euphémisme… « J’ai tout fait pour te le sauver ton pays » dira Garrigou à son ami.

N’empêche, les Arabes, Garrigou en parlera toujours à Serge en disant « tes Arabes »… Et dans ce petit village du Castoul, sur ce même territoire bien circonscrit, il y en a des Arabes : la famille Taïeb par exemple. Tout le monde les connaît bien les Taïeb… Ils ont perdu une fille, une petite Najet, qui n’est jamais rentrée d’un voyage en Algérie.

Bientôt, ils perdront un fils… Les accidents sont si vite arrivés… Le fils Taïeb renversé par une voiture… conduite par Serge Leblanc.

C’est lui, il a avoué...

Et pourtant, ça lui ressemble tellement peu à Serge Leblanc de s’alcooliser, de conduire vite au risque de renverser un jeune garçon sur son scooter.

Un jeune Arabe…

Un portrait sensible et tout en nuances d’un père introverti, silencieux, hanté par les lieux d’avant, ceux de l’enfance, du passé, de la mémoire, un homme « tout résigné au sort qui l’accable, déterminé à survivre encore une fois avec ce qu’on lui laisse », un homme « profondément habitué à perdre.»

Et autour de lui, une femme, deux enfants, des amis qui vont s’inscrire dans son destin, tenter d’y trouver leur place, de l’aimer, de profiter aussi de sa générosité et de sa fragilité...

Un récit très fort et tout en tension… magnifique !
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Délit de gosse

Bon, que je le dise tout de suite : je ne connais personne aux Éditions du Rouergue, n'ai pas d'actions chez eux et ne cherche pas à m'y faire publier ! J'ose donc affirmer (et ce n'est pas la première fois que je le dis) que je ne suis JAMAIS déçue par leurs publications ! Et une fois de plus, je viens d'achever un roman magnifiquement écrit qui m'a totalement bouleversée.

Je vous préviens, mon petit résumé ne donnera pas grand-chose parce que l'écriture est tellement délicieuse qu'il faut lire ce roman pour en apprécier toute la beauté et toute la sensibilité !

Deux mots quand même: Jeanne aime Marie. Marie aime Jeanne. Elles sont jeunes et vivent ensemble à Paris dans un appartement prêté par la famille de Jeanne. Le père de Jeanne est notaire, sévère, et très très traditionnel dans sa façon de concevoir l'existence et les choses en général, si vous voyez ce que je veux dire... Il vit dans une somptueuse demeure périgourdine où Jeanne a passé toute son enfance et où elle n'a quasiment jamais remis les pieds depuis qu'elle a rencontré celle qu'elle aime, et surtout depuis qu'elle a refusé d'épouser un voisin bien né, un certain François-Henri. Or, un jour, elle reçoit une invitation d'Ernest, son petit frère : il se marie et Jeanne est invitée. Elle ira, évidemment, mais avec une petite idée derrière la tête...

En effet, Jeanne a un projet, magnifique et complètement fou : elle veut un enfant et elle profitera de cette noce pour tenter d'amadouer un des fils à papa invités à la grande cérémonie, dans le but de repartir… enceinte ! Et elle tient à ce que Marie soit présente ce soir-là : elle aura au moins une fois mis les pieds dans ce parc merveilleux et « fait la connaissance » - à distance, certes, mais quand même - du clan familial ! Pour Jeanne, c'est important.  Afin de noyer le poisson, Marie sera accompagnée par leur pote Mano au grand coeur, un Mano tiré à quatre épingles pour l'occasion. Jeanne a tout organisé minutieusement, tout est parfaitement réglé à l'avance : les moindres gestes et les plus petits déplacements. Quant aux éventuelles prises de parole de Marie et de Mano, faut qu'ils oublient. Ils regarderont, de loin si possible, et repartiront tôt à l'hôtel. Jeanne croit dur comme fer que tous ces collets montés n'y verront que du feu et ciao l'équipe, on repart avec le mouflet gros comme une puce dans le ventre…

