« Sonny et Vera. Vera et Sonny. »
On pourrait penser répéter ça en chantant pour se moquer de ces amoureux. Et pourtant, non.
Sonny est un jeune irlandais de 16 ans qui tente à tout prix de fuir sa vie. Comme la plupart des jeunes en Irlande, l’avenir n’est pas prometteur et la fuite reste le plus bel espoir pour tenter d’exister. Alors il fume, il boit, il provoque, il jure… en cachette bien sûr. Mais quand ses yeux se posent sur Vera, il sait pertinemment que sa vie ne sera plus la même.
Vera est une femme sublime, plus âgée que lui et il en tombe éperdument amoureux. Du haut de ses 16 ans, il en est certain : l’amour c’est ça, c’est elle et tout ce qu’il ressent quand il aperçoit ne serait-ce qu’un bout de ses cheveux à l’angle de la rue.
Et nous voilà à suivre cet amour « impossible » et pourtant inéluctable.
Avez-vous déjà eu la sensation de lire un livre comme si c’était un classique ?
Car avec « Vera » de Karl Geary, c’est précisément l’impression que j’ai eue. L’écriture est particulière par la finesse et la modestie des mots choisis. Le livre n’est pas au « je », ni au « il » mais au « tu ». Si cela est un peu déroutant au début, au fil des pages on s’y fait très bien et le « tu » donne une différence assez forte à l’histoire. Comme si le lecteur était invité à prendre part dans cette relation compliquée et désapprouvée par leur entourage.
Le rythme général est un peu lent mais pas du tout ennuyeux. C’est une histoire de vie (du moins, un passage) et il y a quand même ces petits « rebondissements » qui perturbent ou embellissent le quotidien. Ici les révélations arrivent quand on ne s’y attend pas (malgré une clairvoyance offerte au lecteur assez libre de la part de l’auteur) et renforcent la puissance des sentiments et des émotions qui portent ce livre.
Chaque mot, chaque phrase n’est pas là par hasard. Les doubles sens sont assez nombreux, cachés entre les lignes, pour accentuer les caractères des personnages. Leurs regrets, leurs rêves et leurs blessures. Ils ne sont pas parfaits, Sonny n’est pas forcément sympathique et les autres personnages donnent tous l’impression d’avoir une rage au ventre qui les consume et les force à vivre ainsi. Mais pourtant, on s’y attache. Plus on les côtoie et plus on se surprend à espérer que l’Irlande puisse leur offrir une chance de devenir ce qu’ils rêvent. Et l’histoire d’amour entre Vera et Sonny s’éprend de cette même intensité. Elle est complexe, elle perturbe mais elle existe. Et eux deux ne l’ignorent pas.
Une très belle découverte et je remercie chaudement les éditions Rivages pour cette révélation irlandaise !
Le petit plus : Ce roman fait partie de la sélection Rivages qui fait la rentrée littéraire. J’espère que vous saurez lui faire un bel accueil et une belle place !
Si je le conseille ? Oui, vraiment c’est le genre de livre qu’on range et dont on prend soin. Pour moi, il a la même qualité et la même richesse d’écriture qu’un « classique ». Une belle histoire d’amour qui m’a fait penser à l’une des plus belles du 6ème art (c.f. « N’oublie jamais ») et qui restera en mémoire. Et en plus, je trouve la couverture sublime ! Simple, forte, mélancolique, très proche de l’atmosphère qui se dégage durant la lecture.
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