Pure est un livre sombre, qui a tout pour oppresser le lecteur qui ne peut que se projeter dans cette atmosphère post-apocalyptique, décrite avec une précision qui force le respect. On sent que l’auteure a passé du temps à réfléchir à ce monde puisqu’elle a apporté un grand soin à la création des décors ravagés, mais aussi à celle des physiques de ses personnages. Et c’est justement là que se situe le problème me concernant.
Pour résumer rapidement. Il y a quelques années, des bombes nanotechnologiques ont explosé et causé des mutations chez la population, qui a fusionné avec les objets, animaux ou personnes à proximité durant cet événement tragique, qu’on attribue à une soi-disant guerre. Quelques privilégiés ont trouvé refuge dans un dôme, ils sont nommés les Purs car ils sont physiquement intacts et font tout pour le rester en vivant en autarcie. Durant ce premier tome, nous suivons Pressia, une jeune fille ayant une poupée à la place de l’avant-bras, et Partridge, un Pur qui s’échappe du dôme pour retrouver sa mère. Leurs chemins se croisent, ils arpentent ce monde dévasté et remontent le fil de cette tragédie qui les conduit sur les traces de leur propre passé…
Julianna Baggott a mis toute son énergie dans les descriptions et en a un peu oublié l’histoire, dont le rythme particulièrement lent accentue le malaise ressenti à la lecture. Un malaise que l’écriture légère et simple aide à mieux supporter. On met environ la moitié du roman pour pleinement entrer dans le vif du sujet. Je parle de l’intrigue, pas du décor qu’on a bien intégré en 250 pages. L’idée des fusions est très originale, et si je salue l’ingéniosité de la plume à ce niveau, je dois avouer avoir quelques fois eu du mal à me les représenter, une défaillance qu’il m’arrivait de regretter en d’autres occasions, tant la vision de ces corps « violés » était insoutenable.
Outre cela, en dystopie, je suis partisane des histoires d’amour qui sont autant de bouffées d’air frais dans de tels univers. Ici, les deux romances qui se mettent en place sortent un peu du chapeau, on dirait qu’elles sont là parce qu’il fallait les inclure. Les sentiments existent plus ou moins avant les épreuves affrontées, j’aurais aimé qu’on se focalise plus sur leur développement, pour non seulement les crédibiliser, mais surtout pour insuffler des émotions positives dans un cadre si pesant.
J’ai bien apprécié l’alternance de points de vue du départ, qui apportait un parallèle entre les visions des Purs (Partridge) et des Fusionnés (Pressia). On ne fait que « tester la température » à l’intérieur du Dôme, duquel on s’échappe vite (et trop facilement pour que ça ne soit pas suspect), mais ça ne m’a pas gênée plus que ça, car on se doute qu’on y entrera de nouveau. Plus loin dans le récit, on a droit à d’autres points de vue, judicieux à mon sens puisque l’un confirme la présence de la résistance tandis que le second apporte un contrepied très psychologique de par la fusion de deux frères. Pressia et Partridge deviennent plus denses en fin de livre, et une scène très émouvante m’a définitivement ralliée à leur cause, d’autant que je ne l’ai pas du tout anticipée.
Il y a quelque chose qui m’a particulièrement plu au sujet des fusions, c’est le double-sens dramatique qu’elles suggèrent pour chaque personnage. Ainsi, Pressia qui a fusionné avec une poupée nous rappelle qu’elle est encore une enfant qui espère, tandis que Bradwell, ce jeune rebelle aux grands idéaux, se voit affublé d’oiseaux dans le dos, symbole d’une liberté à gagner. El Capitan, quant à lui, qui voulait prendre soin de son jeune frère partage désormais son corps avec lui.
Vers la fin du tome, on nous explique à renforts de longues tirades ce qu’on avait déjà plus ou moins deviné concernant les bombardements ayant entraîné les mutations de la population. Je n’ai pas vraiment trouvé utile d’y revenir en profondeur, encore moins à ce moment précis, ce qui a rendu les retrouvailles familiales un peu froides. Au final, dans Pure, on en revient au schéma classique de la dystopie avec des dirigeants qui souhaitent contrôler l’univers dépeint et qui n’hésitent pas à manipuler ou tuer pour y parvenir.
Pure est une bonne dystopie, d’un réalisme qui bouleverse, au point que le décor reste gravé sur notre rétine après avoir refermé le livre. Malheureusement, du fait des longueurs et des explications pas forcément convaincantes car trop concentrées, on garde une impression de lenteur dérangeante alors qu’on aurait voulu entrer dans le vif de l’intrigue plus en amont. Peut-être est-ce parce qu’il s’agit d’un premier tome ?
NB : Un conseil, c’est un livre à lire quand votre humeur est au beau fixe…
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