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Critiques de Jules Renard (246)
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Journal (1887-1910)

un très touchant journal d'écrivain, où Jules Renard n'épargne personne, y compris lui-même!
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Journal (1887-1910)

S il y avait un seul livre que je garderai le jour où je quitterai cette terre, c est bien celui-ci. C est l écrivain qui vous décrit, vous détaille et vous explique à la fois l âme et le physique des hommes en une phrase. Et on a tout compris, on a tout saisi. L essence même derrière quelques mots. Une plume qui scalpe. Une plume qui cisaille le moindre recoin des personnages avec très peu de moyens et un vocabulaire toujours juste, précis et renouvelé. Renard a le mot percutant et rien n échappe à sa sagacité. Il n a pas nous plus la jalousie et la petitesse des frères Goncourt. Lui-même ne s épargne pas. Il a l œil inégalé d un artiste qui nous plonge dans son XIX s. bouillant qui décrypte sans equivoque les castes sociales de son époque, sa beauté et ses malheurs. Oui, c est ce livre que j emmènerai car il me permettra là-haut de ne pas m ennuyer, de me faire rire et surtout de me rappeler et de garder la nostalgie des qualités et des travers de l homme que je ne serai plus.

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Journal (1887-1910)

Jules Renard est très célèbre par son "Poil de Carotte". Mais il ne fait pas partie des poids lourds de la littérature française. Pourtant son "Journal" écrit entre 1887 et 1910 et paru après sa mort (après avoir été expurgé) a été classé parmi les « cent livres du XXème siècle ». Il faut dire que l'auteur était caractérisé par sa lucidité hors du commun. de plus, il connaissait bien le Tout Paris littéraire de son époque. Au fil des jours, il a écrit ainsi de très nombreuses notes, parfois courtes, parfois plus développées.

J'ai tenté de me plonger dans ce long, très long Journal. Mais j'ai été incapable d'en faire une lecture intégrale. J'ai lu quelques dizaines de pages par ci par là, pour voir si les sujets abordés à diverses périodes de la vie de Jules Renard pouvaient m'intéresser. En fait, il se réfère très souvent à des personnages dont j'ignorais tout ou presque tout - et cela m'a démotivé. J'ai abandonné assez vite. Mais je comprends que ce livre puisse être une source précieuse pour les historiens de la littérature et plus généralement pour les spécialistes des années autour de 1900.
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Poil de Carotte

"Poil de Carotte" est un classique de la littérature française. Il traverse les années en tant que tel, comme, hélas, la maltraitance parentale que subissent certains enfants, à l'instar du héros.



Je ne sais pas comme Jules Renard, qui s'inspire de son enfance pour écrire ce roman, a pu supporter cette relation toxique avec sa mère. Les mots qu'il a posé sur le papier ont sûrement été thérapeutique et, grâce à son talent d'écrivain, ce qui est tragique pour lui nous permet de passer un bon moment.
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Poil de Carotte

Autobiographie sur l'enfance de Jules Renard.

J'ai lu ce livre de Jules Renard, étant adulte, cette histoire est un classique de la littérature enfantine.

François Lepic, alias Poil de Carotte, narre sa vie pénible due à ses cheveux roux et taches de rousseur, sa mère ne l'aime pas comme elle le devrait, elle est tyrannique, les attitudes de son frère, sa sœur et son père ne l'aide pas. Il devra faire preuve de résilience, il conduira sa colère sur des animaux..

En ce milieu de XIXe siècle, les personnes rousses ont dû assez être mal traités, surtout qu'ils ne représentent que 4 % de la population en Europe (en notre époque) alors imaginons en cette époque avec un accès très restreint à la culture ou aux croyances superstitieuses.

Chitry-les-Mines dans la Nièvre, c'est là où se passe l'histoire, Jules Renard a ensuite été le maire de cette commune, ainsi que son père bien avant.



