Les voies de l’amitié ou de l’amour sont parfois impénétrables. Racines communes, imprégnation de la mort dès la jeunesse, vision d’un avenir ou rappel d’une jeunesse sont autant de facteurs qui poussent deux êtres différents l’un vers l’autre.
John Gload est à la fin de sa vie, il est derrière les barreaux d’une prison, il donne la mort de manière sauvage.
Val Millimaki est jeune, il est adjoint au shérif et il passe son temps avec son chien Tom à tenter de sauver de la mort des personnes signalées disparues.
» Et je ne sais pas où tu es Val. Avec tous ces morts que tu retrouves dehors, j’imagine. Ils sont plus simples. Tu n’es pas obligé de leur parler. Tu ramènes à la maison leurs foutues photos comme s’ils faisaient partie de la famille, ou comme si c’était une amante secrète. »
Mais, pour l’un comme pour l’autre, la mort fait partie de leur vie depuis leur enfance. Cette obsession met en péril leur couple, ajoutant de la noirceur à une vie difficile dans un milieu aride.
» Il se demanda ce qui pouvait susciter une telle cruauté dans un si beau paysage. Comme si le vent qui balayait les flancs depuis les escarpements gelés et mornes apportait avec lui l’appétit des loups et des ours, pareil à un microbe contaminant le sang. »
Dans cette région, il est difficile de vivre seul. Entre le vieux tueur sanguinaire isolé dans sa prison et le jeune policier abandonné par sa femme, de conversations nocturnes en confidences, des liens involontaires se resserrent.
Une amitié, qui, même si elle n’est pas avouée réciproque, me heurte face à la description des activités de John Gload, homme qui ne mérite pas la pitié.
« Pour le reste d’entre nous, pense Millimaki, la distance entre la raison et la folie est infime, une frontière fine comme du parchemin et tout aussi fragile pour contenir le monstre. »
La vieillesse de ce monstre, l’attrait d’une terre et de ses pommiers peuvent-ils expliquer ce rapprochement? Même vieux, John Gload est un homme dangereux que l’on imagine pas sortir seul avec un policier dans la nature.
Si ces petites réserves m’empêchent de ressentir avec force la relation entre les deux hommes et de prôner l’excellence, je reconnais que Les arpenteurs est un premier roman bien maîtrisé, sensible qui fait honneur à la collection de Nature Writing.
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