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Critiques de Laurence Plazenet (17)
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Anthologie de la littérature grecque

Après l'Anthologie de la littérature latine, lue cet été, je me suis "attaqué" à la plus épaisse, en langue grecque.

Je m'attendais à n'avoir que peu de choses à y lire, ayant déjà pas mal parcouru d'auteurs classiques.

C'était oublié que, déjà, l'humilité ne doit pas être un vain mot face à cette civilisation magnifique, et que celle-ci s'étend du VIIIeme avant J.-C. au XVeme après J.-C. !

Et dans la dernière période, je n'avais tout bonnement rien lu ! Une honte à présent un peu effacée...



Le problème avec ces anthologies, et je le soulignais déjà pour celle en latin, c'est qu'elles donnent envie de lire des tonnes d'auteurs, et qu'on a vite fait de se retrouver noyé sous les livres !

Pour ma part, j'ai du un peu me forcer pour lire tous les auteurs chrétiens, qui ne sont pas ma tasse de thé, mas j'ai découvert tous ceux regroupés dans l'anthologie Palatine avec joie, trouvant des styles très différents et très libre, loin du classicisme que j'adore, mais qui à la longue, lasse (quoique...).

Il en va de même pour les auteurs byzantins, passionnants !

Bref, sans rentrer dans les détails, il s'agit d'une somme géniale, d'un ramassis de textes superbes et qui ouvrent bien des portes, voire des fenêtres !
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La blessure et la soif

Voilà un roman incandescent qui ne quitte l'extase mystique et l'ivresse des sens que pour entrer dans l'horreur la plus absolue.

De la France de la Fronde avec M. de La tour à la Chine de la dynastie finissante des Ming avec Lu Wei, nous découvrons les vertiges de l'amour et les souffrances de la guerre, le raffinement des lettrés et la brutalité des armées.

Nous suivons la rencontre improbable de M. de La Tour et de Lu Wei et partageons leur inimité d'ermites reclus au milieu d'un lac de montagne.

Nous souffrons avec Mme de Clermont, unique amour de M. de La Tour, qui est abandonnée et reniée et qui laisse la place à la recherche délirante de Dieu ou du Vide.

Nous assistons à la destruction par les troupes de Louis XIV du couvent de Port Royal (sans doute ?) dernier refuge de M de La Tour.

Tout celà, écrit dans une langue ciselée mais sobre, nous donne à apercevoir l'exigence et la radicalité d'une vie qui se rapproche fortement du jansénisme.

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La blessure et la soif

La blessure et la soif, par Laurence Plazenet. Ce livre est un monument, une somme, étrange, qui oscille entre une histoire d'amour, un roman historique, un long poème mystique.

Ce roman est historique en ce qu'il se situe au XVIIe siècle, au début du règne de Louis XIV, quand Mazarin et Anne d'Autriche (mère du roi et régente) font face à la Fronde, menée par des notables et des nobles. C'est des alliances et des renversements d'alliance. C'est la guerre et ses désolations, morts et blessés, pillages, spectre de la famine, chaos. La deuxième partie du roman se passe en Chine où la dynastie des Ming ploie sous les coups de boutoir des Mandchous conquérants, donnant lieu à des atrocités tout orientales, exécutions aveugles, villages brûlés, famines effroyables, villes et populations rayées de la carte (150 millions de mort, lit-on ailleurs). De ce point de vue historique, cet ouvrage est parfaitement documenté et fort intéressant.

L'histoire d'amour lie Madame de Clermont, épouse d'un noble qui s'oppose puis se rallie au pouvoir royal, et Monsieur de la Tour, neveu de Monsieur de Clermont, partisan de la Fronde, acteur et spectateur désabusé de la guerre et de ses horreurs. L'amour entre ces amants est aussi ardent, fulgurant que sans issue et, humilié par le spectacle involontaire d'une scène d'amour (on pourrait parler d'un viol) entre les époux légitimes, Monsieur de la Tour décide de partir au bout du monde. Il se retrouve au centre d'un lac, dans une habitation de fortune où demeure Lu Wei, lui aussi amoureux contrarié par le suicide de son épouse adorée et dont il se sent responsable. Les deux hommes s'enfoncent volontairement dans une sorte de néant absolu, ils se complaisent dans une expérience du vide, du détachement, de l'annulation de soi, du silence. Ils se pétrifient et restent immobiles treize mois jusqu'à devenir des spectres vivants. Cette ascèse et cette sorte d'extase sublimée par la douleur qu'élèvent la perte et l'absence de l'aimée, rapproche l'un de la foi chrétienne, l'autre du Vide, expérience mystique taoïste. Ils vivront ainsi reclus douze ans. Après la mort de Lu Wei, Monsieur de la Tour rentre en France et se retire dans l'abbaye janséniste de Port Royal, menacée par le pouvoir royal. Il y vit isolé, dans le dénuement le plus complet, et, s'il accepte de rencontrer Madame de Clermont sans la voir, il refuse de lui donner son cœur, accaparé par la religion.

