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Citations de Marie-Claire Bancquart (202)


Dans sa bibliothèque silencieuse
un vieil homme prend un livre
glisse sa main entre les pages

caresse
comme ferait un aveugle
le très léger relief des caractères sur les feuilles

Délices du toucher , que va tuer la numérisation.

Un vieil homme semblable à lui
déroulait doucement un rouleau, voici des siècles.

Il déplorait la brutalité rectangulaire
de ce nouveau venu: le livre.
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Marie-Claire Bancquart
Oui, un poète
a le monde entier sur les bras

sa parole
parfois
capture une plume un nuage

annonce parfois
très doucement
que le Golem ne viendra pas ce soir
qu'une guerre parmi cent autres
a pris fin dans le monde

...et parfois
sur la partition des nuits
le poète déchiffre
un sommeil proche du bonheur.
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VIEILLESSE


Les douceurs, les rencontres
ne s’offrent plus à emporter (take away)

où serait-ce ? et pour quel petit temps ?

Mais, pour qui a souvent parcouru des espaces impitoyables,
plus belles les noces,
soleil, amitié, vignes,
à consommer sur place.
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Aimer, c’est, à travers le corps,
rencontrer l’âme ; c’est aussi
par les sentiers de l’âme aller
à la découverte du corps.
Aimer, c’est mêler l’âme au corps,
le corps à l’âme, c’est encor
du bout des doigts au fond de l’être,
toucher, sentir et reconnaître
avec la chair, avec l’esprit
sans deviner lequel est pris
et lequel prend, sans pouvoir dire
qui se réveille et qui s’endort
lequel commence, où finit l’autre,
quel est le vif, quel est le mort.

LILIANE WOUTERS
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LE DEDANS DE QUELQU’UN

j’ai caressé tout ce qu’il faut de vie
de bêtes moqueuses et de peau douce
mais comment bouger
si la nuit le dedans de quelqu’un
vient ver nous

je dis le dedans de quelqu’un sans savoir
à partir de quel muscle ou ligament
si c’est une ligne d’horizon dans le cerveau
ou nœud dans la gorge
sans savoir si c’est tendre
lové sur un oui dans la poitrine
ou si c’est vaste herbe avec un nom oublié

NICOLE BROSSARD
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L'AUTRE

« Je est un autre. » Arthur R.

À force de m’écrire
Je me découvre un peu
Je recherche l’Autre

J’aperçois au loin
La femme que j’ai été
Je discerne ses gestes
Je glisse sur ses défauts
Je pénètre à l’intérieur
D’une conscience évanouie
J’explore son regard
Comme ses nuits

Je dépiste et dénude un ciel
Sans réponse et sans voix
Je parcours d’autres domaines
J’invente mon langage
Et m’évade en Poésie

Retombée sur ma Terre
J’y répète à voix basse
Inventions et souvenirs

À force de m’écrire
Je me découvre un peu
Et je retrouve l’Autre.

ANDRÉE CHEDID
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Est-ce la terre qui s’éloigne
Où l’horizon qui se rapproche
On ne saurait jamais dans ces grandes distances
Tenir la mesure
De ce qu’on perd ou de ce qu’on gagne


ANNE PERRIER - La Voie nomade et autres poèmes
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Une traversée de tendresse
près d'un autre corps

une amitié secrète
pour la phrase d'un inconnu

un sourire.

Coups de bonheur.

Marques heureuses

sur la peau de la vie.
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Marie-Claire Bancquart
Je ne suis plus qu'herbes dans pré
sans mémoire ni science
où glisse l'être, heureux à peine
d'errer, d'écrire un rêve.