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Poil de Carotte

Je découvre les classiques de la littérature française au compte goutte. Ce court roman est attendrissant grâce à poil de carotte, ce gamin, roux, benjamin d'une fratrie de 3 enfants. On y ressent l'amour familial et filial. L'écriture est précise, chaque mot à sa place, sans fioriture. Les chapitres sont courts et racontent un événement de la vie de Poil de carotte, ses relations avec chaque membre de la tribu et surtout ses rapports avec sa mère.

Des souvenirs parfois piquants mais sans amertume.

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Poil de Carotte

Personne n'aime personne dans cette famille : les frères se détestent tandis que les parents ne s'adressent pas la parole - on apprendra dans la pièce la Bigote pourquoi M. Lepic ne parle plus à Mme Lepic. Seul le père semble aimer son fils, mais il n'arrive pas à lui montrer, et ne veut pas lui montrer d'ailleurs - ce n'est pas viril de montrer ses sentiments.

Cette incompréhension qui vire au manque d'amour vient d'un manque de communication, les personnages ne se parlent que pour se donner des ordres, se moquer ou s'adresser des reproches. Tout est dans les non-dit. On peut en rire, mais aussi les plaindre, notamment Poil-de-Carotte qui est plein de sentiments mais ne peut les exprimer.
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Poil de Carotte

Dans la campagne de la fin du XIXè siècle, François Lepic, surnommé Poil de Carotte à cause de ses cheveux roux et de ses tâches de rousseur, vit une enfance difficile. Méprisé par sa mère, ignoré par son père et souffre-douleur de son grand frère Félix et de sa soeur Ernestine, il doit lutter quotidiennement contre les humiliations infligées par cet entourage familial hostile qui l'incite parfois à exercer sa cruauté sur plus faible que lui. Mais Poil de Carotte saura trouver en lui la force et la volonté d'échapper à un destin peu reluisant.



« Poil de carotte » publié en 1894 est un roman autobiographique où Jules Renard (1864-1910) règle ses comptes avec son enfance et surtout sa propre mère. Il est devenu un des classiques de la littérature évoquant la maltraitance et le rejet durant l'enfance, au même titre qu'un « Vipère au poing » d'Hervé Bazin. L'histoire de « Poil de Carotte » est racontée sous forme de petites saynètes thématiques plus ou moins longues (et d'intérêt variable) et si le lecteur fait globalement preuve d'empathie pour le pauvre gamin, il est parfois plus difficile d'être vraiment touché par son sort quand il se met à torturer une taupe ou massacrer un chat avec un sadisme effrayant. Inutile de dire que ces chapitres, s'ils sont nécessaires et permettent de comprendre l'amertume et la colère qui habitent le coeur de l'enfant, sont pour le moins désagréables et pourront choquer voire inciter le lecteur à abandonner le roman ! Ce qui serait regrettable car le récit prend une autre dimension au fur et à mesure que l'enfant grandit et devient adolescent. La « tempête de feuilles » observée par un Poil de Carotte fasciné est notamment un très beau moment de poésie et la correspondance échangée entre l'enfant et son père est empreinte d'une drôlerie assez irrésistible. Jusqu'à ce chapitre intitulé « le mot de la fin », sorte de long dialogue entre le fils dédaigné et ce père accablé de reproches qui essaie tant bien que mal de se justifier. Selon moi le meilleur passage d'un classique pas toujours facile à lire (ni à aimer!) mais qui peut encore toucher le lecteur actuel.
Lien : https://www.takalirsa.fr/poi..
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Poil de Carotte

Pourquoi ce livre ?

J'avais tres envie de lire un classique et en même temps un livre qui se lit rapidement. Le choix s'est avéré tres difficile car je dispose de plein de livre jeunesse classique que je n'ai pas encore lu tels que Tom Sawyer, le prince des voleur ou encore Peter Pan mais je me suis finalement arrété sur un livre que je connaissais déjà et qui m'évoquais un très grand nombre de souvenir de mon enfance: Poil de carotte.





De quoi parle t-il?