Le lecteur, lui, est transporté par le style de l'ouvrage, recherche permanente d'effet littéraire, poésie fastueuse, colorée, flamboyante. On est souvent dans une quête philosophique de sens et de symboles, ou de vérités et de sentences. On est parfois dans la prière, dans l'incantation, dans les Écritures. Mais trop de panache, trop d'ostentation dans l'écriture tuent l'attrait qu'elle suscite et font perdre en saveur. Dans leur déroulement tout en virtuosité, les mots se montrent parfois vains, les comparaisons creuses, et les phrases vides de sens. L'écœurement guette.

Accro toutefois à ce beau livre, on attend le passage suivant…

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Port-Royal

Avec cet ouvrage somptueux, Laurence Plazenet nous livre les secrets de l'abbaye de Port-Royal. Quel bonheur ce fut pour moi de lire cette anthologie qui met enfin un terme à un contresens insupportable que nous inflige l'Éducation Nationale depuis des lustres (et que j'ai subi pendant ma scolarité de lycéen), et sachant que La Princesse de Montpensier est au programme du baccalauréat littéraire de la session 2019/2020, et que l'on se vautre dans les certitudes en affirmant que Madame de Lafayette était janséniste, j'ai l'impression que nous sommes loin d'en avoir fini avec cette imposture. Le jansénisme est un "épouvantail " inventé par les Jésuites qui avaient une grande influence à Versailles (le confesseur de Louis XIV était lui-même un jésuite), afin d'éclabousser d'oprobre les augustiniens de Port-Royal, qui menaient une vie ascétique en suivant les préceptes de l'Augustinus, l'ouvrage de Saint Augustin. L'ouvrage de Jansenius et ses interprétations furent galvaudées par les Jésuites afin de discréditer Port-Royal qui était le refuge d'anciens frondeurs, parmi lesquels se trouvait la cousine du roi, la duchesse de Longueville, elle-même une ancienne héroïne de cette période troublée. Ce livre est une mine d'or inestimable pour ceux qui veulent découvrir l'histoire des Solitaires de l'abbaye de Port-Royal. C'est également l'occasion de découvrir des figures emblématiques comme la mère Angélique dont plusieurs fragments de ses correspondances se trouvent dans ce livre. J'ai découvert cet ouvrage lors de mes investigations, lorsque je rédigeais mon mémoire sur Louis Racine, poète injustement oublié de nos jours, qui rend hommage aux augustiniens de Port-Royal dont il redore le blason dans ses deux poèmes, La Grâce, et La Religion. Car, en digne fils du père d'Athalie, Louis Racine a baigné dans la culture du monastère des Solitaires, et il a vécu de près la crise autour de la Grâce (le litige entre les augustiniens et les jésuites se concentrait autour de cette question que Pascal évoque dans Les Provinciales). Laurence Plazenet accomplit un travail remarquable et de qualité, c'est un réel plaisir de lire et relire cet opus magnum. La plume de l'auteur est si envoûtante qu'on ne voit même pas le temps passer: il m'arrive d'être si absorbé lorsque je lis cet ouvrage, que j'ai l'impression que le temps n'a plus la moindre emprise sur moi. Ce livre est un vrai trésor pour les historiens, car l'auteur remonte jusqu'aux prémices des fondements du monastère, pour nous faire ensuite découvrir son histoire pareille au destin d'une étoile filante.
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L'amour seul

Un roman totalement envoûtant, dès les premières pages. La relation amoureuse intense et douloureuse, la fusion des corps entre deux êtres qui vont passer de la séduction à l’amour, de la tentation à l’enfer de la possession.