" La paix saignée "
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Perpetua


Extrait 2

  Hugues se leva pour examiner l'ensemble, qu'éclairait un soleil doux.
  Les deux petites plaques étaient en effet sculptées de pampres, qui se répartissaient autour de deux figurations: un berger qui tenait un agneau sur son cou, et un grand oiseau battant des ailes au-dessus d'un bûcher, image dans laquelle Hugues reconnut l'oiseau Phénix en résurrection, que ses études de mythologie lui avaient rendu familier. Quant à la grande plaque, elle représentait toutes sortes d'animaux, du lion au lièvre, de l'insecte à l'oiseau groupés en bonne intelligence autour d'un personnage qui jouait de la flûte: Orphée, sans aucun doute.
  Un tombeau. Un tombeau dont il ne possédait pas la plaque antérieure, où se trouve gravé le nom du défunt ou de la défunte. Les trois plaques, malgré leurs éraflures, n'en constituaient pas moins un trésor. Hugues les fit transporter dans sa chambre, et, grâce à des supports de bois, les établit dans leur position d'origine, les deux petites plaques perpendiculaires à la grande, à chaque extrémité de celle-ci. Chaque soir, il caressait le marbre, en détaillait les sculptures, ne se lassant pas de voir Orphée parmi son entourage d'animaux charmés, ou le fier oiseau Phénix, ou la scène idyllique du berger qui foulait un sol fleuri.
  Un tombeau si riche, superbement sculpté, à qui pouvait-il avoir été destiné ? Hugues n'avait pas de doute à ce sujet: à une belle morte, à la belle morte [...] Sans doute la morte avait-elle disparu, à la différence de celle de la Via Appia. Quelques ossements peut-être étaient restés dans l'argile qui avait pénétré et brisé le tombeau. Mais Hugues l'imaginait comme si elle s'était depuis peu endormie pour toujours: le sang circulait sous sa peau fine, elle souriait légèrement, ses lèvres appelaient le baiser d'un amant que jamais elle n'avait eu, qu'elle attendait... Hugues lui-même, enfin venu. Il vivait dans la douceur d'une idylle païenne, dans un « coup de lune » perpétuel.
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Marie-Claire Bancquart
EN ANGLETERRE


En Angleterre restent    les restes d'un grand mur triste
vieux de deux mille ans.

Ici les Romains ont arrêté leur avance
ils l'ont édifié, contre les invincibles Barbares au corps peint.

On hésite    Le gris confond
ciel et terre.

Les pierres sont
presque indiscernables.

Mais on les touche

et le cœur a mal
d'autres murs    plus récents    à travers le monde.

Nulle part on ne sentirait aussi fort
qu'il fait
partout
violemment antihomme parmi les hommes.
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« tous les liens sont cliquables. »

Je reçois cette information de mon ordinateur,
et le temps
soudain
me paraît touchable et fragile.

Ces mots n’auraient eu aucun sens quand j’étais jeune.

Mais, d’un âge assez mûr pour les rechercher dans
un livre, je sais que ces mots très jeunes vont vite
s’expliquer….
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Beaux délices dissimulés
comme lécher le sucre d’un biscuit
gratter de l’ongle un savon odorant
lire un poème
par hasard
dans une revue ouverte en catimini.

On prend revanche, si mince soit-elle,
de tant de mauvaises minutes
qui nous ont menacés, détournés,

revanche qui nous lie d’un élan partagé
avec les conquérants et les grands séducteurs.
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Quand la respiration difficile du réveil
aura cessé de m’agacer,
quand j’aurai vécu ma dernière nuit de femme,
je plongerai dans l’univers multiple,
j’intégrerai telle espèce animale, telle herbe,
puis telle autre.

Puis ce sera la disparition dernière du vivant.

Cher sire aimé, nous n’irons plus vers la douceur de vivre,
mais vers l’incertitude.
Des chercheurs, des savants, exhiberont quelques
fragments de nous

Et puis, et puis, ces fragments eux-mêmes auront disparu.

Des millions d’années ensuite, quelqu’un se demandera
si la vie avait existé vraiment, sur cette planète désormais
inatteignable
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Syntaxe difficile de ce monde
avec toutes les actualités de l’habitude,
incendies, attentats, tornades,
exilés, offensés, meurtriers éclatants.

Tout va comme si la terre profonde
se révoltait contre l’idée d’un dieu singulier ou pluriel

comme si
la terre
haletait d’impuissance

un très, très peu d’amour
mendie et rôde
surpris
de sa propre survie.
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Petit bruit, pluie.