Poil de carotte est un enfant issu d'une famille qui ne le comprend pas et qui passe son temps a se moquer de lui. Son frère semble gentil mais ne fais que profiter de lui, sa sœur est une véritable chippie, son père est trop absorber par ses propres intérêts qu'il en oublie souvent d'être un père et pour finir, sa mère qui lui a donné ce surnom ridicule de "Poil de carotte" à cause de sa couleur de cheveux ne passe son temps qu'à le réprimander pour des broutilles. Pourtant Poil de Carotte ne rêve que d'une chose, se sentir aimé par cette faille qui la rejette sans cesse..





Que penser de l'histoire et des personnages?

J'ai lu ce livre à l'école primaire et l'ai même joué au théâtre avec mes camarades et notre maitresse. A l'époque ce livre m'avait interpellé grandement et je l'avais adoré. Je me rappelle même avoir eu à me battre pour obtenir le rôle de Poil de Carotte car j'adorais le personnage et ses histoires.



A ce jour, je n'ai pas eu le même choc qu'autrefois, je me suis même ennuyé à certains passages qui me semblait trop long ou inutiles. Voir toute cette maltraitance psychologique m'a gênè et à la fois déplu. Mes souvenirs d'autrefois ne se sont pas montré et je regrette limite d'avoir relu ce livre que j'aurais tant aimé garder dans un esprit positif.



Le vieux français qui habite les pages de ce roman a rendu ma lecture difficile et je me suis même demandé s'il n'y avait pas des erreurs de mise en page mais non, ce n'est que le langage de l'époque, langage que j'ai du mal encore a comprendre.



Les personnages m'ont par contre agacé une nouvelle fois, je me rappelle avoir détesté madame Lepic que je trouvais cruelle et sans cœur autrefois... mon avis ne s'est malheureusement pas transformé. Je la trouve toujours aussi mauvaise. L'ignorance de son père et la méchanceté de son frère et sa sœur m'a également agacé. Je ne comprends pas qu'on puisse s'amuser comme cela avec un petit garçon si gentil... Bref: famille de merde!



En conclusion?

Je regrette d'avoir relu ce livre qui m'avait tellement transcendé à l'époque. Comme quoi, parfois, il vaut mieux se fier à son premier avis et garder de bons souvenir! Dans le sens contraire, cela aurait été moins dérangeant mais la j'ai l'impression d'avoir gâché un souvenir d'enfance agréable. Dommage...
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Histoires naturelles

Un chef-d'oeuvre de bestiaire. La finesse de l'observation n'a d'égale que la finesse de l'ècriture... Un livre que l'on n'a jamais fini de lire. Il suffit d'ouvrir une page au hasard et se laisser emporter par la poésie ou la cocasserie des scènes rapportées.

Aujourd'hui me voilà à essayer de me faire adopter, comme l'auteur par "une famille d'arbres"; Epoustouflant!
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Poil de Carotte

Poil de Carotte/Jules Renard

On peut dire que Jules Renard (1864-1910) avait un véritable don d’observation des détails de la vie courante et ce d’une manière incisive et pénétrante, quand il écrivit ce court recueil (125 pages), petit roman à épisodes relatant les hauts faits de Poil de Carotte. Procédant par touches minces et caustiques en une série d’instantanés, il élabore le portrait d’une famille, les Lepic père et mère, frère Félix et sœur Ernestine. Tour à tour, se glissent dans le discours le cocasse et l’ironie, la tendresse et la lucidité, le comique et le douloureux.

La couleur des cheveux du troisième enfant des Lepic, on l’aura deviné, est à l’origine de ce surnom. Poil de Carotte est en enfant privé d’amour que personne n’embrasse jamais, souffre douleur de sa mère et on ne peut s’empêcher de songer à des origines autobiographiques pour ce récit où l’ironie côtoie la tragédie et l’indignation la comédie.

Le style est somptueux dans sa simplicité et ses mots du terroir.

Les seules armes de Poil de Carotte dans cette vie de désamour : la ruse, la lucidité et la répartie.

