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Citations de Jim Crace (37)


Rêver, c'était courir après sa vie : rêver la fin de l'hiver dans l'espoir de revoir le printemps revenait à précipiter les quelques saisons qu'il restait à vivre.
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Il ne s'arrêta pas pour regarder Joseph ou Célice. Leur âge et leur nudité l'embarrassaient.Il ne les aurait peut-être pas autant punis s'ils avaient été habillés.Ils étaient responsables de leur malheur.
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Et ensuite-imaginez- ils pourraient repartir vers l'ouest. Ils le pouvaient. Ils pouvaient s'imaginer s'adjuger une parcelle de terre abandonnée depuis longtemps et élire domicile dans quelque vieille maison, sur un territoire qui suppliait d'être utilisé. En allant vers l'ouest, ils étaient libres
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Parfois il est plus sage de jeter la sagesse aux orties. "Seuls les fous parviennent jusqu'à la côte." Et seuls les fous rebroussent chemin ensuite. Telle était la sagesse de la route : il fallait être assez fou pour prendre les risques, parce que les risques étaient inévitables. Alors ils en vinrent à parler avec avidité de repartir vers l'ouest, de ne pas être raisonnables, de tourner le dos au soleil levant et à l'océan, de rentrer chez eux.
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Ma mère m'appelle. C'est ça que je pensais. En allumant ce feu. En donnant du coeur à cette petite cabane. En attendant que tu pousses la porte pour qu'on puisse manger. Tout ce que j'ai fait pour toi aujourd'hui, je le faisais pour elle. Mais je ne vous abandonnerai pas, Jackie et toi, comme j'ai tourné le dos à ma mère. Tant que je respirerai, je n'oublierai jamais le moment de notre départ. ... ... J'ai rêvé de retourner chez nous, même si notre terre est pauvre, et de prendre soin de Ma. Voilà mes plus grands rêves. Ils sont plus grands qu'un pont de navire, je peux te le dire.
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C'était la saison des déments, la première nouvelle lune du printemps attirait ces hommes — car les déments sont surtout des hommes, ils ont le temps et l’opportunité — pour exorciser cette part d’eux-mêmes qui les avaient rendus fous. Enfin, fous de douleur. Ou de honte. Ou d’amour. Ou de maladies et de visions. Assez fous pour croire que chacun de leurs gestes , si vain ou trivial fût-il, intéressait leur dieu. Assez fous pour croire que quarante jours d’inconfort pouvaient remettre leur monde en ordre.
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Mais maintenant il lui suffisait de plonger les mains dans la mer et de pêcher les algues. C'était là un monde d’une petitesse rassurante. La zoologie est une compagne bien plus douce que la cosmologie. Il était bien plus réjouissant de préparer et d’exécuter la capture d’une mouche vésiculaire, comme un grand dieu, que d’observer les immenses et lointaines striures dans le ciel. Il est bien plus grand que la mort des étoiles, cet univers humide, avec ses grains de sable et ses pellicule liquides, ses miettes et ses vers trop petits pour qu’on les voie mais qui nagent, mangent, meurent, respirent en miniature massive.
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Qu’est-ce qu’un animal ou un enfant n’ayant encore jamais entendu une musique en provenance d’un instrument ferait, se demanda-t-il alors que ses doigts produisaient des sons caverneux et des bruits de tonnerre ? Il dut chasser cette pensée. Que se serait-il passé, disons trois ans plus tôt, quand Alicia était toujours vaillante, que son appétit n’avait pas encore faibli, si elle était descendue au milieu de la nuit, désarmée, pieds nus, aussi furtive qu’un animal, les yeux ensommeillés, à la recherche d’un en-cas, et qu’elle avait croisé, comme Busi quelques heures plus tôt, la créature à la porte du garde-manger ? La brute. La bête. Le chat sans pelage. L’enfant. L’aborigène.
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Ces dernières années, avant même le décès d’Alicia, Busi avait remarqué que son désir diminuait. Ce qui était tout aussi bien, se disait-il, parce qu’à son âge, rêver était inutile, futile et ravageur. Rêver, c’était courir après sa vie : rêver la fin de l’hiver dans l’espoir de revoir le printemps revenait à précipiter les quelques saisons qu’il restait à vivre. Même sa vie sexuelle n’était plus qu’un rêve. Surtout sa vie sexuelle. Était-ce déjà le signe du grand âge, se demandait-il, ou juste de la nostalgie, le regret de ce qui ne pouvait plus être ? Ou bien serait-ce une conséquence du veuvage ? Par le passé, il avait certes déjà imaginé faire l’amour à sa belle-sœur, mais il ne pouvait décemment espérer l’embrasser, à présent.
