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Citations de Kinga Wyrzykowska (23)


De vraies autruches. Malgré l'évidence, ils ne voient pas, ne croient pas, la tête enfoncée dans le sable, ils creusent un trou où s'enterrer vivants. Son frère et sa sœur. Vivants et cons. Pas un pour rattraper l'autre. Paul est atterré par la puissance du déni. Ils sont emblématiques d'ailleurs, entre parenthèses, de notre société abêtie, léthargique, qui a mis son intelligence en jachère pour se contenter de faux-semblants, de vérités idéologiques, qui refuse de regarder la réalité telle qu'elle est.


Tu leur craches dessus et ils lèvent les yeux au ciel pour vérifier s'il pleut. Samuel, encore, c'était attendu. Pas touche au Padre, l'idole, saint Claude, au-dessus de tout soupçon. Mais que Clothilde réagisse avec autant de résistance, et, soyons franc, de bêtise, il ne comprend pas. Ce n'est pas le genre de papa, elle dit. Ni d'aller baiser ailleurs. Ni de déroger à ses responsabilites. Paul a plaqué ses fantasmes sur une photo, voilà tout. Ça t'arrange que papa apparaisse aux yeux de tous comme un salaud.
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Les Simart-Duteil, un horizon inatteignable, une énigme depuis toujours, désormais à portée de main. Tout ce que vous avez voulu connaître, toucher, enfermé dans une résidence secondaire à Yerville. Et leurs vies d’avant, traçables. Ici, et là. Il suffit de glaner.
Imaginez, il y a de quoi frissonner.
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Vous scrollez la vie des autres, sans émotion, anesthésié-e. Vous balayez les chiens écrasés avec distance, clic après clic. Tant de chair et pas un os à ronger. Rien qui croustille. Vous devriez vous arrêter, ranger la machine, prendre un bon roman, parlez à votre voisin, lever le nez.
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Samuel est en train d’annoncer son mariage. Regarde la tête de ta mère.
Isabella pâlit sous l’effet de la surprise. Samuel aurait pu le lui dire en privé. Elle observe le couple. À quarante-deux ans, son fils a la beauté du diable. Il ressemble à Gregory Peck. En plus mat, et les cheveux bouclés, un Gregory Peck méditerranéen. La silhouette fine, élégante et virile de Claude. Monika ne démérite pas non plus. Une créature, dans son genre scandinave un peu froid. Un peu triste. Pas la sensualité italienne mais si ça convient à Samuel… Isabella devra s’en accommoder. Que peut-elle faire d’autre ?
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La première opération est prévue à neuf heures.Samuel arrive deux heures plus tôt dans la clinique vide.Il n'a pas dormi de la nuit.A six heures ,après avoir donné le biberon à Théodore ,il ne s'est pas recouché : inutile .Il a posé le nourrisson à côté de Monika,chuchoté qu'il avait sorti leur fils du berceau ,tremblant qu'elle se réveille. Enfant,des que son père partait ,il se glissait auprès de sa mère, leur secret à tous les deux,il ne fallait pas que Paul ni surtout Clothilde,la plus petite,l'apprennent --Les enfants Simart-Duteil avaient interdiction d'entrer dans la chambre parentale ,à moins d' y être conviés ou convoqués.Le respect de l'intimité des adultes était une loi familiale à laquelle Samuel avait dérogé jusqu'à son adolescence tardive,la tête enfouie dans la poitrine de sa mère, parfois -- il y repense avec un plaisir coupable--un de ses tétons à portée de sa bouche .S'en rendait-elle compte? Il se le demande encore.( Page 157).
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Vous ne savez plus.Vous avez l'impression de perdre la tête. Est-ce que c'est la maison des Simart-Duteil? demandez-vous encore.Alors ,très lentement ,en articulant avec excès on vous répond que non,ce n'est pas comme ça que s'appellent les propriétaires actuels ou passés d'ailleurs,puisque ,comme on vous l'a expliqué ,la demeure n'a appartenu qu'à une seule et même famille..
Le réel se fissure.Le monde chancelle.
Et avant que vous ne raccrochiez ,hagard.e ,on vous previent: il y a une liste longue comme le bras de clients qui souhaitent visiter.Alors si la maison suscite votre curiosité, ne tardez pas.Un bien pareil ,ça en fait rêver plus d'un.( Page 317).
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0.

