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Citations de Marie-Claire Bancquart (202)


COMMENT VIVRE DANS UNE MAISON SANS JARDIN…


Dehors, l’humus est tiède.

Douce nourriture
douce couverture
pour bêtes et graines,
l’humus
plein de germes
préparant
sous la protection du puant, de l’opaque,
un éclat de couleurs et parfums nuancés.

Il bouge doucement sur place
il déborde de vies

l’humus invite
à la caresse

il fourmille

il travaille en secret
pour nos cendres futures
qu’il recevra au nombre
de ses futures fleurs.


Une rien du tout, une pas grand-chose
cette miette d’éternité
cette seconde
où nos mains se rejoignent
chaque soir pour souhaiter bonsoir...
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COMMENT VIVRE DANS UNE MAISON SANS JARDIN…


Comment vivre dans une maison sans jardin, sans amour, repliée sur toi, malheureuse ?

— Allume une lampe rouge
fais le compte de tes amis.

Tente de transporter chez toi une petite divinité agraire qui prendra la forme du pain.

Une assiette, un peu de lune,
tu vas les installer ensemble sur la table.

Ainsi la maison sera douce à ton cœur.
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IL Y A DU JEU…


Il y a du jeu
dans l’être d’une femme
qui caresse un livre mince
et pense à l’incertitude de la vie
tout en surveillant au miroir
la bonne tenue de son rouge à lèvres.
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Perpetua


Extrait 1

  Un jour, il trouva ouverte l'église « Domine quo vadis ». Il entra, et fit la rencontre d'un jeune clerc romain parlant français. Ce garçon avait à peu près son âge. Hugues lui parla avec passion des tombes de la Via Appia. « Oui, dit Francesco, nous en avons pénétré quelques-unes sans le vouloir, par exemple lors des travaux de la forteresse Caetani. Ces tombes ont la réputation d'abriter des esprits impurs. On les comble aussi vite que possible. Mais il y a peu d'années, des ouvriers ont trouvé un tombeau de pierre dont le couvercle était à moitié soulevé, et laissait voir le visage intact d'une jeune fille. Ils n'ont pas pu s'empêcher de découvrir tout à fait la tombe. Le cadavre, recouvert d'un léger voile, était intact, et la jeune fille apparaissait plus belle que la plus belle des vivantes. Elle avait le rose aux joues. On l'aurait dit prête à se réveiller. La nouvelle s'est vite répandue. Du monde, toujours plus nombreux, et venu admirer la merveille, jusqu'au point d'alarmer notre Saint-Père. Il a voulu voir la belle morte, lui aussi. Puis il a ordonné qu'on la referme dans sa tombe. Car il pensait que son état de conservation était sorcellerie, et qu'elle pouvait maléficier ceux qui l'admiraient.
[...] »
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Un tremble
c'est le nom
du peuplier blanc : luisance furtive.

Éclair des feuilles

leur vie scintille

instant après instant
elles chuchotent
que nous avons aussi des momentss miroitants
minuscules, étincelantes traces de nous sur le monde.
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MER ANCIENNE


Bruyères
à l’automne des montagnes

au printemps, c’est de nouveau leur étendue mauve.

Toison caressable toute l’année, comme celle d’un ventre.

Sol sourd aux pas, on avance, s’agenouille, rafraîchit sa joue,
on voudrait que toutes les fleurs se distillent en liqueur qu’on boirait,
 magique,
descendant jusqu’à des coquillages enfouis,

une mer ancienne,
sur laquelle on dériverait, bouche sur le sein caché depuis des millénaires.
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CUISINE ET L'AMOUREUSE


Émince le quotidien
Moule sa patience à l'humilité des heures
Réduit sans fin vers le tacite et vers l'obscur ?

— N'y croyez pas
L'éclatante se rit des jours

Cuisine en mage
Frôle sans arrêt le futur

Cassant un œuf
Ouvre la perfection aux aventures
Pelant un fruit
Livre sa couleur à toutes les floraisons du soleil

Viande elle tient le clandestin royaume d'effraction
Vin la vigne et l'arable

Maîtresse doublement
Par les philtres servis aux deux pentes du jour
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Mes os


Ils ont de beaux restes, mes os

déjà sciés c’est vrai
déjà
ravaudés
ils restent courageusement
Ils tiennent
la chair, la peau, par-dessus eux.

Leur troupe, je l’emmène
et m’emmène avec elle
(vieille impression : ne pas en être tout à fait)
devant des vitrines de musées, section préhistoire
où, parmi des cailloux prétendument taillés, des flèches,
se montrent des fémurs à fractures visibles
mais recollées.

Comme quoi, dans dix mille et des ans,
mes chers os maintenant sur le macadam, vous pourrez figurer
dans des expositions montées après un labeur fou
près de canettes à bière et de mitraillettes,

tout ce fourbi qui
dans ma vie
m’aura fourbue.

p.12
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ISIS TOUJOURS

Feudataire des riens


Sur le C de cerise
le calligraphe
traque l'énigme universelle.

Un oiseau
pour se donner accès libre aux nuages
s'envole du fruit.
Se couvrant
d'un rouge absolu
la cerise éclate en lumière.

Sa rondeur charnue
gonfle le cœur du calligraphe.

