Jessica Knoll

En cas de stress, certains n'ont plus faim et perdent du poids. J'avais cru que ce serait mon cas, après tout ça. Ne sachant pas ce que j'allais devenir, je ressentais une angoisse au goût acide. Mais elle s'est envolée quand j'ai découvert ce que j'étais finalement devenue : la nouvelle élève, certes mignonne, qui avait déjà perdu sa popularité sept semaines après le début des cours. La nourriture ne ma jamais fait autant de bien quà ce moment-là.

"Votre mère travaillait?
-Non. Mais elle aurait du, Whitney. Elle aurait dû oublier son fantasne de la petite mère au foyer entretenue par son mari, pour mieux contribuer à la prospérité du ménage. Je ne peux pas à dire qu'elle aurait été plus heureuse, mais en l'état, on navait pas les moyens de penser au bonheur. On n'avait pas un rond.
Maman empilait les cartes de crédit pour financer ses excursions chez Bloomingdale's, pendant que les murs en Placoplatre de notre pathétique demeure étaient attaqués par les moisissures, et qu'on n'avait pas assez d'argent pour s'en débarrasser. Mais très juste, Whitney, maman a eu la joie d'être avec moi tous les jours.

Mon téléphone de bureau clignotait : j'avais un message. J'ai rolevé mon pantalon avant de m asseoir - comme je suivais le régime Dukan depuis une semaine, mes jupes et mes pantalons commençaient à flotter à la taille : un sentiment tellement apaisant que quand je n'arrivais pas à trouver le sommeil, que i'avais un creux au ventre et que mes souvenirs tournaient en boucle, je prenais deux ou trois pantalons dans mon armoire et je me faisais un petit défilé rien que pour moi, devant le miroir de ma salle de bains, toute contente de voir que je rentrais dans une taille 34 sans défaire les boutons.

Devenir femme, c’est affronter le couteau. C’est apprendre à supporter le tranchant de la lame et les blessures. Apprendre à saigner. Et malgré les cicatrices, faire en sorte de rester belle et d’avoir les genoux assez solides pour passer la serpillière dans la cuisine, tous les samedis. Ou bien on se perd, ou bien on se trouve.
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L’émission part de ce principe radical selon lequel les femmes sont d’abord des personnes ; or, lorsqu’elles ont des enfants, elles abandonnent tout au trou noir de la maternité. Je tiens à dire ici clairement qu’il s’agit là de la vision du monde de Jesse, même si je ne considère pas forcément qu’elle a tort. Nous sommes confrontées à des choix en tant que femmes et aucun n’est meilleur que les autres – surtout parce que, quelle que soit votre décision, le reste du monde vous dira que vous ne faites pas comme il faut. Mais lorsque vous faites le choix d’être mère, ce choix devient celui qui vous définit, si injuste cela soit-il.

Ce n’est pas parce que nous traversons une période compliquée en ce moment que je vais trahir ses confidences. La violence contre les femmes, et en particulier celles de couleur, est une question qui me touche profondément. Jamais je n’oserais m’exprimer à la place de Stephanie sur sa propre expérience.

Chaque année, des participantes sont éliminées et je ne vois aucune raison de me mettre en état de crise par crainte d’être la suivante sur la liste. Chacune de nos histoires prendra fin à un moment donné, inutile d’essayer de manipuler l’inévitable comme le font d’autres membres du casting, jusqu’à s’en rendre dingue. Quoi qu’il en soit, je préférerais encore devoir gérer ça que ma sœur, qui me bourdonne à l’oreille en permanence ces dernières semaines.

Il est dangereux de croire que le féminisme consiste à apprécier toutes les femmes. Cela limite les femmes à entrer dans une catégorie, celle des personnes aimables, alors que le féminisme consiste à permettre aux femmes d’être toutes sortes de choses, même VRP baratineuse.

Notre mère n’avait rien à voir avec ces mères tigresses telles qu’on les imagine traditionnellement. Dans son état normal, elle était une loque figée capable de fondre en larmes pour une simple tache sur son chemisier. Kelly était le bouffon du roi, mais au lieu de jongler et de raconter des blagues, elle décrochait des 20/20 et jouait Bach avec douceur.