Monsieur d’Albrecht devient veuf, il a un fils et une fille, une fille qu’il fuit car elle lui rappelle trop son épouse. C’est un homme « plein de morgue, très instruit, taciturne »

Mademoiselle d’Albrecht grandit, il est temps de lui trouver un maître à sa hauteur.

Son père lui donne un précepteur, Agustin Ramon y Cordoba.

Mademoiselle d’Albrecht devient une jeune fille instruite elle savait « le latin, le grec, l’hébreu, l’araméen. Elle avait aussi appris l’italien, l’espagnol et le portugais. »

Mais le diable de la tentation est entrée dans la maison car « Il la désira dans l’instant »

Le dangereux jeu de la séduction se poursuit.

« Ils lurent le Charmide, le Cratyle, et le Ménon, le Manuel d’Epictète deux fois, les Histoires d’Hérodote, Sapho , Maimonide, Anacréon (…) Catulle, Tibulle, la Cité de Dieu »



Elle progressait, son père y veillait, alors qu’ « elle pensait que toute la séduction qu’elle pourrait exercer viendrait de son esprit » c’est le corps qui parlât

Mais l’amant n’est pas un tendre « Il lui dit que l’amour était des fadaises de rêveur, que l’amour n’existe pas, qu’il n’y a que le frottement ahuri des sexes »

Pourtant « Elle lui appartenait, il la possédait »

Pour elle c’est la passion, une révélation, pour lui c’est la rage et la haine même s’il admire sa beauté.

Il y aura des départs avec une maigre consolation quand Monsieur de Ramon avoue « j’ai plus de tendresse pour vous que vous ne l’imaginez »

Il y aura la solitude de Mademoiselle d’Albrecht peuplée de lectures, d’apprentissage de la médecine. Elle établit une édition de Virgile car « Elle se demandait parfois si le chant IV de l’Enéide ne lui avait pas appris à aimer. »

Je vous invite à découvrir ce roman troublant, plein du feu de la passion et surtout rendu avec une langue somptueuse.



L’écriture m’a rappeler celle de Pascal Quignard dans Tous les matins du monde et les personnages de Laurence Plazenet ont un parenté avec Pascal et les Messieurs de Port Royal.

Un roman trop peu connu, sautez le pas !!
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La blessure et la soif

Incompréhensiblement oublié des prix littéraires de l’automne 2009, alors qu’il aurait pu prétendre aux plus hautes récompenses, autant, en tout cas, que certains des ouvrages qui ont alors été couronnés, La blessure et la soif, deuxième roman de Laurence Plazenet réédité aujourd’hui en collection de poche, est un livre impressionnant, à cause de ses plus de 500 pages, bien sûr, mais surtout par le caractère abrupt de son chapitre liminaire où se succèdent le dépeçage d’un cadavre, la syncope puis le suicide d’une femme définitivement brisée, une averse vagabonde aux allures de fin du monde. Pour peu qu’il s’accoutume au métal effilé de ces premières pages, le récit happe ensuite le lecteur et, comme un piège dont la morsure serait à la fois déchirante et salutaire, le maintient entièrement captif.



La suite de cette chronique sur Culturopoing !
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La blessure et la soif

Ce roman de Laurence PLAZENET est un puits de connaissances, on est impressionné par celles sur la Fronde, et sur la fin de la dynastie Ming, et l'invasion Mandchous, mais également par celles sur les pratiques religieuses du 17 ème siècle, sur les pratiques de méditation, sur les ermites chinois. L'amour passion, Dieu, et concentration intérieure qui atteint au vide, sont au cœur de ce gros roman. Une style riche pour donner de la profondeur dans l'expression des sentiments, dans la description de l'amour passion, de la beauté, de la sérénité d'esprit et de la croyance. L'alternance de moments d'extrême violence, la description de la guerre avec des chapitres courts, et d'intense quiétude, méditation avec des chapitres plus longs une écriture plus lente donne le rythme du roman. Le récit du voyage de Lisbonne à Goa est un grand moment de littérature, quelle richesse dans les descriptions! La rencontre de M de la Tour avec Lu Wei l'homme qui ne parle pas, n'a pas de nom, ni de langage, apporte de la quiétude, au personnage, ainsi qu'au lecteur. Il y a alors communion entre M. de la Tour et Lu Wei, ils sont victimes des mêmes maux, l'amour exclusif, et la guerre et sont en quelques l'incarnation de dieu l'un pour l'autre et vis-versa. Les descriptions de la beauté, de l'art de la calligraphie, de l'élaboration des pinceaux, de la passion, de la sagesse, de la sérénité, de l'amour (pages 498 à 502) sont merveilleuses. Une profusion de phrases remarquables
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Disproportion de l'homme

