AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Jeanne Cordelier (39)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


La dérobade

La Dérobade

Jeanne Cordelier (née en 1944)

« La Dérobade c’est l’histoire pleine de bruit et de fureur d’une longue saison en enfer, car se prostituer c’est comme vivre un éternel hiver… »

Une très belle préface de Benoîte Groult précède ce récit autobiographique bouleversant, l’histoire de Marie, de son nom de trottoir Sophie, qui après une enfance difficile dans une famille modeste a été abandonnée par ses parents dans les bras d’un souteneur qui l’a mise au turf.

Quatre années de prostitution que Jeanne Cordelier raconte sans détour, évoquant les diverses facettes de cette vie avec les nuits de garde à vue, les passes à la chaine dans les pires claques (jusqu’à soixante quinze passes de sept minutes !), l’arrière-goût de ciguë du champagne, les perversions de certains michetons, la violence des julots qui attendent l’oseille, les partouses improbables, la tristesse et le moral flingué, la solitude et la lutte pour s’en sortir. Sans oublier les viragos comme Madame Pierre, la mère maquerelle de la rue de la Grande Truanderie, une vraie trimardeuse, une taulière qui se glorifie d’avoir eu, certaines nuits de février, le gel au bout des seins et qui annonce à ses filles pour bien les mettre au parfum :

« Mesdames, vous êtes du bétail, rien que du bétail, ne l’oubliez pas. » Et les filles de répondre : « Oui Madame Pierre. »

Dans un style dur et âpre très travaillé, parfois violent, au vocabulaire argotique, souvent poétique comme dans sa description des Halles de l’époque, Jeanne Cordelier déroule sans mélodrame et sans haine son existence douloureuse sur les trottoirs à faire le tapin et dans les chambres à la merci des caprices des hommes, entre ceux qui se servent d’elle et ceux qui ont besoin d’elle. Comme dit Sophie, il ne faut pas avoir le cœur trop tendre et il faut éviter de penser quand on fait la pute.

Et Sophie dans les moments de relâche s’interroge :

« Que faire d’une nuit de liberté quand on a perdu l’habitude, quand on n’a personne à appeler, à qui dire simplement : alors, on dîne ensemble ? »

Extrait : Saynète exécutée par Sophie déguisée d’une barboteuse et d’une passoire en guise de couvre-chef, pour le plaisir d’un « ministre » :

« Je m’appelle Slup-slup. Je viens d’un lieu connu de tous et pourtant vous n’en soupçonnez rien, d’un lieu mille fois exploré, fouillé par vous, d’un lieu tiède et douillet, accueillant mais un peu humide, d’un endroit où il fait bon vivre, d’une contrée où l’on ne parle pas de politique mais de plaisir, où les dirigeants sont dirigés, les costauds matés, les incompris compris, les malheureux réjouis, les jouisseurs satisfaits, les obscurs illuminés, les intellectuels abêtis. Mon existence se meut dans les profondeurs féminines… Ohé ministre, je pourrais te raconter des histoires obscènes, faire plein de trucs avec mes doigts et ma bouche,..simuler l’orgasme dévastateur… »

Au petit matin gris d’incertitude, en remontant la rue Fontaine comme chaque jour en silence après une nuit blanche, Sophie épuisée et légèrement ivre ne voit que les taxis qui roulent au pas à la recherche du client égaré dans la faune barbouillée de Pigalle…C’est l’heure où les pauvres ribaudes fatiguées quittent leurs perchoirs, l’heure où le savant maquillage n’est plus qu’un masque grinçant, l’heure du cerne bleuté, triste à dormir, l’heure où les chasseurs font leurs comptes.

« C’est l’heure où, entre chien et loup, mon cœur se déchire, envahit ma poitrine, vagabonde jusqu’à la masse sombre des arbres, s’y écorche en cherchant sa raison de battre. »

Et citant Prévert, Marie de confier à sa copine Maloup en pleine dépression :

« Il y aura toujours un trou dans la muraille de l’hiver pour revoir le plus bel été…Tu comprends Maloup, nous ne faisons que traverser un long hiver, rien d’autre. »

En résumé, un récit parfaitement écrit dans un style riche et exubérant, sans complaisance, absolument bouleversant, relatant une vérité crue et amère.

