Mon bien-aimé,
Nous sommes assis au sous-sol depuis les premières heures du matin à attendre que quelque chose se passe. Les sirènes hurlent sans cesse dans la ville au-dessus, mais aucune bombe n'est encore tombée. Il y a trois jours, tu as disparu, et sans toi ma vie est sans lumière. Mon cœur est silencieux d'agonie. Je continue de me blâmer. Si seulement je ne t'avais pas laissé seul, si proche avant notre évasion. Tu es tout pour moi. TOUT! Dans mon désespoir, j'écris à l'adresse de ton père que j'ai trouvée dans ton journal. Je prie pour toi mon amour, et pour un nouveau monde où il y a une place pour nous et notre amour.
À toi pour toujours,
C.
- Ton père me l'a offerte il y a bien longtemps. Je pense qu'elle t'ira.
Je l'embrassai sur la joue puis enfilai la robe avant de courir jusqu'au grand miroir, dans le couloir. Elle m'allait bien, juste un peu large aux hanches. Transportée de joie, je sautai au cou de ma mère et lui chuchotai "merci" à l'oreille. Je la remerciais moins pour la robe, qu'elle n'aurait de toute façon plus jamais portée, que pour avoir enfin repris part à ma vie et m'avoir offert un peu de cette tendresse maternelle qui me manquait tant. L'espace de quelques instants, elle était redevenue ma chère maman, celle que j'avais perdue six ans plus tôt.
Perdre du temps était moins douloureux quand on ne le comptait pas.