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Citations de Michel de Jaeghere (56)


Comme [si les Grecs] avaient compris que le mystère de la condition humaine laissait place à des questions auxquelles la réponse ne pouvait être donnée que sous le voile du mythe. Et que le triomphe de la raison sur les forces obscures de la pensée magique ne pouvait avoir, pour autant, toujours réponse à tout.
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L'histoire est un dévoilement. Elle fait lever des ombres venues de la profondeur des âges pour nous faire partager les leçons tirées de la pratique de notre condition. Elle a pu devenir une science, peut-être. S'en tenir pour autant à la froide objectivité d'un collectionneur de papillons (…) c'est passer à côté de ce qui l'a justifiée, pendant tant de siècles ; nous priver de l'essentiel de ce que nous lui demandons : d'enrichir nos âmes blessées au milieu des vivants par un fructueux colloque en compagnie des ombres.
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Nous avons entamé un dialogue sans limite avec les hommes de notre temps. Il nous donne le sentiment d'une amplification inouïe de nos connaissances, de notre intelligence, de notre faculté de compréhension. Il nous grise de l'illusion de notre omniscience, acquise sous les couleurs du divertissement. Elle ne se résume guère qu'à une succession d'impressions que rendent éphémères l'abondance et le rythme des informations, notre indifférence foncière à l'égard d'une actualité que démodent sans cesse de nouveaux rebondissements.
Le dialogue avec les morts semble échapper, seul, à la curiosité universelle, parce qu'il correspond à de tout autres exigences, qu'il est le fruit d'un effort absorbant. Il s'établit par la frequentation des livres d'histoire, des grands textes, des documents. Par la méditation de leurs leçons. Il ne se contente pas d'une attention superficielle : il suppose qu'on franchisse la barrière de langues parfois mortes depuis longtemps ; que l'on s'acclimate à des habitudes, des institutions, des coutumes, des mœurs, des religions qui nous surprennent ; dont nous ne sommes pas sûrs de comprendre toujours la signification. Qu'on entre en familiarité avec des mentalités qui nous sont étrangères. Il demande qu'on accepte de poursuivre longuement une recherche imparfaite, incertaine, qui nous laisse dans le doute et l'insatisfaction. Nous ne comprenons pas toujours ce que les morts nous disent. Nous sommes sujets aux contresens comme le seraient deux hommes conversant du haut de deux falaises, de part et d'autre d'un gouffre dont on ne verrait pas le fond : l'écho ne leur renvoie que des bribes de réponses, sans qu'il leur soit possible de se faire confirmer la justesse de l'interprétation que chacun d'entre eux a faite de cris presque indistincts.
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Rien n’est tout à fait vrai dans les Promenades dans Rome. Stendhal les avait ouvertes en nous avisant qu’il avait été six fois à Rome, et il n’y était allé que quatre. Il date son premier séjour de 1802, et il n’avait poussé, en 1801, que jusqu’à Florence ; il avait regagné la France l’année suivante, sans s’aventurer plus au sud ; il ne visiterait Rome que dix ans plus tard, en 1811. Ce changement de date lui était, simplement, nécessaire pour raconter que suspect, comme Français, aux autorités de la Rome pontificale (nos troupes y avaient proclamé, en 1798, la République, et en avaient expulsé le pape Pie VI avant d’en être elles-mêmes chassées par les Bourbons de Naples), il y avait été continûment suivi par deux argousins auxquels il avait fini par donner amicalement du vin à boire, et qui lui avaient, par reconnaissance, baisé la main en lui disant adieu.

Il prétend avoir peint ses tableaux sur le motif, noté les conversations sur le vif, rédigé le récit de ses découvertes et de ses aventures le soir même de ses courses. Il avait écrit en réalité tout son livre à Paris : même les pages où il semble rapporter, heure par heure, les échos du conclave qui s’était achevé, le 31 mars 1829, avec l’élection de Pie VIII.