Inutile de vous dire que rien ne va se passer exactement comme prévu…

Bon, déjà, je me rends compte que le résumé des premières pages est très incomplet : je ne vous ai pas dit par exemple que… Bon, je me tais… Sur la famille de Marie, il y aurait mille histoires à raconter et cent mille à rêver… Je ne vous ai pas expliqué de quelle façon magnifique elles se sont rencontrées… Et je ne vous ai pas non plus parlé de la demeure familiale et surtout de son parc majestueux où Jeanne, enfant, aimait courir à en perdre le souffle et jouer jusqu'à pas d'heure, vous ne savez rien des bois de grands hêtres, du petit kiosque à musique, de la fontaine avec la Velléda. Non, je ne vous ai rien dit de tout ça car seuls les mots d'Isabel Ascencio peuvent rendre avec autant de beauté, de poésie et d'émotion la magie de tout cela. J'ai tout vu, tout senti, tout respiré… je me suis enivrée du parc, de la forêt, du verger et de la mer… C'était magnifique...

Et quelle émotion… Je n'ai pas les mots pour en parler…

Un roman tellement beau qu'on a envie de l'offrir au monde entier et surtout peut-être à quelques-uns pour tenter de leur faire comprendre que lutter contre l'amour, c'est inutile.

Tout simplement.
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Un poisson sans bicyclette

J'ai mis un certain nombre de pages avant de m'habituer à cette curieuse écriture. Il faut en effet apprivoiser les lieux, les personnes, les faits.

Nous sommes en 1976, un été caniculaire, dans le Var.

Dans une vieille ferme se sont installés de jeunes adultes, vivant en communauté, avec ce que cela implique de belles paroles, de recherche de liberté, de musique, d'harmonie avec la nature ...

Lise a 13 ans, une bicyclette, et des rêves plein la tête. Elle vit au village avec son père, sa mère n'est plus.

Elle observe cette communauté avec attention, elle invente des histoires, auxquelles elle mêle involontairement les habitants du village. Si seulement elle pouvait s'enfuir avec l'un des chevelus de la ferme!

Des personnages décrits avec humour, des situations cocasses ou tragiques. La communauté est confrontée à des réalités pas toujours compatibles avec son idéal.

La fin m'a laissée un peu perplexe.

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Délit de gosse

Attiré par le pitch de départ par une couverture épurée et figurines de Lego et par les thèmes très consensuels.

Un genre de lecture dont je n'ai vraiment pas l'habitude. Mais justement, sortons un peu de nos rails. Partons à la découverte de ces deux femmes (et un homme) qui cherchent à fonder une famille.



Jeanne et Marie, un couple très uni. Une envie de bébé. La méthode traditionnelle est la meilleure selon Jeanne. Oh oui, testons-là. Ah ben tiens justement, au mariage du petit frère. Oui, mais attends, je crois que Marie ne sera pas la bienvenue. Ah mais pourquoi? Oh, mais la famille très traditionnelle de Jeanne a des principes. Peuh, ce n'est pas bien grave, on va utiliser l'alibi. Ce sera Mano, le copain gay qui va donner le change. OK. On s'organise tout ça. Au millimètre près. Parfait. Y a plus qu'à.....



Lu comme ça, on se croirait dans un scénario d'une série TV. C'est vraiment un procédé intéressant et original. Sauf qu'un grain de sable va enrayer cette machine bien huilée.

J'ai trouvé une écriture majestueuse, candide, et parfois triste. Entre souvenirs d'enfance, rêves et désirs, l'histoire avance petit à petit vers un final polémique (celui de l'homophobie). Et puis d'autres idées comme le racisme, la PMA, la religion,l'obscurantisme.

C'est plein de sensibilité. La petite larmounette à la fin. Un roman actuel sans jugement et bien écrit. Je vous le conseille.

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Délit de gosse

Toi et moi. Un scénario de braquage.



Un petit frère et son mariage, une amorce littéraire et un désir de gosse, « Parce qu’aux gens de la famille de Jeanne, il faut le savoir, il n’a jamais été question que je sois présentée ».



Comment transformer une cérémonie de mariage en braquage de gamètes ? Jeanne invente, le cinéma est son métier, un scénario pour une copulation « traditionnelle » en cachette de ses réels désirs amoureux.