Critique de Laurent Nunez pour le Magazine Littéraire



Avec Disproportion de l'homme, Laurence Plazenet montre comment un homme, empli de l'idée de l'Amour pour combler le vide de sa vie, passe à côté de tout. Disons que c'est un roman d'amour, ou plutôt le récit d'une passion. Un récit qu'on croit d'abord très simple. «Simon aimait Élisabeth. Il épouse une autre femme. Il la quitte. Il se remarie. Puis, il revoit Élisabeth.» De ce schéma si ordinaire (le mari, la femme, la maîtresse), Laurence Plazenet tire sept chapitres obscurs et même mystiques : cent quarante pages de lyrisme religieux. Disproportion de l'homme épate à proportion de ce qu'il dit. On croyait tout savoir de la casuistique amoureuse, des mains qui se frôlent et des yeux qui s'évitent : l'écriture maniérée (ce n'est pas un reproche) de Laurence Plazenet les rejoue devant nous.

Le héros de son livre, Simon, est de ces monstres fous d'amour qui plaisent tant qu'on ne les côtoie pas. Il est marié, père de famille. Il a une bonne situation. Il écrit même quelques articles sur la musique classique. Mais, à chaque concert auquel il assiste, il glisse des boules de cire dans ses oreilles. Et s'il ôte le gant de sa main droite, il voit sur sa paume le visage de celle qu'il aime, et qui n'est pas sa femme. C'est Élisabeth, celle qu'il attend derrière chaque porte, celle qu'il entend dans chaque instrument ; celle qu'il essaie de recréer par la pensée, dans la rue et jusque dans le métro - la scène est l'une des grandes réussites du livre. «Simon a épousé le passé qui ne mourait pas. Il y débouche. Il est le Seigneur des choses [...]. C'est un miracle, une illumination. Il est joyeux. Dans un souterrain. Dans le noir. » Mais sa joie sera passagère : les amants se retrouvent, puis se quittent. Ils se revoient encore, puis se séparent - définitivement. Le récit avance ainsi, par sursauts et saccades, vers le gouffre non pas de la mort, mais de la survie loin de l'autre. Car ce n'est pas la fin du livre. Élisabeth est partie ; mais Simon demeure, agenouillé vainement devant celle qui ne l'accompagne pas. Mille phrases cisèlent la statue de l'absente : c'est très écrit, mais cela reste pur. «Je suis entièrement dévoré du même amour que je t'ai porté, jadis, sans t'en dire mot. Rien n'a changé ou varié en moi. Pourquoi tant de douleur seulement parce que, dans le jour, nous ne savons pas nous trouver ? Nous sommes, toi et moi, des époux de la nuit, des époux secrets. Nous nous retrouverons.» On songe parfois à Duras. On songe parfois à Racine. On songe aussi au Cantique des cantiques, pour la pudeur et la grâce des métaphores. Puis on se dit que Laurence Plazenet n'a guère besoin qu'on songe à tant de grandes oeuvres. Son livre existe : la preuve est qu'il se consume devant nous.

J'ai dit que c'était un roman d'amour? Non, je me trompais. C'est ce que Simon essaie de croire. Disproportion de l'homme est plutôt un livre sur l'errance et sur l'indécision, et sur la mauvaise foi. Un homme a presque 40 ans : il comprend soudain la laideur d'une vie parfaite et mesurée. Il ne songe qu'à en sortir. Laurence Plazenet lui fait rencontrer l'amour, mais ç'aurait pu être la foi ou la luxure : tout plutôt qu'une vie rangée comme une voiture dans un parking. (La scène existe dans le livre.) Le roman dès lors tient de Pascal, bien sûr, pour son titre et pour sa recherche de l'absolu, mais aussi de Valéry, qui notait : « L'homme est grand par ce qu'il cherche, et petit par ce qu'il trouve. » Le malheur de Simon vient qu'il obéit scrupuleusement à cette phrase, mais qu'il ne l'accepte pas ; et le récit se construit comme l'ensemble des mensonges que son personnage invente, afin que ce qu'il cherche ressemble un peu à ce qu'il trouve.

