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Citations de Jérôme Meizoz (26)


« Un écrivain est-il un vendeur d’aspirateurs comme un autre ? »
(Source : quotidien "Le Matin", 18 octobre 2015)

[Jérôme MEIZOZ, "Faire l'auteur en régime néo-libéral. Rudiments de marketing littéraire", éditions Slatkine (Genève), coll. "Slatkine Erudition", 256 pages, 2020]
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- Ça fait un moment que les avocats ne se préoccupent plus du juste et de l'injuste...
- Et la vérité dans tout ça ?
- La vérité est un rapport de forces, c'est tout.
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L'autoroute fonce, selon la trajectoire la plus droite, sans occuper trop d'espace. Là où le Rhône prenait son temps en méandres inutiles, en marécages silencieux, ensablés, on a rectifié le tir, enfermé l'eau dans un couloir.
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pouvait-on refaire le monde par de simples paroles? Et fallait-il un feu vert, mais de qui, pour parler en son nom propre?
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Alors qu'on vienne un jour leur parler de biotopes, de batraciens menacés et de restriction de chasse, qu'on prétende protéger une forêt, contester une route, et tout de suite on passerait pour un causeur des villes, un étranger qui ne connait rien au lieu et à ses lois, un ennemi des ancêtres ayant maintenu envers et contre tout ces villages de bois, ces prés dégagés, ces routes de forêt ; on passerait pour un traître désireux de revenir en arrière, ennemi d'une prospérité tardive et méritée, débarqué du train pour convaincre les natifs du charme des sous-bois.
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Oui, disait-il avec passion, une chose qui abonde ici, c'est bien l'ombre et avec elle « l'air frais et pur de nos montagnes ». Tant de pays du Sud, écrasés de chaleur n'avaient-ils pas un besoin d'ombre et de fraîcheur ? Le soleil n'était-il pas au fond le véritable souverain de ces contrées, il n'y avait qu'à voir à la télévision tous ces peuples abrutis par sa loi ? Sans ombre, ils ne pourraient jamais se mettre au travail, c'était bien connu, ajoutait-il avec un sourire complice. Nous allions profiter des caprices de la géographie, mettre à profit la situation de notre village.
Nous allions conditionner notre ombre, celle qui couvrait nos maisons tout l'hiver, et même en été, nous allions l'emballer et l'exporter vers des pays chauds. Ainsi revigorés et purifiés, ils découvriraient les avantages de notre offre et ne tarderaient pas à importer en quantité cette richesse naturelle qui leur faisait tant défaut.
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Et je prenais en photo les mains de père, si rassurantes pour son éternel gamin. Des mains tannées, lourdes, rugueuses, de vraies pattes d'ours que je croyais invincibles...
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Durant des siècles, les gens y avaient domestiqué les bêtes. Ils dormaient au-dessus de l'écurie. Plusieurs alpages situés à diverses altitudes leur permettaient de survivre. Les autres animaux, cerfs, chamois, chevreuils, lièvres, ils les chassaient pour la viande. Hors des animaux utiles, il n'y avait que des "bestioles", disait-n, et ce mot entendu depuis l'enfance, prononcé avec une sorte de rage mauvaise, jaillit parfois de ma bouche quand je n'y prends pas garde. De quel passé de violence nous sommes faits !
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Il [le patron] veut faire plaisir à son dévoué mécanicien qui vient de perdre son fils puis sa femme. Il se trouve que le frère du patron possède l'un des plus beaux palaces des Alpes. Une nuit y est offerte aux rescapés de la famille. Un peu de répit, à défaut de partager vraiment les richesses.
Le jour dit, père, ma sœur et moi entrons dans la suite qui nous est réservée. Partout, des draps de soie, des linges brodés, une décoration luxueuse avec coffre-fort près du lit... Nous regardons la chambre avec le respect accordé aux musées. Depuis le balcon, le paysage empile les cimes. Alpages et forêts se disputent le nom de paysage. Apercevoir quelques vaches nous rassure énormément. Nous restons debout dans la chambre sans oser toucher quoi que ce soit. Vient une sorte de honte poisseuse à chaque mouvement, puis la mauvaise nuit dans des draps impeccables. Toute notre vie renvoyée en pleine figure.
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Notre réalité, c'était l'ignorance, la très vieille superstition. "Mourir de vieillesse", c'était tout le fatalisme d'un monde coutumier de l'usure, du déclin. Image archaïque qui préférait à la rude explication causale une formule vague mais paisible, où s'étalait notre soumission résignée au cycle du vivant.
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ça colonise la langage... Dans le "service du personnel", il y avait encore des personnes... maintenant ce ne sont que des "ressources" humaines !
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Toute sa vie, père a voulu croire au progrès. L'avenir radieux ne serait qu'une affaire de technique. Il fallait juste avoir confiance, s'en remettre à ceux qui savaient. En nous, rien n'avait jamais été moderne. Face aux malheurs, nous restions bouche bée.