Un lieu et une date, « Faut qu’on y soit, nous aussi », une focalisation réfléchie sur un ancien petit ami. En contrepoint comme des flash-back cinématographiques – l’ombre ou la lumière portée des temporalités, le vent de liberté levé dans le cœur de Jeanne, la place des salles obscures et du cinéma, la transformation du nom Jeanne et du Val, le rendez-vous auquel elle court, un récit de rencontre et d’embrasement, Barcelone, la danse et l’ivresse, « La bombe qui lui explosait aujourd’hui au corps la libérait d’un tel étau visé sur elle depuis toujours qu’elle ne pouvait pas se tromper », Marie et un tee-shirt Proud to be queer, des nuits, l’histoire de Marie, l’amante de Nadar et de Baudelaire, Port-Louis, la mulâtresse, Mano, le fardeau « de honte et de boue », l’épanouissement et la joie lesbienne, les rapports au père et à la famille, Brest et les bateaux, le cinéma de l’une et de l’autre, une ancienne histoire d’amour enfantine et plus tard la compréhension du véritable chagrin d’amour,



Je ne vais pas décrire l’organisation, les tenants et les masques, la place de l’une et de l’autre, Marie et Mano, l’intrigue, les accoutrements, « Je me suis fait l’effet d’un chat, griffes mal rentrées, qu’on flattait pour qu’il plonge sa patte dans une bassine d’eau », la cérémonie de mariage, le hold-up en talons et costard, le désir d’elle, les masques et le temps d’une danse, la violence, l’impression « qu’on venait de l’enfermer définitivement dehors »…



Un scénario, une histoire, l’X, « Elle avait maintenu son corps du début à la fin dans une application anxieuse », les émotions rentrées, le teint cireux de Jeanne « comme à ses pires moments de malaise en mer », le décrassage de sa peau par centimètre, la sueur froide, l’idée de la gosse dans le ventre, l’événement en train de ne pas avoir lieu…



Entre rêve, cauchemar et réalité, des photos, « On est où, toi et moi ? », le trou noir de l’absence, ces personnes qui n’impriment même pas la pellicule, la Jeanne de Courbet, la famille et la foule, l’arrivée d’un cyclone, celles et ceux qui ont manifesté contre le mariage pour toustes, l’argument éculée de la « nature », l’An-Arkos, les aubes levées sur l’océan, « Moi à la barre, j’ai dit, et toi dans son ventre », Ernst salué et le père dans l’escalier…



La tendresse et le désir contre l’invisibilité et l’homophobie. Un hold-up bien particulier soigneusement préparé et agencé, les costumes et le décor, les actrices Jeanne et Marie, Mano et le monde familial du conformisme haineux…
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Un poisson sans bicyclette

Un beau récit plein de délicatesse, qui nous replonge dans ces belles années d'illusion où tout était possible et réalisable donc extraordinaire, surtout pour les adolescentes de ma génération.

Les années post 68, années des références bousculées, renouvelées, de la mutation d'une société policée, politiquement correcte pour un modèle moins conventionnel, de l'apogée du mouvement hippie, de la vie rêvée en communauté, sans règles ni contraintes apparentes, avec ses aléas mais sa liberté...

Au fil des pages on voit que quitter l'adolescence, ou la sécurité, laisser derrière soi une société établie, pour la liberté mais aussi l'inconnu, n'est pas aussi simple qu'il n'y parait et ne convient pas à tout le monde, Jane par exemple.

La fin du livre laisse le lecteur dubitatif mais reflète tout le paradoxe de cette période de l'histoire, où toutes les expériences vécues ont été importantes dans l'histoire de chacun sans pour autant être nécessairement une finalité.



Merci beaucoup à Masse Critique et à Babelio pour cette découverte et encore mille excuses pour cette critique tardive.
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Drama queen

Ce livre est celui d’une disparition, celle du « Pop ». « Un jour, au début de semaine, il va au travail dans sa Citroën C5 gris métallisé. Seulement là, va savoir pourquoi, il ne rentre pas. » Mais c’est surtout celui d’amitiés ambiguës et d’ « amours jeunots qui frôlent la catastrophe », ceux d’une jeune bachelière Alex, de sa copine Bess, de Félix, le frère de Bess, et de Yacob, l’oncle d’Alex.