Initialement, Simon nous abuse : on s'était cru dans un roman d'amour, brutal et ciselé. On comprend lentement qu'on s'était fourvoyé, et que Simon lui-même se fourvoie : non qu'il n'aime pas Élisabeth, bien sûr ; plutôt qu'il aime l'Amour plus que cette femme. Elle-même s'en rend compte, et ses propos, lors de sa dernière rencontre avec Simon, achèvent de dessiller les yeux du lecteur : « Tu es lâche. Tu cherches des accommodements avec tout » ; « Tu as tout dévasté, bien plus que les menteurs ou les inconstants, parce que tu n'avais pas toujours menti, parce que, une heure, nous avons été accordés. C'est la plus noire des illuminations que nous pouvions redouter ». L'imposture est révélée. L'amour fou n'était qu'une folie qui portait le nom de l'amour : folie de croire que l'amour peut remplir une vie qui s'est vidée de sens depuis longtemps.

Le livre gagne soudain en profondeur : Simon devient ce faux mystique qui, fâché contre sa propre existence, idolâtre une femme afin de ne jamais vivre avec elle. Parce qu'inscrire l'amour à l'apogée, le simuler comme un absolu, cela sert à demeurer ridicule et lâche dans sa petite vie - quitte à racheter en secret la maison d'enfance de celle qu'on aime. Tout, plutôt que de plonger dans le présent. La mauvaise foi de Simon contamine doucement le récit et rend chaque épisode ambigu : il est coupable d'avoir tout exagéré, par peur des dimensions exactes.

L'audace de Laurence Plazenet, c'est d'avoir répercuté cette « disproportion » dans l'écriture de son récit, jusqu'à ce que le lecteur se rende compte que, dans cette description hyperbolique de l'amour, quelque chose ne va pas. La montagne semblait trop haute pour ne pas être en carton. « Derrière la porte, ils s'étaient mis nus et emboîtés aussitôt. Ils avaient défait le chagrin. Ils s'étaient donné leur fête de nuit et de grâce jointes. Ils avaient gémi. Elle était rentrée chez elle avant le matin. » On dira que c'est très bien écrit, presque trop, mais c'est cela aussi, la Disproportion de l'homme. Inscrire l'amour si haut qu'on ne peut plus le vivre exigeait de placer pareillement l'écriture à ce degré extrême où elle brille presque trop. Qu'on ne lui reproche pas, dès lors, cette brûlure qu'elle cause à nos yeux : c'est bien la preuve que nous avons, plus que Simon, les yeux ouverts.
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La blessure et la soif

J'ai abandonné à 400 pages... L'écriture ne m'a pas séduite. J'ai trouvé que c'était longuet très souvent. L'histoire d'amour gnan gnan . Bref, ça ne sera pas un bon souvenir.



J'ai abandonné à 400 pages... L'écriture ne m'a pas séduite. J'ai trouvé que c'était longuet très souvent. L'histoire d'amour gnan gnan . Bref, ça ne sera pas un bon souvenir.
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Disproportion de l'homme

La première moitié de ce court roman peut rebuter certains lecteurs par son style onirique mais on est récompensé d'avoir persévérer dans la seconde moitié. L'épisode où l'homme ressasse ses souvenirs dans la maison natale de son amour perdu est touchant.
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La blessure et la soif

La Fronde bouleverse la France. La dynastie des Ming, en Chine, meurt. Deux hommes, passionnément, aiment des femmes qu'ils tremblent de perdre. L'un est français, l'autre chinois. Dans le chaos, ils cherchent la vérité et la justice.



Des continents les séparent : M. de La Tour et Lu Wei ne devraient pas se rencontrer. L'amour fou. Dieu et le Vide vont avoir raison des continents entre eux. Pendant douze ans, deux hommes s'efforcent de briser l'absence qui les ronge. la privation, la ruine, les spectres du deuil. Ils leur opposent la fidélité, l'extase. Un jour, Lu Wei confie à M. de La Tour quelques sceaux qui sont tout ce qu'il a conservé de son univers. Les chemins les plus merveilleux sont des détours.



Port-Royal et Louis XIV attendent encore M. de La Tour. Une femme aussi.