Maintenant, me voilà enfin prêt à raconter ces années de promesses, quand on chantait partout l'avancée triomphale et la croissance infinie. Parce qu'aujourd'hui, apparemment, il faut en rabattre.
Quelque chose s'est brisé, mais quand ?
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Ecrire c'est accepter que le sens de nos vies et notre identité ne sont pas figés, dictés une fois pour toute, mais qu'ils se constituent par des processus symboliques. En lisant, on accède à d'autres visions du monde, on confronte les valeurs et solutions, et notre identité se trouve ébranlée [...].
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L'écriture ouvre à une seconde dimension de l'existence qui est la représentation. Les choses existent deux fois, une fois dans leur réalité physique, la seconde dans leur représentation. Un élément du vécu ou de l'imaginaire est mis en forme par l'écriture et prend corps comme une réalité tangible. Il y a un effet des représentations sur l'auteur et sur le lecteur: effet miroir, ordonnancement, possibilité d'interpréter, regard second ou recul sur une émotion. La capacité d'explorer et créer nos représentations modifie effectivement l'existence.
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Un garçon, ça ne pleure pas pour rien, ça s'impose et ça se défend, ça ne se préoccupe pas des habits, des tissus, ça ne fait pas une affaire de son apparence. Et surtout, un garçon ne reste pas dans les jupes.
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Le Haut Val (obturé à l'est par un glacier et à l'ouest par un lac) et ses allures de corridor sans issue; les autochtones y vivaient depuis des siècles comprimés entre deux chaînes de montagnes, bon an mal an, ignorant les ciels immenses d'Asie ou d'Afrique, mais avec le soutien de la religion, dominés tantôt par ceux du Haut et leur langue rugueuse, tantôt par ceux du Bas dont les armées avaient toujours remonté le Val; ceux qui étaient demeurés chez eux s'étaient bâti un fier récit (ils disaient une identité), à partir de cette situation plutôt inconfortable sur une terre aux hivers interminables, envahie de marais ou de glaces, faisant nécessité vertu jusqu'à proclamer bénie de Dieu cette cuvette ou ce couloir que les poètes officiels aimaient comparer généreusement à un berceau; ayant en eux, dès lors, avec l'orgueil des survivants, la colère ombrageuse contre qui se mêlerait de leurs affaires, leur rappellerait l'ingratitude du lieu, le peu de promesses qu'il tenait, l’exiguïté des terres et, parant, leur malchance, le retrait où il étaient tenus par une géologie impitoyable; eux, ayant lutée des siècles contre ces terre amères, impavides et revêches, auxquelles ils avaient bien dû, pour ne pas désespérer, prêter des beautés secondes; œuvrant pour rendre cette nature peu à peu habitable à coups de pioches et de fusils, la tenant en respect comme une sourde menace, un ennemi séculaire; eux qui pensaient que les "bestioles" devaient être exterminées ou réduites par dressage, les forêts essartées devant le bétail, les cours d'eau captés vers les villages; eux qui contre ces forces muettes avaient soutenu l'assaut, obstinés et taiseux; eux qui de cet interminable différend avec le monde, avaient gardé au fil des générations une sévérité rieuse, un goût du sacrifice et de la force, un fatalisme puissant dénué de pitié.
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Arc-bouté sur lui-même, encoléré, le Haut Val tient bon, rétif encore au monde du dehors.
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Il a traversé la vie et il n'a rien trouvé.
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Surpris les mains dans la caisse, le conseiller municipal a perdu la face.
A la maison, chacun évitait le sujet. Lui, battait tous les records du silence.
Plutôt que les menottes au poignet, tête basse devant les citoyens, il a préféré se mettre une fleur rouge à la tempe.
On l’a retrouvé au bord du fleuve, dans sa jeep agricole, le fusil coincé entre les jambes comme un jouet d’enfant.
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Rien, lui répondis-je, je n’avais rien à dire sur les peintres, par contre j’improviserais volontiers sur les bonnes, oui, les bonnes.
Après tout, elles avaient fidèlement servi les peintres, ces paisibles bourgeois venus voir les sauvages (et parmi ces sauvages, bien sûr, ma grand-mère et son chapelet, mon grand-père et ses chèvres) et qui n’auraient pu travailler en paix dans ses paysages époustouflants sans le soutien de jeunes filles quasi illettrées qui pour une modique somme, pour un monsieur parfois aimable mais toujours exigeant, faisaient le ménage, la cuisine, la couture, j’en passe et des meilleures, allaient commissionner au village et réceptionner les toiles vierges à la gare.
Les bonnes en avaient à dire sur le revers du monde ! Avec elles s’ouvraient les portes du caché… Elles m’intriguaient plus que les peintres, comme tous les êtres que le Code civil, en ce temps-là, déclarait « atteints d’imbécillité, de démence, de fureur ou de prodigalité ».
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