Extrait où Madame Lepic une fois de plus va sévir à l’encontre de poil de Carotte :

« La rouette de Madame Lepic se lève, prête à cingler. Poil de Carotte, pâle, croise les bras, et la nuque raccourcie, les reins chauds déjà, les mollets lui cuisant d’avance, il a l’orgueil de s’écrier : « Qu’est-ce que ça fait, pourvu qu’on rigole ! »

Plus loin :

« Quoi qu’on te fasse lui dit son parrain, tu as tort de mentir. C’est un vilain défaut et c’est inutile, car toujours tout se sait. Oui, répond Poil de Carotte, mais on gagne du temps. »

« Hélas, se dit encore Poil de Carotte, tout le monde ne peut pas être orphelin… »

Un petit chef d’œuvre de tendresse et d’intelligence.

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Journal (1887-1910)

Jules Renard, c’est bien sûr « Poil de carotte » et les « Histoires naturelles », mais pour ceux et celles qui s’intéressent à la littérature de plus près, le « Journal » qu’il composa de 1887 à 1910 a une importance inestimable : De par ses qualités intrinsèques d’écriture d’une part, où on retrouve l’esprit piquant et acéré de ses ouvrages, ainsi que la clarté lumineuse et l’humour caustique et bon enfant à la fois qui le caractérise, mais aussi par le tableau extrêmement vivant qu’il donne de la société (en particulier de la société culturelle) de son époque.

Et son époque, précisément c’est « La Belle époque ». Une époque d’une richesse inouïe en beaux esprits, en personnalités de premier ordre, inscrite dans un progrès technique et social qui renverse des siècles d’avancées de tortues, un monde où l’écrivain fait un double témoignage : sur lui-même et sur le monde qui l’entoure.

Sur lui-même, bien sûr. Parce qu’un journal, qu’il soit intime (sans autre destinataire que soi-même) ou destiné un jour à la publication, est avant tout une œuvre personnelle, qui vient de soi et va à soi. C’est d’abord une confidence intime, avec peut-être (ce n’est pas toujours le cas) le souci de « laisser une trace », sur soi et sur les autres, en tous cas sur la perception qu’on en a eue.

Sur les autres également, le « diariste » (anglicisme : il n’existe pas en français un terme précis pour désigner le rédacteur d’un journal intime) fait aussi office de témoin (rarement objectif puisque étant à la fois juge et partie) d’un monde qui lui apporte tour à tour joies et tristesses, amours et haines, la vie, quoi.

Jules Renard nous apprend beaucoup de choses sur lui-même. Ses œuvres précédentes, où l’autobiographie parfois devenait évidente, nous révélaient par leur style caractéristique les qualités et peut-être les défauts de l’homme. Jules Renard est un timide qui s’exprime mieux à l’écrit qu’à l’oral (j’en connais un autre). Il a des idées bien arrêtées sur tous les sujets : en politique, il est dreyfusard. Dans l’intimité, c’est un misogyne acharné. En littérature il a ses amis et ses têtes de turc.

Et comme nous tous, il est pétri de contradictions : anticlérical convaincu et militant, il confesse : « J’ai l’esprit clérical et un cœur de moine ». Sur les femmes, il déclare : « Je les aime toutes, je fais des folies pour elles » Sacha Guitry dira un peu comme lui (à peine un peu plus tard) : « Je suis contre les femmes. Tout contre. »

Enfin le « Journal » de Jules Renard est un objet littéraire : parce qu’il parle de littérature, bien sûr en invoquant les grands noms de l’époque (ils y passent à peu près tous, dans l’Edition Bouquins, un index judicieux vous permet de voir ce que l’ami Jules pensait d’eux, ça va du mordant au touchant) ; et sur le travail de l’écriture, où avec modestie et constance et grand effort de volonté il exprime sa façon de voir, en particulier la qualité première de son humour : l’ironie plus ou moins appuyée : « les ironistes, ces poètes scrupuleux, inquiets jusqu’à se déguiser » : tout Jules Renard est là : l’ironie, le scrupule (question d’honnêteté envers le lecteur) et cette inquiétude quasi métaphysique qui tient au ventre la plupart des (vrais) écrivains.

