Citations de Kathleen Winter (61)
Entre les paupières de Wayne et la bouteille cassée, l'écart n'est pas plus large que l'épaisseur d'une autre paupière.
Ma propre vérité, qui je suis réellement.
Il suffit parfois d’une interruption, d’une rupture dans le cours des choses, même si ça ne dure pas, pour ouvrir une faille.
(Chapitre 16 – Eloignement)
On dit que l'amour nous attend à chaque coin de rue. Si c'est vrai, il faut croire que je tourne en rond.
Nous vivons dans un monde où on accroche à chaque personne, chaque plante, chaque créature animale ou chaque entité quelle qu'elle soit une étiquette explicative.
Les angoisses d'un enfant ne sont pas celles d'un adulte. Elles le rongent et cette souffrance n'est vraiment pas nécessaire. Pourquoi les adultes croient-ils les enfants incapables d'entendre la vérité ? Pourquoi s'obstinent-ils à refiler à leurs enfants les mensonges que leurs propres parents leur ont refilés, alors qu'ils se souviennent sûrement de la détresse qu'ils avaient ressentie quand ils pleuraient tout seuls dans leur lit, en proie à des peurs que personne n'avait pris la peine de les aider à surmonter ?
Pour Thomasina, les gens sont des rivières, toujours prêts à passer d'un état d'être à un autre. A ses yeux, il est injuste de traiter les gens comme des êtres achevés. Chacun est constamment en devenir ou en non-devenir.
Rares sont les moments, dans la vie des femmes, où elles peuvent sentir le soleil palpiter sur leurs paupières dans un endroit caché sans personne pour leur demander quoi que ce soit.
Plaindre quelqu'un ne l'aide en rien.
Les gens parlent de Mozart avec une affection qu'ils sont incapables d'éprouver pour Haendel, qui évoque l'apparat et non la tendresse.
Je trouve fascinant d'observer à quel point la recherche d'un avantage personnel empêche les hommes de voir ce qu'ils ont devant les yeux.
J'ai trop compté sur vous pour m'apporter un minimum de réconfort. Vous l'ignoriez pendant un temps, pendant un très bref moment. Puis vous vous en êtes rendu compte. Mon entourage finit toujours par s'en apercevoir et par me considérer comme un puits sans fond, un gouffre où il déverse des océans d'amour pour les voir inévitablement se tordre en filaments de glace. Je vis dans une froideur infernale dont nul ne peut me sauver.
Car, comme bien des fils, j'ai appris avec les années à ne dire à ma mère que ce qu'elle veut entendre.
Ce qui a privé Montcalm de ce qu'il lui aurait fallu pour triompher, c'est l'indifférence de la France.
Lorsqu’on garde un autre monde en mémoire, un monde qu’on a perdu, on peut toujours s’imaginer le visiter à nouveau.
Pourquoi appelle-t-on ça du maquillage ? Prétend-on ainsi maquiller les carences d’une personne, et si oui, comment nommer ça autrement que façade et mensonge ?
La tristesse qu’éprouve Wayne en quittant sa mère est celle que ressentent tous les fils et toutes les filles lorsque leur traversier s’éloigne du quai et que les parents restent plantés sur la jetée à faire des signes tandis que leur silhouette rapetisse. Une tristesse qui fait mal, puis qui s’évapore dans la brise fraîche.
Quand, étendu sur le dos dans un champ, vous tendez vos yeux fermés au soleil, quand vous êtes jeune et que le monde ne vous a pas encore imposé de souvenirs impossibles à effacer, vibre contre vos paupières fermées un rouge-orange qui contient la chaleur de tous les étés à venir, et le rouge qui se rue contre les paupières fermées de Wayne tire lui aussi sur l’orange.
Mais cela se passait à la saison des petits fruits, par une de ces journées chaudes et dorées où, dans le jus de chaque baie et la sève de chaque feuille, se concentre encore tout le soleil de l’été.
Wayne ne connaît aucun autre adulte qui admette avoir besoin de réfléchir avant de répondre à une question. Les adultes ont toujours une réponse toute prête, même si elle n’a aucun sens.