Mon avis :



555 pages sur la Fronde et la fin de l'empire Ming, autant vous dire que l'auteure a bien délaillée son texte et ne nous épargne aucun fait historique.



De plus, pour parler de l'amour, j'ai trouvé son style empoulé et vain. A trop vouloir décrire, j'ai trouvé qu'elle se perdait dans des détails pour revenir, toujours, sur la vanité de l'existence.



Certe, j'aime quand les phrases ne sont pas trop longues, mais parfois, j'ai trouvé certaines tournures un peu lapidaires.



Ma conclusion : un roman qui aurait pu être beau s'il avait été plus ramassé sur lui-même.


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La blessure et la soif

Critique de Minh Tran Huy pour le Magazine Littéraire



Faire le pont entre la France de la Fronde et la Chine de la fin de la dynastie Ming à travers les itinéraires croisés de deux hommes qui vouent chacun un amour éperdu, et condamné, à une femme : tel est l’audacieux pari - réussi - de Laurence Plazenet, qui signe l’un des plus beaux romans de cette rentrée. Sitôt que M. de La Tour, frondeur, septième fils du duc de Montmorency, aperçoit Mme de Clermont, l’épouse d’un de ses parents, s’amorce une passion d’autant plus effrénée que chacun tente, de toutes ses forces, de la réfréner. Au-dehors, les alliances se renversent, les batailles se succèdent, la famine s’étend. Pour se défaire de ce qui le hante, le gentilhomme ira jusqu’en Chine partager la solitude et le silence de Lu Wei, mandarin que la mort de sa femme, la belle T’an Mei, et les horreurs d’un monde en proie au chaos (les troubles accompagnant la chute des Ming ont coûté la vie à quelque 150 millions de personnes) ont conduit à l’érémitisme.

Dans une langue à la fois recherchée et sensuelle, polie jusqu’à la préciosité et pourtant vibrante, l’auteur, par ailleurs universitaire et spécialiste de Port-Royal, donne corps et chair à des personnages qui ne dépareraient pas une tragédie racinienne ou un récit de Mme de La Fayette : « Mme de Clermont fait allégeance à Dieu qu’elle sait désormais ce que c’est que l’incendie du midi, et l’abandon, et la détresse absolue, l’amour et les passions. » Nourri d’un gigantesque travail de documen-tation qui permet de restituer la France et la Chine de l’époque jusque dans ses moindres détails, paysages, architecture, vêtements, artisanat, La Blessure et la Soif est également un très bel hommage, tant à des existences réelles (l’enfance et la blessure que reçoit M. de La Tour sont très proches de celles de La Rochefoucauld, dont Laurence Plazenet a justement édité les Maximes) qu’à un corpus littéraire où la Vie de Rancé voisine avec La Princesse de Clèves. Ces références multiples, et l’érudition dont elles témoignent, enrichissent le livre sans jamais l’alourdir, porté comme il l’est par un style extrêmement visuel, fourmillant de couleurs, de textures, de sensations, où l’emploi du présent ne fait qu’ajouter à l’impression d’immédiateté, de saisie d’une intrigue en mouvement. La Blessure et la Soif est un roman d’aventures au meilleur sens du terme, où les drames intimes se découpent avec éclat sur la toile de fond d’une Histoire effroyablement violente. Mais il tient tout autant d’un chant, d’une partition de Bach, avec ses adresses désespérées et sublimes qui viennent ponctuer le cours du récit proprement dit : le présent de l’action (au sens cinématographique du terme) le cède alors à un présent éternel, intemporel, celui de la prière - à une femme aussi bien qu’à Dieu, l’amour de la créature menant pour M. de La Tour à celui du Créateur, l’absolu de l’amour se renversant bientôt en amour de l’Absolu.