Il faut avoir lu le « Journal » de Jules Renard : il est très facile à lire, le style est celui qu’on connait, caustique, ironique et tout ce que vous voulez, mais familier et proche de vous, et puis c’est le ton de la confidence, vous n’êtes pas avec l’auteur Jules Renard, vous êtes avec l’ami Jules qui fait la causette avec vous, en buvant un pastis (ou une absinthe pour faire plus vrai).

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L'Ecornifleur

Je ne connaissais Jules Renard que pour son Poil de Carotte. À dire vrai, je me souvenais même fort peu de celui-ci, souvent confondu dans mon esprit avec L’Enfant de Vallès, que je confonds lui-même bien des fois avec Le Petit Chose de Daudet, et le tout m’évoque assez les démesures verbales et impitoyables du Solal de Cohen. J’ai une mémoire singulière, je sais bien, je n’en sors pas. Je trouve ces livres cousins, voilà, ils ont un air de famille : on y retrouve une ironie cruelle de victimes. Un être souffre et, sans s’en ficher pour autant, avec recul, il rit de lui qui a eu tant mal. Un rire jaune, quelque chose comme l’inverse de pleurer de rire : rire de pleurer. Une thérapie un peu cynique où l’on critique la bassesse qu’on expose pour ne pas s’anéantir de douleur. Se montrer à peu près comme rien, et prétendre : « Après tout, le néant aurait tort de se plaindre ! c’est juste ! ». Une morale plutôt aigre de sacrifié ou de blasé. Un livre où le coup est présenté comme l’acte naturel d’une vermine : l’homme. On n’y peut rien, n’est-ce pas ? c’est de l’homme, tout ça, la pauvre espèce !

L’Écornifleur, cela signifie le pique-assiette, le parasite – je dois l’explication à Robert, grand ami, très cultivé : allez donc faire sa connaissance ! Henri y est un poète bohème, à qui doit s’identifier Jules Renard : celui-là se coagule à un couple de bourgeois, les Vernet, qu’il impressionne de simagrées littéraires et qu’il parvient à fasciner, dont il devient la fierté, l’alibi artistique, un véritable trophée. Lui sait tout de son imposture : il a de ces trucs tout préparés, de ces citations et de ces mensonges qui stupéfient comme s’il côtoyait le génie et les génies ; il se fait admettre comme destin, promis à une gloire inéluctable par des gens aimables mais intellectuellement communs et faciles à leurrer, qui le payent en repas et en sympathie sincère : il s’en remplit l’estomac – et l’orgueil ! Et, n’ignorant rien de cela, tartufe, il s’en méprise presque aussitôt.

L’Écornifleur, c’est le récit d’une double vie de pose continuelle : celle de ces dilettantes fortunés qui ne reconnaissent l’art que dans ses apparences mondaines et qui cherchent à s’en attribuer la découverte et à s’en attirer le prestige (les Vernet si on m’a bien compris), et aussi celle de ces artistes peut-être véritables mais réduits, par impatience du succès, à feindre le talent et qui, différant l’ouvrage, vivent à l’excès dans un monde virtuel de littérature où leurs références perpétuelles leur tiennent lieu d’existence.

Mme Vernet est une Mme Bovary pleine de mièvres postures soyeuses et vivant un rêve valorisant de rencontre éblouissante où elle se figure conseillère et muse.

Henri est un lecteur impotent du livre de sa propre vie : il n’agit que par paroles, toute sa préoccupation au mieux est à des actions de lui espérées par d’autres ; il ne tâche qu’à correspondre à l’image qu’il veut donner, idéal cliché dont il se sent prisonnier ; il se regarde sans cesse, se demandant toujours ce qu’il siérait de faire, dans tel contexte narratif semblable à sa position, s’il était protagoniste d’une histoire romanesque. Le récit d’un vrai homme qui doute, et qui voudrait être un personnage qui siège et qui trône.