Tout est faux, et pourtant, tout est plus vrai que nature : éclatant de couleurs et palpitant de vie. La Rome qu’il décrit superpose, entremêle les antiquités, les musées et les champs de fouilles, les temples païens et les basiliques dédiées aux martyrs, les palais ruisselant de marbre et les catacombes éclairées à la bougie, les somptueuses liturgies pontificales et les chefs-d’œuvre de la Renaissance, les jeux de l’amour et de la mort de l’histoire et de la légende, et les crimes passionnels du bout de la rue. On y entend le cri des marchands de légumes et le chant des castrats de la chapelle Sixtine ; on pénètre dans quelques-uns des plus inaccessibles des palais construits par les familles de la noblesse « noire », on y rencontre des cardinaux à l’ambition féroce et au goût exquis, on se raconte, entre deux sorbets, l’histoire de crimes spectaculaires et de complots subtils. On visite l’atelier de Canova, on berce ses soirées avec les longs récitatifs des cantatrices. On flâne dans une ville dont la réunion de splendeurs, palais, jardins, églises, peintures, sculptures, a fait une œuvre d’art à part entière, une polyphonie créatrice. On retrouve, d’un monument à l’autre, Michel-Ange, Raphaël, Caravage comme de vieux amis. On s’irrite de voir décliner leur art sous le pinceau de leurs disciples. On mesure la soif de pouvoir sans limite de quelques hommes d’Église, en même temps que la vigueur, l’énergie d’un peuple qui n’a rien oublié de sa grandeur et de son caractère en perdant la puissance qu’ils lui avaient value.

(INCIPIT)
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Au Panthéon.
Tout ce que l’Antiquité a légué à la Renaissance et à l’Europe baroque se trouve ici, ou presque, des courbes sublimes de la voûte aux niches à portique, du jeu des marbres polychromes à la douceur de la lumière zénithale qui nimbe les tombes et les autels de son linceul de soie. C’est ici qu’il faut s’arrêter pour lire et relire encore la divine musique de Marguerite Yourcenar, prêtant sa voix à l’empereur Hadrien :

J’avais corrigé moi-même les plans trop timides de l’architecte Apollodore. Utilisant les arts de la Grèce comme une simple ornementation, un luxe ajouté, j’étais remonté pour la structure même de l’édifice aux temps primitifs et fabuleux de Rome, aux temples ronds de l’Étrurie antique. J’avais voulu que ce sanctuaire de tous les dieux reproduisît la forme du globe terrestre et de la sphère stellaire, du globe où se renferment toutes les semences du feu éternel, de la sphère creuse qui contient tout. C’était aussi la forme de ces huttes ancestrales où la fumée des plus anciens foyers humains s’échappait par un orifice au faîte. La coupole, construite d’une lave dure et légère, qui semblait participer encore au mouvement ascendant des flammes, communiquait avec le ciel par un grand trou alternativement noir et bleu. Ce temple ouvert et secret était conçu comme un cadran solaire. Les heures tournaient en rond sur ces cadrans polis par les artisans grecs ; le disque du jour y resterait suspendu comme un bouclier d’or ; la pluie formerait sur le pavement une flaque pure ; la prière s’échapperait comme une fumée vers le vide où nous mettons les dieux (Mémoires d’Hadrien).
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La patrie, souligne Simone Weil, est « le bien le plus précieux dans l’ordre temporel » parce qu’elle est ce qui assure à l’homme « à travers le présent une liaison entre le passé et l’avenir » ; qu’elle lui apporte une « continuité dans le temps, par-delà les limites de l’existence humaine » qui lui permet de donner un sens à sa vie, de surmonter les calamités et les revers, d’aborder les bonheurs mêmes sans céder à l’ivresse et à la démesure ; parce qu’elle donne aux prospérités leur signification et leur place légitime en les inscrivant dans la chaîne d’une transmission, dans le grand œuvre d’une aventure collective.
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L’histoire est, de fait, complexe. Elle échappe, par sa richesse, ses nuances, ses contradictions et ses paradoxes à la lecture manichéenne à laquelle on voudrait souvent la réduire.
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Librement consentie, l’hégémonie se prête à merveille à l’union contre un ennemi commun. Elle a, au XXe siècle, permis en cinquante ans aux États-Unis de vaincre leur rival soviétique.
Le problème commence lorsqu’elle prétend survivre, comme celle d’Athènes (comme l'a fait pendant trente ans l’Otan, choisissant, au lendemain de l’effondrement de l’Union soviétique, de se maintenir et de s’étendre au lieu de se dissoudre), à la menace qui l’a fait naître.
Elle devient dès lors une méthode de sujétion instable, condamnée à susciter le désordre et la confusion au rythme même des crises qu’elle prétend résoudre dans une éternelle fuite en avant : en Irak et en Afghanistan comme à Potidée ou à Corcyre. Elle offre à l'adversaire d’hier autant d’occasions de revenir dans le jeu en exploitant l’exaspération d’alliés qu’aucune autre nécessité que la contrainte ne retient plus dans une fédération informe.
Elle condamne celui qui prétend l’exercer à une guerre multiforme et sans fin.
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Aiguisée par notre conscience de la finitude (seuls dans tout l’Univers, nous nous savons mortels, comme nous savons destiné à périr tout ce que nous aimons : l’art profane n’a sans doute pas d’autre origine que notre désir d’immortaliser les instants de beauté, de bonheur, de tristesse dont nous avons mesuré à quel point ils étaient fugaces), notre sensibilité se nourrit et respire au contraire au rythme de nos émotions et de nos attachements : de l’amour que nous sommes capables d’éprouver au point de nous sentir prêts à nous sacrifier à plus grand et plus haut que la satisfaction de nos appétits matériels.
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Le texte est, dans sa limpidité, l’un des plus beaux de ceux que nous a transmis l’Antiquité grecque. Il est programmatique pour une nation en crise existentielle :