Imaginez,vous avez dû temps à tuer.Une vacance.
Échine courbée ,doigt sur l'ecran du portable ,yeux légèrement plissés,vous vérifiez vos mails,la météo, passez en revue les messages qui s'empilent dans vos conversations actives ,jetez un oeil au cours de la bourse alors que vous n'avez placé d'argent nulle part ouvrez " Le Monde" ,Leboncoin, un jeu de poker en ligne et Instagram .
Les minutes passent,l'ennui pas: vous cédez à l'appel d'une news qui promet un rebondissement insensé dans l'affaire Dupont de Ligonnès, et finalement rien.Deçu.e vous sautez par la première fenêtre surgissant pour déouvrir que Brytney Spears a dorénavant les cheveux bleus.( Page 9).
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Ils sont emblématiques d'ailleurs, entre parenthèses, de notre société abêtie, léthargique, qui a mis son intelligence en jachère pour se contenter de faux semblants, de vérités idéologiques, qui refusent de regarder la vérité telle qu'elle est. Tu leur craches dessus et il lèvent les yeux au ciel pour vérifier s'il pleut.
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Putain, grogne Paul, nous sommes une famille, nous sommes là pour nous épauler .regardez tout ce qui menace autour de nous. Si tu ne comprends pas ça, Antoine, tu dégages. Si t' as pas envie de faire partie de notre cellule, notre cellule familiale, soudée et saine . exactement, saine . parce que le monde
est malade et que nous développons des anticorps pour lutter. Tu es ivre, Paul, on en reparle demain. Je vais aller me coucher. Mais alors tu retires, Antoine tu retires. Je retire, Samuel, et je vais me coucher.
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Clothilde attendra le lendemain pour répondre. Là, elle trouve ça bizarre, inadéquate, hors sujet pour le moment, cul nu, elle n'aspire qu'à hacher d'un geste expert oignons, échalotes, carottes tomates, ail, ciboulette, persil et coriandre, tout ce qui tombe sous sa main salie, et cuisiner encore, cuisiner
toujours, n'être plus qu'une machine, un appareil électroménager qui pèse, coupe, broie, malaxe, mélange, cuit, casse. Un Thermomix rempli et bruyant, qui ne pense à rien.
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Depuis la naissance de Théo, elle ne désire personne . tout s'est relâché là-dedans. Elle n'a aucune envie que le sexe de son mari erre en elle sans aucun endroit où s'accrocher. Un satellite perdu dans l'espace. Le vide infini de son bassin la terrifie.
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Vous scrollez la vie des autres, sans émotion, anesthésié·e. Vous balayez les chiens écrasés avec distance, clic après clic.
Tant de chair et pas un os à ronger. Rien qui croustille.
Vous devriez vous arrêter, ranger la machine, prendre un bon roman, parler à votre voisin, lever le nez. Vous n’y arrivez pas. La déception vous affame. Le vagabondage vous rend vorace.
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Aurélien observait celui qui se tenait face à lui et qui lui apparaissait chétif, vieux. Sa peau habillait une absence. Il avait cette silhouette évanescente, de virgule, dont on ne saurait dire vers quoi elle tend. Hier ou demain ? Sa disparition ou une existence nouvelle ?
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Samuel n'y connait rien en psychotropes. Et Paul non plus. Quinze ans de défonce ne sont pas l'équivalent d'un doctorat en médecine.
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Tomek prit une large inspiration. De toutes les choses difficiles qu'il avait eu à faire ce jour-là, c'était certainement la plus pénible. Il appuya sur le bouton rouge de la sonnette. La porte s'ouvrit aussitôt.
- Je t'attendais, murmura une voix douce.
Une vieille femme, à l'épaisse chevelure blanche nouée en un chignon qui encadrait majestueusement son visage, l'invita à entrer dans un appartement sombre. Bien que le soleil fût levé depuis longtemps, tous les rideaux étaient tirés. Seules quelques bougies éclairaient avec parcimonie une grande pièce qui servait à la fois de chambre, de cuisine et de salon.
Tomek entra. Ses narines furent envahies par une délicieuse odeur de beignets à la rose.
- Il faut que tu prennes des forces pour ton voyage... Il ne trouva rien à répondre. Toute la semaine, il s'était demandé comment il lui annoncerait son départ. Et elle le savait déjà !
Il saisit un de ses gâteaux préférés et le croqua avec l'avidité de celui qui se doute qu'il n'en mangera plus avant longtemps. Puis il se dirigea vers un grand fauteuil en velours vert élimé. Son fauteuil. Là où il aimait s'asseoir pendant des heures depuis que Mira avait emménagé dans son immeuble. Il y avait un an. Quelques jours après ce que toute la cité appelait, en chuchotant, surtout devant un membre de la famille Parniewski, «l'Accident». Et elle était devenue sa Baba une grand-mère personnelle, choisie et secrète.
Baba Mira commençait toujours par préparer le café. Elle mettait une petite casserole en cuivre sur le feu. Et, pendant cinq minutes, elle veillait, muette et concentrée, à ce que la boisson ne bouille pas. Tomek écoutait les tintements de la cuillère contre les parois du récipient et observait l'épaule de la vieille femme qui s'agitait. Puis Mira éteignait la gazinière, et servait le café brûlant et mousseux avec cérémonie. Il avait droit au même café qu'elle, dense et sucré. Une boisson d'adulte qui laissait une fine pellicule granuleuse sur les lèvres. Mira s'asseyait en face de lui et l'écoutait. Elle ne prenait jamais l'air désolé. À elle, il pouvait tout dire. Elle était la seule à laquelle il se confiait.
Son moment préféré, c'était quand il avait terminé son café. Il posait alors sa tasse à l'envers sur la soucoupe. Baba Mira haussait les sourcils en plissant son front ridé pour signifier que la suite des événements la dépassait. Puis ils attendaient dans le silence. Enfin, elle soulevait la tasse refroidie et scrutait attentivement les dessins qui s'étaient formés avec le marc. Elle y lisait l'avenir de Tomek. Ce n'était jamais le même. Ça les faisait rire.
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Il faut confire, tous ensemble à l'intérieur, ça fait partie du jeu.
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Souvent, celui qui découvre le pot aux roses, descelle le placard aux cadavres, soulève les draps incestueux, confesse avoir éprouvé, en dehors de la stupeur prévisible, une délivrance, la confirmation du fait qu’il n’était pas fou, que tout ce qu’il pressentait, imaginait — savait — était bel et bien, un jour, advenu.
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Rien de tel que la peur pour se sentir vivant.
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Se peut-il ?