“Il est tout aussi choquant de prétendre ne pas voir les couleurs que de prononcer le mot « nègre », tu sais.”

Les personnes en bonne santé sont celles qui se sentent liées à leur communauté, sont aimées et soutenues par ceux qui les entourent et ont une raison d’être. Les femmes en bonne santé ne dilapident pas leur précieuse énergie à séparer les blancs des jaunes.

Les femmes et les filles berbères – certaines âgées d’à peine huit ans – marchent en moyenne six kilomètres par jour sous un soleil épouvantable, indice UV de 14, pour rapporter à la maison un unique bidon d’eau. Il revient aux femmes de fournir en eau propre leur famille, une corvée qui les empêche souvent de se rendre à l’école et par la suite, d’entrer dans la vie active. Autre enjeu, la question de leur sécurité. Une femme berbère sur cinq est agressée sexuellement en allant au puits, parfois par des groupes d’hommes qui se dissimulent dans les buissons, attendant que les plus jeunes passent à proximité.

“Superbe. Sublime. Exotique. Ce visage. Ces cheveux.” Tout cela fait vibrer le tendon dans le cou de Kelly. “Ma fille n’est pas un fruit tropical en voie de disparition, rétorquait-elle parfois à des inconnus animés de bonnes intentions. C’est une fillette de douze ans. Dites simplement qu’elle est jolie.”

Ma mère m’a toujours dit que je devais gagner mon propre argent, pour ne pas avoir d’ordres à recevoir de la part d’un homme. (Comme si mon père avait pu la forcer à faire quoi que ce soit.) Et c’est exactement ce que je fais en cet instant, ou du moins essaie de faire ; à ce détail près que je me soumets aux ordres d’une femme qui n’hésiterait pas à me frapper plus fort que n’importe quel homme si je ne suivais pas ses consignes. Je ne suis pas indépendante. Je n’ai pas d’options désirables.

“Ce chagrin que nous ressentons, et je suis persuadée que vous le savez, est une véritable tornade d’émotions. Douleur, choc, trouble, colère.”

Cette crainte que nous ne retrouvions nos rôles d’enfance – moi la fille chérie, Brett la dépravée – était un incendie que rien ne parvenait vraiment à éteindre. “Au moins tu n’as pas eu une enfance de merde”, disait-elle chaque fois qu’un malheur me frappait à l’âge adulte. Comme si je n’avais pas le droit de me plaindre de devoir me faire dévitaliser une dent tout ça parce que, petite, j’étais la préférée de notre mère. Ce que Brett n’avait jamais réussi à comprendre, c’était que notre mère m’aimait particulièrement parce qu’elle parvenait à me contrôler, ce qui était en soi aussi une forme d’enfance de merde. J’étais la fille qui disait toujours oui et, pour information, ce que j’ai obtenu en échange n’avait rien à voir avec l’amour. Ce que j’ai obtenu, c’était une barre de plus en plus haut placée, jusqu’à devenir inatteignable.

J'en fais mon affaire, avait-il dû penser, comme toute personne dont la vie se résume à repasser par la case départ en empochant deux cents dollars chaque fois.

La solitude et l'âge s'étaient emparés d'elle comme deux pays alliés en temps de guerre, ne lui laissant aucune chance de se défendre.

La seule façon que j'avais de penser à autre chose qu'à mon angoisse galopante, ou qu'au dégoût que cette chambre et cette maison faisaient resurgir des galeries obscures du passé, c'était de m'intéresser au triangle amoureux Jennifer Aniston - Brad Pitt - Angelina Jolie. Pour moi, le seul moyen de lutter contre des souvenirs lugubres et troubles, ce sont des niaiseries superficielles. Deux choses qui s'excluent mutuellement et avec succès.

Hallsy n'a que trente-neuf ans, mais son visage est déjà aussi tendu que des leggings taille S sur des fesses trop rondes.