Marie-Francine Hébert

Nul poisson où aller de Marie-Francine Hébert est une oeuvre complexe et dont il est difficile de s'approprier le sens.



Le lexique imagé et riche laisse place à maintes interprétations de la part du lecteur. Combiné aux illustrations, il présente des défis de compréhension importants.



La guerre et la déportation, les deux thèmes phares, nécessitent une contextualisation que l'oeuvre elle-même ne suffit pas à donner.



L'enseignant souhaitant exploiter cet album doit anticiper les réactions – rébarbatives - des élèves et se préparer à les orienter dont les niveaux de compréhension et d'interprétation seront sans aucun doute très varies.

L’album est un outil de grande valeur lorsque vient le moment d’aborder la littérature.



L’œuvre «Nul poisson où aller» est un texte qui offre une belle résistance à tout lecteur tentant de forcer la porte de sa compréhension. Cette résistance se veut toute positive puisqu’elle pave la voie à de multiples chemins par lesquels nous pouvons faire vivre une expérience littéraire à nos jeunes élèves.



Tout d’abord, le style d’écriture de l’auteur et le vocabulaire puissant et évocateur qu’il utilise donne une grande envergure à cette œuvre, mais légèrement teintée de noir, de pénombre.



Utilisant les figures de style et le symbolisme à profusion, l’auteure nous plonge dans un univers quelque peu lugubre, à la porte de l’abîme de notre civilisation. Les images, parfois fortes, parfois légères, nous permettent de ressentir, par personnage interposé, les émotions d’une enfant vivant la cruelle réalité de la guerre. De quelle guerre s’agit-il ? Peu importe. On ne souhaiterait pas vivre se jour même si c’était la nuit.



Déjà riche et profond, ce texte superpose une seconde trame narrative à la toile de fond d’un récit au rythme rapide, par ses phrases courtes, parfois non verbales, parfois trop verbales…

L'album Nul poisson où aller de Francine Hébert raconte l'histoire d'une petite fille nommée Zolfe qui découvre la brutalité des hommes et les horreurs de la guerre civile à travers ses yeux d'enfant.

L'intérêt de l'oeuvre réside dans la qualité des textes qui laissent la place à plusieurs niveaux de lecture. Le vocabulaire, soigneusement choisi, permet un travail intéressant sur le lexique et sur les différents sens des mots en lien avec leur contexte.

L'histoire est appuyée par une iconographie trèes riche sur le plan symbolique qui permet aux élèves d'aller chercher un autre degré de lecture.

On ne connaît ni le lieu ni l'époque du récit, mais ce qui pourrait apparaître comme une faiblesse nous semble au contraire une force.

L'histoire de cet album est profondément touchante et la réalité troublante de la guerre se reflète à travers le regard d'une enfant. Par le biais du narrateur, elle décrit l'horreur sans jamais la nommer avec cette naïveté qui caractérise l'enfance. Complétant le texte, les images parlent d'elles-mêmes et nous transportent dans un univers où se côtoient tristesse, dégoût, compassion et espoir. D'ailleurs, une relecture est parfois nécessaire afin de bien comprendre les images qui se cachent derrière le texte. Le titre, très à propos, évoque, quant à lui, toute la solitude, le désarrois et le sentiment d'impuissance que vivent les personnages.

L'album Nul poisson où aller de Marie-Francine Hébert est sans nul doute un album à ne pas mettre entre toutes les mains, du moins, sans une certaine préparation. Il s'agit en effet d'un texte où l'on retrouve différents niveaux de lecture et d'interprétation et qui fait appel aux référents culturels du lecteur d'une façon peu commune.



Dans un premier temps, on retrouve l'histoire de cette petite et de sa famille, tous arrachés à leur vie par la guerre, cette petite qui traîne avec elle l'univers de son poisson rouge dont elle a la charge.



Les illustrations de l'album viennent compléter cette histoire en allant parfois beaucoup plus loin et nous font découvrir tout un univers de métaphores.



Enfin, en parallèle au livre, on retrouve un petit livre offert à la jeune fille par sa meilleure amie et qui vient donner un tout autre éclairage à cette histoire dramatique.



Le thème de la guerre, devenu presque banal tellement il a été traité souvent, est abordé ici avec un souci de déstabiliser le lecteur. La voix de l'enfant, elle aussi assez commune dans la littérature, vient apporter un questionnement naïf dans cet univers sombre qui nous est présenté. Ainsi, on retrouve beaucoup de drame, mais aussi beaucoup de poésie dans cette histoire de guerre déstabilisante.



En fait, Nul poisson où aller, c'est une histoire à partager, une histoire qu'il fait bon apprécier à travers le regard de l'autre.