Citations de Jean-Marc Roberts (53)
Toute ma vie, j'ai pris des risques, mais jamais pour des raisons mercantiles, toujours pour des raisons littéraires.
Un roman doit toujours contenir un secret.
Je suis capable de mettre une vie sur un visage avec la conviction de ne pas me tromper. Je n'ai pas besoin d'agenda. Je sais par cœur tous les gens que je connais et leur adresse, leur numéro de téléphone ou de poste de bureau. Cela me donne l'illusion d'en connaître un plus grand nombre. Je sais tous les mois vécus, toutes les dates, ne m'attachant qu'à des détails. Je me suis fabriqué le regard d'un homme de police.
Être aimé ne guérit pas, de rien, soulage peut-être, quand aimer nous porte tant, au contraire. Ne me suis-je pas employé avec obstination depuis mon béguin sans suite pour les baigneuses, ne me suis-je pas efforcé à être celui qui finit toujours par aimer le moins des deux ? C'est tellement plus confortable. L'autre souffrira davantage dès lors que l'on souffrira moins soi-même.
Le lendemain, j'ai conduit Papa à Disneyland. Nous sommes arrivées tôt, très tôt dans l'espoir d'éviter la foule et de profiter du maximum d'attractions. François a raison : il n'existe rien de meilleur pour se laver la tête.
J'ai même accepté de monter sur un cheval de manège avec lui. Papa s'est serré contre moi bien fort comme le manège tournait vite et il m'a parlé de Blanche-Neige. Il prétendait qu'un jour, les enfants dessinent des seins à Blanche-Neige, que ce jour-là est un jour sombre, fatal.
J'aimais voir Nina me revenir ainsi, très doucement, à la manière d'un chat qui vous a boudé trois jours sans raison. Il y avait dans ses yeux gris une vraie insouciance, un bonheur tranquillement différent. Ce regard suffisait. Il signifiait pour moi : « Je ne te quitte pas. »
Les femmes de ménage, on les respecte, au moins! Pour rien, vraiment. La sensation d'être meilleure que la veille et moins bien que le lendemain. Petits rêves.
Aurais-je gagné ? Aurais-je perdu .
Je connais tout de Peggy, ses excès, ses naufrages.
Mentir. Je mens pour des choses futiles. Plus que des mensonges, ce sont des histoires déformées, racontées d'une autre manière.
Les Magasins étaient ainsi conçus que la séparation entre rayons et bureaux paraissait illusoire. Une simple pancarte indiquait sur l'une ou l'autre des différentes portes « Interdit aux clients ». Comme au théâtre. D'une cloison à l'autre, deux univers interchangeables. Chacun son odeur, pourtant. Une odeur propre à chaque rayon, à chaque article invendu : peaux de loup, tapis persans dépliés sur toute leur longueur pour épater l'éventuel acheteur. Rayon des parfums aux vendeuses technicolor et embaumées; kilomètres de fleurs artificielles au sous-sol, jardin d'Éden poussiéreux.
Sur la guérison , les bons médecins sont incapables de se prononcer . On se croit sauvé , je l'étais bien fin Mars ,quelques jours plus tard on rechute. Une question de chance , au fond.
Peut-être ma mère Peggy a-t-elle raison? Peut-être avions-nous seulement du mal à être trois. C'était moi et Richard, ou moi et Jean-Louis, ou Jean-Louis et Richard, évidemment le pire.
Je rêvai une autre fois d'un larcin magnifique qui ferait de mon père un être en tout point différent de celui que nous imaginions, un mensonge énorme, le bobard qu'avalent certains personnages dans les récits feuilletonesques, films de série B, susceptibles de modifier toute l'action, le déroulement des choses, qu'on n'explique qu'en fin de parcours et qui bouleverse la salle.
Intuition et instinct m'auront été plus précieux que lectures et conseils.
[Extrait d'un texte de Barbara, que Jean-Marc Roberts a choisi en exergue pour cet ouvrage ]
Si la photo est bonne
juste en deuxième colonne
il y a le voyou du jour
qui a une petite gueule d'amour
Dans la rubrique du vice
il y a l'assassin de service
qui n'a pas du tout l'air méchant
qui a plutôt l'oeil intéressant
coupable ou non coupable
s'il doit se mettre à table
Oh ! Dites-lui qu'il vienne
pour se mettre à la mienne .
Pendant toutes ces années, j'ai toujours réussi à savoir où Richard en était. Jamais perdu sa trace, à défaut de me manifester.
Je n'ignore rien de ce qui lui est arrivé : un divorce, un enfant, quelques séjours en HP.
Il est des êtres sur lesquels il semble impossible de se prononcer immédiatement. Une intuition vous met en garde : cette fois, il serait dangereux de se tromper.
Je ne suis pas encore mort, tellement vivant au contraire. Le moment présent est devenu le plus important, je dirais crucial. Je ne promets aucun ordre dans ces pages, je ne promets plus rien de toute façon; (p.22)
Je ne veux rien sinon guérir.