Je n’interprète rien : le livre est volontairement hilarant de ridicules et d’embarras bien rendus. On se moque de ces guinderies de bourgeois qui paradent ou qui louent, on s’amuse des excès de cette baudruche de poète qui critique tout y compris lui-même, on se divertit en somme de cette vacuité de bonne compagnie fondée sur d’affectueuses affectations !

Tout cela exprimé dans une prose artiste, vivante, chaleureuse, foisonnante, tantôt sèche et froide pour rendre la plate consternation de l’imposture reconnue, tantôt ample et outrée pour singer les exaltations poétiques de l’esthète : or, cette virtuosité est incontestablement celle d’un grand esthète ! Impertinent, gouailleur, astucieux, sardonique, inventif, énergique, truculent : Jules Renard avec délectation collectionne les figures épinglées pour la frime, s’émulationne d’envols surexcités suivis presque aussitôt de retombées cocasses ou triviales, son esprit bouillonne de trouvailles audacieuses et superbes, d’assemblages hétéroclites, de façonnements inédits – et il en rit, le bougre ! et l’on entend ce rire par-delà la page virevoltante, gros rire bonhomme qui se contemple avec ardeur sans pouvoir se croire génial, se mirant à distance, honteux d’être fier, incertain peut-être de valoir quelque chose, se sachant original et ceci du moins avec certitude. Il faut lire, je crois, ce petit ouvrage avec une acuité particulière, relire – j’ai lu lentement – maintes fois pour les entendre des fulgurances d’idées drôles ou méchantes, le tout apparemment balancé sans intention ni travail, mais prodigieux de fausse nonchalance, amateur constant d’une toute feinte négligence, bien trop inquiet, peut-être, d’être admiré pour ce que vaudrait son sérieux quand ses ironies sont déjà si pétillantes.

Et c’est peut-être la faiblesse de ce livre qu’il soit tout de forme et d’un fond si maigre : on en sort enivré-pas-nourri, on a l’aperçu d’un bel éblouissement mais issu d’une lucarne trop étroite, on est tout à fait mouillé… jusqu’au genou seulement ! Le récit est construit d’une succession d’ingénieuses et courtes situations dont le rythme entraîne mais qui manque à faire l’ampleur d’un roman : de la vivacité, de l’énergie, de l’élan, mais… guère de souffle ! On croit à un exercice de style, au défoulement vigoureux d’une humeur qui s’élance et bondit, tant enjouée et frénétique qu’on ne peut la retenir, mais, faute de sujet profond et d’intrigue préparée pour la soutenir, ne rendant que des chroniques, que des brèves et que des anecdotes mises bout à bout dont la somme ne suffit pas à faire un chef d’œuvre : une rencontre d’esbroufe à Paris, un voyage au bord de la mer tout en déclinaisons de poncifs drôles, un amour trop fantasmé de romans, et pas de dénouement, une précipitation pour achever cela quand l’humeur s’en va et que l’envie cesse. Le dernier tiers – et peut-être toute la seconde moitié – est moins brillant quoique agréable encore, on y trouve une moindre quantité de bons mots étourdissants, on sent une certaine langueur de l’artiste qui ne sait trop où il se dirige ni s’il a vraiment la force d’achever ; un doute l’a pris, il fallait en finir en retombant à peu près sur ses pieds, il a achevé à peu près « comme il faut ».

Cette pulsion vitale agrémentée de couleurs si originales fut pour moi une réjouissance : l’amoralité même du récit le rend piquant, chatouillant, poivré ; et j’aime l’épice qui est ce qui fait le plus défaut à notre société du caramel à la crème allégée et surtout digeste. Ne presque rien dire, et produire un bon livre tout de même, c’est déjà une performance qui m’émeut ; mais on veut – je quête sans relâche – des grandeurs, des hauteurs d’où ma moindreur serait obligée à la soumission : mon appréciation de ce Renard va pour l’admiration de son fort caractère à travers la maîtrise de son surprenant style ; une prochaine fois, je l’espère, pour la vénération de sa profondeur d’esprit.