Je ne déshonorerai pas les armes sacrées, je n’abandonnerai pas mon compagnon là où je me trouverai posté ; je combattrai pour les principes sacrés, ceux des dieux comme ceux des hommes, je ne laisserai pas la patrie amoindrie, mais au contraire plus grande et plus forte, de mon propre chef et avec le concours de tous ; j’obéirai aussi à ceux qui se succèdent sagement aux affaires, ainsi qu’aux lois établies et à toutes celles qui pourront être établies avec sagesse. Si quiconque cherche à les renverser, je ne le laisserai pas faire, de mon propre chef et avec le concours de tous ; j’honorerai le culte de mes ancêtres.
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La démocratie athénienne repose certes sur des principes très différents de ceux qui fondent le régime dans lequel nous vivons. Par la place qu’elle fait aux lois divines, à la loi naturelle, à l’autorité des traditions, elle en est même parfois le contraire. S’autoriser de la beauté de l’Acropole ou du génie de Platon pour justifier le triomphe de la démocratie contemporaine, c’est se parer à peu de frais des plumes du paon. La démocratie athénienne est un régime politique qui a eu ses grandeurs et ses faiblesses, ses avantages et ses inconvénients, ses ombres et ses lumières. Le drame est qu’il semble bien qu’elle ait tenu ses ombres de ce qu’elle a de commun avec nous, tandis qu’elle a dû ses grandeurs à tout ce qui nous sépare d’elle. La démocratie athénienne n’est pas le despotisme, mais il se pourrait bien que ce que nous lui avons emprunté, insensiblement, nous y mène.
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Sans doute encore les exigences de la cancel culture font-elles chaque jour sentir plus étroitement leur emprise sur la liberté de pensée et d’expression, exigeant de nous désormais que soient reniées les figures de notre passé, revisités les épisodes de notre histoire, bannis les héros de notre littérature pour avoir participé, consciemment ou inconsciemment, au « racisme systémique » qui a assuré trop longtemps la domination patriarcale et oppressante de l’homme blanc ; que nous fassions nous-mêmes, en tant qu’Européens, et dans la pure tradition des procès de Moscou, notre autocritique en demandant pardon, à genoux pour notre injuste hégémonie (larmes et sanglots sont appréciés : ici s’arrête la culture du ricanement, le « droit au blasphème », on ne plaisante plus) ; que nous abandonnions nos manières de penser, de parler et d’écrire pour les soumettre à un reformatage qui va jusqu’à la grammaire, jusqu’à l’orthographe ; que nous acceptions, corrélativement comme une punition rédemptrice (en même temps qu’un bienfaisant enrichissement) l’invasion de nos pays par des masses déracinées du tiers-monde ; que nous consentions, plus généralement, à sortir sur la pointe des pieds de l’histoire en espérant trouver la justification de nos fautes dans l’abolition de notre être.
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Sans doute les représentants de la pensée dominante – celle qui prône d’un même élan le métissage des peuples, l’immigration de masse, le féminisme conquérant, l’écologie politique, la libération des mœurs et l’idéologie du genre – se sont-ils emparés aujourd’hui, en France comme dans nombre des démocraties occidentales, des leviers de commande de la plupart des grands médias audiovisuels, ont-ils colonisé l’Éducation nationale et l’Université, autant que le monde de la publicité, celui de la culture de masse, et ont-ils ainsi pris en main une partie des consciences afin d’y exercer, à travers ce que l’on désigne couramment comme le « politiquement correct », une pression qui conduit tous les partenaires du débat politique à user des mêmes clichés, des mêmes slogans, à faire les mêmes professions de foi ; qui condamne ceux qui y contreviennent à la relégation professionnelle, médiatique et sociale ; qui fait d’eux non les partenaires d’un débat contradictoire, mais les porteurs d’un « discours de haine », des ennemis de la liberté dont chacun conviendra qu’il est urgent, au nom de la morale, de les mettre hors de combat.
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La mondialisation économique (avec l’apparition de sociétés multinationales dont les moyens d’agir, désormais analogues ou supérieurs à ceux d’un État, sont mobilisés en faveur de l’ouverture des marchés à leurs productions) et la révolution technologique qui a vu l’apparition d’Internet et le règne des « Gafa », ont démultiplié, depuis, les risques de manipulation de l’opinion en rendant les nouveaux acteurs capables de faire naître et de développer à loisir des désirs irrésistibles, des peurs incontrôlables, qui, fondés sur l’image et le mimétisme, échappent à toute argumentation. La surinformation née de l’apparition des chaînes d’information permanente et de la multiplication des réseaux sociaux aggrave le phénomène en saturant les esprits de connaissances inutiles et contradictoires. Comme la crise engendrée par la pandémie de Coronavirus l’a montré ad nauseam, elle provoque l’amnésie (le flot des nouvelles informations chassant les précédentes à un rythme toujours plus soutenu) en même temps que l’affolement du discernement, la dictature de l’émotion fugitive. L’ensemble rend presque inévitable la stigmatisation de ceux qui prétendraient opposer à la satisfaction des revendications nouvelles ou à la prévention des grandes peurs relayées par les mêmes canaux, la barrière de règles immuables, le respect de principes millénaires, encore considérés, il y a peu, comme consubstantiels à notre civilisation. Il encourage leur désignation comme autant de boucs émissaires, coupables d’entraver le progrès de l’humanité, son irrésistible marche en avant vers un monde sans détermination, sans souffrance, sans contrainte. À terme, se profile l’appel à la violence, symbolique ou réelle, contre ceux qui prétendraient faire obstacle, par des considérations désuètes (des préoccupations morales hors d’âge, des précautions justifiées par le souci d’un avenir qui « n’a pas d’électorat ») au mouvement irrésistible de l’histoire.
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Au-delà même de ce qui peut apparaître comme une manière un peu brutale, sommaire, de régler les différends politiques, l’Assemblée d’Athènes vota parfois des lois liberticides.

