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Critiques de Max Stirner (9)
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L'unique et sa propriété

J'ai lu L'Unique et sa propriété vers mes 20 ans : il a clairement contribué à me déniaiser intellectuellement. C'est le premier et seul livre que j'ai trouvé dangereux, à ne surtout pas mettre entre toutes les mains. Ça a aussi été l'avis des autorités prussiennes qui l'ont censuré avant de lever rapidement la censure : L'Unique et sa propriété ayant été jugé « trop absurde pour être dangereux ».



Sur la forme c'est un livre bizarrement construit, volontiers provocateur, assez répétitif et souvent verbeux. Sur le fond, c'est une oeuvre absolument radicale, foncièrement nihiliste, une illustration théorique parfaite du mot de Dostoïevski : « Si Dieu n'existe pas, tout est permis ». Rien n'est laissé debout, tout est détruit. Stirner s'attaque à toute idéologie, tout idéal, toute morale. La Patrie, l'État, l'Homme, le Libéralisme, le Socialisme, etc., ne sont que des fantômes, comme les appelle Stirner, des nouveaux Dieux qui remplacent l'ancien Dieu, des vues de l'esprit, des constructions abstraites qui oppressent l'individu concret, l'Unique, et en font l'esclave d'une chimère. Toutes les chaînes doivent être brisées. Pas de vérité en dehors de l'individu, pas de transcendance d'aucune sorte, ni bien, ni mal, ni droits, ni devoirs : ne reste qu'un égoïsme pur, débarrassé de toutes les hypocrisies et des pseudo-vérités. Seul compte mon intérêt et absolument tout est permis pour le satisfaire : les autres sont éventuellement un moyen, jamais une fin, mon droit est ma force et rien ni personne ne doit empiéter sur ma souveraineté, sur mon Moi. Cette pensée peut sembler assez actuelle... C'est en partie vrai mais ce serait un contresens de faire de L'Unique stirnerien un équivalent de l'individu libéral contemporain, ce dernier étant totalement esclave des dieux Argent et Consommation, et n'ayant pour ainsi dire pas d'individualité, pas d'unicité.



La critique de Stirner est aisée. L'individu libre n'existe pas, chaque individualité étant forcément le fruit de son environnement et de sa biologie, choses que personne ne choisit. Les chaînes sont éternelles. La croyance, peu importe son objet, est le propre de l'homme et Stirner, comme tout le monde, a la sienne : c'est celle de l'homme libre. La société qu'a imaginé Stirner, car il reconnaît que l'Unique ne peut vivre seul, est un monde inhumain, un désert glacé où s'associent et s'affrontent, guidées par le seul égoïsme, des puissances que plus rien ne retient. Il n'en reste pas moins que Stirner a raison sur un point : l'homme, quelles que soient ses opinions ou ses actions, est égoïste et agit pour son intérêt exclusivement. Il ne peut pas en être autrement. Tuer ou risquer sa vie pour quelqu'un, se sacrifier même, c'est toujours de l'égoïsme si on y réfléchit : toute action vise la satisfaction personnelle. Disons simplement qu'il y a un bon égoïsme, celui qui passe par l'Autre.



Ce livre, bien que rapidement tombé dans l'oubli après avoir fait sensation, mit fin à l'idéalisme allemand issu de Hegel et eu une influence décisive sur Marx, le faisant définitivement rompre avec celui-ci et le « forçant » à élaborer une théorie matérialiste de l'Histoire. C'est aujourd'hui un classique incontournable de la pensée individualiste, ayant influencé aussi bien des anarchistes, des libertariens ou des esprits libres comme Georges Palante.
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L'unique et sa propriété

Une partie du 19ème siècle est traversée par certains mouvements de pensée radicaux qui dévoilent une béance métaphysique : Dieu est une fiction fabriquée par les hommes (cf. Feuerbach). Quelques philosophes vont alors faire des propositions pour répondre à cette question : mais que faire et qu'être, dans un monde exempt de dimension divine ?

Si, face à cette béance existentielle, Schopenhauer propose (pour aller vite) une sorte de sagesse du néant et Thoreau formule des réponses en interpellant les leçons de la nature, le philosophe Max Stirner va de son côté poser la question du moi comme unicité, un "je" radicalement post chrétien qui fait table rase de la notion du corps et de l'âme, instituant, dans la constellation anarchiste riche en positions et traditions paradoxales, un anarchisme individualiste.