Commenter  J’apprécie          20
La Mort de Blanche-Neige

La Mort de Blanche-Neige / Jeanne Cordelier

Tout dans ce récit poignant est vu et décrit par les yeux d’une fillette qui ne comprend que peu à peu les violences qu’elle subit. Et l’on découvre une famille de misère et de brutalités avec cinq enfants en détresse, frappés, attachés, malmenés. La petite conserve une certaine tendresse envers son père même quand sa mère partie au marché ou à des rendez-vous mystérieux, son père abuse d’elle par des caresses et des attouchements tandis que les images en couleurs du monde merveilleux de Walt Disney quelle voit à l’envers égayent les murs de la chambrette, avant de passer au viol dans la chambre conjugale, la chambre « normale ».

Un livre dur et bouleversant, pour public averti, sur l’inceste dans lequel l’auteure passe du violent au pudique dans un style tout simple, celui d’une enfant sensible et intelligente, résignée et traumatisée. Usant à bon escient de la synecdoque, la métonymie et la catachrèse, le vocabulaire de Jeanne Cordelier ne choque jamais même lorsqu’elle décrit les pires gestes d’un succube frappé de satyriasis.

Découvert et lu il y a 25 ans, je relis avec émotion et colère ce petit bijou de 160 pages écrit par Jeanne Cordelier.

Commenter  J’apprécie          20
Escalier F

Un court roman écrit par Dany devenue Jeanne autodidacte qui est autobiographique .Ce dernier raconte ,à travers les décès qui frappent la fratrie , l’histoire de sa famille frères et sœurs maltraités mais solidaires , le manque d’affection , d’éducation mais ou alcool et violence font office de lois …on a beau le savoir …on aimerait tellement que ces récits soient un reflet dépassé de notre société , ce dont hélas je doute …
Commenter  J’apprécie          30
La dérobade

Ce livre vaut ce qu'il vaut par le fait que ce soit un témoignage authentique. Donc si le sujet vous interpelle, ça peut avoir son intérêt.

Pour ma part, je l'ai lu il y a très longtemps mais il m'en reste un souvenir malsain et sordide. C'est une réalité, certes, mais ce n'est pas agréable à lire.
Commenter  J’apprécie          00
La dérobade

J’ai acheté ce livre sur une brocante et j’ai voulu le lire car le sujet est intéressant et mon grand-père l’avait lu. La curiosité l’a donc aussi emporté.



C’est un témoignage enrichissant, il nous fait découvrir la prostitution des années 1960 au temps où les maisons closes étaient encore ouvertes à Paris. Au moment aussi où les lois ont commencé à changer et les bordels qui ont fermé. On apprend la différence entre une prostituée de maison close, de luxe et de la rue. Au final, il n’y en a pratiquement pas, à part la sécurité que procurent les maisons closes.



On découvre Marie, qui aura été malheureuse toute son enfance et la première partie de sa vie d’adulte. Son enfance a été terrible… On la suit dans les méandres de la prostitution, dans ses amitiés, ses inimitiés, ses espoirs, ses tentatives de suicide. On suit, également, à travers son regard le chemin d’autres prostituées, celui des macs ou des matrones. On suit le point de vue des gens et des policiers. Marie a sombré dans la prostitution car elle voulait fuir sa famille destructrice et elle espérait trouver un meilleur avenir. Elle s’est faite entourlouper par son futur mac, qui a vu sa faiblesse et qui a été bien aidé par le père de famille. Malheureusement, ce genre de choses arrivent encore aujourd’hui…



C’est un récit poignant, révoltant. J’ai été bouleversée et choquée. C’est très bien écrit, il y a beaucoup de mots d’argot et de vieux français mais j’ai fini par m’y faire et ça ne gêne pas la compréhension du récit. J’aurais aimé davantage de pages, un peu plus d’informations sur ce qu’elle devient après la prostitution. Mais cela ne m’a pas empêché d’apprécier cette lecture. Je ne regrette pas.
Commenter  J’apprécie          20
La dérobade

Lecture difficile à tous points de vue. Je ne maîtrise pas l'argot alors forcément certains passages sont restés obscurs, certains m'ont ennuyée. Je ne conseillerais pas ce livre aux âmes sensibles, tellement c'est dur, violent, écœurant.
Commenter  J’apprécie          00
Escalier F

Le désamour, l'alcool, la violence, la maladie...Tout au long de ce roman autobiographique, l'auteure ( qui s'appelle Danielle dans le livre) parle de son enfance, de son adolescence, de sa vie de femme.

