Citations de Louis-Henri de La Rochefoucauld (100)
Qui est le vieux garçon ? Un troisième sexe. Rien à voir avec les théories du genre, ce fatras ennuyeux pour harpies vindicatives et camionneurs repentants…
Non : le vieux garçon n’est ni homme ni femme, il ne chasse à courre ni les hommes ni les femmes – ni les honneurs. Il aime les feux de cheminée, les couchers de soleil, les chaussettes montantes, l’humour anglais et les vestes d’intérieur. La littérature, aussi. Et la contemplation.
(A propos du jockey-club) Pour être reçu dans ce club réservé aux hommes que Proust en personne tenait pour le plus fermé du monde, il fallait être parrainé par deux membres. Une campagne commençait jusqu’au ballotage, stressant : une boule noire annulait plusieurs boules blanches – d’où la charmante expression se faire blackbouler.
Des marques de l’âge qui n’altéraient en rien sa prestance. Quand on le voyait entrer dans une pièce, on imaginait des centaines d’hectares derrière lui.
Cet homme était une boule de nerfs. Avec un tigre dans le moteur. Son ombre peinait à la suivre.
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- Comme tu le sais, François, la passion de ma vie a été la France libre.
- La France libre ?
- Oui, la France libre dans son acception la plus large. La France libre d’hier et celle qui reviendra, je l’espère, un jour… Car nous sommes occupés, François. Tu ne t’en rends peut-être pas encore compte, tu es trop jeune, mais moi, ça me préoccupe : ce pays est contaminé par la médiocrité. Notamment celle des politiciens médiatiques, toute cette roture affublée de l’hermine. Ils sont mignons ces ouistitis, à se revendiquer sans cesse de notre héritage, à mes Compagnons et moi… Leur lavage de cerveau ne prendra pas sur les vieux singes comme nous, encore moins sur le grand babouin que je suis ! Comme si on ne voyait pas clair dans leurs mensonges, leurs palinodies, leurs finasseries. On dit qu’ils ont la langue de bois ? Pas que la langue, François. Tout le reste. Toutes les parties du corps sans exception. Le buste et les membres. Les tibias en bois. Les rotules en bois. Les cheveux en bois, les mèches et les tonsures. Et leurs ongles manucurés. Et puis les rides, les gestes, les appels du pied, les alliances, les soumissions, les trahisons : tout chez eux est en bois. Quand les températures deviennent rudes certains hivers, je m’en servirais volontiers pour ma cheminée.
(Sur la page de garde d’une brochure de l’ordre des Chartreux)
Vous n’y trouverez rien ou peu de chose de ce que le monde actuel apprécie, pas même le souci d’être différent.
En entendant ce mot de "pur-sang", j'ai repensé à ma grand-mère, la vieille bique de sang-mêlé, et me suis mis à imaginer... Le président, qui bien entendu était duc, voulait-il dire qu'il avait un élevage de duc ? Qu'il y organisait saillies et croisements ? Afin d'avoir des ducs de course ? Des ducs de compétition ?
les chaines du mariage sont si lourdes qu'il faut être deux pour les porter. Quelquefois trois.
Monsieur Précieux, né André Durand en 1953, "Dédé" pour ses parents, était une incarnation particulièrement réjouissante de cette éternelle figure du gendelettre bouffi de lui-même qui hante le milieu littéraire faute d'être habité par la littérature.
En prime et pour finir, ma grand-mère me passant tout depuis que j'étais chez elle, j'avais obtenu de faire mettre cette plaque dorée sur la porte d'entrée : LE CLUB DES VIEUX GARÇONS - Vous qui entrez ici, retrouvez toute l'espérance.
Il est normal que je ne sois plus de de première fraîcheur, vu que nous datons du Paléolithique inférieur.
Les gens de votre génération nous ont gonflés avec leur libération sexuelle, déjà : elle n'est qu'un leurre. Il ne fait pas prendre des vessies pour des lanternes. Les libertins du XVIIIe siècle étaient des gens désintéressés. Ils ne pensaient pas toute la journée à leur porte-monnaie. Vous n'avez pas été des libertins, vous, les soixante-huitards : vous n'avez été que des petits-bourgeois pour qui l'ascension sociale est passée par l'entassement de partenaires, de divorces, de retournements de veston, de cash et de lingots...
Nombreux furent les fous rires et les quiproquos qui émaillèrent nos journées, comme le jour où Félicité proposa une partie de sept familles, et où ma grand-mère s'indigna de ne pas trouver les Rupignac dans le jeu de cartes.
Différemment désabusés, nous aspirions tous les deux, à l'anarchie- une anarchie qui restait à définir.
Ce mot usé était à réinventer. Nous ne voulions pas d'une anarchie anarchiste, d'une anarchie anarchique, chiquée, d'une anarchie classique et scolaire. Nous la voulions neuve, ambiguë, déconcertante, déconnectée de toute idéologie. En un mot : artistique.
A mes sourcils froncés, elle comprit d'emblée qu'elle n'allait pas s'amuser tous les jours. Que je serais un ronchon. En même temps elle ne pouvait s'en prendre qu'à elle-même : comment aurait-elle pu avoir un bébé dans le coup, elle qui était comtesse ? Les Rupignac étant l'une des plus vieilles familles de France, il était normal que je sois dès ma naissance un bébé démodé, un antimoderne, un croûton dans la malle...
Je sais bien que tout couple est une association de névroses, mais ma folie douce est trop folle pour se fondre dans une autre. Je n'y crois pas, aux rencontres amoureuses.
-Tu vas vraiment pas te marier, Charles-Henri ?
-Non. Ce n'est pas ma priorité. Ermite des villes ou ermite des champs, moine mondain ou moine soldat, appelez ça comme vous voulez : toujours est-il que je suis un solitaire, un anarchiste radical - un type incapable d'être en couple.
Mais j'ai un tas de pognon qui lambine à la banque, et il m'a toujours paru absurde et bourgeois de mourir sans être à découvert.
La modernité ne proposait plus au cheptel humain qu'une alternance de travail et de loisirs en batterie - un même esclavagisme.
Je m'explique : les malades d'Alzheimer qui vacillent dans leurs vieux délires, ce monde perdu, ces mystères de l'Ouest, c'était autre chose que la triste réalité de l'Est parisien, tous ces branchés collet monté qui ne pensaient qu'à se regarder dans le miroir, miroir mon beau miroir, faire leur footing, footing mon beau foouting, et se rendre le dimanche à des brunchs, brunchs nos beaux brunchs, où ils parlaient de leur nouveau tatouage bio, de "propositions de cinéma", de folk équitable et du départ imminent de leur super chouette colocataire à Berlin, la belle Berlin.