Auteur d'un livre unique assez mal construit, réunissant des cahiers sans véritable ligne conductrice, Max Stirner semble tout détruire pour ne sauver que son moi et interroger sa nature, dans un plaidoyer du Je qui anéantit le modèle de l'idéalisme allemand.

Si Marx le qualifiera de petit bourgeois égocentrique, Stirner, qui a influencé l'esthétique de Marcel Duchamp sur les conseils de lecture de Picabia, également attentivement lu par Mussolini, reste une source d'inspiration essentielle pour le surhomme de Nietzsche, même si ce dernier ne l'a jamais cité, on sait cependant qu'il l'a lu.

Issu du cercle des jeunes hégéliens de gauche aux côtés d'Engels et Bauer, Max Stirner y puise une partie de la pensée de son ouvrage explosif, L'unique et sa propriété, avançant que le moi, l'unique, est essentiel et tout ce qui empêche son affirmation et sa réalisation doit être détruit, véritable épine dorsale de tout le développement de sa pensée.

Le projet de ce livre est de proposer, dans un monde sans dieu, d'être libre en considérant que rien ne doit être posé au dessus de "ma" liberté. La propriété du moi est que tout potentiellement lui appartient à partir du moment où personne n'est assez fort pour s'y opposer, donc une guerre de tous contre tous pour l'auto affirmation. Ce sont aussi des morceaux épars de polémiques et controverses parfois difficiles à identifier. Max Stirner se hâte d'exposer des thèses sans dire qu'elles ne sont pas les siennes pour ensuite les réfuter ce qui rend assez âpre sa lecture.



Nihiliste, foncièrement anti-hégélien et épuisant la dialectique d'Hegel, la puissance du travail du négatif chez Max Stirner se déploie autour d'une dénonciation farouche et colérique de la loi, des institutions, de la politique et toute la politique (révolution française comprise), de la religion et de ses dogmes, du travail et du peuple, du marché, de la propriété, de la société (famille, argent, éducation, héritage…), mais aussi de la morale bourgeoise en attaquant la prohibition de l'inceste, critiquant la monogamie, le sens de l'honneur, l'amour, l'amitié, le mariage, l'altruisme, l'éthique… Tout ce qui peut entraver, engager ou contraindre la libre expression du moi, ultime souverain et seule réalité positive, hissant l'ego au dessus de toute forme de déterminisme. Que l'on adhère ou pas à ses thèses, Max Stirner a osé dans cet ouvrage foutraque une liberté de pensée décapante et une hardiesse philosophique inouïe en bâtissant cette très humaine révolte du moi.
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L'unique et sa propriété

Excellent livre de ce philosophe courageux décrivant avec clarté et vérité ce thème récurrent qu'est l ' hypocrisie sociale . Un bain de mots salvateur pour se récurer l'esprit de toute la gluante hypocrisie ambiante , quelle fraicheur,quelle respiration que ce texte !
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L'unique et sa propriété

Ouvrage étrange et atypique, aussi déconcertant sur le fond que sur la forme. Plaidoyer pour le Moi et apologie de la puissance, si vous voulez attaquer l'oeuvre plus rigoureuse de Nietzsche par la suite, ce livre peut faire une bonne introduction.
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L'unique et sa propriété

Pour s’évader quand les circonstances le permettent, il faut encore avoir des envies d’évasion. Plus encore pour créer ces circonstances. Si je me satisfais d’être prisonnier, si je suis fier du prisonnier qu’on a fait de moi, si je m’investis dans mon rôle de prisonnier, s’il n’y a plus aucune distance ni différence entre ce rôle et moi, alors oui, je suis prisonnier – de mon état de prisonnier. On m’avait enfermé dans une prison, je me suis moi-même enfermé dans ce qu’elle attend de moi. Je suis devenu ma prison, et je resterais une prison, même si j’étais libéré de ses murs.

J’ai dressé un mur infranchissable entre mon identité de prisonnier et mon identité propre et unique.



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L'unique et sa propriété

Il s'agit d'une philosophie vraiment très puissante, très éloignée de la morale commune. Stirner est tout le contraire d'un hypocrite et, sans tomber dans des atrocités sadiennes, assume totalement l'égoïsme.



L'ouvrage ne peut pas se comprendre comme un simple manifeste d'anarchisme individualiste. Il doit se comprendre dans l'optique - reprise et critique - de la philosophie moderne égologique comprise dans son ensemble.



L'ensemble peut grossièrement faire penser à l'œuvre de Nietzsche (refus de l'esprit de système, refus des armatures idéalistes, etc).
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Oeuvres complètes : L'Unique et sa propriété et..