Dany sera sauvée par l'écriture: romancière à succès, troisième d'une famille de 6 enfants mal aimés, violentés, frappés, elle parle et les mots vont droit au coeur du lecteur tant l'émotion affleure à chaque page.

Les frères et soeurs se sont aimés, eux, malgré leurs différences. Ils ont formé une famille solide face à la fragilité des parents.

Jeanne Cordelier évoque cette vie de misère avec pudeur et sans pathos...Mais sa plume sensible et humaine sait toucher nos coeurs.
Commenter  J’apprécie          90
La dérobade

Dans une ville ou a chaque fois que je rentrais chez moi, les bus passait devant, voir même a pied de la gare. Ce livre m'aura longtemps préservé de certaines choses...(d'en abuser en tout cas).
Commenter  J’apprécie          00
La Mort de Blanche-Neige

Jeanne Cordelier est surtout connue pour son livre "la Dérobade" (1976) et le film qu'il a inspiré (1979). Elle y raconte ses années de prostitution.

"la mort de Blanche Neige" c'est le récit par une petite fille de son (non)existence, avec ses frères et soeurs dans une famille miséreuse et dysfonctionnelle. Roman certainement très fortement biographique, l'histoire de l'une de ses sœurs ?

Un des livres qui m'ont le plus émue et perturbée : complètement désespérant et pourtant merveilleusement bien écrit.

Dommage que cette auteure ne soit pas plus lue et connue.

Commenter  J’apprécie          00
La passagère

Gentil roman d'amour sans prétention à travers le voyage intérieur que réalise une femme venue aux Etats-Unis pour aider l'homme qu'elle croit aimer aux prises avec police, trafic de drogue et difficultés judiciaires. Elle en profite pour visiter son passé en un voyage intime livré au lecteur. Vite lu, vite oublié.
Commenter  J’apprécie          10
La dérobade

bouquin et film pas mal ......
Commenter  J’apprécie          10
La dérobade

Un livre témoignage, magnifique de terreur de désespoir et chargé d'espoir! j'ai trouvé ce livre magnifique
Commenter  J’apprécie          30
Escalier F

"Dany "devenue "Jeanne "par la grâce de l'écriture, née en 1944, autodidacte, troisième d'une fratrie de six enfants, rend hommage à ses frères et sœurs, complices d'enfance et de douleur, dans les années 50, dans ce court récit autobiographique.

Elle revient sur son passé, gravit les marches de l'escalier F une à une, oú vivait une "cordée"unie, soudée à la vie, à la mort, oú chacun faisait face, unis, serrés les uns contre les autres, une nichée, un "bouquet d'arbres écorcés", qui souvent tremblait mais jamais ne ployait.

Nous découvrons le cœur serré, au fil des pages, la violence des assauts du pére,Lucien, l'inceste , l'innommable....les insultes de la mére :Andrée, une Folcoche incapable d' aimer, " On Lui avait coupé les ailes"...

Détruire la faisait vivre: les coups, l'humiliation, l'insulte....dans le mal elle puisait sa substance, détruire jusqu'à l'épuisement .On suit la tyrannie et la perversité d'Andrée faite de plaintes, d'alcool, d'explosions de rage ou d'indifférence...

Les enfants dispersés, tenus par un amour fraternel jamais démenti vivent comme ils peuvent, la vie , ses coups durs, la maladie.....

Dany raconte ainsi ses frères et sœurs et les chemins difficiles qu'ils ont pris...

Un témoignage extrêmement fort, lucide , une écriture réaliste, maîtrisée et sensible, pleine d'amour pour sa fratrie, noire, sombre, désespérante où chaque mot est à sa place, sans faux semblants, misérabilisme ni pathos.

A travers la misère affective et sociale affleure l'humanisme , un récit qui parle aussi, avec pudeur, de la mort de ceux que l'on aime.

La langue directe et fleurie rend un bel hommage et toute leur dignité à ces êtres fragiles, pétris d'humanité , oú la tendresse est pudique, et l'attention bourrue, eux qui ne demandaient qu'un peu de ciel bleu....