Entre haine et amour, tortures et caresses, perversité et tendresse, tous les quatre s’enfoncent dans un jeu de plus en plus dangereux, celui du « je t’aime moi non plus ». Et au-dessus de tout ça, le Pop. Le grutier « pachydermique », l’observateur inlassable, « le garde de nos corps, le service de nos ordres, notre barrière de sécurité ». Sa silhouette massive plane au-dessus des adolescences d’Alex, Bess et Félix, de plus en plus menaçante, de plus en plus oppressante. Jusqu’au point de non-retour.



Je ne tenterai pas de le résumer davantage. Ce n’est pas un livre que l’on résume, c’est un livre dans lequel on se plonge corps et âme. Mais ce qui ensorcelle dans cet ouvrage, c’est l’écriture d’Isabel Ascencio. La construction en flash-back nous fait découvrir peu à peu les attirances, les liens qui unissent tous ces personnages déglingués et éclaire les zones d’ombre. Riche, dynamique, imagée, la langue nous tient en haleine et nous entraîne de plus en plus loin avec ses héros, approchant leurs folies les plus insupportables sans tomber dans le glauque.



Jubilatoire. A lire et à relire.
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Les événements, suite

Après l'enterrement de son père, Joëlle Leblanc explore le passé pour reconstituer son itinéraire et expliquer pourquoi cet homme, né en Algérie, exilé en France, a accepter un deuxième exil en partant vivre dans le Nord, loin de sa terre natale et des plages méditerranéennes d'où il pouvait encore vaguement s'imaginer la voir. Reconstruisant pas à pas le fil des événements qui vont le conduire à ce double déracinement, elle trace le portrait d'un homme blessé, mélancolique, qui accepte douleurs et humiliations comme si elles lui étaient dues. La tension s'accroît de pages en pages, l'autrice instillant petit à petit les éléments qui permettent de comprendre le personnage, sa nostalgie et ses émotions, et de finalement saisir l'enchaînement des événements jusqu'à la révélation finale, suite arithmétique dans laquelle s'ajoutent exils, douleurs, trahisons et désillusions. L'écriture d'Isabel Ascencio emporte, ses phrases nous saisissent et nous plongent dans un tourbillon qui mêle les micro-événements d'une vie intime aux " événements" de "l'Histoire avec sa grande Hache" comme aurait dit Georges Perec. Le puzzle prend forme peu à peu avec en toile de fond une suite musicale aux notes profondément mélancoliques, comme celles des balades de Leonard Cohen que Serge Leblanc aimait tant.

Les Événements suite, est un roman foisonnant, extrêmement bien construit autour d’un personnage qui ne peut que nous toucher tant ses misères intimes peuvent être l'écho de bien des drames universels.



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Les événements, suite

Un soir de décembre 1975, sur une route sinueuse du Var, qu'est ce qui peut réunir en un même lieu Serge Leblanc, pied noir installé dans le Var et fraîchement séparé de sa femme, Michel Carrigou, flamboyant entrepreneur local et meilleur ami de Serge, un commissaire de police marseillais, et Azzedine Taieb, employé de Carrigou et petit traficant ?

C'est l'énigme sur laquelle, quarante ans plus tard, se penche Joëlle Leblanc, fille de Serge. Car de cette rencontre de décembre 1975, c'est bien la mort qui a surgi.



Si l'intrigue aux allures de roman noir tient en haleine le lecteur, elle n'est pourtant pas le seul attrait de ce roman au style soigné et envoûtant, qui nous prend dans ses filets, aussi bien par son fond que par sa forme.



Car si cette œuvre déroule le fil du destin tragique de Serge Leblanc, elle nous plonge aussi dans les méandres de la mémoire de la narratrice, qui s'efforce de reconstruire un passé lacunaire, marqué par le divorce de ses parents, leurs failles dans lesquelles la grande Histoire a imprimé sa marque.