Le texte tout entier est construit sur ces binarités, qui se déclinent en reflets et symétries, et dans le fond, et dans la forme. Au Dieu de M. de La Tour répond le Vide que Lu Wei tâche d’atteindre et, à travers leur rencontre, deux civilisations se font face qui se rejoignent étrangement. Le parcours du premier - qui le mènera à Port-Royal et à la sainteté - fait écho, dans l’ascèse et le dépouillement de soi, à la recherche de la Voie et à la posture taoïste du second. Et lorsque le héros français décide de partir en Chine, c’est pour un détail profondément symbolique : l’instrument de la contemplation de soi par excellence, le miroir, n’y existe pas - on se contente de polir des morceaux de métal qui permettent d’entrapercevoir une image des plus vague. Le roman est bien sûr pourvu d’une structure en miroir (première partie en France, deuxième partie en Chine, troisième partie en France), et il n’est nul hasard dans le fait que le retour de M. de La Tour sur un rivage fui douze ans durant coïncide avec l’achèvement de la galerie des Glaces à Versailles, qui vient clore un ouvrage dont l’extrême cohérence ne fait jamais que rehausser l’émotion, tout aussi extrême, qu’il suscite.
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La blessure et la soif

Je dirais que ce livre manque d’élagage.Le début est super, l’ecriture très érudite, on est plongé facilement dans un contexte historique très bien décrit.

Beaucoup de simagrées pour une histoire d’amour. Oui, non, je veux mais non, moi aussi je veux bien mais non, finalement oui, bon moi aussi oui, puis non , bla-bla-bla.

Ensuite on part en Chine et là on affronte d’épouvantables horreurs, un catalogue qui n’en finit pas, une autre histoire d’amour , des tas de noms très chinois, et, pour ma part je me suis fort ennuyée.

Dommage, car c’est remarquablement écrit.
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La blessure et la soif

Je ne peux pas lire ce genre de truc. L'idée qu'il y ait des gens supérieurement supérieurs parce qu'ils ont un suuuuuperbe destin de naissance... oh et puis merde c'est nul
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Disproportion de l'homme

J'ai eu beaucoup de mal mais pour des raisons probablement personnelles, donc je ne saurais faire une bonne critique de ce livre qui est pourtant écrit d'une belle plume.
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La blessure et la soif

Dans une écriture convoquant la littérature d'époque mais aussi Quignard et Claudel, Laurence Plazenet réussit en effet un grand roman mystique sur la passion, fuyant les émotions et le spectaculaire trop faciles. A (re)découvrir.
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Disproportion de l'homme

Critique de Laurent Nunez pour le Magazine Littéraire



Avec Disproportion de l'homme, Laurence Plazenet montre comment un homme, empli de l'idée de l'Amour pour combler le vide de sa vie, passe à côté de tout. Disons que c'est un roman d'amour, ou plutôt le récit d'une passion. Un récit qu'on croit d'abord très simple. «Simon aimait Élisabeth. Il épouse une autre femme. Il la quitte. Il se remarie. Puis, il revoit Élisabeth.» De ce schéma si ordinaire (le mari, la femme, la maîtresse), Laurence Plazenet tire sept chapitres obscurs et même mystiques : cent quarante pages de lyrisme religieux. Disproportion de l'homme épate à proportion de ce qu'il dit. On croyait tout savoir de la casuistique amoureuse, des mains qui se frôlent et des yeux qui s'évitent : l'écriture maniérée (ce n'est pas un reproche) de Laurence Plazenet les rejoue devant nous.

Le héros de son livre, Simon, est de ces monstres fous d'amour qui plaisent tant qu'on ne les côtoie pas. Il est marié, père de famille. Il a une bonne situation. Il écrit même quelques articles sur la musique classique. Mais, à chaque concert auquel il assiste, il glisse des boules de cire dans ses oreilles. Et s'il ôte le gant de sa main droite, il voit sur sa paume le visage de celle qu'il aime, et qui n'est pas sa femme. C'est Élisabeth, celle qu'il attend derrière chaque porte, celle qu'il entend dans chaque instrument ; celle qu'il essaie de recréer par la pensée, dans la rue et jusque dans le métro - la scène est l'une des grandes réussites du livre. «Simon a épousé le passé qui ne mourait pas. Il y débouche. Il est le Seigneur des choses [...]. C'est un miracle, une illumination. Il est joyeux. Dans un souterrain. Dans le noir. » Mais sa joie sera passagère : les amants se retrouvent, puis se quittent. Ils se revoient encore, puis se séparent - définitivement. Le récit avance ainsi, par sursauts et saccades, vers le gouffre non pas de la mort, mais de la survie loin de l'autre. Car ce n'est pas la fin du livre. Élisabeth est partie ; mais Simon demeure, agenouillé vainement devant celle qui ne l'accompagne pas. Mille phrases cisèlent la statue de l'absente : c'est très écrit, mais cela reste pur. «Je suis entièrement dévoré du même amour que je t'ai porté, jadis, sans t'en dire mot. Rien n'a changé ou varié en moi. Pourquoi tant de douleur seulement parce que, dans le jour, nous ne savons pas nous trouver ? Nous sommes, toi et moi, des époux de la nuit, des époux secrets. Nous nous retrouverons.» On songe parfois à Duras. On songe parfois à Racine. On songe aussi au Cantique des cantiques, pour la pudeur et la grâce des métaphores. Puis on se dit que Laurence Plazenet n'a guère besoin qu'on songe à tant de grandes oeuvres. Son livre existe : la preuve est qu'il se consume devant nous.

