Julie James

— L’agent Griegs est-il toujours des nôtres ?
— Oui. Pourquoi ?
— Il va devoir participer, lui aussi.
Davis souffla bruyamment.
— Je crains le pire.
— Vous n’avez pas tort. J’ai hésité entre ça et exiger que vous téléphoniez à ma mère pour lui expliquer que c’est votre faute si je ne peux pas assister à sa fête d’anniversaire. À vous de décider. Cependant, je préfère vous prévenir : ma mère est italienne. Italienne de New York, c’est-à-dire italienne à cinq cents pour cent.
Davis jura entre ses dents.
— Je m’occupe de Griegs.

— Tu sais, les relations deviennent compliquées quand tu es adulte.
— Oh, je vois. C’est juste pour le sexe.
— Tu n’es pas un peu jeune pour parler de ça ?
— Je n’ai pas dit que je le pratiquais moi-même. Mais, au risque de te choquer, oui, je sais que les adultes couchent ensemble sans pour autant se jurer de s’aimer toute la vie.
Vaincu, Cade tenta de résumer la situation.
— D’accord, il y a une femme. On s’entend bien. On a couché ensemble.
— Tu l’apprécies ?
— Évidemment. Elle est intelligente, drôle et très sexy.
— Mouais, je vois bien ce qui te gêne. Intelligente, drôle et sexy. Ça m’a l’air très compliqué comme situation. Un conseil ? Passe à la vitesse supérieure. 

— Val, la plus grosse erreur qu’une femme puisse commettre est de se convaincre qu’elle s’adaptera à la situation. J’ai commis cette erreur une fois ; cela ne se reproduira plus.

— Vous êtes assez séduisant. Physiquement, j’entends.
— Arrêtez ! Vous me faites rougir.
— En revanche, votre personnalité présente quelques défauts.
— Je vois. Lesquels ?
— Combien de temps de vol nous reste-t-il ?
Jason rit aux éclats et Taylor sourit. 

Toutefois, malgré ses convictions, Taylor estimait avoir fait preuve d’une grande diplomatie à l’égard de l’assistant en lui lançant :
— La coutume veut-elle que je lui fasse la révérence avant ou après avoir été présentée à Sa Majesté ?
Il n’avait pas apprécié. 

— Dis-moi, j’ai raté le chariot déjeuner ? Il est déjà midi ?
Dieu qu’elle détestait cet homme !
« Il est très rare que j’arrive à midi », faillit-elle répliquer, mais elle se mordit la langue. Non. Elle n’allait pas s’abaisser à son niveau.
— Si tu passais moins de temps à guetter mes allées et venues, J. D., et un peu plus à te concentrer sur ton boulot, peut-être que tu n’aurais pas besoin de travailler quinze heures pour en facturer dix. 

C’est alors qu’il prit sa décision.
Elle pourrait imposer ses règles à sa guise – mais ce duel, c’est lui qui l’emporterait. 

— Tu abandonnes les missions d’infiltration ? En quel honneur ? souffla-t-elle, en état de choc.
Nick reprit son souffle et se prépara à un feu de questions.
— Euh… voilà, maman, c’est que… euh… j’ai rencontré quelqu’un.
Silence.
— Allô ? Maman ? Tu es toujours là ?
Un sanglot étouffé.
— Non ! Ne me dis pas que tu pleures déjà ! Je ne t’ai encore rien dit sur elle.
— Aucune importance, Nick. Voilà des paroles que j’attendais depuis trente-quatre ans.

Au moins s’étaient-ils mis d’accord tacitement pour ne jamais révéler aux autres leur animosité. Car tous deux désiraient plus que tout faire carrière et savaient que, comme à l’école, il n’était jamais bon dans un cabinet d’avocats d’obtenir un « peut mieux faire » dans la case « jouer avec les autres ».

La société Rhodes Network Consulting LLC n’ayant pas encore de clients, il n’en profitait guère. Par conséquent, quand Jordan avait décrété que lui et Nick devraient passer une soirée ensemble afin de mieux se connaître, Kyle avait offert deux billets à ce dernier en lui proposant d’amener un copain. De son côté, se fiant à l’adage « plus on est de fous, plus on rit », il avait invité Dex.
Il s’en mordait les doigts.
D’un œil méfiant, il vit les deux agents du FBI – oui, maintenant ils étaient deux, apparemment ils se multipliaient comme des gremlins mouillés – pousser le rideau pour pénétrer dans la loge.
— Sympa ! s’exclama-t-il. Vous êtes venu avec le type qui m’a massacré la cheville en y fixant un bracelet électronique.