Entre introspection, enquête, évocation de la guerre d'Algérie, l'autrice mêle habilement les événements historiques au destin de ses personnages, pour nous conter un récit profondément humain, fait d'exil, d'amour, de trahison et d'amitié.
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Délit de gosse

Jeanne, la compagne de Marie qui nous raconte l'histoire, a un désir fort d'enfant. Sauf qu'elle souhaite le faire «à l'ancienne», en choisissant un géniteur avec qui elle aura un rapport sexuel. Elle choisit FH, son ami d'enfance à qui elle était promise et décide de mettre son plan en action lors du mariage de son petit frère. Le «braquage de gamètes» est en route.

L'idée est singulière, le roman aussi, à certains égards, mais je reste mitigée. J'ai aimé les retours en arrière sur la vie de Marie qui a grandi à l'île Maurice, ainsi que sa relation avec son père marin. J'ai aimé l'aspect engagé du roman sur le droit des homo contrastant avec le milieu hyper bourgeois de la famille de Jeanne. J'ai aimé le côté très cinématographique, du fait que Jeanne est réalisatrice. Mais le récit de la noce, qui court sur plusieurs chapitres, m'a ennuyée et les personnages ne m'ont pas franchement émue. Je n'ai pas eu grand intérêt à lire ce roman en fin de compte. Je ne le déconseille pas car il est original et traite d'un sujet peu abordé mais ce n'est pas un coup de cœur non plus. Vous vous ferez votre avis !
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Délit de gosse

Réalisatrice en devenir, Jeanne décide de profiter du mariage de son petit frère, Ernest, pour effectuer auprès de son ancien fiancé un braquage de gamètes. Pas question en effet pour elle d'envisager autre chose qu'un rapport sexuel afin de concevoir "la gosse" dont rêvent Jeanne et sa compagne.

Aidées de leur ami gay, Mano, les jeunes femmes mettent alors au point un scénario rocambolesque, extrêmement précis et visuel, qui se déroulera dans le manoir familial du clan de Jeanne, dans le Périgord. Mais gare à ceux qui oseraient se mettre en lumière et franchir la lisière de ce qui reste tolérable aux yeux d'une famille engluée dans ses traditions et ses préjugés.

Isabel Ascencio aurait pu choisir la voie documentaire pour traiter ce thème ,mais elle a préféré une manière à la fois plus poétique, par la langue et plus ancrée dans l'univers de la création artistique, dans lequel ses héroïnes vont parvenir par des chemins très différents.

Ce n'est pas un hasard, si en choisissant de raccourcir ses nom et prénom, la braqueuse de gamètes endosse l'identité de Jeanne Duval , maîtresse mulâtre de Baudelaire qui a été effacée ,ou plutôt juste recouverte de peinture sur un tableau où elle figurait derrière son amant , tant elle inspirait à la fois de fascination mais aussi de honte. Croyant choisir un nom d'artiste, la jeune réalisatrice optait en fait pour un nom "de paria" comme le souligne Marie, qui vient de soutenir une thèse sur cette femme dont elle partage la couleur de peau.

Un roman sensible et lucide sur une société qui peine à évoluer.
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Un poisson sans bicyclette

J'ai beaucoup aimé ce livre et les différents points de vue des personnages. L'utopie de la vie en communauté y est bien dépeinte et les paysages m'ont fait partir en vacances.

La jeune adolescente est très attachante et les autres personnages haut en couleur.
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Les événements, suite

Coup de coeur ! une écriture précise et brillante au service d'un fait divers du milieu des années 70, qui fait ressurgir les échos de la guerre d'Algérie... et qui génère à son tour, quarante ans plus tard, une enquête familiale suite à la mort du père. A LIRE !
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Délit de gosse

Je viens de finir ce livre et de prendre connaissance des 11 critiques déjà en ligne.

La mienne sera volontairement différente. Je rejoins la plupart des critiques que j’ai lues.

Si j’ai lu ce livre, c’est parce que je suis allée voir Isabel Ascencio le présenter dans une librairie bisontine. En effet, elle habite le Jura, et moi j’habite Besançon.

Je ne souhaite pas revenir sur cette belle histoire mais plutôt vous parler de l’auteur.

J’ai trouvé cette rencontre très intéressante. Isabel est aussi douée à l’oral qu’à l’écrit.

Elle est fort sympathique et nous avons pu bavarder. Un très agréable moment pour moi.

