Lucie Delacroix

Et évidemment, on finit par en manger avec du nutella en dessert.
C’est un régal, ce n’est pas bon pour la ligne ni pour la planète, mais c’est excellent pour le moral.

Lorsqu’elle repart, je me sent rassasié, vidé, et à peine coupable. Cela faisait des années que je n’avais pas ressenti un tel désir, une telle excitation. Je me suis laissé tenter par l’interdit, ou l’inconnu peut-être. Malgré ma conscience me persuader que c’est une mauvaise idée, j’ai déjà envie de recommencer.

Je suis le chef de famille, je suis leur pilier. Je suis celui qui rassure, qui aime,
qui répare les jouets et les cœurs blessés, soigne les petits bobos par des bisous
magiques. Mais aucun baiser, aucune parole, n’aura assez de poids pour les
réconforter.

Ça y est après des mois de réflexion pour élaborer un stratagème qui tienne la route, elle était là. Il ne voyait pas encore ce qu’il allait faire, mais au moins il l’avait sous le coude, c’était une bonne chose. Seulement, elle s’avérait être une personne très agréable, travailleuse, généreuse et plutôt jolie, ça ne lui faciliterait pas la tâche. Mais il ne fallait pas qu’il se laisse attendrir. Il avait réussi à la faire venir jusqu’ici, il arriverait bien à aller jusqu’au bout de son idée. Il n’avait plus qu’à attendre qu’Elle le rejoigne, et il pourrait continuer son plan.

-) Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne, je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends. J'irai par la forêt, j'irai par la montagne. Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.

-) Et plus que tout, nous sommes profondément convaincus que le bonheur est précieux. Nous avons eu la preuve que tout peut basculer d'une minute à l'autre, et que ça n'arrive pas qu'aux autres. Alors nous allons savourer tous les instants de joie que la vie nous offrira. Profiter des gens qu'on aime et leur dire qu'on les aime, avant qu'il ne
soit trop tard. La vie est trop courte pour être gâchée, alors vivons-la pleinement.

J’adorais sa spontanéité, son enthousiasme, sa joie de vivre permanente. Je m’extasiais devant ses yeux, m’enivrais de ses baisers, tantôt doux, tantôt fougueux. J’étais folle de lui.

Le malheur frappe tout le monde. On croit être à l'abri en étant heureux, mais c'est faux. Un jour, quelqu'un là-haut doit décider que notre jauge de bonheur est trop haute, et le ciel nous tombe sur la tête.

Notre jeunesse, c'est ce qui nous a poussé à mettre un terme à notre relation. Pour garder exactement ces souvenirs de nous, et ne pas risquer de les gâcher en laissant la routine et l'usure du temps s'installer. Mais dix ans après, j' ai toujours ce sentiment de ne pas être allé au bout de notre histoire. Finalement, ce n'est le temps qui a tout gâché, c'est nous.

Qu’est-ce que j’espère au fond ? Que je vais l’appeler, qu’il va me dire qu’il m’attend depuis dix ans, qu’on va reprendre notre relation là où on l’avait laissée ? Je sais très bien que ce n’est pas possible. On a grandi, on a changé, on a perdu l’insouciance de nos vingt ans

« Je lui avais promis à l’époque que je serais toujours là pour lui, et je tiens toujours mes promesses »

Je me sens blêmir, je n'ai jamais voulu tuer personne. Je voulais juste défendre mon épouse. Je ne suis pas un assassin, je ne veux pas qu'on me prenne pour un criminel, ni qu'on me traite comme tel.

J’ai espéré sa visite depuis des mois, je l’ai attendue, priée presque. Finalement, même si j’avais fini par désespérer de la retrouver un jour, j’avais raison d’y croire.

Nous nous sommes mariés pour le meilleur et pour le pire. Le pire, nous sommes en train de le vivre.

Mais dans ses bras, je me sentais vivante, dans ses yeux, je me sentais belle, et avec lui, je me moquais éperdument du regard des gens. Une autre forme du bonheur.

Dix ans, ce n'est pas assez long pour oublier? Pour certains très certainement. Pas pour moi. Et dix années supplémentaires n'auraient probablement rien changé.