— Les préliminaires ?
— Parfaitement. Voici comment il faut procéder. Lors d’une dégustation, tu dois respecter les phases suivantes : examen visuel, examen olfactif, examen gustatif, ensuite tu craches ou tu avales.
— Et tu préfères… ?
— Seuls les poids plumes rejettent… Première étape : on regarde.
— Ça m’a tout l’air d’être du vin.
Elle secoua la tête.

— Et si je vous disais qu’il y a un autre gros poisson qui frétille en liberté et que nous pourrions vous aider à le prendre dans la nasse, qu’en penseriez-vous ?
— Je pense que vous devriez éviter, ainsi que votre confrère, de continuer à utiliser des métaphores liées à la pêche.

Jason et Taylor se retrouvèrent seuls.
Entourés de centaines d’inconnus. 

En entendant la porte claquer, Taylor s’effondra sur le canapé. Elle inspira profondément.
Au base-ball, on ne pleurniche pas.
Elle cligna des yeux.
Au base-ball, on ne pleurniche pas.
Elle tiendrait. Au base-ball, on ne pleurniche pas…
Mais le combat était perdu d’avance. Pour la première fois de sa vie d’adulte, une larme coula sur sa joue. Puis une autre…
Elle ne les essuya pas. 

— Mais je m’en fiche de la vérité ! Je ne veux pas l’entendre. Je veux qu’on me remonte le moral, qu’on m’encourage. Tiens, tu sais ce que tu pourrais répondre : « Ne t’en fais pas, Brooke. Bien sûr qu’il veut être avec toi. Vous allez tellement bien ensemble. D’ailleurs, je crois qu’il traîne comme une âme en peine depuis deux semaines, quittant à peine son appartement tellement il déprime parce que tu n’appelles pas… »
— C’est ce que je dois dire ?
— Oui.
— Le problème, c’est que les hommes ne réagissent pas comme ça. On élude le problème, on boit, parfois on trouve une autre fille pour oublier la première…
Voyant l’air paniqué de Brooke, il essaya de se rattraper.
— Je ne dis pas que c’est le cas. Je parle des hommes en général… Et je crois que je ferais bien de me taire.
— Merci, Ford. Maintenant, je me sens beaucoup mieux.
— Je crois que je viens de prouver que je suis nul pour remonter le moral des troupes. Mais je peux quand même ajouter quelque chose ?
Brooke soupira.
— Au point où nous en sommes…
— La seule façon de savoir avec certitude ce que pense Cade, c’est de le lui demander.

— Si c’est ce que tu veux, dit-il en haussant les épaules.
— Tu as hésité, remarqua Vaughn d’un ton doucereux.
— Pas du tout.
Seth lui coula un regard depuis la place du conducteur.
— En fait, si. Vous avez marqué une courte pause.
Cade se rencogna dans son siège et tourna résolument les yeux vers sa vitre, laissant un silence lourd d’agacement s’installer dans la voiture.
Évidemment, pour une fois que ceux-là tombaient d’accord, il fallait que ce soit à son détriment !

Jordan posa une main sur son cœur.
— Ô mon Dieu ! Tu cherches à l’impressionner. Comme c’est mignon !
— Ne sois pas ridicule. J’ai entendu tant de gens s’extasier en parlant de ce breuvage que j’ai envie d’y goûter, voilà tout.
— Kyle. Elle sera enchantée.
Bon, d’accord, peut-être cherchait-il à impressionner Rylann Pierce. Un peu.
— Tu crois qu’elle va me trouver excessif ?
— Ma foi, on dirait Bambi qui fait ses premiers pas.
— Jordan !
Avec un sourire, elle lui serra affectueusement l’épaule.
— Pas du tout. Crois-moi, tu ne pouvais pas mieux choisir. 

— Il capte les voix à quinze mètres à la ronde, même à travers un vêtement. Il vous suffit de l’insérer dans votre soutien-gorge… en admettant que vous en portiez un sous ce fourreau.
— Non. Juste des sparadraps sur mes tétons.
Cinq années à la brigade des mœurs, les six suivantes au FBI… jamais Nick n’avait été confronté à une telle situation. Jordan afficha un sourire.
— Je plaisante… Tournez-vous. 

Alors elle lui posa la question qui la turlupinait depuis plusieurs jours.
- Pourquoi es-tu brusquement si gentil ? Pourquoi maintenant ?
Se penchant en avant, il la regarda droit dans les yeux, et Payton se demanda pourquoi il lui avait fallu huit ans avant de la contempler avec cette expression.
- Parce que tu me le permets enfin, répondit-il d'une voix douce.

- Je ne parviens pas à décider si vous êtes sûre de vous jusqu’à en devenir irritante, ou simplement…
Il parut y réfléchir quelques instants et finit par hausser les épaules.
- Non, rien d’autre ne me vient, à part “irritanteˮ.
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