C’est ainsi qu’alors que les premières années de la guerre du Péloponnèse étaient marquées par une peste qui allait emporter un tiers de la population (dont Périclès lui-même), elle adopta sur la proposition d’un devin qui exploitait la poussée de superstition que suscitaient les malheurs publics, une loi qui faisait un crime que d’enseigner l’astronomie, suspectée de détourner les hommes de la croyance aux dieux immortels. Ami de Périclès, Anaxagore de Clazomènes, qui avait prétendu que le soleil, la lune et les étoiles étaient des pierres en combustion, ne dut son salut qu’à la fuite.

C’est sur le même fondement d’impiété que Socrate serait condamné, trente ans plus tard, à boire la ciguë ; que le sophiste Protagoras, ayant été chassé d’Athènes pour avoir constaté : « sur les dieux, je ne puis savoir ni qu’ils existent, ni qu’ils n’existent pas, ni quelle forme est la leur», ses livres furent brûlés en public.
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Reste que c’est là, à Athènes, que fut établie, inventée la démocratie : un système où chacun était appelé à donner son avis sur les affaires publiques, et où le dernier mot devait rester au peuple s’exprimant par un vote majoritaire. Il est indiscutable que la démocratie athénienne a cela de commun avec nous.
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Sur la colline de l’Acropole, à l’heure où les ombres s’allongent, les murs du temple d’Érechthée prennent une couleur de pêche mûre. Les cariatides qui soutiennent le baldaquin du tombeau de Kekrops, le roi légendaire d’Athènes, semblent vibrer sous la caresse du couchant. Au loin, la mer scintille entre les caps qui ferment le port du Pirée. Les îles se dissipent dans la brume, Salamine devient imperceptible et le ciel flamboyant embrase la surface de l’eau ; l’horizon se brouille, il n’y a plus d’autre ligne droite que celles des colonnes et des frontons des temples. Sur le mur de la cella du Parthénon, la foule en procession pour les Panathénées s’immobilise.
On dirait que le soleil oblique, en précisant les ombres, souligne des contours que l’on avait crus à peine esquissés dans la pierre. Au Nord, les hoplites et les cavaliers ont revêtu leurs habits de fête. À l’est, les dieux attendent leurs hommages dans l’ombre, impassibles et muets.