Cavalerie fourmi
chuchote à minces pattes avec les feuilles.

L’après-midi n’est pas augurale
mais pareille à tant d’autres.

Nous aimons sa simplicité.

Dans les vitres s’inscrivent nos visages
un peu flous
comme si nous voulions dérober le paysage
et le transporter pour toujours dans notre maison.

Il nous laisserait vivre en lui, sans histoire.

Nous serions des stratèges en gouttes et brindilles,

nous préserverions une paix
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TOI, L’HERBE…


Toi, l’herbe
toi ligneuse, tête lourde de graines,
que le hasard a fait germer en pot sur un balcon,
je te merveille, je t’espérance

tu sauvage
tu
secrète
tu parles d’une grande terre semée de toi

sur elle je caresse ma figure civilisée,
mes livres verticaux,
l’espace tout entier : sa vieille histoire, sa fatigue.

Nous nous faisons une origine
dans l’odeur de ta sève.

Babel n’est pas encore construite
et nous non plus.

Ce sont les jours d’avant l’homme et la femme.

Tout est possible encore.
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INTERVALLE


Derrière le miroir on se verrait au juste

mais devant lui
toujours
devant
on ne se connaît pas tout à fait

on demeure avec soi
qui n’est pas
complètement soi

on s’engage en conversation
on s’interdit à soi de s’en aller
de peur de s’ennuyer tout seul
on met en route un mot
à distance.

L’intervalle a de ces délices.

Dans un miroir
on a de quoi unir et désunir
on se dit :
mes mots
peut-être
tiennent le fil de la combinaison et du hasard.

p.57
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UNE VILLE AIMÉE LUIT ET CRIE…


Extrait 2


Pour aller
contre sa boucle
je caresse une branche
dans toute sa longueur.


J’écris une lettre à je ne sais qui
une lettre pour je ne sais où.

J’annonce qu’à l’automne
il ne faut pas ignorer les branches
qui jouent magnifiquement leur partition de cuivres.

Des nouvelles si importantes, au milieu des guerres,
des catastrophes,
c’est à faire savoir.

Sur l’enveloppe :
Pour X, dans n’importe quel pays triste.
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UNE VILLE AIMÉE LUIT ET CRIE…


Extrait 1

Une ville aimée luit et crie

passagère
sa
langue de bruits

nous en voudrions un glossaire
direct, piaffant, gonflé de souvenirs :
appels de marchés, passages de tanks,
sonnettes des autobus autrefois,
couinage des urgences,
le tout traversé par une petite flûte au travail.


Répertoire demeuré seul, une fois notre langue perdue,
les peuples survivants partageraient
notre espéranto d’existence.


Le mot non. J’en inverse les lettres. C’est toujours non.
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"– Non, pour te le dire franchement, je ne trouve pas que ce soit si formidable, dit Hans Castorp. Où sont donc les glaciers et les cimes blanches et les géants de la montagne ? Ces machins ne sont tout de même pas bien haut, il me semble. – Si, ils sont haut, répondit Joachim. Tu vois presque partout la limite des arbres. Elle est même marquée avec une netteté particulièrement frappante, les pins s’arrêtent, et puis tout s’arrête, il n’y a plus rien, rien que des rochers, comme tu peux t’en rendre compte. De l’autre côté, là-bas, à droite de la Dent Noire, de cette corne là-haut, tu as même un glacier. Vois-tu encore le bleu ? Il n’est pas grand, mais c’est un glacier authentique, le glacier de la Scaletta. Piz Michel et le Tinzenhorn, dans le creux, tu ne peux pas les voir d’ici, restent également toute l’année sous la neige. – Sous la neige éternelle, dit Hans Castorp. – Oui, éternelle, si tu veux. Oui, tout ça est déjà assez haut, mais nous-mêmes, nous sommes affreusement haut. Songes-y. Seize cents mètres au-dessus du niveau de la mer. De sorte que les altitudes n’apparaissent plus beaucoup."

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