J'ai dit que c'était un roman d'amour? Non, je me trompais. C'est ce que Simon essaie de croire. Disproportion de l'homme est plutôt un livre sur l'errance et sur l'indécision, et sur la mauvaise foi. Un homme a presque 40 ans : il comprend soudain la laideur d'une vie parfaite et mesurée. Il ne songe qu'à en sortir. Laurence Plazenet lui fait rencontrer l'amour, mais ç'aurait pu être la foi ou la luxure : tout plutôt qu'une vie rangée comme une voiture dans un parking. (La scène existe dans le livre.) Le roman dès lors tient de Pascal, bien sûr, pour son titre et pour sa recherche de l'absolu, mais aussi de Valéry, qui notait : « L'homme est grand par ce qu'il cherche, et petit par ce qu'il trouve. » Le malheur de Simon vient qu'il obéit scrupuleusement à cette phrase, mais qu'il ne l'accepte pas ; et le récit se construit comme l'ensemble des mensonges que son personnage invente, afin que ce qu'il cherche ressemble un peu à ce qu'il trouve.

Initialement, Simon nous abuse : on s'était cru dans un roman d'amour, brutal et ciselé. On comprend lentement qu'on s'était fourvoyé, et que Simon lui-même se fourvoie : non qu'il n'aime pas Élisabeth, bien sûr ; plutôt qu'il aime l'Amour plus que cette femme. Elle-même s'en rend compte, et ses propos, lors de sa dernière rencontre avec Simon, achèvent de dessiller les yeux du lecteur : « Tu es lâche. Tu cherches des accommodements avec tout » ; « Tu as tout dévasté, bien plus que les menteurs ou les inconstants, parce que tu n'avais pas toujours menti, parce que, une heure, nous avons été accordés. C'est la plus noire des illuminations que nous pouvions redouter ». L'imposture est révélée. L'amour fou n'était qu'une folie qui portait le nom de l'amour : folie de croire que l'amour peut remplir une vie qui s'est vidée de sens depuis longtemps.

Le livre gagne soudain en profondeur : Simon devient ce faux mystique qui, fâché contre sa propre existence, idolâtre une femme afin de ne jamais vivre avec elle. Parce qu'inscrire l'amour à l'apogée, le simuler comme un absolu, cela sert à demeurer ridicule et lâche dans sa petite vie - quitte à racheter en secret la maison d'enfance de celle qu'on aime. Tout, plutôt que de plonger dans le présent. La mauvaise foi de Simon contamine doucement le récit et rend chaque épisode ambigu : il est coupable d'avoir tout exagéré, par peur des dimensions exactes.

L'audace de Laurence Plazenet, c'est d'avoir répercuté cette « disproportion » dans l'écriture de son récit, jusqu'à ce que le lecteur se rende compte que, dans cette description hyperbolique de l'amour, quelque chose ne va pas. La montagne semblait trop haute pour ne pas être en carton. « Derrière la porte, ils s'étaient mis nus et emboîtés aussitôt. Ils avaient défait le chagrin. Ils s'étaient donné leur fête de nuit et de grâce jointes. Ils avaient gémi. Elle était rentrée chez elle avant le matin. » On dira que c'est très bien écrit, presque trop, mais c'est cela aussi, la Disproportion de l'homme. Inscrire l'amour si haut qu'on ne peut plus le vivre exigeait de placer pareillement l'écriture à ce degré extrême où elle brille presque trop. Qu'on ne lui reproche pas, dès lors, cette brûlure qu'elle cause à nos yeux : c'est bien la preuve que nous avons, plus que Simon, les yeux ouverts.
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