P.-S. : Je n’ai guère compris la préface de Gardair ; c’est du pédant et ça n’explique rien. Ah ! me rappeler d’éreinter un jour ces préfaces si déconnectées des goûts du lecteur qu’elles lui éventent tout le livre en le résumant imbécilement de A à Z.


Lien : http://henrywar.canalblog.com
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Poil de Carotte

Je voulais lire quelque chose de léger et amusant. J’ai choisi ce remake du vilain petit canard. Raté !

Les péripéties de ce petit garçon aux cheveux roux prêtent à sourire quelquefois, à rire, rarement. D’autres m’ont franchement mis mal à l’aise. On navigue entre des situations ambiguës et des scènes de maltraitance sournoise. L’innocence, l’optimisme et l’intelligence du gamin sont touchants et compensent heureusement la gravité du sujet.

On voudrait croire que les mœurs et coutumes ont changé depuis, que ce sont des histoires d’une autre époque. C’est vrai pour certaines, comme les épisodes de chasse, du poulailler, etc. Mais les relations mère-fils sont, elles, éternelles, pour le meilleur comme pour le pire.
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Histoires naturelles

Un vrai bonheur !

Tout est vrai, on y est. On les voit, tous ces animaux décrits ici. Toutes ces scènes liées à la nature sont tellement expressives, que l'on n'a qu'un seul regret : Pourquoi ne pas y avoir pensé aussi ?

Mais Jules Renard, au nom prédestiné, est passé par là, avec son immense talent. J'ai souvent passé d'excellents moments avec Jules Renard (Son journal), mais là, avec une écriture simple, imagée, il nous enchante.

A lire, à faire connaître, ou à lire avec vos enfants, pour éveiller leur capacité à imaginer notre monde, en dehors des villes.
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Poil de Carotte

J'ai beaucoup goûté cette longue nouvelle, tendre, pudique, drôle mais triste aussi. Elle semble assez autobiographique puisqu'à l'image de Poil de Carotte, Jules Renard avait une grande affection pour son père, mais n'aimait pas sa mère qui ne semble pas avoir débordé d'affection pour lui.

Cette œuvre se présente sous forme de petites pastilles littéraires, acidulées et originales. Le style de l'auteur est simple et vif, hardi et juste. On passe agréablement la journée avec ce diable de Renard!
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Journal (1887-1910)

Jules Renard (1864-1910) a tenu son journal très régulièrement pendant les 22 dernières années de sa vie de 1887 à 1910. Il est mort à 46 ans.



Il m’est difficile, voire impossible, de lire ce gros volume au jour le jour, comme s’il s’agissait d’un roman alors je picore de temps en temps ici et là et je l’oublie le plus souvent sur son étagère.

C’est pourquoi, à l’occasion d’un rangement, je l’ ai ressorti pour ne lire que ses notes anniversaires des débuts de printemps, écrites chaque fin du mois de mars.

En voici quelques-unes..
Lien : http://liratouva2.blogspot.c..
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Poil de Carotte

François Lepic alias Poil-de-Carotte est le fils puîné d'une famille de paysans enrichis vivant à la campagne. Roux et couvert de tâches de son, Poil-de-Carotte est élevé à la dure. Comme un instinct de survie, il a développé le sens de la malice et la ruse que l'on prête habituellement au renard, cet autre rouquin.



Les parties de chasse et de pêche, les jeux avec son frère aîné et sa sœur, les cours en pension, les bêtises et les facéties constituent le quotidien. Souvent rudoyé par sa mère, protégé par son père, choyé par son parrain, Poil-de-Carotte va son bout de chemin, entre rires et larmes.



Le récit dénonce un mode d’éducation aujourd’hui heureusement complètement dépassé. La maltraitance et les humiliations sont le lot quotidien. A cela s’ajoute la violence psychologique qui fait de Poil de Carotte un véritable bouc émissaire. Il y a tout de même de la tendresse, de l’humour qui pointent dans plusieurs saynètes.

Si la résilience est au bout du chemin, ce roman reste difficile. Mais il faut aussi se replacer dans le contexte des campagnes des années 30.

