Jennifer Estep

Pour ce qui est des couteaux, je les ai faits parce que je savais qu'ils te plairaient. Je savais que tu t'en servirais. Et je les ai faits parce que je voulais que tu aies les meilleures armes possibles quand tu affronterais Elektra LaFleur, Mab Monroe ou n'importe qui d'autre. je veux que tu me reviennes entière. Chaque fois. C'est pourquoi j'ai façonné ces armes. Parce que si je ne peux être à tes côtés quand tu te bats, elles le seront. Et, bordel, ce sont les meilleures que j'ai jamais faites pour la bonne raison que je les ai faites pour toi.

- Ce n'est pas pour une partie de jambes en l'air, marmonnai-je.
- Ben voyons. Et je suis un eunuque.
Je haussai les sourcils.
- Il se trouve que j'ai quelques couteaux tranchants sur moi. On pourrait donc facilement arranger ça, si tu voulais vraiment effectuer une telle transformation.
Finn frissonna.
- Plutôt mourir.

Le remords et le chagrin m’étreignaient la poitrine, brisaient la muraille qui protégeait mon cœur, réduisaient la pierre en poussière. Ma gorge se serra, et les larmes, plus chaudes que l’eau qui coulait sur moi, me brûlèrent les yeux. Je tombai à genoux dans la cabine de douche, me recroquevillai contre les carreaux lisses et froids.

Et, pour la première fois en dix-sept ans, je pleurai vraiment.

Un aller retour de mon arme dans leur corps, et c'en était fini. Le temps qu'ils aient compris ce qu'ils leur arrivait, qu'ils se preoccupaient déjà davantage des tripes sortant de leur ventre que de me stopper.

"- Je ne vous juge pas, Gin. Pourquoi me jugez-vous pour les fautes commises par un autre homme? Parce que Donovan Caine a fait une faute, continua Owen avec douceur. En renonçant à une femme comme vous.
- Une femme comme moi?
Owen se leva et se planta devant moi.
- Une femme incroyablement forte, courageuse, intelligente, insolente, séduisante et sexy. C'est pour ça que vous m'intéressez, Gin. Parce que vous êtes tout ça, et plus encore. Pas à cause d'un geste charitable que vous avez fait à une époque de ma vie que j'aimerai oublier."

Le vieux n’aimait pas les violeurs, et encore moins ceux qui s’en prenaient à des enfants. Je ne les aimais pas non plus, alors j’avais fait le boulot à l’œil. Encore un geste d’utilité publique. Le maire devrait me donner une médaille. 

Côtoyer un tueur à gages, c'est un peu comme avoir un éléphant au milieu de son salon. Un truc tellement énorme qu'il est impossible de ne pas le voir, même quand vous faites tout ce que vous pouvez pour l'ignorer.

J'actionnai les fermoirs et ouvris la boîte. Sur un plateau en mousse noire épaisse reposaient cinq couteaux en argylithe. La lueur du feu qui crépitait dans l'âtre fit scintiller les lames.
- Ils sont magnifiques, murmurai-je.
Et ils l'étaient. S'ils ressemblaient à ceux que je possédais déjà, ils avaient été façonnés avec un extraordinaire savoir-faire. J'en saisis un et le tournai et le retournai dans ma main, le soupesant, en évaluant l'incroyable perfection.
Léger et puissant à la fois, effilé et redoutable, beau et létal, le couteau semblait être un prolongement naturel de ma main. Comme si Owen avait mesuré ma main et fait des calculs en partant de chaque angle possible, puis avait conçu une lame juste pour moi.
Le métal étincela de nouveau, et je remarquai un symbole gravé sur la garde. Je regardai de plus près et, bien sûr, l'identifiai tout de suite.
Un petit cercle entouré de huit rayons équidistants. Une rune araignée.
Ma rune. Mes couteaux

Donovan tourna un regard furieux vers Finn, qui le lui rendit. Les deux hommes serraient les poings. Je poussai un nouveau soupir. Finn était dans mon camp, bien sûr, et ses mots et sa logique étaient implacables. Mais la seule façon de faire accepter à Caine l'assassinat de Tobias Dawson, c'était d'avancer à petits pas. Ce qui signifiait que c'était à moi de m'en occuper.
- Finn ?
- Oui ?
- Tu as ton ordinateur portable ?
- Est-ce que cela m'arrive de ne pas l'avoir ?
Réponse claire et nette. Je me demandais parfois comment Finn arrivait à s'arracher à son écran suffisamment longtemps pour cavaler après tout ce qui a un soutien-gorge.

Moi, je n'étais qu'un amas d'émotions bouillonnantes, et mon bateau intérieur tanguait sur les flots violents sans véritable cap.

Si aucun peuple n’avait réussi à prendre le dessus, c’était pour une raison très simple : les armes à feu mettaient tout le monde d’accord. De même que les armes blanches, les battes de base-ball et les tronçonneuses.