[...] je sais bien qu’il s’agit là d’une illusion d’optique. Que les motifs des monuments de l’Acropole, les caissons de leurs plafonds, les personnages des frises, des frontons, étaient rehaussés de couleurs vives. Que la blondeur chatoyante qui nous émerveillé est celle de la pierre d’un monument en ruine, décapé par le temps. Mais si la disparition des couleurs a transformé l’aspect des édifices, elle ne les a pas dénaturés. En les privant de la polychromie qui en soulignait le décor, elle les a rendus à leur seule architecture, elle y a intégré les chefs-d’œuvre de la sculpture qui lui avaient été surajoutés. Elle nous en a révélé, plus encore qu’à leurs contemporains, peut-être, le sublime. Car, à l’égal des pyramides de Gizeh, du Panthéon de Rome, de Sainte-Sophie de Constantinople, le Parthénon est l’un de ces rares monuments qui se suffisent par leurs proportions, leurs formes ; qui n’aient nul besoin, justement, d’être décorés parce qu’ils parviennent, par leurs propres forces, à la plénitude.
(INCIPIT)
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Le soir venu, je retourne chez moi et j’entre dans mon cabinet, je me dépouille sur la porte de mes habits de paysan, couverts de poussière et de boue, je revêts mes habits de Cour ou mon costume, et vêtu décemment, je pénètre dans le sanctuaire antique des grands hommes de l’Antiquité. Reçu par eux avec bienveillance, je me repais de cette nourriture qui, seule, est faite pour moi, et pour laquelle je suis né. Je ne crains pas de m’entretenir avec eux, et de leur demander compte de leurs actions. Ils me répondent avec bonté ; et pendant quatre heures de temps, je n’éprouve aucun ennui, j’oublie mes peines, je ne crains ni la pauvreté, ni la mort, je me transporte en eux tout entier.

Machiavel, XXVI ème  lettre à Francesco Vettori,10 décembre 1513.
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Comme le souligne encore W. R. Connor, Thucydide est moins un pourvoyeur d’inaltérables lois d’airain, par quoi on pourrait, par avance, prévoir toute l’histoire, qu’un guide subtil des difficultés liées à l’exercice du pouvoir, en même temps que des défaillances qui peuvent guetter la politique la plus intelligente. 

Or, l’une des plus claires des conclusions qui s’imposent à la lecture de son livre est sans doute aujourd’hui celle qui permet de comprendre les ressorts du chaos que les États-Unis ont répandu eux-mêmes autour d’eux depuis un peu plus de trente ans, l’anarchie que les néoconservateurs ont provoquée par leur volonté de faire survivre le leadership américain à la menace qui l’avait fait naître en se donnant mission de susciter des révolutions démocratiques sur toute la planète, révolutions qui ont plongé, en Irak, en Lybie, en Syrie, en Ukraine, nombre de pays dans la guerre civile ou la guerre étrangère, quand elles n’en ont pas provoqué l’implosion ou la destruction

Le paradoxe est que ces errements ont eux-mêmes trouvé, en grande partie, leur origine dans une lecture biaisée de La Guerre du Péloponnèse.
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Rome détruirait, au IIIe siècle avant J.-C., la puissance de Carthage, en prélude à l’immense expansion qui lui permettrait de dominer le monde méditerranéen. Une fois achevée sa conquête, elle parviendrait pourtant à donner une forme politique à sa prééminence et à offrir, partant, plusieurs siècles de paix et de prospérité au monde méditerranéen. Elle bâtirait son empire en utilisant les procédés mêmes qui lui avaient permis d’unifier la péninsule italienne sous son commandement. [...]
Rien de tel à Athènes : son environnement et le champ d’expansion de sa puissance étaient tout au contraire peuplés d’hommes avec lesquels elle avait en commun la langue, les légendes, l’histoire et les dieux. Autant dire qu’il aurait pu sembler plus facile de les réunir, non dans le cadre d’un empire multiculturel, comme y parviendrait Rome, mais dans ce qui aurait pu être, avec de longs siècles d’avance sur le cours de l’histoire européenne, une nation.
Or elle y a échoué.
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