L’Unique et sa propriété est un livre énervant. Avec une vision de l’histoire de la civilisation européenne particulière, quelques dénonciations d’hypocrisies salutaires, des fulgurances. Un livre radical dans sa prise de position pour l’individu contre la collectivité, irréaliste dans ses attaques contre l’Idée et les idéologies, un livre de philosophie politique, polémique, théorique, impraticable, borné, déraisonnable, plein de sophismes, ignorant de toute histoire, de toute sociologie, de toute psychologie.

Stirner a été assez perspicace dans sa découverte de la bien-pensance moderne, celle qui est encore la nôtre et qui est l’héritage de la philosophie des lumières, c’est-à-dire l’humanisme libéral. Selon lui, bourgeois, communistes, nationalistes, socialistes, ont beau s’opposer les uns les autres, tous sont des héritiers du christianisme, même les athées. Tous sacrifient à un dogme, à une « Idée fixe », à une idéologie ; parce que c’est ça, la grande invention du christianisme : avoir délivré les hommes de la soumission au monde physique pour les soumettre au monde des Idées. Le christianisme est l’inventeur de l’idéologie. Et l’humanisme libéral en est le dernier avatar.

Stirner refuse de soumettre son Moi à aucune Idée, que ce soit Dieu, l’Etat, l’Homme, la Liberté, l’Egalité ou quoi que ce soit d’autre. Comme il pense que le christianisme est à l’origine de tout cela, il s’attaque particulièrement à la valeur chrétienne par excellence : l’amour. La pitié, la charité, la compassion, l’oubli de soi, n’existent pas dans les relations humaines, ce sont des hypocrisies issues d’Idées fantômes. Il n’y a que l’intérêt personnel qui fasse agir les hommes. L’individu, l’égoïste, s’associera à d’autres individus s’ils peuvent l’aider à obtenir ce qu’il désire mais il ne se soumettra à aucune Idée, aucune idéologie, et rompra l’association dès qu’il n’y trouvera plus son intérêt. Un intérêt qui a pour but la jouissance, et des relations, donc, purement utilitaires, avec des rapports de force plutôt que d’amour. D’un certain point de vue Stirner effectue un retournement des valeurs. Mais d’un autre côté, on pourrait aussi penser qu’il ne fait que remplacer un mot par un autre, l’amour par l’égoïsme, pour désigner, finalement, le même sentiment mais débarrassé de l’idéalisme.

Toute cette argumentation est rabâchée pendant la majeure partie du livre, sans ordre véritable, et avec beaucoup de répétitions fastidieuses. Seules les dernières pages du livre, intitulées « Ma jouissance personnelle » vont un peu plus loin et deviennent vraiment intéressantes. Il écrit : « Quand il s’agit de Me faire comprendre et de communiquer, Je ne puis assurément faire usage que des moyens humains qui sont à ma disposition, parce que Je suis aussi homme. Et de fait, Je n’ai de pensée qu’en tant qu’homme. Comme Moi, Je suis aussi bien vide de pensées. Quiconque ne peut se débarrasser d’une pensée n’est dans cette mesure qu’homme, valet de la langue, cette institution des hommes, ce trésor de la pensée humaine. La langue ou « le mot » Nous tyrannise de la pire manière, parce qu’elle met en ligne contre Nous toute une armée d’idées fixes. »

Pourtant, il ne mène pas tout à fait jusqu’au bout cette réflexion sur la Raison et la communication (ce qu’on pourrait autrement nommer le Logos grec ou le Verbe chrétien, ou la Loi) et il refuse d’envisager l’Unique comme un concept de l’individualisme poussé à son extrême, une « idée fixe ». Dans une sorte de postface, il répond de manière quasiment mystique à des critiques faites sur son livre : « Ce que dit Stirner est un mot, une idée, un concept ; ce qu’il vise n’est ni mot, ni idée, ni concept. Ce qu’il dit ne correspond pas à ce qu’il vise et ce qu’il vise est indicible. »

Un livre pré-nietzschéen, écrit principalement en réaction à l’idéalisme allemand.
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Oeuvres complètes : L'Unique et sa propriété et..

Quelle déception ! De nombreuses idées intéressantes mais beaucoup de verbillage inutile. Pourtant j'étais partie confiante sur cette lecture, le thème de l'égoïsme, de la préservation du soi face aux autres et à l'écrasante force de l'Etat.



A voir si je retenterais plus tard... Auquel cas, je compléterais cette critique.
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Oeuvres complètes : L'Unique et sa propriété et..

Magnifique ! Il faut lire ! Absolument !
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