Une fois terminé, je sortis de ma poche une paire de lunettes à monture argentée ovale. Des lentilles de contact bleues vinrent modifier mon regard gris. Une casquette de baseball apporta la touche finale avec le double avantage de cacher mes cheveux décolorés et de laisser dans l’ombre mes traits. Des accessoires simples, voilà ce qui marchait toujours le mieux lorsqu’on cherchait à changer d’apparence.

Malgré le travail que nous avions effectué ensemble par le passé, l'inspecteur et moi, nous nous retrouvions une fois de plus à la case départ. Lui, cramponné à son idéalisme et déterminé à m'empêcher d'agir hors du contexte légal ; moi à arriver à mes fins par tous les moyens.

Un putois mouillé aurait été plus séduisant que moi. Et aurait senti meilleur, aussi.

- Vous savez quoi ? Beaucoup de gens à Ashland n’ont pas l’air de se souvenir de ce qui leur est arrivé, déclara Bria. Agressions, attaques, intimidations…
- Ça doit être dans l’eau, répondis-je du tac au tac. Un produit chimique qui entraîne des pertes de mémoire, peut-être.

- Je reconnais que le fait que tu sois une tueuse à gage apporte...du piment à notre relation, fit Owen d'un ton profondement sincere. Mais je pense aussi que tu es la femme la plus fascinante que j'aie jamais rencontrée. Tu es solide, attentive et formidablement loyale envers ceux que tu aimes.

t, après la longue et sanglante journée qui avait été la mienne, les vibrations graves que je percevais ne me calmèrent pas vraiment. Cependant, nous atteignîmes le second sous-sol sans encombre. Je soutins Finn jusqu’à la voiture que je devinai aussitôt être la sienne – une Aston Martin gris métallisé qui n’aurait pas dépareillé dans un film de James Bond. Finn collectionnait les voitures comme d’autres les capsules de bière.
- Non, souffla-t-il. Pas l’Aston. Tout sauf l’Aston. Je l’ai depuis un mois à peine. Le sang va me bousiller les sièges en cuir. Même Sophia ne saura pas les nettoyer.
- Bien. Que propose Son Excellence, alors ?
- Prends la Mercedes, dit-il en indiquant une autre voiture du menton. Au moins, l’intérieur est bordeaux.
Levant les yeux au ciel, j’obtempérai. Finnegan Lane n’était peut-être pas mon frère de sang, mais il m’agaçait à peu près autant. Personne ne savait comme lui me taquiner, m’agacer, me provoquer jusqu’à ce que j’aie envie de lui arracher la langue pour la faire frire et la manger. Pourtant, j’étais capable de tout pour lui. Même d’accepter de monter dans le véhicule de son choix pour le tacher de sang.

les nobles continuaient de croire que j'étais simplement un cabot à l'odorat surdéveloppé, et rien de plus. Désormais, ils allaient certainement croire que mon épée m'avait sauvée des éclairs de Libby, ainsi que ceux de Vasilia. Que mon arme possédait un pouvoir ou une propriété unique qui la distinguait de la pierre de larmes traditionnelle.
C'était mieux que de les voir tenter de s'emparer de ma magie pour accomplir leurs propres desseins, mais j'allais devoir faire attention aux voleurs. Ils allaient non seulement convoiter mon épée, mais aussi la dague à ma ceinture, le bracelet à mon poignet et le bouclier dans mes quartiers.
Je resserrai ma prise sur mon épée, comme si je refusais de la lâcher, alors même que j'étais à présent hors de danger. L'avidité dans les yeux de Fullman s'accentua, tout comme dans ceux de quelques autres nobles. Bien. Tous les mensonges auxquels ils croyaient m'offraient un avantage sur eux.
Plus j'observai les nobles, en particulier l'air hautain sur le visage de Fullman, plus ma colère accentua. J'avais bien évidemment imaginé que Maeven continuerait d'essayer de me tuer, par elle-même ou à l'aide d'un assassin, jusqu'à ce que l'une de nous deux meure. Il y avait toujours quelqu'un prêt à tuer la reine.

— Après que j’ai tué l’homme qui vous a attaquée, achevais-je.

Violet avala une grande goulée d’air. Jo-Jo tendit la main, tapota la sienne et me fustigea du regard. Je poussai un soupir. Quoi ? J’étais une ancienne tueuse à gages, pas une baby-sitter. 

« - Je m’appelle Gin. Je tue des gens.

En temps normal, cet aveu aurait provoqué diverses manifestations de panique : visages pâles, sueurs froides, cris étouffés, fuites affolées dans un mouvement désordonné de chaises qui valdinguent pour éviter que je ne plante un couteau dans le cœur – ou dans le dos – de quelqu’un, quoi qu’il en soit un coup mortel, personnellement, je ne suis pas regardante sur l’endroit où je frappe.

Mais là, la situation est différente.

- Bonjour Gin, me répondirent en chœur quatre personnes, d’une voix blanche et monocorde.