À la fin il se voue au rêve
s'envole l'oiseau
devient cerise.

À peine esquissée
sa lettre s'échappe
de son côté
laissant la page
seule
avec sa question.

p.82
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VILLE, ET TOI

MÉLODIE TRÈS ÂPRE


Le dormeur dévale
une pente incertaine
et tombe
sur
ses propres cendres.

De quoi salir un peu sa manche.

Il se réveille, marche, oublie son cauchemar.

Dans une cour d'anciens ateliers
le petit jour résonne avec ses pas.
Le temps s'ouvre en arrière
vers un imprimeur de livres grecs qui savait lire
seulement
leur alphabet

mais l'anarchie, son avenir de révolte, il y croyait,
son triomphe, il le prédisait en éveil et en rêve,

moins perdu que nous, dans la même ville
parcourue de même
en préface de la journée
d'un vague bruit maritime : voitures, trains.

Et nous incertains,
            la faute au siècle, la faute à pas de chance,
                                     la faute
                                          à
                                          quoi ?

— N'empêche : le matin, on le célèbre malgré tout.

p.51-52
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VILLE, ET TOI

MÉLODIE TRÈS ÂPRE


Entendre
psalmodier la ville.

Mélodie très âpre
qui exige
qui hurle
avec éclairs de joie.

Vient le vent
qui balaie le bruit.

Il sent le chien mouillé
parce qu'il a suivi tous les convois d'âmes mortes.

Ses aboiements
célèbrent une sorte d'innocence
issue de l'égarement général.

p.47
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VILLE, ET TOI


En replantant des ellébores
je te parle
de nourrir le cosmos :
rien que cela

une cuillerée de terre
pour la racine encore visible

une cuillerée
pour achever d’emplir le pot

une
pour le globe tout entier

la dernière
pour sa verticale vers l’énigme.

p.63
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VILLE, ET TOI


Je voudrais pouvoir palper tes notes
dans une caverne sans lumière, sans reflets
où deviendrait sensible
le grain de leur chair

je voudrais pouvoir
confondre cette chair avec la mienne
la faire entrer comme
en inversion
d’un accouchement

dans mon corps

dans
une réelle peau du son,

dans tout l’impossible.

p.63
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POUR LE PROFOND DU CORPS


Une lettre de rejet
un regard simplement qui blesse
alors le temps
devient du temps
pierre lourde
que nous essayons d'arracher à notre corps
depuis le fond des mots.

p.38
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AINSI CE PAYSAGE


Dans la solitude d'un jardin
ou d'une forêt en métamorphose automnale
le corps
épanouit
son dedans
qui se tient
comme doigts d'une main.

Il bat et rebat pour nous seuls.

Chaque oiseau, chaque écureuil des arbres
possède son dedans
qui bat pour lui
uniquement

liaison-déliaison du monde

on voudrait pouvoir habiter ailleurs, dans une attache universelle

mais
de naissance, de chair,
cela nous fut
refusé
à nous tous.

p.27
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AINSI CE PAYSAGE


Si noire
qu'elle a
des reflets rouges
la terre.

C'est le soir

un coucher de soleil
a regardé sans l'éblouir
le regard
d'un animal

qui ne refuse pas ensuite
juste avant la nuit
l'émanation rousse des collines.

Il hume sa propre couleur profonde

possède un empire
perdu par les hommes
qui ferment leurs volets
sur l'éclat méconnu du sombre.

p.26
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VIVRE N'EST JAMAIS PAUVRE


Comme si
dans un trou du temps
s'établissait un silence
qu'on pourrait saisir en pleine ville

en plein
dans sa gare sifflante, son marché.

On se transporterait aux confins de la mémoire :
forêt du très jadis
sommeil d'apaisement près d'un canal désaffecté.

Les mots se déshabilleraient de leur sens
ils deviendraient
une saveur sur langue
l'informulé de notre corps profond.

Comme si
dans un trou de temps
nous entendions
presque inaudible
une confidence
sur le pourquoi de notre vie.

p.93
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VIVRE N'EST JAMAIS PAUVRE


L'oiseau
n'a rien à offrir que sa voix
en très haut lieu, sur une branche

sous plumes chaudes bat son cœur

mais l'arbre
pensons-nous à son aubier pulpeux, caché sous l'écorce ?

Au milieu des affiches, sur le boulevard crissant, hurlant,
les platanes ont chair

ils ouvrent
leurs doigts de feuilles

quand une grande pluie vient sur la ville
alors le bruit des voitures se tait
nous respirons les odeurs fortes de dessous l'écorce
et l'oiseau
célèbre
leur magnificence.

p.87
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C'est en travaux


Entre le blanc de lune et celui de la mer
dormeur, il se faufile encore
avec rêves laiteux :
pain, visage, neige sur montagne.

Au réveil il regarde ses mains pâles.
Il soupire.

Il n'a pas mérité
d'être le candidat de l'aube
ni de la fleur de cerisier.

Il vivra un jour comme un autre.

p.114
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Ce tremblé
va loin
sur la mer

effet de la lumière ?
troupe immense d'oiseaux en fuite ?

Contre le doute
on pose
tout près de soi
la potée de fleurs orange

l'ici et maintenant
arrête le regard.

p.16
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