Une autobiographie qui bouscule, sincére et réussie, empreinte d'un fort humanisme, de chaleur humaine ,d'une tendresse pour les siens , d'une énergie sans faille qui ne laissera personne indifférent !

Un très bel ouvrage dont on ne sort pas indemne !
Commenter  J’apprécie          330
Escalier F

J'ai eu beaucoup de difficultés à entrer dans ce roman, description d'une famille à problèmes : une fratrie importante, un père alcoolique, une mère incapable d'aimer... La vie est dure pour les enfants et alors qu'ils sont devenus adultes, et que l'un d'eux décède, chaque frère et soeur se retrouvent. Ils sont toujours aussi liés les uns aux autres même s'ils se sont parfois perdus de vue. C'est l'occasion pour la narratrice de parler de chacun d'eux, de leur misère, de leurs problèmes familiaux ou de leurs maladies. Ce n'est pas réjouissant, évidemment et il est parfois difficile de s'y retrouver parmi tous les membres de la famille.
Commenter  J’apprécie          10
La dérobade

La dérobade est un témoignage poignant sur la prostitution. Jeanne Cordelier nous relate 5 années de sa vie pendant lesquelles elle a exercé ce qu’on appelle pudiquement le plus vieux métier du monde.



Issue d’une famille nombreuse avec une mère alcoolique et un père incestueux, Marie rêve de paillettes. C’est une voiture de luxe garée devant le bar que fréquente assidûment sa famille qui sera l’objet de sa perdition. Cette voiture est celle de Gégé, proxénète, qui fera rapidement de Marie sa femme, son objet, son gagne pain.

Marie rebaptisée par le trottoir, Sophie ou Fanny est une femme forte qui supporte l’insupportable. Je dois avouer ne pas toujours l’avoir comprise cependant elle a très vite qu’un seule idée en tête sortir de cet enfer, échappée à l’emprise de Gégé. Ce n’est un mystère pour personne, elle y parviendra et c’est juste après ces 5 années à vendre son corps que Jeanne Cordelier écrira 1000 pages réduites de moitié dans la version publiée.

Jeanne Cordelier a une réel talent d’écriture. Dans ce récit, elle alterne avec brio de jolies images, dont la dernière phrase du roman est selon moi la plus sublime des illustrations et des mots d’argot qui ancre définitivement le lecteur dans ce monde de la rue mais qui m’ont un peu gêné pendant la lecture car pour beaucoup je n’en connaissais pas la définition.

Ce roman est assez cru, aucune violence ne nous est épargnée. Les coups de son homme, les nuits en prison, les coups bas des copines et les bizarreries des clients sont décrits sans cachoteries. Des bars à filles, aux hôtels de luxe en passant par les vitrines de la rue Saint Denis jusqu’au maison d’abattage, Sophie/Fanny a tout connu. Et même si les lieux, les personnages, les circonstances sont différentes la violence est identique. C’est pourquoi, j’ai un peu eu l’impression que l’histoire n’avançait pas. Je me dis maintenant que c’est sans doute également ce qu’à pu ressentir Sophie/Fanny pendant toutes ses années. Pourtant le personnage évolue, il s’éloigne peu à peu de ce milieu, de ces obligations.

La dérobade a été publié en 1976 mais j’imagine que malheureusement les choses n’ont que très peu évoluées pour ces filles qui gagnent leur vie en se baladant sur le trottoir.
Lien : http://mesexperiencesautourd..
Commenter  J’apprécie          110
La dérobade

On est en 1966. Sophie arpente tantôt les rues malfamées et les hôtels miteux de Paris, tantôt les maisons closes et les bars chicos, à la recherche du micheton. Elle nous raconte sa descente aux enfers quotidienne, oscillant entre l’argot parisien et un lyrisme hors du commun, une voix qui crie et qui susurre, une voix qui nous emporte dans l’essence même de la condition féminine.



[...]

Sophie la putain entre en scène ! Femme esclave, femme battue, femme violée, son récit ébranle. Écoutez cette voix autobiographique qui crie dans sa prison, ce cœur si tolérant qui a tant d’amour à donner ! Elle raconte la prostitution de la femme, cette forme de prostitution qu’on ne veut pas voir et qui pourtant en dit long sur l’histoire des femmes.