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Un tissu, ça ne décevait jamais, même lorsque la peau vieillissait. Les hommes faisaient mine de ne pas s’intéresser à la façon dont les femmes s’habillaient, alors qu’en réalité, Terina l’avait bien compris, c’est ce qui les attirait le plus. Pourtant, elle n’avait nullement l’intention d’exciter son beau-frère, ni un autre homme. Les séduire, oui, mais rien de plus. À son âge, les besoins physiques n’étaient pas un sujet majeur. Elle cherchait surtout l’élégance, espérait attirer les regards féminins, aimait que d’autres femmes se retournent sur elle avec un air approbateur pour détailler sa tenue.
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Les pillards empruntaient en général les sentiers du maquis creusés par le gibier, puis surgissaient sur l’escarpement calcaire derrière la villa. Busi n’avait plus escaladé cette paroi depuis son enfance, mais il se souvenait encore être rentré plus souvent qu’à son tour les jambes égratignées par les épines, une cheville tordue et les mains écorchées, pour être accueilli par la pommade piquante que lui appliquait alors sa mère. Vers l’est, derrière la maison, le maquis était pentu et dangereux, si bien que toute créature signalait sa présence en glissant sur les gravillons, en déplaçant un caillou ou en faisant craquer une brindille.
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Lui et sa femme étaient également gorgés d'eau, deux cavités inondées, deux outres de cuir. Plus rien au monde ne les préoccupait. ils n'auraient plus jamais envie de chanter, ou de fumer une cigarette, ou de faire l'amour.
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Même la mort était aqueuse. « Nous l’appelons Poisson », écrivit-il. « Il nage, disons nous, prédateur silencieux et implacable qui , la nuit, sort de la mer et se précipite dans l’humidité moins profonde et résistante des rues. Poisson vient , il prend votre père et votre mère dans leur lit. Et tout ce qu’on entend, quand les âmes s’en vont et forment leur spirale de déplacement dans l’air confiné, c’est un frémissement de nageoire ».
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Mais notre temps n’est guère optimiste, ni sentimental — et ce mardi après-midi ne date pas d’il y a cent ans. Joseph et Célice ne seront pas découverts, ni emmenés chez eux pour l’enterrement, les pauvres. En tout cas pas tout de suite. Leurs visages ne s’accorderont pas en rimes douces sur un lit. Personne ne viendra dissimuler leurs blessures ou coiffer leurs cheveux. Il n’y aura pas de camphre, cire ni savon pour masquer l’odeur de leur décrépitude. Les corbeaux ne frapperont pas le toit par milliers.
Leurs oiseaux seront plus cruels et leurs espaces plus vastes.
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Jim Crace
Mais notre temps n’est guère optimiste, ni sentimental — et ce mardi après-midi ne date pas d’il y a cent ans. Joseph et Celice ne seront pas découverts, ni emmenés chez eux pour l’enterrement, les pauvres. En tout cas pas tout de suite. Leurs visages ne s’accorderont pas en rimes douces sur un lit. Personne ne viendra dissimuler leurs blessures ou coiffer leurs cheveux. Il n’y aura pas de camphre, cire ni savon pour masquer l’odeur de leur décrépitude. Les corbeaux ne frapperont pas le toit par milliers. Leurs oiseaux seront plus cruels et leurs espaces plus vastes.
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C'était comme si la vie de ses parents, qui paraissait jusque là cachée et pâle, si peu illuminée en surface, au mieux une silhouette, n’avait attendu que la torche de la mort pour faire sortir les couleurs et la passion. Sa lumière les avait maintenant captés et fixés. Leur histoire était certaine. Plus rien n’arriverait. Rien à ajouter. Leurs dates étaient inscrites à l’encre indélébile. Rien ne pourrait être changé ni amélioré, sinon par les sentiments et mythes  de ceux qui n’étaient pas mort. C'est le seul jour du Jugement qui existe. Les bénéfices de la réflexion après-coup. Les morts eux-mêmes en sont privés. On ne leur demande pas de donner un sens à leur mort.
 
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Elle pouvait en profiter. C'est là l’ambiguité embarrassante de la mort et, en particulier, des morts spectaculaires telles que celle-ci. Les plus proches parents, les êtres les plus touchés, sont bizarrement contents d’eux-mêmes, et agités. Leur cœur — et les convenances — peut exiger des frénésies de désespoir, une ululante épilepsie, l’effondrement, l’hystérie, mais au lieu de cela leur cerveau distille un cocktail de substances euphorisantes pour les soutenir contre le choc et la colère. L’adrénaline ne peut faire de distinctions. Les pompes stimulantes et tranquillisantes usurpent les élans du cœur.  Ils donnent à la mort quelque chose de revigorant et d’érotique.
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Death is nothing at all. I have slipped away into another room. All is well." Except, thought Syl, that there's no slipping back.
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We live, we die, we do not need to understand. There are no ghosts to lay. There is just ash and memory.
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Anyone who studies nature must get used to violence. You'll have to make yourselves companionable with death if any of you want to flourish as zoologists.
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