C’est grotesque.

25 octobre 1988. Personne ne se souciait de l’aîné des Simart-Duteil, évaporé du jour au lendemain. Au moment du clic, le petit oiseau va sortir, Paul tâpinait surement au bois de Boulogne, et pompait un pauvre type dans sa bagnole de merde pour cinquante francs tout ronds. Dans l’indifférence générale. Tandis qu’à des milliers de kilomètres, sur un canapé moyen-oriental kitsch, dégueulasse, l’homme-son père – c’est grotesque et irréversible -, qui n’a jamais cherché son fils, s’ébahissait d’un autre, tout entier tendu vers lui. Plein de tendresse. Dans sa main gauche, celle à la montre, une Dunhill éteinte, probablement achetée en Franche par Clothilde ou Samuel (il envoyait toujours ses enfants lui chercher des cigarettes), tandis que de la droite il berce, affectueusement, un enfant dont on ignore si c’est une fille ou un garçon. Un enfant langé de blanc et blotti dans le coude paternel.

Dans le coude de.

Malgré l’hébétude sur son visage, malgré son ravissement insupportable, malgré le geste protecteur, enveloppant – un geste que Paul ne lui connaît pas, d’amour -, ça ne peut être que lui, son père, Claude Simart-Duteil.

Au dos de la photo, quelques mots, au crayon à papier : Ma Chadia et Feras, Damas, automne 88.
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Deux fossettes creusent les joues de la doyenne. Elle est mignonne, songe Antoine. Avec l'âge, c'est drôle comme l'enfance affleure, bordée de rides.
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