Son récit est nécessaire, car si le Paris d’aujourd’hui n’appartient plus aux ouvriers, et si un vent de mondialisation a soufflé sur la prostitution, les conditions de la prostitution sont les mêmes ; on a troqué l’avortement sauvage pour la contraception et la syphilis pour le sida.



Mais Sophie ne se laisse pas apprivoiser par le lecteur si facilement. Il faut d’abord passer le cap de la première partie dont l’argot est ardu ; mais ensuite, elle se dévoile et laisse entrevoir la jeune fille issue d’une famille ouvrière et les traumatismes de son enfance. Dès lors, chaque mot cogne, son style lyrique et luxuriant éclate, mêlant vérité crue et métaphores sensibles, parvenant à faire jaillir le sublime dans l’horreur. Un texte exceptionnel, intemporel, poignant et nécessaire.



L'article entier sur mon blog :

http://www.bibliolingus.fr/la-derobade-jeanne-cordelier-a107974310
Lien : http://www.bibliolingus.fr/l..
Commenter  J’apprécie          30
Reconstruction

Après encore bien des coups, physiques et moraux, Sophie rencontrera l'amour, le vrai, celui d'une vie. Elle a également commencé avec succès une carrière d'écrivain (qu'elle poursuivra toute sa vie) avec La Dérobade, récit de ses années de prostitution. Grand succès à l'époque, classique aujourd'hui, à côté de L'Astragale.

Avec son honnêteté et son entièreté (?), les mêmes que La Dérobade, elle raconte son lent et parfois difficile retour à la vie. Sa volonté de laissé le passé au passé, sans le renier ; son fils connait son histoire. Elle a toujours construit autour d'elle une atmosphère d'harmonie, de calme, de beauté, tout ce dont elle a manqué. Elle a beaucoup voyagé, vécu dans de nombreux pays, là où les envoyait le métier de son mari. A écrit, publié, découvert des artistes. La malchance ne l'a pas toujours épargné, mais elle est vivante et forte. Elle ne se laissera pas abattre sans résistance.

Peut-être un peu moins fort et prenant que son premier livre (et encore, je ne l'ai pas lâché avant la fin), mais encore une belle leçon de courage et de ténacité. Un bel exemple de femme.
Commenter  J’apprécie          120
Ni silence ni pardon

A l’instant même, mon enfance a fondu comme neige au soleil



Marie-France Casalis, dans une courte préface, parle de briser la loi du silence, des victimes « Autour d’elles une véritable conspiration des oreilles bouchées les avait abandonnées, livrées à la cruauté, à la violence des adultes, dont la mission était au contraire de les protéger, de les aider à grandir, à devenir autonomes, adultes, libres ».



Jeanne Cordelier propose quelques textes, dont de très poignants extraits de « La mort de Blanche-Neige ». La romancière insiste sur le plaisir tiré « de ce qu’il voit dans mes yeux ».



Avoir la mort dans la tête. « En abusant de moi, mon père m’avait fait accoucher de mon monstre ». Les rêves de lui mettre les tripes à l’air, « la main d’une enfant violée n’est pas comme la main des autres, elle a toujours au creux un manche de couteau, de hache, une pierre, un flingue », et le fait de n’avoir tué « qu’une ombre ».



Regards, silence, plaie, « C’est une plaie à jamais inscrite dans le corps de la petite fille », le refus de l’oubli, le crachat.



Le titre de cette note est extraite du second texte « Le majeur droit ».



« Que tout se taise enfin,



Que se closent nos mots,



Que nos mains prennent la parole. »



Mélusine Vertelune indique « Pour la rédaction de ce texte, j’ai choisi de ne pas me soumettre à la règle de grammaire qui veut que le masculin l’emporte sur le féminin. C’est pourquoi, sauf lorsque j’emploie des termes épicènes, les mots qui désignent des personnes des deux genres sont accordés aux deux genres. Ainsi, il apparaît dans le texte des « Es » et des termes comme « elleux », « celleux », « illes », etc… ». Je souligne cette indication, contre la banalisation du sexisme ordinaire de la grammaire usuelle.