Enfin, j’ai aimé le clin d’oeil final à Gustave Courbet, peintre né en Franche-Comté, dans la petite ville d’Ornans. Une grande partie de son oeuvre évoque notre région.

Je parle de mes meilleures lectures au club de lecture dont je fais partie ( lien sur mon profil)...je parlerai d’Isabel...elle mérite d’être connue localement.

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Délit de gosse

Elle veut faire un bébé toute seule, c'est un peu le refrain qui pourrait se fredonner pendant cette lecture. Présentation chronologique ou dans "l'ordre" du livre ? Le scénario permet la liberté de choisir ! Jeanne rencontre Marie lors du tournage d'un film à Barcelone. Elles forment rapidement un couple. Les projets arrivent, entre autre celui d'un gosse, appelé comme ça tout au long du livre, à tour de rôle féminin ou masculin. Et pour ce grand projet, c'est un véritable scénario que nous propose l'autrice, à partir de la réception du carton d'invitation au mariage du petit frère de Jeanne !

Car elles auraient pu retourner à Barcelone, oui mais voilà, Jeanne est née Jeanne-Elise Vaujours du Val et elle a des principes, cela se fera de façon naturelle. Mais quid du donneur... voilà le roman lancé, entre présent et passé, gros plans et panoramiques ! Un véritable braquage de gamètes ! Une écriture MAGNIFIQUE !!!!! cette présentation me paraît fade, plus encore après avoir eu le bonheur de rencontrer l'autrice ! Il faut le lire pour en apprécier la beauté et la sensibilité ! Une très belle manière d'aborder la maternité, la PMA, les enfants de couples homoparentaux, la filiation, la "famille idéale", un hymne à la tolérance mais aussi et tout joliment, une histoire d'amour !
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Délit de gosse

Jeanne et Marie s'aiment, depuis le jour de leur rencontre, qui était comme une évidence. C'est d'ailleurs tellement une évidence entre elles, que l'heure est venue de fonder une famille. Seulement voilà, Jeanne vient d'une famille très classique, pour qui le mariage et la famille sont les valeurs centrales. Alors pour elle, hors de question par la science. Pour faire un enfant, il faut avoir une relation sexuelle avec un homme, et c'est ce qu'elle va donc tenter de provoquer, malgré son manque d'attirance évident pour le sexe opposé.



L'invitation au mariage du frère de Jeanne tombe alors à pic : ce sera pour elle l'occasion de faire un petit jeu de séduction auprès de son ex-fiancé, afin de faire, selon son expression, un "braquage de gamètes". Car Jeanne est une jeune réalisatrice qui est fascinée pour les westerns. Elle va donc préparer l'événement avec la même minutie que si c'était un film.



C'est Marie, la compagne de Jeanne, qui nous raconte cette histoire un peu folle. Au début, c'est vraiment la décision de Jeanne que de faire les choses de cette manière. Marie se laisse embarquer petit à petit dans cette aventure, et elle met donc une distance nécessaire dans son ton de narratrice. Cette distance, alliée au côté très cinématographique de l'écriture, apporte beaucoup d'humour au texte. Et cet humour, mine de rien, apporte une petite réflexion sur tous les enjeux de cette histoire.



C'est donc une lecture qui fait sortir de sa zone de confort, sans aucun doute. Je ne serai certainement pas allée vers ce titre sans la Masse Critique. Et c'est donc un très belle surprise que ce livre, qui m'a réellement fait passer un bon moment !
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Les événements, suite

Un événement en 1975 qui bouleversera la vie de Serge Leblanc, après les événements, ceux d'Algérie, quelques années avant. Joëlle, fille de Serge et Dominique, raconte l'histoire de ce père, ses drames, et retrace une époque, qu'elle inscrira dans quatre cahiers.

Un style littéraire très élaboré, et quelques longueurs, dans ce récit. Si j'ai été plutôt curieuse au début, au fil de la lecture, j'ai trouvé dans le texte une certaine lourdeur, comme une sorte de martèlement autour d'un mystère qui n'en est plus un dès les premières pages. Les phrases, certaines très longues, ont peut-être renforcé cette impression de pesanteur. Ce livre dégage toutefois une certaine atmosphère, qu'Isabel Ascencio a réussi à créer.

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