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Poil de Carotte

"Poil de carotte" a été écrit en 1894 par un Jules Renard âgé de trente ans. C'est un livre facile à lire, basé sur les souvenirs d'enfance de l'auteur. Il y parle de la difficulté de grandir quand on a la malchance d'avoir une mère autoritaire, qui multiplie les injonctions contradictoires, les procès d'intention, la violence psychologique et physique, bref, une mère mal aimante, mais qui n'était pas exceptionnelle dans la deuxième moitié du XIXe siècle.



Constitué de très courts chapitres qui n'ont pas de liens entre eux, hormis les personnages et la chronologie, "Poil de carotte" est à mi-chemin entre un conte et un témoignage. L'écriture est fluide, élégante, et l'auteur parvient toujours à faire passer l'émotion ressentie. Sans être aussi excellent que "Vipère au poing" de Hervé Bazin, je ne regrette pas de m'être lancé dans la lecture de ce classique.
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Histoires naturelles

Jules Renard, dans son journal, se montre souvent d'une férocité implacable envers les humains, y compris contre ses collègues écrivains.

Le 14 novembre 1907, il accueille Victor Ségalen qui avec "Les Immémoriaux "publié sous le nom de Max Anély espère être goncourable. Voici ce que Renard écrit:

"Reçu la visite de Max Anély, auteur des "Immémoriaux". Pas trente ans, je crois, Médecin de marine. A fait son tour du monde. L'air jeune, souffreteux, pâle, rongé, trop frisé, la bouche pleine de l'or qu'il aurait rapporté de là-bas avec la tuberculose. Situation médiocre et suffisante.

Voudrait le prix Goncourt, non pour de l'argent, mais pour écrire un autre livre."

Toute l'attention, toute l'empathie de Jules Renard se reportent sur les animaux, la nature qui l'entoure.

Dans sa préface intitulée "Le chasseur d'images" il révèle son extrême sensibilité:

"Il entre au bois. Il ne se savait pas doué de sens si délicats. Vite imprégné de parfums, il ne perd aucune sourde rumeur, et, pour qu'il communique avec les arbres, ses nerfs se lient aux nervures des feuilles.

Bientôt, vibrant jusqu'au malaise, il perçoit trop, il a peur, quitte le bois et suit de loin les paysans mouleurs regagnant le village. "

Le titre "Le chasseur d'images"m'a fait penser au recueil qui me tient le plus à cœur , dans la poésie contemporaine:"Les Chasseurs", d'André Hardellet.

Ce dernier, proche des surréalistes, présente ainsi son ouvrage:

"Depuis mon jardin d'enfance, à Vincennes, je n'ai jamais interrompu ma chasse. Ce que les mots laissent parfois échapper malgré eux, les scènes qui se jouent pour un public inconnu derrière le complot des apparences--voilà mon gibier.

J'ai choisi quelques exemples où ils se rejoignent;. H pour Hardellet . R pour Renard:

Les Fourmis

H: Sable noir d'un sablier horizontal



R: Chacune d'elle ressemble au chiffre 3. Et il y en a !

Il y en a 333333333333...jusqu'à l'infini.



La Libellule

H: Suspendue à un fil invisible, vibre la libellule électrique qui surveille et inquiète les roseaux. A peine la croyez-vous partie qu'elle se reforme, insistante, à la même place - ou peu s'en faut.



R: [la Demoiselle] Elle soigne son ophtalmie.

D'un bord à l'autre de la rivière, elle ne fait que tremper dans l'eau fraîche ses yeux gonflés.

Et elle grésille comme si elle volait à l'électricité.



Le Loriot

H: Le Loriot et "Le temps des cerises", s'entendaient au fond de l'été - parfaitement d'accord.



R: Je lui dis:

-Rends-moi cette cerise, tout de suite.

- Bien, répond le loriot.

Il rend la cerise et, avec la cerise, les trois cent mille larves d'insectes nuisibles qu'il avale chaque année.
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