L’auteure parle, entre autres, du silence imposé aux victimes, des délais de prescription, « cadeau offert par l’État aux violeurs et autres agresseurs sexuels d’enfant », des ressources psychiques nécessaires à la révolte, de son histoire, de ce récit où elle doit employer des pseudonymes, prescription…



Le frère et le « climat de terreur entre lui et moi », l’éducation des mâles, le retournement de culpabilité, « il avait réussi à faire en sorte que je me perçoive moi-même comme une petite chose, vicieuse, sale et coupable », pipi au lit, viols, redoublement en classe, dépendance affective envers la mère, bouc-émissaire à l’école, racisme, pornographie tolérée pour le petit mâle, les « femmes-choses interchangeables et destinées à la consommation » et la sensation « de ne pas être tout à fait vivante »…



La nudité imposée, la prostitution présentée comme « une profession à part entière », des discours sur une certaine sexualité, « J’avais l’impression de n’être qu’un bout de viande exhibée et transpercée de toute part »…



Les adultes, être en sécurité dans ses rêves éveillés, la lecture, l’émerveillement, « garder espoir », les grands-parents, le sentiment de culpabilité, les souvenirs de viols qui « remontaient à la surface »…



Le dire tout haut, comme des mots échappés, la culpabilité, les réactions de la mère, la minimisation des faits…



Boulimie, anorexie, les progrès scolaires, la découverte des libertaires, une rencontre, le retour du passé, les psy, la lecture de Simone de Beauvoir « Le deuxième sexe », voyage, le père, la prise de conscience « je n’étais pas la responsable-coupable de l’inceste – que ce que m’avait fait subir Esteban a un nom : viol ».



L’indignité et l’indécence de la mère, « elle n’était pas simplement responsable mais coupable, au même titre que son fils ». La loi du silence brisée.



« Ce n’est pas le pardon qui libère.



Il est mortifère, dégradant et non pas apaisant de se voiler la face en niant la réalité et de vouloir « dédramatiser » un acte qui est bien pire que déshumanisant.



Le viol est un acte chosifiant qui pérennise un système de domination ultra-violent avec ou sans tarification et servitude volontaire.



Ce qui libère, c’est affronter la réalité en la regardant bien en face, de détruire la loi du silence, de ne pas taire la gravité du viol qui est une torture physique et mentale »



Dans sa postface, « Viol, inceste et anarchisme », Mélusine Vertelune critique des problématiques occultées chez des « libertaires » (il est possible d’élargir le propos à de multiples groupes politiques), le refus de faire appel à la « justice bourgeoise ». L’auteure souligne que « les violeurs sont des agents actifs et volontaires d’un système d’oppression », il est possible d’élargir le propos aux prostitueurs. « Le viol n’est pas un « passage à l’acte », il est le fruit d’une décision conçue en toute lucidité ».



L’auteure revient sur les discours masculinistes, les oppressions, les violences machistes. Il faut y opposer « une lutte politique sans compromis ni ambiguïté ». L’inceste est un pilier du patriarcat.



« Qui se voit imposer une pénétration en est « réduite » au genre féminin pour les hommes et les garçons ou rappelEe à ce même genre en ce qui concerne les femmes et les filles. Celui qui pénètre un être comme s’il pénétrait un jouet, un instrument, un produit de consommation, affirme avec cette pénétration sa supériorité de genre ».



« La peur et la honte doivent changer de camp et ce n’est pas en étant bienveillants avec les oppresseurs que l’on met un terme à l’oppression ».
Lien : https://entreleslignesentrel..
Commenter  J’apprécie          50
Escalier F

J'ai dû m'accrocher pour ne pas abandonner la lecture de ce livre et réussir à le lire jusqu'au bout. Sûrement à cause de cette histoire difficile où la violence est omniprésente, lecture oppresante pour ma part
Commenter  J’apprécie          10
La dérobade

C est ma grande soeur qui m a fait lire ce livre sur la prostitution .

Le style est lourd parfois
Commenter  J’apprécie          00




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Jeanne Cordelier (640)Voir plus

Quiz Voir plus

Oh, Antigone !

Comment se prénomme la sœur d'Antigone ?

Sophie
Hermine
Ismène

10 questions
3135 lecteurs ont répondu
Thème : Antigone de Jean AnouilhCréer un quiz sur cet auteur

{* *}